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ayant cité une fois ce verset avec ces mots, in Isaïá prophetá, le cite deux fois avec ces mots, in prophetis. La plupart des exemplaires grecs lisent aujourd'hui, in prophetis. Les versions arabique et éthiopique lisent de même. Theophilacte et Euthymius ont

ainsi lu.

Chap. 14, v. 61. Tu es Christus, filius Dei benedicti. Le mot Dei a été ajouté; il ne se trouve ni dans l'original grec, ni dans l'ancienne version Vulgate, ni dans les versions syriaque, arabique, éthiopique et persane. Saint Hilaire, sixième livre de la Trinité, col. 923, lit de même, tu es Christus filius Benedicti. Quelque copiste, ignorant que les Hébreux désignent souvent Dieu par ces mots, le Bénit, aura cru que le terme Dei avoit été omis dans l'exemplaire qu'il transcrivoit, l'aura mis à la marge de sa copie, d'où il aura passé dans le texte.

Nous avons réservé pour dernier exemple une addition entièrement semblable à celle dont il est question (1). « J'ai lu, dit saint Jé» rôme, quelques exemplaires de saint Mat»thieu qui, dans l'endroit de cet évangéliste » où la Vulgate et ma version mettent ut impleretur quod dictum est per prophetam

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(1) Commentaire sur le verset 35 du chapitre 13 de saint Matthieu.

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» dicentem, portoient: Per Isaïam prophetam dicentem. Je crois que ce terme » a été dans la suite retranché par des gens »sages, parce que les paroles citées par >> saint Matthieu ne se trouvoient pas dans » Isaïe. Comme Asaph est l'auteur du psaume » 77 d'où ce passage est pris, il me semble » continue ce père, que l'évangéliste avoit » d'abord écrit : Quod dictam est per Asaph » prophetam dicentem ; mais que le premier » copiste, ne sachant qui étoit Asaph, et >> croyant que c'étoit une faute de l'écrivain >> dont saint Matthieu s'étoit servi, y avoit » substitué le nom d'Isaïe, beaucoup plus » connu. Il faut donc savoir que dans les » psaumes, les hymnes et les cantiques, non>> seulement David, mais tous ceux dont les >> noms sont à la tête de ces ouvrages, comme » Asaph, Idithun, etc., doivent être appelés >> prophètes. >>

La conjecture de saint Jérôme n'est pas fondée.

1o Dans plusieurs endroits du nouveau Testament, on cite des passages pris des psaumes; mais jamais on n'y joint le mot d'Asaph d'Idithun, ni d'aucun des autres prophètes qui sont les auteurs de ces sacrés cantiques avec David. Ce prince est le seul qui soit nommé dans deux ou trois de ces citations.

2. Si saint Matthieu avoit mis Asaph dans son Evangile, on auroit trouvé ce nom dans les exemplaires où le nom d'Isaïe n'auroit pas été substitué. Or il ne s'y trouvoit pas, puisque saint Jérôme, qui s'en servoit pour sa traduction, ne l'a point mis dans sa version. D'ailleurs ce père, qui avoit consulté tant d'exemplaires de nos saints livres, n'a pu en citer un seul où le nom d'Asaph se soit lu, ce qu'il n'auroit pas manqué de faire pour appuyer sa conjecture. Disons la même chose de l'auteur de l'ancienne Vulgate, qui vivoit du temps des apôtres, ou peu après. Il faut que les exemplaires dont il s'est servi n'aient. point eu le nom d'Asaph, puisqu'il ne se lit point dans sa version.

Il paroît donc certain que l'évangéliste n'avoit écrit que le mot de prophète, et qu'un copiste ayant mis à la marge de son exemplaire le nom d'Isaïe, d'autres plus téméraires le placèrent dans le texte.

Je finis ces observations par une remarque bien pressante. Si saint Matthieu avoit mis dans son texte le nom de Jérémie, on ne peut indiquer aucune raison pourquoi un copiste auroit pu supprimer un nom si connu, tandis qu'il s'en présente une très-simple pour l'ajouter. On lira une citation sous le terme générique de prophète; on est curieux de le connoître en particulier, on croit voir quel

que ressemblance entre l'achat que Jérémie fit d'un champ pour une somme d'argent et l'achat qui fut fait d'un champ par les princes des prêtres avec l'argent que Judas leur avoit rendu. Sur cela on écrit Jérémie à la marge de son exemplaire. Ce procédé est si naturel qu'il s'observe tous les jours parmi nous. Dans les nouveaux Testaments imprimés, on voit à la marge les noms des auteurs sacrés dont on a cité quelques paroles dans le texte, sans les désigner personnellement. C'est ainsi qu'au chapitre 2 de saint Matthieu on lit à la marge le nom de Michée et celui d'Osée à côté des prophéties qui sont tirées de ces prophètes.

Le concours de tant de preuves forme dans l'esprit une conviction qui approche de celle que l'évidence y produit. Si pour s'apaiser entièrement on désiroit un plus grand nombre d'exemples de semblables additions, on n'auroit qu'à parcourir les variantes de Luc de Bruges et de M. Mill.

Au reste, les fidèles ne doivent point s'alarmer de ces altérations auxquelles nos livres saints ont été sujets. La Providence divine qui a permis ce mal nous a pourvus du remède. 1° Aucune de ces additions n'intéresse la foi; 2° il est toujours resté un nombre suffisant de monuments et d'exemplaires dans lesquels ces fautes n'ont point pénétré, par le secours

desquels on a pu corriger ceux où elles se

trouvoient.

Centurion présent à la mort de Jésus-Christ.

Le centurion' voyant les prodiges qui s'opèrent à la mort de Jésus-Christ, confesse hautement dans saint Matthieu et dans saint Marc qu'il étoit véritablement le fils de Dieu; et dans saint Luc' il le reconnoît seulement pour un homme juste: cet homme, dit-il, étoit juste.

Grotius, pour concilier les textes, croit que le centurion fit deux confessions différentes, l'une lorsque les miracles commençoient, l'autre après qu'ils furent tous opérés. Mais cette explication est contraire au récit des évangélistes, qui ne parlent que d'une confession de cet officier, et qui la placent après tous les prodiges arrivés à la mort du Sauveur.

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Selon saint Augustin, l'on peut avancer que le centurion a dit que Jésus étoit juste et qu'il étoit le fils de Dieu, et saint Luc a rapporté le premier de ces aveux; saint Matthieu et saint Marc le second. Mais est-il croyable que saint Luc auroit omis le titre le plus glorieux pour ne rapporter que le moin

"Saint Matthien, c. 27, v. 54.

- 2 C. 23, v. 47.

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