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ciples n'écoute pas l'Eglise, ayez pour lui le même éloignement que les Juifs ont très-injustement pour les publicains.

Voici un reproche que Jésus-Christ fait aux pharisiens Malheur à vous, scribes et pharisiens, hypocrites, qui payez la dîme de la menthe, de l'aneth et du cumin, et qui laissez là ce qu'il y a de plus important dans la loi, la justice, la miséricorde et la foi : il falloit observer ces choses-ci, et ne pas omettre celles-là. Le Sauveur ne commande pas la dime de la menthe et du cumin, puisque la loi ne l'ordonnoit pas. Ainsi, quand il dit qu'il ne faut pas l'omettre, il parle suivant l'opinion des pharisiens.

Saint Paul, dans l'épître aux Galates, c. 2, v. 15, dit: Nos naturá Judæi et non ex gentibus peccatores; nous sommes Juifs par notre naissance, et non du nombre des gentils qui sont des pécheurs.

Les Juifs, par un ancien orgueil, dit saint Augustin sur ce passage, se croyoient les seuls justes, et appeloient pécheurs ceux qui n'étoient pas de leur religion. Peccatorum nomen gentibus imposuerant Judæi jam vetustá quádam superbiá, tanquam ipsi justi

essent.

Saint Augustin appelle avec raison cet or

I C. 23.

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gueil ancien. Le cœur des Juifs en étoit déjà rempli du temps des Machabées; car nous lisons dans le second des livres qui portent leur nom que Rasias aima mieux se donner la mort que de se voir assujetti aux pécheurs. Il est question en cet endroit des Gentils.

Jésus-Christ s'est conformé à cet usage des Juifs, lorsqu'il a dit en saint Matthieu, chapitre 26, verset 45 : Filius hominis tradetur in manus peccatorum: le fils de l'homme sera livré entre les mains des pécheurs, c'està-dire des Gentils. Voyez Maldonat sur ce

passage.

L'usage de s'exprimer conformément aux sentiments de ceux à qui l'on parle, quoiqu'on ne pense pas de même, est assez commun parmi nous. Un homme m'aura nommé tel et tel pour ses amis; je ne blesserai point la vérité en leur donnant ce titre dans le cours de la conversation, quoique je sache que ce ne sont pas de vrais amis, parce que je parle alors selon son opinion et non selon la mienne.

Zacharie, fils de Barachie.

Jésus-Christ après avoir fait plusieurs reproches aux scribes et aux pharisiens, termine son discours par ces paroles :

'Saint Matthieu, c. 23.

« Achevez donc aussi de combler la mesure de vos pères (1). Serpents, races de vipères, comment pourrez-vous éviter d'être condamnés au feu de l'enfer? C'est pourquoi je m'en vais vous envoyer des prophètes, des sages et des scribes, et vous tuerez les uns et crucifierez les autres, vous en fouetterez d'autres dans vos synagogues et vous les persécuterez de ville en ville, afin que tout le sang innocent qui a été répandu sur la terreretombe sur vous, depuis le sang d'Abel le juste, jusqu'au sang de Zacharie, fils de Barachie, que vous avez tué entre le temple et l'autel. »

Les uns veulent que ce soit Zacharie (2), l'onzième des douze petits prophètes (3) dont le père s'appeloit Barachie; mais nous ne lisons nulle part dans les livres sacrés que ce saint homme ait souffert une mort violente, et qu'il l'ait soufferte dans le parvis des prêtres, entre le temple et l'autel.

D'autres pensent que c'est Zacharie, fils de Barachie, qu'Isaïe prit par l'ordre de Dieu (4) pour être un des deux témoins de la

(1) En saint Matthieu, c. 23, v. 32 et suiv.

(2) Sanct. ad Zach, 1, v. 12, 9.

(3) Natalis Alex. hic in et dissert., 6, ætat. 6, V. T. Ssrabus hic.

(4) Le P. Martianay, notes sur cet endroit de saint Mat

prophétie qu'il écrivit, dans laquelle Dieu. promettoit la naissance d'un fils qui devoit être le gage et le symbole de la délivrance du royaume de Juda. Il en est de ce Zacharie comme de celui dont on vient de parler ; on n'a aucune preuve qu'il ait été tué entre le temple et l'autel.

Quelques-uns des pères (1) ont écrit que Zacharie, fils de Barachie, dont il est ici question, étoit le père de saint Jean-Baptiste, qui fut mis à mort par les Juifs pour avoir annoncé la venue du Messie dans son cantique, et pour avoir soustrait le petit saint Jean au massacre qu'Hérode fit faire des enfants de Bethléem.

D'autres, comme Origène (2), l'auteur d'une homélie attribuée jusqu'ici à saint Basyle; Euthymius, Théophylacte ont allégué une raison différente du meurtre de Zacharie: ils ont dit qu'il fut massacré par les Juifs pour avoir placé dans le temple, parmi les vierges, Marie, mère de Jésus-Christ comme n'ayant point perdu sa virginité en l'enfantant. Enfin saint Epiphane dit qu'il

(1) S. Cyrillus, Alexand., Cant. Autropomorphitas, Petrus Alexand. in Regul. Eccles. can. 3°.

(2) Orig. in Matth. sanct. Basilius hom. de humana. Christi generatione.

fut mis à mort par Hérode, entre le temple

et l'autel (1).

Comme toutes ces histoires ne sont appuyées que sur une tradition populaire, dont ceux mêmes qui la citent ne font pas grand cas, et sur le protévangile de saint Jacques, que l'Eglise a constamment mis au nombre des apocryphes, elles ne méritent aucune créance. D'ailleurs, ni dans cette prétendue tradition, ni dans ce faux Evangile, on ne trouve le nom de l'aïeul de saint Jean-Baptiste.

« Plusieurs nouveaux, dit dom Calmet (2), >> soutiennent que ce dernier juste, que Jé» sus-Christ reproche aux Juifs d'avoir tué, » est Zacharie, fils de Baruch, dont parle » Josèphe, et qui fut mis à mort assez long» temps après la résurrection du Sauveur, » un peu avant la prise de Jérusalem par les » Romains. Le fils de Dieu parle ici en pro» phète il met le passé pour le futur, il » prédit la mort de cet homme, qui étoit, » dit Josèphe, un des plus illustres de la » ville et qui faisoit profession de haïr le » vice et d'aimer la liberté de sa patrie. Sa >> droiture et ses richesses l'avoient rendu

(1) Lib. de vitâ et obitu prophetarum.

(2) Grotius, Hamond. l'emper. Louis de Dieu, sur saint Matthieu. M. de Tillemont, titre 1 des emper., art. 54. Voyez aussi Jansen sur cet endroit-ci.

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