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M. de Metz et l'abbé de Castries, qui sont venus me surprendre ici à dîné, vous font bien des compliments.

A Versailles, ce 11 novembre 1697.

LETTRE CLXXII.

de l'abbé bosSUET A SON ONcle.

Sur l'avantage que l'on retiroit de l'impression des écrits des évêques; les dispositions de la congrégation et du Pape touchant la communication demandée par l'abbé de Chanterac; divers écrits de M. de Meaux, et ceux publiés pour M. de Cambrai.

J'ai reçu la lettre que vous m'avez fait l'honneur de m'écrire de Fontainebleau, le 21 octobre. Je n'ai rien changé à ma manière d'adresser mes lettres à M. Roulier, à Lyon, parceque je la crois sûre, et que jusqu'ici rien ne s'est perdu. Je prends du reste les précautions que vous avez vues, et qui sont praticables, de peur de surprise. Vous avez, il y a longtemps, l'éclaircissement sur le retardement de mes lettres du 1er octobre.

Tout est dans la même disposition que je vous ai marquée dans ma précédente, de la part des jésuites et du cardinal de Bouillon. J'en recois tous les jours de nouvelles confirmations: on n'en peut douter; mais, encore un coup, cela ne peut que faire un peu retarder le jugement.

avec

Pour ce qui regarde M. de Cambrai, il est bien difficile que son livre échappe ici à la condamnation. On aura beau faire, cette cour non pressée ira peut-être un peu lentement; mais il faudra mettre à profit cette lenteur, qui, cela, ne sera pas excessive. Pour en tirer parti, il faut nécessairement traduire en latin les premières vingt remarques dont je vous parlois dans ma dernière lettre, et les faire imprimer. J'ai pris le conseil de M. le cardinal Casanate, de M. le cardinal Noris, et de plusieurs autres. On a trouvé fort bon l'impression de la Déclaration et du Summa Doctrinæ. Je fais voir par-la que les évêques ne font rien en secret sur cette matière; qu'ils sont bien aises d'exposer aux yeux, et à la censure publique, des remarques sur un livre public, et dont le scandale est public. Cela m'a fort servi dans les instar.ces que j'ai été obligé de faire, pour qu'on ne se départît pas des règles du saint-office relativement à la communication, qu'on vouloit extorquer, des sentiments des examinateurs et des propositions, et que la congrégation a résolu de ne point communiquer.

*Du Cambout de Coislin, neveu du cardinal de ce nom.

M. le cardinal Casanate m'a assuré encore aujourd'hui, et M. le cardinal Spada aussi, que toute la permission qu'on avoit accordée aux examinateurs étoit seulement d'écouter M. de Chanterac, sans s'expliquer avec lui; et c'est à présent l'intention de Sa Sainteté, qu'on avoit surpris. Ainsi les choses resteront dans l'état où elles doivent être, moins que le Pape et la' congrégation ne changent de sentiment.

ordre au maitre du sacré palais de ne plus apHier on m'assura que le Pape avoit donné peler le père Damascène aux assemblées : cela voudroit dire qu'il est exclu. J'en ai dit un mot aujourd'hui au cardinal Casanate, qui n'a voulu me rien dire; mais il m'a parlé de manière que j'ai sujet de croire qu'il y a en cela quelque chose de vrai. Il n'y a pas grand mal, quoique le père Péra m'ait voulu persuader qu'il étoit engagé à condamner le livre. Ce père Damasment contre lui. Il n'ignore pas les bons offices cène s'en prend à M. le nonce, qui a écrit forteque vous lui avez rendus : ainsi il ne nous en sait pas mauvais gré.

Pour revenir à nos vingt remarques, je vous dirai donc que M. Phelippeaux en a traduit une partie. J'avois écrit à Naples dans l'intention d'y faire imprimer cet ouvrage; mais on me mande qu'il faut la permission du cardinal-évèque et du vice-roi. Cela seroit long à examiner, peutêtre la permission ne seroit pas sûre: ainsi nous dinaire, ce qu'il y en a de traduit; et par le avons pris le parti de vous envoyer, par cet orprochain, je vous enverrai le reste. Il est absolument nécessaire de le faire imprimer bien et correctement. Ces vingt remarques sont démonstratives et décisives: vous pouvez compter qu'avec cela bien entendu, le livre ne peut pas tenir. Vous y corrigerez ce que vous jugerez vous-même à propos. On n'a pas cru devoir mettre les qualifications: comme elles sont séparées, on en a inséré ce qu'il faut dans le corps du discours; cela ne sera pas improuvé ici, mais est même nécessaire. On pense qu'il est bon de mettre les principaux passages à la marge en françois, pour qu'on voie tout d'un coup d'œil, et qu'on puisse confronter aisément.

Les dernières remarques que j'ai reçues par le dernier courrier avec le Summa Doctrinæ, sont aussi excellentes mais l'ouvrage seroit trop long; et puis ces remarques sont sur des matières plus délicates, plus épineuses, plus subtiles pour la plupart, et ne sont pas en gé. néral nécessaires pour la condamnation du livre en ce pays-ci, où on ne sera touché que des erreurs sensibles et démontrées. On peut néanmoins (et il n'y a que vous qui le puissiez faire)

:

en prendre le substantiel, et ce qui tendroit à, fortifier les vingt premières remarques, pour le fondre dans ces remarques, ou le placer à la fin mais il ne faut, s'il vous plaît, prendre que ce qui ne souffre aucune réplique, et ne laisse lieu à aucune échappatoire. Il est aussi important d'abréger le plus qu'il sera possible, car c'est ce qui fera l'utilité de cet ouvrage; surtout aussi, que rien ne sente la querelle particulière et l'injure.

Il sera bon d'expliquer les suppositions impossibles, de faire voir en quoi est l'excès de M. de Cambrai, et combien est différent ce que vous en avez écrit; de bien établir l'exercice de l'oraison de quiétude, qui ne rend pas plus parfaits chrétiens. Cela sape par les fondements tout son système, et lui enlève les passages de l'Écriture sainte, dont il abuse manifestement. La remarque sur les articles faux est excellente: il est à propos de la mettre en substance et en abrégé. Enfin il faut faire de ces remarques un ouvrage complet: mais pour les vingt-quatre dernières remarques, ne mettez que ce qui est essentiel, substantiel et sans réplique, et qui peut frapper ces gens-ci en leur faisant sentir les inconvénients. Il faut, s'il vous plaît, que, pendant qu'on imprimera les vingt remarques, vous ne perdiez pas de temps à achever en latin cet ouvrage, et le conclure en laissant entendre qu'il y a une infinité d'autres remarques à faire, mais qu'on s'en tient aux principales.

aussi bien que des Déclarations et des Summa Doctrinæ : il est nécessaire de répandre cela partout. On juge ici fort sur la réputation : ces trois pièces se soutiennent l'une l'autre, et suffisent. Au reste, les dernières remarques nous serviront ici pour approfondir la matière, et pour répondre, s'il est nécessaire, à quelques difficultés, par quelques feuilles volantes, et pour instruire dans la nécessité. Mais que l'imprimé, s'il vous plaît, soit bien correct et envoyé promptement. Encore une fois, n'hésitez pas un moment, car cela est absolument nécessaire.

La Lettre pastorale de M. l'archevêque de Cambrai a été envoyée ici imprimée. L'assesseur l'a prêtée à M. le cardinal Casanate, qui l'a lue: elle est très longue. M. le cardinal m'a dit qu'il lui paroissoit qu'il commençoit à rétracter beaucoup de choses: il ne l'avoit plus, et l'avoit rendue; il la croit conforme aux notes.

Au reste, comme on alloit me donner copie des notes en latin, le maître du sacré palais a repris le manuscrit, et je ne l'ai pu avoir; mais on m'a assuré que je l'aurois pour l'ordinaire prochain. M. le cardinal Casanate me l'a comme promis, et une autre personne.

Je vous envoie un écrit en françois contre vous*, très mauvais, sur le cas impossible. Il est de la main, à ce qu'on dit, de M. de Cambrai. Celui du docteur de Sorbonne ne se publie pas, et apparemment ce n'est pas grand'chose.

Les personnes qui écrivent en France qu'on consultera sur cette affaire le cardinal Petrucci

Il est bon aussi que vous sachiez qu'une des choses qui fera ici le plus de tort à M. de Cam-ignorent absolument le caractère de cette courbrai, c'est qu'on s'imagine qu'il est cartésien, et qu'il préfère cette philosophie à la commune : cela gendarme ici quelques uns des principaux examinateurs contre lui.

Au reste, il n'est pas nécessaire que vous mettiez votre nom à cet ouvrage. Il ne faut même l'imprimer que pour ce pays-ci, vous réservant à faire imprimer le françois quand il vous plaira, et dans la forme que vous jugerez à propos. Encore une fois, n'hésitez pas à faire imprimer ce que nous vous demandons pour ce pays-ci, cela est absolument nécessaire; mais, s'il yous plaît, il ne faut pas perdre un moment de temps. Aussitôt mon paquet reçu, il faut faire imprimer en toute diligence ce que nous vous envoyons, quand vous aurez corrigé dans le latin ce que vous jugerez à propos. Vous donnerez la dernière forme à l'ouvrage, à mesure qu'on l'imprimera dans huit jours vous recevrez le reste de la traduction des vingt remarques. Dès qu'elles seront imprimées, vous m'en enverrez des exemplaires, s'il vous plaît, pendant trois ou quatre ordinaires, le plus qu'il sera possible,

ci, et l'état présent des choses; outre que je sais, de science certaine, que ce cardinal condamne le livre de M. de Cambrai. Mais il suffiroit qu'on crût qu'il y prit part, pour faire condamner plus vite M. de Cambrai : il n'y a rien à craindre de ce côté-là.

Plus la Hollande se déclarera favorable à M. de Cambrai, plus son affaire sera mauvaise ici.

Je ferai bon usage de la relation que vous me promettez. Il est certain que M. le cardinal de Bouillon est très indisposé contre moi. Je traite les affaires dont je suis chargé avec toute l'application qui m'est possible, et je rends tout le respect que je dois à chacun.

L'union entre vous, M. de Paris et M. de Chartres, est nécessaire, et que même cela pa

*Cet écrit, de près de deux cents pages in-12, est intitulé

Lettre d'un Ecclésiastique de Flandre à un de ses amis de

Paris, où l'on démontre l'injustice des accusations que

fait M. l'évêque de Meaux contre M. l'archevêque de Cambrai. On fit d'abord courir cette pièce manuscrite à Rome, et enfin on la fit imprimer l'année suivante, 1698.

roisse encore par quelque chose de public, aussi bien que l'attention et la protection du roi.

Si M. le cardinal de Janson et M. le cardinal d'Estrées écrivoient ici à quelque cardinal, ou personne de considération, sur la disposition de la France et du roi, sur le scandale que cause le livre, et le contraste de votre procédé avec celui de M. de Cambrai, cela feroit un bon effet. Il seroit bon même qu'on commençât dans la Faculté et dans le clergé à se remuer là-dessus, s'il est possible: vous êtes prudent et sage.

Je finis par vous annoncer la promotion inopinée de M. le cardinal Cenci, que le Pape déclara hier être un des deux réservés in petto, dès la première promotion: ainsi il va immédiatement après le cardinal Tanara. J'en ai une joie très particulière; car c'est, je l'ose dire, le seul ami sur qui je puisse compter ici sûrement. C'est un homme d'une douceur et d'un mérite infini, aimé de tout le monde, et très affectionné à la France. J'ai été, cette après-dînée, une heure avec lui: personne ne s'attendoit à sa promotion, et lui moins qu'un autre. M. le cardinal de Janson en

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DE L'ABBÉ PHELIPPEAUX A BOSSUET. Sur les mouvements que cet abbé se donnoit; le retard qu'avoient éprouvé les congrégations ; la traduction latine du livre de M. de Cambrai; et les délais à craindre. Voilà le reste de la traduction faite à la håte, et d'un style simple pour être mieux entendu, avec les notes de M. de Cambrai. Vous pouvez insérer la réfutation de ces notes, et de l'écrit que j'ai envoyé par le dernier courrier. Comme ce ne sont que des observations, on y peut insérer les qualifications; et il faut nécessairement rendre la vérité éclatante, car il y a bien des sollicitations publiques et secrètes.

nasse davantage; mais ma première maxime, c'est d'obéir et de suivre vos volontés.

Les congrégations des examinateurs ont été suspendues en attendant la traduction latine, les notes et quelques autres écrits. Cette traduction a déja été donnée à quelques examinateurs : je l'ai vue; le latin en est pur. Vous jugerez des notes: le peu que j'en ai vu ne servira qu'à faire condamner l'auteur.

On m'a assuré que le maître du sacré palais avoit ordre de n'appeler plus Damascène : on en saura la vérité à la première assemblée. Ainsi il resteroit sept examinateurs, dont cinq paroissent vouloir faire leur devoir. On ne sait encore quel parti prendront Gabrieli et Alfaro, jésuite: on m'a assuré que le premier iroit bien; pour ce jésuite, qui est Espagnol et assez honnête homme, je ne sais s'il pourra s'éloigner de l'engagement où paroit être la société. On cherche déja à différer; et nous serons long-temps ici, si de votre côté on ne presse. Vous n'ignorez pas ceux qui peuvent traverser : il n'y a que l'évidence de la vérité qui pourra toucher cette cour, et la porter à agir malgré les sollicitations et les intrigues qu'on pourra faire.

Le livre du P. Dez* devoit être référé ce soir : mais comme M. le cardinal de Bouillon vouloit être présent, peut-être que les dépêches qu'il devoit faire auront engagé à différer. Le maître du sacré palais donna ce livre à lire au père Massoulié, qui y fit des notes. Le P. Dez les ayant vues, a fait un livre contre le dominicain sous le titre de Réponse au janséniste anonyme: le dominicain s'en est plaint à la congrégation, et je ne sais comment cela se terminera.

L'Ordonnance de M. de Reims contre les thèses des jésuites sera fort estimée : on a beaucoup de curiosité de la voir. C'est un coup bien violent pour des gens qui n'y sont pas ac

coutumés.

Si vous prenez le parti de faire imprimer les observations, il faut y mettre tout ce que vous aurez à dire contre le livre, afin de ne point multiplier les écrits, et de ne point attirer de réponses frivoles. Tous les gens instruits et non prévenus sont pour nous. Je vous prie même d'insérer dans ces observations une réfutation courte de la Lettre pastorale que vous pouvez avoir : il n'en est venu ici qu'un exemplaire, apparemment pour pressentir ce qu'on en diroit en cette cour. On parle encore d'un écrit d'un docteur de Sorbonne, probablement supposé : je n'ai pu encore le voir. Il faut que ce ne soit

Vous me mandez de ne me donner que le moins de mouvement que je pourrai; rien n'est si facile : mais si je ne m'en donne, je ne sais qui s'en donnera. Au reste, je puis assurer que ceux que je me suis donnés ont éte nécessaires, et qu'ils n'ont été aperçus de personne; puisque je vais sans valet, et le soir, et que je ne vois que des personnes sûres et fidèles, qui sont de mes * Ce livre étoit dirigé contre les Œuvres de Bains, que le amis. Il seroit peut-être bon que je m'en don-père Gerberon venoit de publier en Flandre.

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pas grand'chose, car on n'ose encore le communiquer. Après ces observations, s'il se fait quelque réponse, je serai en état d'y répliquer, faisant tout ce que je puis pour m'instruire à fond de la matière.

***

M. de Chanterac et M. courent partout, débitant beaucoup de choses qui ne servent à rien ni l'un ni l'autre n'est capable d'entrer en discussion de la matière. Si M. le cardinal de Janson étoit encore à Rome, l'affaire seroit bientôt jugée; mais il faudra prendre patience. On attend quelque événement qui puisse retarder, et qui n'arrivera peut-être pas.

Les jésuites ont répandu ces jours-ci que madame de Maintenon avoit écrit au cardinal de Bouillon en faveur de M. de Cambrai on veut même que le roi soit indifférent; mais cela ne fera pas grand effet, s'il continue à presser l'affaire. Je suis avec un profond respect, etc.

Ce 18 novembre 1697.

LETTRE CLXXIV.

DE BOSSUET A SON NEVEU.

Sur l'Instruction de M. de Cambrai et celle de M. de Paris, et sur divers écrits qu'il envoie à son neveu. J'ai reçu votre lettre du 29 octobre, et je suis bien aise de vous voir toujours au fait et fort attentif. J'attends par l'ordinaire prochain d'apprendre l'événement de votre projet *. Il ne faut point, sans nécessité, demander audience au Pape, à cause du grand éclat que cela feroit; mais agissant par le conseil du cardinal Casanate que vous me nommez, vous ne sauriez que bien faire. Prenez garde de parler toujours en mon nom, sans mettre en jeu celui du roi, dont on ne doit point se servir sans ordre.

Vous avez vu présentement sans doute l'Instruction pastorale de M. de Cambrai : vous remarquerez aisément que tout y est déguisement et artifice. Je travaille à la réfuter sommairement. Ce n'est pas une explication, mais un autre livre, mauvais et censurable comme le premier.

M. de Paris doit envoyer aujourd'hui à Rome son Instruction pastorale **. Il n'y nomme point M. de Cambrai, ni son livre; mais en trente endroits il en rapporte des quatre et cinq lignes, qu'il foudroie d'une étrange force.

Je vous envoie une petite lettre de M. l'abbé

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de Beaufort à M. le maréchal de Noailles, sur le sujet du frère Laurent, carme déchaussé. Vous verrez avec combien peu de ménagement un homme de l'archevêché, et bien avoué de son patron, parle de M. de Cambrai.

Outre l'Instruction pastorale, M. de Cambrai remplit le monde de petits ouvrages, qu'il répand par le nombre infini de ses émissaires. En un mot, quoi qu'il dise, et quelque beau semblant qu'il fasse, il n'a guère envie de se soumettre; mais il le fera malgré lui, parceque si Rome prononce, il ne trouvera pas un seul homme pour le suivre.

M. l'abbé de Fleury l'aumônier a reçu une lettre de M. le cardinal de Bouillon par rapport à moi : il veut toujours que je croie qu'il ne se mêle de rien. Cet abbé doit répondre que je crois tout ce qu'il dit, et que je n'entre en nulle connoissance de sa conduite, qui ne peut être que bonne, et conforme aux ordres qu'il a. Je me réduis toujours, sans plainte et sans chagrin, à dire que cette Éminence ne me fait pas assez de justice, sur ce qu'il me paroît trop regarder cette affaire comme une querelle particulière entre M. de Cambrai et moi. Comme il parle de vous, j'ai prié cet abbé d'assurer que vous recevez de ce cardinal toute sorte de bons traitements, et que vous n'avez qu'à vous en louer. Demandez-lui toujours sa bienveillance et sa protection; vous ne sauriez lui rendre trop de devoirs.

Quant aux écrits que j'envoie, il ne faut pas que votre prévention pour moi vous empêche d'examiner ce qui convient au lieu où vous êtes: de mon côté, je ne puis voir assurément que ce qui convient ici.

Les amis de M. de Cambrai n'ont à dire autre chose, sinon que je lui suis trop rigoureux. Mais si je mollissois dans une querelle où il y va de toute la religion, ou si j'affectois des délicatesses, on ne m'entendroit pas, et je trahirois la cause que je dois défendre.

La traduction en latin de mes remarques francoises seroit bien longue. M. Phelippeaux prendra bien la peine d'en traduire ce qui sera plus utile. Mon intention est qu'elles puissent servir de mémoire à quelqu'un de confiance.

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Vous devez avoir reçu deux pièces latines qui sont pour vous et pour des personnes affi- .. dées l'une est Narratio; l'autre est Errores et qualificationes.

Vous ne manquerez pas de nous écrire sur l'Ordonnance de M. de Reims. On dit qu'il court, contre cet ouvrage, une lettre fort impertinente.

J'attends avec impatience l'écrit latin de M. Phelippeaux ; je l'embrasse de tout mon

cœur.

M. le cardinal de Janson est encore à Beauvais; on l'attend ici dans peu.

A Versailles, ce 18 novembre 1697.

LETTRE CLXXV.

de l'abbé BOSSUET A SON oncle.

Sur les raisons qui le portoient à ne point parler de l'affaire au cardinal de Bouillon; l'importance qu'il y avoit de publier en France beaucoup d'écrits sur la matière; et le projet de former pour cette affaire une congrégation de cardinaux.

M. de Cambrai. Il seroit bon de faire connoître le contraire à tout le monde par toute sorte de voies.

J'ai appris, depuis ma dernière lettre, qu'on parloit tout bas de former une congrégation de cardinaux exprès pour cette affaire. Cela peut avoir son bon et son mauvais. Si cette nouveauté étoit demandée de la part du roi par M. le cardinal de Bouillon, de concert avec M. de Chartres, M. de Paris et vous, je tiendrois le projet pour bon, Si c'est le contraire, ce dessein m'est fort suspect; et on n'y viendra que pour tâcher de changer l'état des choses, qu'on croit n'être pas favorable à M. de Cambrai. J'ai mis en campagne deux ou trois personnes pour découvrir ce qui en est : je le saurai dans peu', et j'agirai suivant l'occurrence. Ce que vous me mandez par votre précédente lettre, qu'on verra l'effet que produira ce que le roi à dit à M. le nonce, me fait suspendre mon jugement; et je doute si ce ne seroit pas ce projet dont vous voudriez me parler d'un autre côté, je crois que cela vaudroit bien la peine de m'ètre mandé clairement.

J'ai reçu ici, il y a trois jours, la lettre que vous m'avez fait l'honneur de m'écrire de Germigny, le 27 du mois passé. Je suis venu ici prendre l'air quatre ou cinq jours, et m'en retourne demain. Je rendrai moi-même votre lettre à M. le cardinal de Bouillon, et aurai par-là occasion de lui parler de cette affaire, dont, pour vous dire la vérité, nous ne nous parlons pas plus que s'if n'en étoit pas question. La raison pour laquelle de mon côté j'en agis ainsi, c'est que je vois fort fusse mieux instruit, et n'être pas obligé de parJe suis venu ici en partie pour attendre que je bien qu'il évite toutes les occasions d'entrer là-ler là-dessus, sans savoir ce que j'ai à dire. Tout dessus en matière avec moi; et comme je veux aller mon chemin, et faire ce qu'il convient pournal de Bouillon sera bien hardi, s'il le fait sans ce que je puis vous assurer, c'est que le cardile bien de la cause, je n'en veux pas être empêché. ordre du roi : car assurément une pareille chose Je suppose toujours qu'on en est bien aise, parceque cela doit être ainsi. Du reste, je ne fais lon y ait part. ne peut s'exécuter sans que le cardinal de Bouilrien que je ne veuille bien qui soit su de tout le monde, et je garde toutes les mesures imaginables.

du roi a été dictée par M. l'évêque de Meaux: ceLes jésuites publient hautement que la lettre évêques l'esprit des examinateurs. Des religieux la est assez insolent, et dit pour aliéner des trois intrigants, à la tête desquels est le père Dias, cordelier espagnol, publient que M. de Cambrai est le seul défenseur des religieux, et qu'ils doi

nombre des examinateurs, dont il est très fâché, Il est sûr que le père Damascène est exclu du et les examinateurs sont fort aises d'en être dé

Enfin nous avons eu copie des notes latines, et j'ai chargé M. Phelippeaux de vous en envoyer un exemplaire par cet ordinaire: il vous instruira aussi de ce qu'il a pu savoir de nouveau depuis mon départ. Il vous doit envoyer les der-vent le soutenir. nières feuilles de la traduction latine, dont nous attendons ici les exemplaires avec grande impatience, comme chose très nécessaire. Vous avez à présent l'Ordonnance et les notes; vous pour-barrassés. M. Phelippeaux vous écrira ampleriez ajouter ce qu'il faut aux endroits. Ce que je prends la liberté de vous recommander, c'est la brièveté, et à cet effet de ne vous arrêter qu'à l'essentiel, et aux erreurs grossières qui sont capables de frapper ces gens-ci.

Au reste, vous ne sauriez, les uns et les autres, trop publier en France d'instructions contre M. de Cambrai. M. le cardinal de Bouillon et les jésuites sont bien aises de faire croire ici que le clergé de France est entièrement divisé sur cette matière, et que beaucoup de prélats et de docteurs ne condamnent pas le livre de

ment: cette lettre sera dans son paquet.

chambre monseigneur Aquaviva, Napolitain, Le Pape se porte bien, et fait son maître de qui est fort mon ami, et qui pourra parler au Pape plus fortement que M. Lenci, qui, parə modestie, n'osoit parler de rien. Je suis, etc.

A Frescati, ce 19 novembre 1697.

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