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LETTRES DIVERSES.

AVERTISSEMENT.

Les lettres suivantes, qui terminent cette correspondance, ont été écrites à Bossuet, soit par ses amis, soit par des savants qu'il mettoit à contribution pour des recherches sur divers points de critique ou d'histoire, par rapport aux ouvrages dont il s'occupoit pour la défense de la religion. Quoique nous n'ayons pas les réponses qu'il y a faites, les détails curieux qu'on trouve dans la plupart de ces lettres feroient regretter leur suppression.

D. Déforis, en les publiant, les avoit classées par ordre de date: nous avons préféré réunir à la suite les unes des autres les lettres des mêmes personnes, parcequ'elles roulent ordinairement sur les mêmes matières.

Nous avons mis en tête trois lettres de Bossuet, qui n'avoient point été imprimées jusqu'à

donnez de ce qui se passe. Pendant que vous prenez tant de soin de réprimer les mal-convertis, je vous prie de veiller aussi à l'édification des catholiques, et d'empêcher les marionnettes, où les représentations honteuses, les discours impurs, et l'heure même des assemblées porte au mal. Il m'est bien fâcheux, pendant que je tâche à instruire le peuple le mieux que je puis, qu'on m'amène de tels ouvriers, qui en détruisent plus en un moment que je n'en puis édifier par un long travail. Je suis de tout mon cœur, comme vous savez, etc.

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nos jours. Elles nous ont été connues trop tard Il lui témoigne sa joie de la nomination de Fénelon à la pour les placer dans les volumes précédents.

LETTRE PREMIÈRE.

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DE BOSSUET A M. DB VERNON, procureur du ROI AU PRÉSIDIAL DE MEAUX*.

Il le prie d'empêcher les assemblées, et les représentations qui pourroient porter au mal.

Il n'y a rien de plus important que d'empêcher les assemblées, et de châtier ceux qui excitent les autres: ainsi, je ne puis que louer votre zèle, et vous remercier de l'avis que vous me

L'original de cette lettre est conservé à Meaux par un des descendants de M. de Vernon, qui nous en a donné communication. (Edit. de Vers.)

place de précepteur du duc de Bourgogne.

Hier, madame, je ne fus occupé que du bonheur de l'Église et de l'état. Aujourd'hui que j'ai eu le loisir de réfléchir avec plus d'attention sur votre joie, elle m'en a donné une très sensible. M. votre père, un ami de si grand mérite et si cordial, m'est revenu dans l'esprit. Je me suis représenté comme il seroit à cette occasion, et à un si grand éclat d'un mérite qui se cachoit avec tant de soin. Enfin, madame, nous ne perdrons pas M. l'abbé de Fénelon; vous pourrez en jouir; et moi, quoique provincial, je m'échapperai quelquefois pour l'aller embrasser. Recevez, je vous en conjure, les témoignages de

* Marie-Thérèse-Françoise, fille du marquis Antoine de Fénelon. Elle épousa en premières noces le marquis de Montmorency-Laval, et en secondes noces le comte de Fénelon, son cousin-germain, frère de l'archevêque de Cambrai. Elle mourut en 1726. Voy. l'Hist. de Fénelon, Pièces justific, du liv, 1, n. 3. (Edit de Vers.)

ma joie, et les assurances du respect avec lequel je suis, etc.

A Germigny, ce 19 août 1689.

LETTRE III.

DE BOSSUET A MADAME DE MAINTENON.

Il l'instruit de la soumission de l'abbé Couet *.

Je crois, madame, que vous aurez agréable que je prenne la liberté de vous donner avis que M. Couet a présenté ce matin, signé de sa main, à M. le cardinal de Noailles, à M. l'archevêque de Lyon, à M. de Rouen et à moi, l'acte que nous avions minuté la veille, M. le cardinal et moi, avec MM. de Toul, de Chartres et de Noyon. Cet acte sera utile à confondre ceux dont la désobéissance a scandalisé l'Église. Pour moi, madame, je crois voir de la docilité à M. Couet, et c'est par où j'espère qu'il sera utile à défendre la vérité. C'est d'ailleurs un homme qui pourra travailler long-temps; et c'eût été dommage qu'il se fût rendu inutile. Je souhaite, madame, que tout se réduise à l'obéissance. L'Ordonnance de M. le cardinal reçoit beaucoup d'honneur dans l'acte nouvellement signé. Je crois que M. de Rouen aura l'honneur demain de le présenter au roi, et de recevoir les marques de la bonté ordinaire de Sa Majesté. J'espère après cela retourner bientôt à Versailles,

et me présenter à vous.

Paris, 9 juin 1705.

LETTRE IV.

DE M. L'ABBÉ FLEURY A BOSSUET. Sur la mort de M. l'abbé de Vares, garde de la bibliothèque du roi.

J'étois à Villeneuve quand je reçus votre lettre, qui fut mardi sur les huit heures du soir. Je n'arrivai ici hier qu'environ à la même heure, parceque, n'étant pas maître de ma voiture, je ne pus partir aussitôt que j'aurois desiré. J'eus encore le temps d'envoyer chez le médecin, qui

L'abbé Couet, grand-vicaire de Rouen, étoit soupçonné d'être l'auteur du Cas de conscience sur le jansenisme, qui fit tant de bruit en 1703, et qu'on a attribué depuis, avec plus de fondement, au docteur Pelitpied. Louis XIV ne consentit à

laisser cet abbé à Rouen qu'à condition qu'il donneroit une déclaration qui pûr dissiper les soupçons élevés sur sa doctrine; et il chargea Bossuet de terminer cette affaire. L'abbé Couet signa la déclaration dressée par l'évêque de Meaux, qui s'empressa d'en instruire madame de Maintenon par cette lettre. Voyez, sur ce fait, l'Hist. de Bossuet, liv. xii, n. 4. (Édit. da Vers.)

me manda que M. l'abbé de Vares étoit très mal, et qu'il devoit recevoir ce matin le viatique. Il l'avoit déja reçu quand je suis arrivé chez lui, qui étoit sur les huit heures et demie. On m'a dit qu'il m'avoit demandé, et il a témoigné être bien aise de me voir. Je lui ai trouvé la poitrine fort engagée, grande difficulté de parler et même d'ouïr; mais la connoissance entière, et les sentiments très chrétiens. Je lui ai dit quelques paroles de saint Paul, sachant qu'il le méditoit continuellement, et quelques versets des Psaumes, surtout In domum Domini ibimus: sur quoi il a témoigné une grande consolation de penser à la sainte cité, et à la bonne compagnie que l'on y trouvera. J'ai continué à lui dire quelques paroles de l'Écriture, de temps en temps; et j'ai vu comme il le goûtoit, par ce qu'il ajoutoit de lui-même. Il a voulu reposer; et j'ai été aux Filles de Saint-Thomas, où j'ai dit la messe pour un malade à l'extrémité. Le médecin étoit venu, qui n'en attendoit plus rien, et jugeoit toutefois qu'il iroit jusqu'au soir. Cependant j'avois envoyé querir M. Bouret, notaire, parcequ'il vouloit faire son testament. Peu de temps après, voyant qu'il s'affoiblissoit, j'ai proposé d'envoyer querir l'extrême-onction. Les notaires sont venus, et il a eu encore assez de liberté d'esprit pour leur expliquer lui

même ses intentions. Comme ils achevoient d'é

crire, M. de Cournouaille est venu avec les saintes huiles, et a trouvé le malade si bas qu'il a commencé par les onctions. Il a toutefois eu encore le temps de dire les prières, puis tout de suite celles des agonisants, pendant lesquelles il a expiré, un peu avant midi. Il a philosophé jusqu'à la fin, demandant pourquoi la maladie s'appeloit un mal, et pourquoi tant de gens s'assembloient autour de lui, paroissant alarmés de son état. Jusqu'à la fin il a témoigné une grande confiance en Dieu, quoique mêlée de quelque légère crainte qui passoit vite.

M. Pessole et M. Clément ont envoyé querir aussitôt, d'un côté M. l'abbé de Saint-Luc, et de l'autre M. de La Chapelle. Cependant je m'en suis allé diner chez M. l'abbé Renaudot, pour ne pas m'éloigner en cas qu'on eût besoin de moi. M. l'abbé de Saint-Luc est venu, qui nous a compté ce qui s'étoit passé, et comme M. de La Chapelle s'étoit chargé des clefs, suivant l'ordre qu'il avoit de M. de Louvois : ainsi, n'ayant plus rien à faire à la bibliothèque, je n'ai pas cru devoir y et m'en retourner samedi à Villeneuve, où M. retourner. J'espère aller demain à l'enterrement, le contrôleur général doit être encore huit jours. Après cela j'espère vous aller trouver, si vous ne m'ordonnez le contraire.

M. l'abbé Renaudot se réveille vivement en cette occasion, et remue toutes les machines dont il se peut aviser. Vous le verrez par cette lettre de M. le Prince. Je l'ai assuré qu'elle étoit fort inutile, et que vous étiez autant bien disposé à son égard qu'il le pouvoit souhaiter. Toutefois, puisqu'elle est écrite, il a fallu vous l'envoyer. M. l'abbé de Saint-Luc lui a offert très honnêtement ses bons offices auprès de M. l'archevêque de Reims, et lui en doit écrire des aujourd'hui. Pour moi, monseigneur, si on me faisoit l'honneur de me demander mon avis, vous savez ce que je vous en ai dit plusieurs fois; et que pour le bien de la chose, sans aucun égard des personnes, je n'en vois point qui convienne mieux à cet emploi que lui. Au reste, la Gazette ne l'occupe pas autant que je pensois. Il ne laisse pas d'étudier beaucoup d'ailleurs ce qu'il écrit en fait foi; et le commerce qu'il a avec tous les savants, dedans et dehors le royaume, feroit honneur à ceux qui le choisiroient. Je ne manquerai pas d'en dire ma pensée à M. le contrôleur général.

LETTRE V.

DE M. L'ABBÉ de saint-lUC.

Sur le même sujet.

Vous aurez appris, monseigneur, par les lettres de Pessole et de M. Fleury, la triste nouvelle de la mort de notre pauvre ami M. de Vares. Vous n'en aurez pas été surpris car vous me marquiez dans votre dernière lettre que vous n'en espériez plus rien et j'ai vu que vous en étiez vivement touché. En vérité, mon

seigneur, je ne saurois me consoler de cette

perte; elle me paroit irréparable pour tous ses d'une société si douce et si agréable. On n'a pas amis. Il est rare d'en trouver de ce mérite, et assurément d'affliction plus sensible en cette vie, et rien ne doit plus servir à nous en détacher. Je l'avois été voir avant-hier, et j'y menai en dis quelque chose dans la conversation : il M. Duchêne, qui le jugea en grand péril. Je lui M. l'abbé de Vares a l'avantage d'être re-s'est disposé à ce dernier moment comme un me parut qu'il m'entendoit assez. En effet, il gretté de tout le monde. M. l'abbé Galois m'en

parla avec de grands sentiments d'estime, la dernière fois que je le vis; et prévoyant ce malheur, il le regrettoit par avance. Le pauvre M. Clément, quoiqu'il eût eu les petits chagrins que vous savez, ne laisse pas de le regretter, craignant de trouver pis. Il est étourdi de ces changements, et mérite que l'on prenne soin de le conserver. Le pauvre M. Pessole me fait grande compassion, et je ne sais ce qu'il deviendra, ni ce qu'on pourra faire faire pour lui. Mais il est inutile, monseigneur, de vous représenter tout cela : vous le voyez comme moi; et personne ne pénètre mieux que vous toutes les conséquences de cette mort. Pour moi, je voudrois bien en tirer des conséquences qui me fussent utiles, et il me semble que cet exemple venant tout-à-coup sur celui de M. d'Amboile, devroit bien m'apprendre à mépriser la vie et tout ce que l'on y appelle établissement, pour ne songer à en faire que dans le ciel. Vous m'y aiderez, monseigneur, par vos bonnes instructions et vos bons exemples, et encore plus par vos prières, que je vous demande avec votre sainte bénédiction.

A Paris, ce jeudi 28 septembre 1684.

FLEURY.

homme bien pénétré des vérités de la religion, qu'il méditoit toujours pendant sa maladie, et

a eu le bonheur de mourir entre les bras de

M. Fleury. Je suis arrivé un moment trop tard : j'ai trouvé le pauvre Pessole fort désolé, et incertain de ce qu'il devoit faire des clefs dont il étoit chargé. M. de La Chapelle, averti par Clément, est venu aussitôt, et a dit que M. de Louvois lui avoit donné ordre en partant de se rendre à la bibliothèque dès qu'il sauroit la mort, de mettre son cachet à toutes les serrures, remettre avec le registre, et de donner avis de et de prendre les clefs. Je lui ai conseillé de les tout à M. de Reims. Je ne doute pas que vous n'ayez la bonté de lui recommander fortement ce pauvre garçon, qui perd tout son appui : son affection et sa fidélité méritent qu'on fasse quelque chose pour lui, outre qu'il est assez intelligent et fort exact.

L'abbé Renaudot espère aussi que vous écrirez en sa faveur. M. de Fleury et moi sommes convenus que l'on ne pouvoit trouver un meilleur sujet, et pius capable de cet emploi, par son érudition et le commerce qu'il a avec tous les gens de lettres. La Gazette ne l'occupe pas ; assez, pour l'empêcher de s'y donner tout entier d'ailleurs il a du bien, et ne cherchera pas à faire son profit aux dépens du service. Vous connoissez la disposition où est M. de Reims à son égard; et je crois qu'il vous sera aisé de faire encore celui-là, qui en sera très reconnois

sant. Je suis, avec un attachement inviolable, absolument à vous.

L'abbé DE SAINT-LUC.

A Paris, ce 28 septembre 1684.

pendant je vous demande, avec un profond respect, vos prières et votre sainte bénédiction *. A Paris, ce 15 octobre 1684.

LETTRE VI.

DE M. L'ABBÉ fleury.

Sur la mort de M. de Cordemoy.

Eh bien! monseigneur, il a plu à Dieu de frapper encore ce terrible coup, et de nous ôter M. Cordemoy. Il me semble que je ne vois plus que des morts, et à peine sais-je si je suis en vie moi-même : du moins sais-je bien que, si j'ai tant soit peu de raison, je ne dois pas me promettre un moment de vie. Quatre amis de cette force perdus en deux mois ! Mais il n'est point question de lamenter: il faut songer aux vivants, et avoir soin de la pauvre famille de notre ami. Il m'a passé par l'esprit que peut-être ne seroit-il pas impossible de conserver la charge ou la pension pour le fils, qui est à Lyon, et de l'engager à continuer l'Histoire *. Je crois qu'en un an ou deux, laborieux comme il est, avec un fort bon esprit, il auroit bien autant d'avance que le père pouvoit en avoir, vu la jeunesse, la fraîcheur et la mémoire, et qu'il n'auroit aucun autre soin. Un de ses jeunes frères l'y pourroit aider; et je crois que ces deux jeunes hommes se donnant tout entiers à cet ouvrage, ils y réussiroient plutôt que quelqu'un des savants que nous connoissons; ou plutôt, je n'en connois point que je pusse indiquer pour cet ouvrage. Je crois bien que cela sera difficile à obtenir; mais quand on n'obtiendroit qu'une partie de la pension, ce leur seroit toujours un grand secours. Peut-être cette affaire mériteroit bien que vous fissiez un tour à Fontainebleau; car elle aura besoin d'être puissamment sollicitée et vous savez mieux que moi que si ces sortes de graces ne s'obtiennent sur-le-champ, et par la compassion d'une mort récente, il n'y a rien à faire ensuite. Je sais bien, monseigneur, que je ne hasarde rien de vous dire toutes mes pensées. Il m'importe seulement de savoir votre résolution; afin que, si vous demeurez à Meaux, je me rende incessamment auprès de vous. Ce

L'Histoire de France: M. de Cordemoy avoit écrit celle des deux premières races, qui a été publiée après sa mort, en deux volumes in-folio. Louis XIV, comme le desiroient les amis du défunt, chargea sou fils de continuer cette histoire. Il avança beaucoup celle de la troisième race; mais son travail n'a pas été donné au public,

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Sur les changements que les luthériens ont faits dans la Confession d'Augsbourg, et ce qu'ils alléguoient pour s'en justifier.

Je réponds un peu tard à celle que Votre Grandeur m'a fait l'honneur de m'écrire, du 26 de mars; parcequ'elle m'a été rendue dans un temps que j'étois surchargé d'affaires plus qu'à l'ordinaire, et qu'ayant changé de maison, je n'ai pas pu si tôt transporter ma bibliothèque, qui est encore actuellement dans la dernière confusion. Cependant, je m'étois déterminé d'abord de satisfaire Votre Grandeur sur ce qu'elle desire de savoir touchant la diversité des éditions de la Confession d'Augsbourg.

C'est une matière qui a été bien battue et rebattue en Allemagne, et on en a fait des livres tout entiers, tant pour accuser cette diversité que pour la défendre. Celui qui l'a traitée avec le plus d'étendue est Laurentius Forerus, dans plusieurs traités qu'il a publiés en l'an 1628, 1629, 1630. Mais comme il a vu que ses raisons n'avoient pas tout le poids qu'elles devoient, à cause qu'étant parties de la plume d'un jésuite, les luthériens eurent moyen de les faire attribuer à la passion et à la haine mortelle qu'il y a entre eux et cet ordre, il les reproduisit quelques années après, revêtues d'un nom illustre, dans le Speculum veritatis Brandenburgica, du marquis Christian-Guillaume, imprimé en l'an 1633 : suivant en cela les traces de Pistorius, qui avoit traité la même matière sous le nom de Jacques, marquis de Baden, dans les motifs de sa conversion, publiés en 1591. M. le cardinal de Hesse la fit aussi éplucher par Thomas Henrici, dans un ouvrage intitulé Anatomia Augustana Confessionis. Et tout nouvellement, M. l'évêque de Neustadt a fait ramasser, dans un traité qui a pour titre, Augustana et

*Nous avrions placé ici une lettre du grand Condé à Bossuet, sur la mort de plusieurs des amis du prélat, si elle n'eût pas été donnée dans l'Hist. de Bossuet, tom. 11, pag. 346. (Edit. de Vers.)

Ulric Obrecht, savant distingué né à Strasbourg le 25 juillet 1645, avoit été élevé dans la religion protestante. Il fit abjuration entre les mains de Bossuet en 1684, et mourut le 6 août 1701. On trouve des détails intéressants sur sa vie et ses travaux dans l'Hist. de Bossuet, Pièces justific, du liv, vi, tom. II, pag. 433 et suiy. (Édit. de Fers.)

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Anti-Augustana Confessio, tout ce qui a été dit | tes : Que dans l'Église chrétienne il a toujours autrefois à ce sujet : et M. l'électeur de Saxe a été permis de changer les symboles et les confait répondre par un professeur de Leipsick ap-fessions de foi; que cela a été remarqué même pelé Valentinus Alberti. L'un et l'autre de ces deux ouvrages est écrit en allemand, aussi bien que la plupart de ceux qui les ont précédés.

A ce que je me souviens, on reproche aux luthériens principalement les changements qui paroissent dans l'édition qui a été faite de la Confession d'Augsbourg à Wirtemberg en l'an 1540, et la diversité qu'il y a entre cette édition et toutes celles qui lui sont antérieures, depuis celle de l'an 1530. En outre, on leur objecte que de plusieurs exemplaires allemands, même des plus authentiques, comme sont ceux qui sont dans la bibliothèque de l'empereur, et dans les archives de l'Empire à Mayence, il n'y en a pas deux qui se ressemblent, non plus que l'édition allemande de l'an 1580, et celle de 1628, dont ils font le plus de cas; et que les exemplaires latins en diffèrent encore davantage. Le nombre des passages où l'on leur montre cette discrépance est presque infini, de plus grande et de moindre importance.

Les luthériens, dans leurs réponses, commencent par rejeter entièrement l'édition de Wirtemberg de l'an 1540. Ils disent qu'elle est un effet de la foiblesse de Melanchton, qui s'est voulu accorder par-là avec les Suisses; qu'elle n'a jamais été reçue parmi eux; qu'au contraire l'auteur en a été repris sévèrement au nom de l'électeur de Saxe, par son chancelier nommé Pontanus, et qu'il a été obligé de l'abandonner entièrement aux colloques de Worms et de Ratisbonne.

Quant aux autres éditions, ils disent qu'il y en a qui ont été corrompues par les imprimeurs; et qu'ils ne reconnoissent que celles qui ont été données par autorité publique, comme sont celles de l'an 1626, in Pupillu A. C., et celle de 1580, in Formula Concordiæ. Ils avouent que le texte latin n'est pas tout-à-fait conforme à l'allemand quant aux paroles; mais qu'il retient pourtant le même sens que la Confession a été traduite de l'allemand en latin, et l'Apologie du latin en allemand: que dans l'une et dans l'autre il faut examiner la traduction sur l'original, et non pas combattre l'original par la traduction : que, dans les exemplaires qui se trouvent dans les bibliothèques et dans les archives, il y a des variétés, mais qui la plupart n'importent rien, et n'altèrent pas le sens que s'il y a des changements, des additions, des omissions, c'est pour donner non pas une doctrine nouvelle, mais plus nette et plus claire.

A ces faits ils ajoutent les réflexions suivan

dans le Symbole des apôtres, dans celui de saint Athanase; et principalement dans celui de Constantinople, où l'Église latine a cru avoir la liberté d'ajouter le Filioque, qui n'étoit pas dans le grec que l'Église romaine leur peut d'autant moins reprocher leurs additions et changements, qu'elle-même s'est servie d'une grande liberté à changer, par exemple, l'édition Vulgate, selon l'aveu de Clément VIII dans sa préface, le canon de la messe, la profession de foi, où ils soutiennent que la foi du concile de Trente est altérée par des additions, comme, par exemple, de jurer l'obéissance au Pape; et par des changements, comme doit être celui de l'article de l'invocation des saints, que la profession veut faire passer pour nécessaire, quoique le concile ne l'ait proposée que comme utile : que la doctrine du concile de Constance a été changée par celui de Latran, touchant l'autorité des papes sur les conciles : qu'il ne sert de rien de dire que leur Confession a été changée dans les diverses éditions, attendu qu'ils ont toujours publié hautement qu'ils se tiendront inséparablement à l'exemplaire qu'ils ont présenté à Charles V, et qu'ils n'ont jamais refusé de laisser juger leur doctrine selon cet exemplaire-là, sans se prévaloir d'aucun des changements qu'on leur oppose.

J'espère que M. Le Correur aura fait son devoir : il y a déja du temps que je l'en ai averti. Il demeure dans la rue Montmartre, vis-à-vis de la Jussienne, chez M. le commissaire Fleury.

J'ai reçu les excellents ouvrages que Votre Grandeur m'a envoyés par le coche, et j'ai rendu les exemplaires où ils étoient destinés. En mon particulier je lui en ai une obligation infinie, et ne souhaite rien au monde si passionnément que d'avoir l'occasion de témoigner réellement avec combien de vénération et de respect je suis, etc.

A Strasbourg, ce 1er mai 1686.

LETTRE VIII. DU MÊME.

OBRECHT.

Sur les principes des protestants touchant la polygamie, et l'usage qu'ils en avoient fait à l'égard du landgrave de Hesse.

Je réponds un peu tard à la lettre que Votre Grandeur m'a fait l'honneur de m'écrire, du 6 du

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