Images de page
PDF
ePub
[ocr errors][merged small]

très précise. Je me donnerai l'honneur de lui | nuent sur le même ton assurément, et ne chanécrire l'ordinaire prochain.

La lettre de M. de Cambrai à madame de Maintenon justifie extrêmement, dans l'esprit des gens les plus affectionnés à M. de Cambrai, le procédé de madame de Maintenon à son égard; car on voit qu'elle n'agit qu'après avoir tout tenté. J'ai fait voir à M. le cardinal Casanate ce qui le regarde dans votre lettre: il ne faut pas le nommer par rapport aux jésuites et au père Dez, qui le tiennent déja pour suspect.

Il n'y a pas encore d'assesseur : tout ce qui est opposé ici aux jésuites souhaiteroit Casoni, et la seule considération qu'on a avec raison pour le roi l'empêche. Sans cette considération, il est certain que pour la bonne doctrine et la morale on ne pourroit mieux tomber: je n'entre point dans le reste. Pour ce qui est de Fabroni, on ne pourroit en avoir un plus mauvais, mais il est protégé sous main par le cardinal de Bouillon, et publiquement par les jésuites. Tout est perdu, s'il est fait assesseur du saint-office : il en faut | avertir le roi nécessairement, et incessamment. M. le cardinal de Janson le connoit bien, et ce que je vous mande là-dessus est certain. M. Nucci seroit très bon, et il est déja du saint-office. Je ne laisse pas d'agir assez bien contre Fabroni.

Vous croyez bien que je ne néglige pas monseigneur Giori; je sais ce que porte la lettre du cardinal d'Estrées.

Le cardinal de Bouillon a dit qu'il avoit proposé un sujet au roi pour être cardinal, et qu'il avoit été pris au mot cela roule entre vous, M. de Chartres ou M. de Paris. Je veux croire, puisque vous le voulez, qu'il est question du dernier plus vraisemblablement.

M. de Paris nous promet incessamment des actes qui étonneront: il n'y a donc que la diligence à demander, et que tout soit authentique, et montré au nonce de bonne main. Il importe aussi que le roi continue à lui parler nettement sur les faits, et sur la nécessité de hâter la décision.

Dans les dernières assemblées, Alfaro, le procureur général des augustins, le père Le Mire, Gabrieli et Granelli ont parlé. L'amour pur fait ici la conversation de tout le monde. Le Pape veut qu'on tienne trois fois la semaine des congrégations. Cela ne laissera pas de durer encore long-temps, si on ne prend une méthode plus courte; mais il les faut laisser faire encore quelque temps, voir un peu le tour que l'affaire prendra, et cependant presser toujours du côté .du roi.

Le cardinal de Bouillon et les jésuites conti

geront pas. La réponse de M. l'archevêque de Paris ne leur plaît pas : elle découvre tout, et leur fait voir qu'on aperçoit leur manége; ils devroient mourir de honte.

Je profiterai dans quelque temps de la liberté que vous me donnez de tirer sur vous quelques lettres de change. Je vous assure qu'on ne peut être plus pressé là-dessus que je le suis. Je m'aide de mon mieux: mais comment puis-je faire? Il me semble qu'il faut finir avec honneur, comme on a commencé. Je vous supplie de vouloir bien vous charger de mes compliments partout, à Paris et à Meaux; car je n'ai pas beaucoup de temps à perdre aux lettres inutiles.

Il

Rome, ce 3 juin 1698.

--

LET TRE CCLXXIV.

DE BOSSUET A SON NEVEU.

l'assure que les délais qu'on apporteroit à Rome, pour mieux juger, ne déplairont point au roi; lui apprend quels sont ceux qui ont été choisis pour continuer l'éducation des princes, et desire que la décision de Rome soit telle qu'elle puisse être reçue unanimement.

J'ai reçu votre lettre du 20 mai. Je suis ravi que vous ayez reçu Mystici in tuto: Schola in tuto sera encore plus fort.

Nonobstant tout l'empressement que témoigne le nonce de la part du roi, vous pouvez assurer sans crainte que quand on prendroit quinze jours et un mois, même plus, pourvu qu'il y ait des bornes, et qu'on emploie le temps à faire une décision digne du Saint-Siége, loin de faire de la peine au roi, ces délais lui feront plaisir.

Le roi s'est clairement déclaré touchant le préceptoriat; puisqu'il a renvoyé les subalternes, qu'on savoit être les créatures de M. de Cambrai, l'abbé de Beaumont son neveu, l'abbé de Langeron son élève, les sieurs Dupuy et de Leschelle, quiétistes déclarés. Cela fut fait mardi matin; et l'on a nommé à l'une de ces places M. de Vittement, receveur de l'Université, que je présentai il y a quelque temps au roi. C'est ce même recteur qui lui fit, sur la conclusion de la prix, une harangue magnifique, qui fut admirée de toute la cour. Il a fait depuis à moimême, comme conservateur des priviléges de l'Université, une harangue latine admirable contre le quiétisme. L'autre homme qu'on a nommé, est l'abbé Le Febvre. C'est un très saint prêtre et très habile, qui travailloit à la Pitié: on ne pouvoit pas faire un plus digne choix. Je ne doute pas, après cela, qu'on ne nomme bientôt un précepteur, et que la foudre

ne suive de près l'éclair: on verra par-là comment le roi et la cour reviennent pour M. de Cambrai. Ma Relation s'imprime celle de M. de Paris a déja paru; vous l'aurez d'abord manuscrite, et bientôt après imprimée.

La lettre du père La Combe à madame Guyon est assez fâcheuse pour les amis de la pénitente. Je la portai dimanche en italien et en françois, aussi bien que la lettre de M. de Cambrai à madame de Maintenon, à Sa Sainteté, qui avoit envie de la voir traduite. J'en pris sujet en même temps de lui faire vos compliments, et ceux de MM. de Paris et de Chartres, sur le ré

Le roi ne cessera point de témoigner son zèle pour la promptitude de la décision; mais il ne faut point douter qu'il n'entende raison, et qu'il ne donne volontiers tout le temps qu'il fau-tablissement de sa santé, et j'eus occasion de dra pour faire une décision plus à fond.

Le père Philippe sera bien sourd, si le Mystici in tuto ne le fait pas entendre. Inspirez toujours que la décision soit telle, qu'elle puisse être reçue unanimement, et sans aucune difficulté. Il est important qu'il y ait un décret contre tous les livres faits en faveur de la doctrine condamnée: moyennant cela, tout ira bien. Mais au reste, quoi qu'il arrive, on fera toujours obéir à la décision du Pape, et il ne sera question que du plus ou moins d'agrément.

On peut s'assurer que tous les évêques, et tous les docteurs en gros, seront très unis contre M. de Cambrai. Le parti est grand par cabale; mais il n'est pourtant composé que de femmes et de courtisans, pour qui les exils de l'abbé de Beaumont et des autres sont des coups de foudre. Ayez soin de votre santé, et embrassez M. Phelippeaux.

On pousse le père La Combe, qui avoue et demande pardon. Madame Guyon est opiniâtre : vous verrez bientôt quelque chose sur cela. Encore un peu de temps, et tout ira bien.

A Germigny, 8 juin 1698.

LETTRE CCLXXV.

DE L'ABBÉ BOSSUET A SON ONCLE. Sur la lettre de M. de Paris, la lettre du père La Combe à madame Guyon, et celle de M. de Cambrai à madame de Maintenon, sur la conférence que cet abbé avoit eue avec le Saint-Père, et les congrégations qui

s'étoient tenues depuis peu devant Sa Sainteté.

lui faire là-dessus fort bien ma cour et celle des évêques. Il me parut touché de cette démarche, et me le témoigna très obligeamment par rapport aux évêques. Il me demanda, en riant, quand on finiroit d'écrire de part et d'autre. Je m'étendis là-dessus, et lui fis comprendre la nécessité indispensable où vous étiez d'éclaircir les points de fait et de doctrine, que M. de Cambrai déguisoit avec un artifice incroyable depuis plus de six mois, en cherchant à s'autoriser des mystiques et des scolastiques. Je lui expliquai le but de vos ouvrages, et le suppliai de s'en faire informer par les cardinaux Casanate, Noris et Ferrari, qui sont les plus capables d'en juger. J'ajoutai que vous ne faisiez rien que de concert avec M. le nonce et le roi, et que vous soumettiez tout au Saint-Siége. Il me parut très satisfait de ce que je lui dis. Je vois bien que l'on continue à lui donner des idées contre la conduite des évêques, que de certaines gens voudroient qui se tussent, pendant que leur faux oracle parle avec tant de hardiesse et d'effronterie. Nos amis s'expliqueront là-dessus fortement au Pape; mais il faut que le nonce écrive en conformité.

M. de Cambrai commence à être connu : sa réputation est perdue, et le seroit à moins. On commence à le regarder comme un homme très dangereux; on ne comprend pas qu'il reste précepteur; on en est scandalisé. Si par hasard on avoit des faits particuliers de madame Guyon, de M. de Cambrai et de la cabale, qu'on ne voulût pas publier, il faudroit les montrer à M. le nonce, et me les envoyer seulement pour le J'ai reçu la lettre de M. Ledieu : je suis ravi Pape. J'ai un canal sûr et très secret pour les de votre bonne santé, que Dieu conserve long-lui faire voir. Ces sortes de pièces sont excellentemps pour l'Église et pour nous! J'ai reçu le tes pour fortifier le Pape, qui en a toujours beSchola in tuto, qui est de la dernière force: soin. tout le monde le demande avec empressement. La cabale dure, et durera la même elle fait jouer tous les ressorts imaginables. La lettre de M. de Paris est désolante pour M. de Cambrai. M. le cardinal de Bouillon est bien fâché d'être obligé d'en dire du bien, et de la trouver belle. Il n'a pas laissé de me dire qu'elle faisoit honneur à M. de Paris, et ce n'est pas sans raison.

A

Le père Massoulié parla mercredi et jeudi devant Sa Sainteté les six examinateurs qui avoient parlé devant les cardinaux parlèrent devant le Pape, qui fut d'une attention étonnante. Tous les jeudis dorénavant les congrégations devant le Pape regarderont M. de Cambrai, et on rapportera au Saint-Père tout ce qu'on aura dit devant les cardinaux. Hier le carme et le maître du sacré palais parlèrent;

le carme à son ordinaire. Vos livres et les faits l'ont ébranlé; et l'on dit qu'à l'exception de l'amour pur, sur lequel il explique M. de Cambrai à sa mode, il convient que le système de ce prélat est mauvais en tout. On ne sait ce que cela veut dire, et je n'y ajoute aucune foi. Le cardinal de Bouillon et les jésuites n'ont rien oublié à son égard je le sais de science certaine.

Le Quietismus redivivus est demandé de tout le monde, et fort desiré. Ne perdez pas de temps, je vous en prie : après cela on pourra attendre la décision du Saint-Siége. Nous souhaitons recevoir bientôt votre Relation en françois et en latin, et votre Réponse aux Lettres de M. de Cambrai. Il en paroît ici une cinquième de ce prélat; il a des traducteurs diligents.

Demain l'archevêque de Chieti et le sacriste parleront à leur ordinaire. Le cardinal de Bouillon fait semblant de presser; mais sous main il travaille à tirer tout en longueur. On verra bientôt comme on s'y prendra pour les autres propositions. Les dispositions sont les mêmes par rapport aux cardinaux. Le cardinal Panciatici, je pense, ira bien. Le cardinal Nerli est un peu revenu des terribles préventions que lui avoient données le cardinal de Bouillon et les jésuites. Je fais de mon mieux pour engager le cardinal Altieri à se trouver aux congrégations qui se tiennent devant Sa Sainteté ; il me l'a promis. Le pauvre cardinal d'Aguirre est quasi hors d'état de s'appliquer ; cela est fâcheux. Le cardinal Casanate a été très incommodé ces jours passés; mais il se porte mieux : nous perdrions tout en le perdant; c'est l'ame de toutes les opérations. Faites, si vous le jugez à propos, écrire le père Mabillon au cardinal Colloredo, sur la protection qu'il donne ici à M. de Cambrai, ou au moins sur le bruit qui en court. Il est trop uni avec Fabroni pour en douter: du reste, je fais tout ce que je puis pour l'éclairer et le détromper. Je crois Fabroni exclu d'être assesseur: j'ai été obligé de dire au Pape qu'il étoit partie dans cette affaire; cela ne lui a pas servi.

Le cardinal de Bouillon fut obligé de convenir hier avec moi, que les mezzo termine n'étoient plus de saison, et feroient plus de mal que de bien. Ce qu'il y a de plaisant, c'est que c'est son unique vue à présent; et nous savons, monseigneur Giori et moi, qu'il a fait insinuer au Pape et aux cardinaux qu'il savoit un moyen admirable d'ajuster les choses; qu'il ne vouloit s'expliquer que quand il en seroit requis. Cependant on répand qu'il seroit dangereux de traiter M. de Cambrai à la rigueur; qu'étant désespéré, il pourroit faire un parti considérable. ou te l'attention du cardinal de Bouillon est de

dissimuler ses desseins au roi, à qui il voudroit faire croire qu'il est indifférent pour la personne et la doctrine de M. de Cambrai, et néanmoins qu'il presse le jugement. Il ne tiendroit qu'ả lui que l'affaire finit dans un mois; mais ce n'est pas ce qu'il demande. Je continue à craindre M. de Barrières.

Sur la bonté que vous avez eue de me marquer de tirer sur vous quelque somme, dans le besoin et la nécessité où je suis, je tire aujourd'hui une lettre de change de neuf cent vingt livres, dont je vous envoie la copie. Je tire de petites sommes, et vous serai à charge le moins qu'il me sera possible.

Cette lettre vous sera rendue par M. de Paris; je la mets sous son adresse, et la donne à Lantivaux, qui la lui remettra en main propre. Rome, ce 10 juin 1698.

LETTRE CCLXXVI.

DE BOSSUET A M. DE LA BROUE.

Sur les réponses faites à M. de Cambrai ; le renvoi de ses créatures; et les personnes qu'on avoit épargnées.

J'ai reçu votre lettre du 29 mai. Vous avez vu que j'ai répondu à quatre lettres de M. de Cambrai, et ma réponse vous a été envoyée. En même temps il en a paru une de M. l'archevêque de Paris, qui a eu ici un grand effet, Cela, M. l'abbé de Beaumont, etc., a désolé le parti. joint avec ce qui s'est passé à Versailles sur Nous avons tous répondu de M. l'abbé Catelan : on a aussi sauvé M. de Fleury. Je ne sais encore ce qu'on fera sur la place principale: vous savez les vues que j'ai eues, les pas que j'ai faits; je persiste, et rien ne me pourroit faire plus de plaisir. Cent fois le jour je vous souhaite ici pour nous seconder dans une affaire qui demande tant d'attention et de lumières, qu'on ne doit rien desirer davantage que d'y être

aidé.

Paris, cé 15 juin 1698.

LETTRE CLXXVII.

DE BOSSUET A SON NEVEU.

Sur la manière dont il a parlé au nonce; sa Relation du quiétisme, l'authenticité des pièces qu'elle contient ; et sur deux propositions omises parmi celles qu'on jugeoit condamnables.

Sur votre lettre du 27 mai, je dis hier à M. le nonce tout ce qu'il falloit pour lui faire connoître ce que vous m'écrivez au sujet du Paps

et des cardinaux, et l'engager à écrire une lettre conforme à cé que vous m'avez mandé.

Mon frère a toujours la goutte; et après beau coup de douleurs, il en est réduit à une foiblesse importune: mais le fond de sa santé est indiqué par le bon visage : du reste, sa bonne hu

Vous pouvez tirer sur moi, en deux fois, jusqu'à douze cents livres : j'ai donné des ordres pour cela. Je suppose que vous aiderez M. Phelippeaux, s'il a quelque besoin. On ne vous laissera manquer de rien, persuadé que l'on est de votre sagesse : il nous tarde bien à tous de vous revoir.

Il me tarde de savoir si vous avez reçu le Mystici in tuto. Je vais reprendre le Quietismus Vous recevrez, par cet ordinaire, cinquante redivivus, qui sera court et tranchant. M. de exemplaires des premières feuilles de ma Rela- Cambrai fait imprimer en Flandre et à Liége tion *, qui en comprennent la moitié, et toutes des écrits de ses émissaires, qui ne font que les lettres de M. de Cambrai, avec son mémoire mal répéter ce qu'il dit. Il a pour lui les gazetà madame de Maintenon, qui y est inséré de tes et les journaux de Hollande, à qui un jémot à mot. Il n'y a point de plus grande authen-suite envoie des mémoires : nous le savons à ticité que d'imprimer ces pièces ici à la face de n'en point douter. toute la cour. On voit bien qu'on n'oseroit le faire, si l'on n'étoit assuré de deux choses: l'une, de ne pouvoir être contredit; l'autre, que le roi et madame de Maintenon le trouvent bon. En effet tout leur a été communiqué, et j'ai ré-meur ne s'altère jamais. ponse positive qu'on agrée cette publication. Au surplus, M. le nonce a vu entre les mains de M. de Chartres le mémoire entier, de la main de M. de Cambrai. Il m'a dit qu'il en avoit écrit à M. le cardinal Spada, et qu'il l'avoit assuré qu'autant qu'il en pouvoit juger par l'inspection, c'étoit le propre caractère de M. de Cambrai. On lui fera voir encore une fois ce mémoire en original; mais il n'y a rien à ajouter à l'authenticité de l'impression, où l'on dit publiquement, et sans crainte d'être démenti, que ce mémoire est transcrit de mot à mot, et sans y changer ou ajouter une seule parole: c'est ce que vous verrez dans les feuilles qu'on vous envoie. L'ordinaire prochain, vous recevrez la continuation de la Relation, où seront mes réflexions sur ces faits, qui donnent une nouvelle force à ce mémoire. M. de Paris vous instruira sur ce qui regarde le reste des faits, et je ne puis que m'en rapporter à lui. Je n'ai pu le voir depuis mon arrivée, qui fut avant-hier; je le verrai ce matin. J'irai ce soir coucher à Versailles.

Le bruit est ici public qu'on a rayé les appointements de M. de Cambrai, comme on a fait bien certainement ceux des subalternes qui ont été renvoyés. Si cela n'est pas encore fait, on peut compter que cela sera, et que M. de Cambrai ne verra jamais la cour. La cabale est humiliée jusqu'à la désolation, depuis l'expulsion des quatre hommes remerciés; et les jésuites, qui disoient hautement que c'étoit leur affaire, n'osent plus dire mot.

J'ai instruit monseigneur le Dauphin des faits. Il est aussi éloigné de la nouvelle cabale que le roi, outre que naturellement il n'a point d'autre volonté que la sienne; et en ce cas particulier, son sentiment y est conforme. Ainsi votis voyez que ce qu'on vante du crédit du père de La Chaise sur son esprit, sera en cette occasion fort inutile. Nous attendrons le père Dez en patience.

Elle se trouve au tome vii.

Je suis étonné qu'on omette, parmi les propositions condamnables, les deux dont vous parlez; la première: Ce qui n'est pas charité est cupidité, où l'auteur admet une charité qui n'est pas la théologale; et la seconde : L'amour de pure concupiscence, quoique sacrilége, est une disposition à la justice. Ces deux propositions ne peuvent être excusées par nulles tergiversations.

A Paris, 16 juin 1698.

LETTRE CCLXXVIII.

de M. de NOAILLES, ARCHEVÊQUE DE PARIS, A L'ABBÉ BOSSUET.

Sur les bons effets de la Réponse de ce prélat; l'authenticité de toutes les pièces qu'on envoyoit à Rome; et sur la nécessité de presser le jugement.

Je ne pus vous écrire par le dernier courrier, monsieur; et je priai le Père procureur général des minimes de vous faire mes compliments: je n'ai pas toujours le temps de faire ce que je voudrois.

Vous devez avoir reçu depuis quelques jours ma Réponse à M. de Cambrai, manuscrite et imprimée : vous l'aurez dans peu en latin. Elle a fait un si bon effet en ce pays, que j'espère fort qu'elle en fera aussi beaucoup dans celui où vous êtes.

Vous avez très bien fait de montrer la lettre dont M. de Meaux vous a envoyé la copie : l'original est où vous savez ; c'est moi qui l'ai rendu : tout ce qui y est n'est que trop vrai. M. le cardinal de Bouillon a pu faire l'étonné; mais je

A

suis sûr qu'il ne l'a point été : il sait la liaison; | madame de Maintenon. Toutes les lettres de

et s'il n'étoit intéressé dans la cause de M. de Rome retentissent du bon effet que cette lecCambrai par les engagements qu'il a pris avec ture a produit: cela a été trouvé ici fort bon et les jésuites et avec lui, il en parleroit plus for- fort à propos. Vous allez présentement recevoir tement que nous. Vous avez pu l'assurer que la suite de ma Relation : elle authentiquera tout, M. le nonce a vu l'original: on lui communi- et l'on verra bien que je n'écris pas sans aveu. que tous ceux des pièces qu'on vous envoie, et M. de Chartres envoie aussi par cet ordinaire on le fera toujours avec plus de soin. M. de sa Lettre pastorale, qui sera d'un grand poids: Meaux la met par extrait dans sa Relation, il vous en fera part. Le surplus des faits vous qu'il vous enverra au plus tôt. La disgrace des sera mandé par M. de Paris. Je fais mettre en quatre hommes que le roi a ôtés de la maison | latin ma Relation: je la ferai traduire aussi en de messeigneurs les princes ses petits-enfants italien, si l'on peut trouver une plume assez fera bien voir que le zèle de Sa Majesté ne s'est élégante. point ralenti, et qu'elle craint toujours autant que jamais que la mauvaise doctrine ne se répande. Je m'attends bien que vous ferez valoir cet événement le plus que vous pourrez.

Nous aurons donc bientôt le père Dez : il a du mérite, et la coadjutorerie qu'on lui donne, dans le public, du père de La Chaise, achève de lui attirer de la considération; ainsi je ne suis pas surpris qu'il en ait eu à Rome. Cependant elle n'a pu lui faire passer son livre, et je sais qu'il en est fort mortifié : il le sera bien encore, quand il verra ici qu'on le croit tout-àfait dans les intérêts de M. de Cambrai. Il aura beau dire, il ne nous persuadera pas du contraire, ni sur lui, ni sur ses frères.

Ce n'est pas un grand malheur pour nous que la mort de Bernini, car il étoit fort gagné ; mais c'en seroit un fort grand, si Fabroni ou Casoni avoient sa place: ils ne nous seroient bons ni l'un ni l'autre. Faites tous vos efforts pour l'empêcher. M. Giori y fera bien tout ce qu'il pourra: il en parle et en écrit vigoureusement.

M. le nonce m'a assuré qu'il avoit écrit sur le mémoire de M. de Cambrai; qu'il lui paroissoit être de la main de ce prélat. Le principal est qu'on connoisse deux choses: l'une, que le roi est implacable sur M. de Cambrai : ce qu'il a fait dans la maison des princes en est la preuve. Assurez-vous qu'il n'y a point de retour: ce que nous imprimons ici aux yeux de la cour en est une confirmation. Quoi qu'il arrive, et quand même on molliroit à Rome, ce qui ne paroît pas être possible, on n'en agira pas ici moins fortement: car le roi voit bien de quelle conséquence il est pour la religion et pour l'état d'étouffer dans sa naissance une cabale de fanatiques, capable de tout, et qui en est venue à une insolence qui a étonné ici tout le monde. L'autre chose qu'on peut tenir pour assurée, c'est le parfait concert des évêques avec le roi, pour couper la racine d'une dévotion qui tend manifestement à la ruine de la religion.

On n'a garde de nommer en rien le cardinal Casanate, dont le nom est à ménager en tout et

Des deux concurrents que vous nommez pour la place d'assesseur, on ne sait ici lequel est plus digne d'être exclu.

. Si on ne va pas plus vite dans les congréga-partout.
tions, nous ne serons pas si tôt hors d'affaire.
Il ne faut pas étrangler; mais il faut presser,
quand ce ne seroit que pour empêcher les longs
discours du père Alfaro je ne comprends pas
comment on les souffre. J'espère toujours beau-
coup de la force de la vérité, et de la continua-
tion de vos soins. Je suis toujours à vous, mon-
sieur, avec les sentiments que vous savez.
A Versailles, 16 juin 1698.

[blocks in formation]

Quant au chapeau, le cardinal de Bouillon le voudroit plutôt pour M. de Chartres que pour M. de Paris, et plutôt pour M. de Paris que pour moi.

Je pense et repense à ce que vous m'avez mandé sur la vue de M. de Paris: cela est fort délicat.

Vous trouverez des ouvertures pour répondre à, toutes les objections, dans le commencement du Schola in tuto: il y en aura d'autres dans le Quietismus redivivus. Je ne vois rien de meilleur que de poser pour principe qu'il faut joindre les deux motifs de l'amour de Dieu in praxi, et de donner quelque mot fort pour décrier les chimères des suppositions impossibles. Je roule cela dans mon esprit, et ne sais encore que dire.

« PrécédentContinuer »