Seule tu fus un homme, et vengeas les bumains! Un scélérat de moins rampe dans cette fange. Versaille, ô bois, ô portiques, Marbres vivans, berceaux antiques, Par les dieux et les rois Élysée embelli, Comme sur l'herbe aride une fraîche rosée, Coule un peu de calme et d'oubli. Mes pénates secrets couronnés de rameaux ; D'où souvent les monts et les plaines Vont dirigeant mes pas aux campagnes prochaines, Sous de triples ceintres d'ormeaux. Les chars, les royales merveilles, Des gardes les nocturnes veilles, Tout a fui; des grandeurs tu n'es plus le séjour : Mais le sommeil, la solitude, Dieux jadis inconnus, et les arts, et l'étude Composent aujourd'hui ta cour. Ah! malheureux! à ma jeunesse Une oisive et morne paresse Ne laisse plus goûter les studieux loisirs. Mon âme, d'ennui consumée, S'endort dans les langueurs. Louange et renommée N'inquiètent plus mes désirs. L'abandon, l'obscurité, l'ombre, De mon pâle flambeau la clarté fugitive, L'âme n'est point encor flétrie, La vie encor n'est point tarie, Quand un regard nous trouble et le cœur et la voix. Qui peut ou s'égayer ou gémir auprès d'elle, J'aime ; je vis. Heureux rivage! Tu conserves sa noble image, Son nom, qu'à tes forêts j'ose apprendre le soir; J'y reviens méditer l'instant où je l'ai vue, Pour elle seule encore abonde Cette source, jadis féconde, Qui coulait de ma bouche en sons harmonieux. Sur mes lèvres tes bosquets sombres pour elle encor ces poétiques nombres, Langage d'amour et des dieux. Forment Ah! témoin des succès du crime, Si l'homme juste et magnanime Pouvait ouvrir son cœur à la félicité, Versailles, tes routes fleuries, Ton silence, fertile en belles rêveries, Mais souvent tes vallons tranquilles, Tes sommets verts, tes frais asiles, Tout-à-coup à mes yeux s'enveloppent de deuil. J'y vois errer l'ombre livide D'un peuple d'innocens, qu'un tribunal perfide Précipite dans le cercueil. ODE XI. LA JEUNE CAPTIVE. L'ÉPI naissant murit de la faux respecté ; Et moi, comme lui belle, et jeune comme lui, Qu'un stoïque aux yeux secs vole embrasser la mort, S'il est des jours amers, il en est de si doux ! L'illusion féconde habite dans mon sein. D'une prison sur moi les murs pèsent en vain, Échappée aux réseaux de l'oiseleur cruel, |