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ques incessantes de la part des batteries et des forts, de la part de brûlots, ou de passagers indigènes qui, une fois à bord, massacraient les Européens.

Une véritable panique régnait à Hong-Kong; le bruit y courut que le pain avait été empoisonné par les boulangers chinois, et la famille de sir John Bowring se plaignit des plus cruelles souffrances. Heureusement, si beaucoup de personnes furent atteintes, nulle n'en mourut. A Singapour, l'alarme était grande aussi; les Chinois, qui forment les huit dixièmes de la population, se montraient agités: des placards affichés menaçaient les Anglais d'incendie et de pillage, et mettaient à prix les têtes du gouverneur, du résident, du juge et des chefs de la police.

Il n'entre évidemment point dans notre cadre de raconter autrement les événements dont il est question ici; il suffit d'en avoir éta bli la gravité et le retentissement, autant qu'il est nécessaire pour expliquer comment les conseils du vice-roi des deux Kouangs avaient dû influencer défavorablement la cour de Hué contre tous les Européens, en général, et particulièrement contre les Français qui, d'accord avec sir John Bowring, contenaient la population de Hong-Kong. On assurait, du reste, que l'entreprise contre Canton avait été préméditée et qu'une entente était établie entre l'Angleterre et la France dès avant l'événement.

Les débats qui s'élevèrent en Angleterre, à la nouvelle de ces hostilités, eurent incontestablement des échos dans tout l'ExtrêmeOrient. On sait que de vives discussions s'élevèrent à ce sujet à la Chambre des Lords et à la Chambre des Communes on contesta la légitimité de l'intervention de l'amiral Seymour; la lorcha Arrow était, disait-on, une gabarre purement chinoise; son équipage. sa cargaison, tout était chinois, et c'était sans droit qu'elle avait arboré les couleurs britanniques. « L'affaire a été illégale du commencement à la fin, dit M. Whiteside, et quant à la moralité, c'est la chose la plus honteuse qui se soit jamais produite devant une assemblée composée d'hommes honorables et au cœur généreux. » 1

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De son côté, M. Disraeli dit que l'affaire de Canton n'était pas une question de légalité, mais bien une question de politique; que la politique du gouvernement cherchait à accroître les relations commerciales de l'Angleterre en Orient, par la force, non par l'action diplomatique, et que la Chambre était appelée à exprimer son opinion sur cette politique dangereuse. « On a parlé, ajoutait M. Disraeli, de l'alarme exprimée par lord Palmerston, à l'annonce d'une combinaison;

1. Chambre des Communes, 27 février 1857.

mais lord Palmerston est l'archétype des combinaisons politiques sans principe. 1 »

M. Roebuck, appréciant l'événement, dit qu'une poignée d'hommes « venait de déshonorer l'Angleterre ».

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M. Gladstone taxa ces faits d'« actes de folie du gouvernement ». Les discussions se terminèrent par un vote de censure, émis à la majorité de 263 voix contre 247. La Chambre des Communes se prononçait en faveur de la paix; mais lord Palmerston, au lieu de se retirer, fit prononcer la dissolution du parlement, et l'Angleterre envoya des forces de terre et de mer à Canton, en même temps que lord Elgin, nommé ambassadeur extraordinaire. La campagne anglofrançaise était commencée.

Pendant ce temps-là, un orage effroyable se déchaînait sur les missions catholiques de l'Annam, et le sang chrétien coulait dans toutes les provinces; parmi les victimes de la persécution, nous devons citer plus particulièrement Mer Diaz, dominicain espagnol, vicaire apostolique du Tonkin central, décapité le 20 juillet 1855. Sa mort et celle de son successeur, Mgr Melchior Garcia san Pedro, coupé en morceaux, pendant qu'on étranglait à ses côtés ses deux servants, le 28 juillet 1858, décideront l'Espagne à se joindre à nous dans la guerre que nous allons voir s'ouvrir contre l'Annam.

Mr Pellerin, évêque de Biblos, vicaire apostolique de la Cochinchine septentrionale, se rendait lui-même en France et, dans une entrevue avec Napoléon III, à Biarritz, obtenait le secours des forces françaises.

(Sera continué.)

J. SILVESTRE,

Ancien Directeur des Affaires civiles et politiques au Tonkin, Professeur à l'École.

1. Chambre des Communes, 3 mars 1857. 2. Chambre des Communes, 5 mars 1857. 3. Chambre des Communes, 6 mars 1857.

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Ce sont les attributions les plus anciennes des chambres de commerce, celles pour lesquelles ces compagnies ont été créées et que toutes exercent. Elles se présentent sous deux formes les avis et les vœux 2. On pourrait en ajouter une troisième : les renseignements. L'article 11 du décret du 3 septembre 1851 s'exprime ainsi au point de vue des vœux :

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Les chambres de commerce ont pour attributions: 1°..... 2o de présenter leurs vues sur les moyens d'accroître la prospérité de l'industrie et du commerce, sur les améliorations à introduire dans toutes les branches de la législation commerciale, y compris les tarifs de douane et les octrois, sur l'exécution des travaux et l'organisation des services publics qui peuvent intéresser le commerce ou l'industrie, tels que les travaux des ports, la navigation des fleuves et des rivières, les postes, les chemins de fer, etc.

D'après cet article, les chambres de commerce n'ont pas seulement la faculté de présenter leurs vues sur les questions énumérées; mais cette faculté est pour elles une attribution d'exercice normal et non pas seulement accidentel. La diversité, le nombre des matières énoncées, ainsi que leur caractère général, leur confère ce droit pour toutes les questions économiques et pour celles qui s'y rattachent. Enfin, chose qu'on ne remarque pas assez, le texte n'indique pas que

1. Voir les Annales du 15 septembre.

2. Les vœux sont des avis émis spontanément.

les vœux des chambres de commerce doivent être limités aux intérêts exclusifs de leur circonscription.

Ces vues doivent être présentées au gouvernement. Cela résulte du caractère de l'institution des chambres de commerce, du § 1er de l'article 11 et des instructions ministérielles en tête desquelles il faudrait placer la circulaire de Champagny que nous avons citée. Voici maintenant pour les avis (art. 11).

Les chambres de commerce ont pour attributions: 1o de donner au gouvernement les avis et renseignements qui leur sont demandés sur les faits et les intérêts industriels et commerciaux; 2°.....

C'est le gouvernement qui a le droit d'interroger les chambres, et il les consulte directement sans même employer l'intermédiaire du préfet. Par renseignements, on doit entendre surtout les états statistiques, monographies concernant le commerce et l'industrie et non les indications relatives à des faits d'ordre privé. Une chambre peut se regarder comme l'office du commerce de sa circonscription; elle doit rassembler d'une manière continue tous les renseignements qui se rattachent au mouvement économique.

Des attributions de nomination sont données aux chambres de commerce. Le décret du 22 décembre 1866 les fait intervenir pour désigner les membres de la réunion générale chargée de constater les cours, quand les courtiers inscrits ne sont pas en nombre suffisant. De plus elles déterminent les marchandises dont le cours doit être constaté ainsi que les jours et heures où la constatation doit avoir lieu. Enfin elles transmettent leurs propositions au ministre pour la nomination des adjoints aux commissaires experts en douane'.

Nous avons dit que la tolérance administrative n'avait pas apporté d'empêchements à la liberté de correspondances des chambres de commerce. Un particulier peut s'adresser à ces compagnies pour avoir communication de renseignements généraux. Les chambres de commerce servent d'ailleurs d'intermédiaire au gouvernement pour

1. Loi du 11 janvier 189 2, art. 11.

2. Le ministère du commerce adresse gratuitement aux chambres des publications périodiques du plus grand intérêt : Le Moniteur officiel du commerce et de l'industrie, journal hebdomadaire contenant des documents officiels, des extraits des rapports des consuls, des renseignements commerciaux, industriels et maritimes de toute catégorie. On lui a annexé, depuis 1892, les Rapports commerciaux des consuls de France publiés par fascicules distincts et qui font connaître d'une manière très complète la situation économique des pays étrangers. Ces rapports formaient autrefois le Bulletin consulaire français. Les chambres reçoivent encore les Annales du commerce extérieur, publication mensuelle, spéciale aux tarifs de douane et à la législation douanière dans tous les pays du monde, le Bulletin de la propriété industrielle qui donne chaque semaine une liste des brevets d'in

faire connaitre au public intéressé les renseignements envoyés par les consuls. Elles tiennent aussi à sa disposition les mémoires et échantillons adressés par les chambres de commerce françaises à l'étranger et les rapports de leurs agents ou de leurs chefs de mission. L'article 12 énumère les questions sur lesquelles l'avis des chambres doit être demandé. Il s'exprime ainsi :

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L'avis des chambres de commerce est demandé spécialement : Sur les changements projetés dans la législation commerciale, les érections et règlements de chambre de commerce, sur les créations de bourses et les établissements d'agents de change ou de courtiers, tarif des douanes, sur les tarifs et règlements des services de transports et autres à l'usage du commerce, sur les usages commerciaux, les tarifs et règlements de courtage maritime et de courtage en matière d'assurances, de marchandises, de change et d'effets publics, sur les créations des tribunaux de commerce dans leur circonscription, sur les établissements de banques, de comptoirs d'escompte et de succursale de la Banque de France, sur les projets de travaux publics locaux relatifs au commerce, les projets de règlements locaux en matière de commerce ou d'industrie.

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On a reconnu, sans trop de difficultés, un caractère consultatif (par opposition à facultatif) à ces avis. L'administration est obligée de les demander sans être tenue de les suivre. Mais cette énumération n'est pas complète. L'avis des chambres de commerce est encore demandé sur la création d'un magasin général ou d'une salle de ventes publiques, sur la création d'un conseil de prud'hommes, sur les projets de règlements dressés par le tribunal de commerce pour déterminer l'organisation et le pouvoir disciplinaire de la chambre syndicale des courtiers inscrits, sur le droit d'inscription

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vention et des marques de fabrique déposées, le Bulletin de l'Office du travail (revue du travail, production, grèves, conciliation et arbitrages, mouvement syndical, assistance, institution de prévoyance, mouvement social à l'étranger). Le ministre des travaux publics adresse aux chambres le Bulletin des propositions de tarifs soumises à l'homologation. Tout commerçant peut aller consulter ces documents à la chambre de commerce de sa circonscription.

Beaucoup de négociants ignorent que des grandes chambres de commerce, et notamment la chambre de Paris, ont organisé des bibliothèques où l'on a rassemblé tous les documents publiés, tant en France qu'à l'étranger, sur des questions économiques et qui reçoivent la plupart des périodiques intéressant le commerce et l'industrie.

Succursales ou plutôt agences locales du ministère du commerce, des chambres ont été autorisées à délivrer les cartes de légitimation exigées des commis-voyageurs à l'étranger et des certificats d'origine pour les marchandises exportées. Elles reçoivent les états semestriels de situation que doivent leur adresser, aux termes de leur acte d'autorisation, les sociétés anonymes d'assurances sur la vie. 1. Lois du 28 mai 1858 et 31 août 1870.

2. Loi du 1er juin 1853.

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