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latins de l'Amérique, qui avait en définitive pour but d'écarter toute colonisation du Nouveau Monde par les puissances des autres continents, spécialement par les puissances de l'Europe, a été finalement acceptée par ces dernières (n°* 3133, 322 et s., 489).

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557. Les modes dérivés d'acquisition du domaine international, qui sont, en même temps que des modes de transmission, des modes d'aliénation, sont la succession par testament ou ab intestat et les conventions sous forme d'échange, de vente, de cession à titre gratuit, la prescription et la conquête. Les uns sont universellement admis, d'autres sont contestés; quelques-uns ont perdu aujourd'hui l'importance qu'ils avaient jadis. L'accession, on l'a vu (n° 533), peut aussi, en certains cas, cesser d'être un mode originaire pour devenir un mode dérivé. Les modes dérivés

se divisent en modes directs, c'est-à-dire constituant réellement et ouvertement des transmissions de souveraineté, et en modes indirects ou déguisés, c'est-à-dire cachant de véritables cessions sous l'apparence de certains contrats laissant au cédant la souveraineté. On distingue aussi parmi les modes dérivés des modes volontaires et des modes involontaires ou forcés, suivant que la transmission des territoires n'est pas imposée ou est imposée à celui qui la fait.

557'.

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La succession est un mode qui a contribué à la formation des grands Etats européens il a produit quelquefois des démembrements. Dans les derniers siècles, son application a été plus restreinte qu'autrefois.

Elle n'est plus possible pour les peuples qui admettent le principe que la souveraineté réside dans la nation.

On peut citer, dans l'ancien droit, de nombreux cas d'acquisition et d'aliénation du domaine international par voie de succession. En 1397, Etienne, comte de Montbéliard, attribua par testament son comté à sa fille. Philippe le Hardi acquit le Languedoc par héritage. Le roi René céda par testament l'Anjou à Louis XI ; c'est également par succession que ce dernier entra en possession du Maine et de la Provence. Louis XII légua par testament à sa fille Milan et Gênes. A une époque plus récente, le roi des Belges Léopold II, par un testament du 2 août 1889, déclara << léguer et transmettre après sa mort à la Belgique tous ses droits souverains sur l'Etat indépendant du Congo », et, par

un nouveau testament du 3 juin 1906, précisa « dans l'intérêt du but national qu'il poursuivait » ses volontés exprimées en 1889 (1)..

II.

CONVENTIONS

557'. 1o Echange. L'échange intervient assez fréquem- ment, lors des délimitations de frontières il ne présente, dans ce cas, qu'un très mince intérêt (en dehors des considérations d'ordre militaire), ne s'appliquant qu'à des parcelles assez restreintes. Mais il peut porter parfois sur des territoires assez considérables il est alors le plus souvent l'un des éléments ou l'un des facteurs d'un traité de paix. Le 8 décembre 1862, la Suisse a abandonné à la France la vallée des Dappes contre un territoire d'une contenance équivalente le long des pentes du Noirmont. Le 7 mai 1875, le Japon a cédé à la Russie l'île de Karafauto (Sagalin) contre l'archipel de Tchissima (Vouriles). --Aux termes des articles 45 et 46 du traité de Berlin du 13 juillet 1878, la Roumanie (qui n'était pas partie contractante) a dû rétrocéder à l'empereur de Russie la portion du territoire de la Bessarabie, détachée de la Russie par le traité de Paris de 185, et recevoir en échange les îles du Delta du Danube et l'île des Serpents, le sandjak de Toultcha et un territoire situé au sud de la Dobrutscha. Le 1" juillet 1890, l'île d'Héligoland a été transmise par la Grande-Bretagne à l'Allemagne en échange d'un territoire dans l'Afrique orientale. Par une convention du 4 novembre 1911 l'Allemagne et la France ont procédé à des échanges territoriaux dans leurs possessions de l'Afrique équatoriale. Dans les instructions du 19 octobre 1920 et du 14 mai 1921, annexées aux conventions sur la délimitation des frontières entre la Lettonie et l'Esthonie et entre la Lettonie et la Lithuanie par un arbitre, il est dit que « les cessions territoriales résultant des modifications de la frontière s'effectueront en raison du principe de compensation » et que, « dans le cas d'impossibilité d'arriver à un accord, reste la frontière établie par l'arbitre ». 5573. 2o Vente. Les cessions, au moyen d'une vente, de territoires, de provinces ou districts, de villes ont été assez fréquentes dans l'histoire. En 1311, le margrave de Brandebourg vend, pour dix mille marks d'or, trois villes à l'Ordre Teutonique. Le pape Clément VI achète la ville d'Avignon à Jeanne, reine de Naples, pour le prix de quatre vingts mille florins. En 1803, Napoléon Bonaparte, premier consul, vend la Louisiane Etats-Unis, pour la somme de soixante millions de francs.

(1) V. Nys, Le droit international, 2e édit. t. II, pp. 11 et s. more, Commentaries upon international law, t. I, §§ 274 et s.

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Le

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ne.

prince de Monaco cède à la France, en 1861, pour le prix de quatre millions de francs, les territoires de Menton et de Roquebru L'Amérique russe est cédée aux Etats-Unis en 1867, an prix de sept millions deux cent mille dollars. En 1872, l'Angleterre achète aux Pays-Bas leurs colonies sur la côte de Guinée. La Suède rétrocède à la France l'île de Saint-Barthélemy, k 10 août 1877, au prix de 320.000 francs. L'Espagne vend à l'Allemagne, par traité du 12 février 1899, moyennant une somme de 25 millions de pesetas, les îles Carolines, les îles Palaos et les îles Mariannes, à l'exception de Guam (1). En 1867-1868, les EtatsUnis voulurent acheter les Antilles danoises pour sept millions cinq cent mille dollars; en 1898 et en 1902 de nouvelles tentatives furent faites pour l'achat de ces Antilles mais elles ne réussirent pas mieux que celle de 1867-1868; c'est seulement en 1916 que des Etats-Unis aboutirent au résultat désiré : par un traité du 4 août 1916, le Danemark a vendu pour 25 millions de dollars or aux Etats-Unis les îles de Saint-Thomas, Saint-Jean et SainteCroix, ainsi que les îles et rochers adjacents (2).

Les conditions de validité et de régularité des ventes ou cessions à titre onéreux sont déterminées par le droit public et constitutionnel de chacun des Etats contractants.

557*. 3° Cession gratuite.

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La cession gratuite d'un territoire ou d'une province est le plus souvent imposée par un vainqueur à son adversaire vaincu, comme condition de la paix à rétablir entre eux. Cela a été notamment le cas de la cession de la Lombardie à Napoléon III (1859), de l'Alsace et de la Lorraine à l'Allemagne (1871), d'une partie de la Turquie d'Asie, Ardaham, Batoum, etc., à la Russie (13 juillet 1878), de Cuba, de Porto-Rico, des îles Philippines, de l'île de Guam, par l'Espagne aux Etats-Unis (traitė de paix du 10 décembre 1898) (3), de la partie méridionale de l'île de Sakhaline par la Russie au Japon (traité de paix du 5 septembre 1905). Les cessions de territoires opérées par les traités de Londres du 30 mai 1913, de Bucarest du 10 août 1913, de Constantinople du 29 septembre 1913, d'Athènes du 14 novembre 1913, de Stamboul du 14 mars 1914, qui mirent fin aux guerres balkaniques, rentrent aussi dans cette catégorie. On doit également signaler les pertes de territoires imposées aux Empires centraux par les traités de paix de 1919 et de 1920 qui terminèrent la guerre mondiale de 1914. C'est ainsi que, dans le traité de Versailles du 28 juin 1919, on trouve des dispositions par lesquelles l'Allemagne a déclaré renoncer à tous ses droits et tires sur

(1) V. R. D. I. P., t. VI, pp. 302 et s.
(2) V. R. D. I. P., t. XXIV, p. 454.
(3) V. R. D. I. P., t. VI, pp. 603 et s.

certains territoires, ce qui équivaut à leur cession, en faveur de la Belgique (art. 33), de la Tchéco-Slovaquie (art.83), de la Pologne (art. 87), des principales puissances alliées et associées pour la constitution de la Ville libre de Dantzig (art. 100 et 102) ou en vue d'une remise au Danemark (art. 110) et en ce qui concerne ses possessions d'outre-mer (art. 119); par l'article 51, les territoires cédés à l'Allemagne en vertu des traités de 1871 (Alsace et Lorraine) ont été « réintégrés dans la souveraineté française à dater de l'armistice du 11 novembre 1918 ».

Mais la cession gratuite peut être aussi absolument volontaire de la part des deux Etats contractants. L'histoire offre de très nombreux exemples de cessions volontaires de provinces, districts, villes : Cession du Dauphiné par Humbert II à Philippe VI de Valois, le 23 avril 1349. — Pays-Bas espagnols cédés par Philippe V à Maximilien de Bavière, le 27 janvier 1712. La Louisiane cédée par la France à l'Espagne en 1764, rétrocédée à la France par traité du 1° octobre 1800 confirmé le 21 mars 1801.- En 1795, le duché de Courlande s'unit volontairement à la Russie et, en 1798, la Ville libre de Mulhouse à la France. L'Espagne cède la Floride aux Etats-Unis par le traité de Washington du 22 février 1819. La Lombardie, cédée dans les préliminaires de Villafranca par l'empereur d'Autriche, rétrocédée par Napoléon III à Victor-Emmanuel, roi de Piémont, dans le traité de Zurich du 10 novembre 1859. La Vénétie, transmise à Napoléon III par le traité de Vienne du 24 août 1866, est rétrocédée au roi d'Italie le 3 octobre 1866. Par traité du 20 juin 1903, la Suède cède au Mecklembourg-Schwerin et par suite à l'Allemagne les territoires de Wismar, Poël, et Neu-Kloster (1). Le 28 novembre 1907, un traité conclu entre la Belgique et l'Etat indépendant du Congo transfère cet Etat à la Belgique.

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Même lorsqu'elle n'est pas la conséquence d'une guerre, la cession gratuite n'est pas toujours entièrement volontaire de la part de l'Etat cédant. Celui-ci peut se trouver forcé d'abandonner le territoire dont il est souverain à la suite d'une campagne diplomatique plus ou moins menaçante, longue et tenace de l'Etat cessionnaire. C'est ainsi qu'en 1897, par traité du 16 juin, les îles Hawaï ou Sandwich devinrent partie intégrante des Etats-Unis (2), et qu'en 1910, par traité du 22 août, la Corée passa sous la pleine souveraineté du Japon (3).

Les cessions volontaires de territoires, opérées par les souverains

(1) V. Waultrin, Une cession à bail. La dernière enclave suédoise en Allemagne, R. D. I. P., t. XII, p. 10.

(2) V. R. D. I. P., t. VI, p. 323.
(3) V. R. D. I. P., t. XVII, p. 522.

des Etats, étaient conformes au droit public de l'ancien régime. « Le souverain avait le domaine éminent du sol; l'habitant était le sujet du souverain et le souverain avait légalement le pouvoir de disposer librement de la terre et de l'habitant » (1). A cette époque, les conventions matrimoniales et les donations des souverains furent spécialement une manière fréquente d'acquérir et d'aliéner des territoires : ainsi furent réunis à la couronne de France le Dauphiné, par donation, sous Philippe de Valois et, par mariage, la Champagne sous Philippe le Bel, la Bretagne sous François L, le Béarn, le Comté de Foix et une partie de la Gascogne sous Henri IV. Mais le droit public moderne s'est modifié sous l'influence des principes proclamés par la Révolution française de 1789. Il est aujourd'hui reconnu que la nation forme l'élément essentiel de l'Etat et qu'en elle réside le fondement de la souveraineté. Si donc les cessions volontaires de territoires rentrent dans le droit des Etats, ceux-ci doivent dans l'exercice de ce droit tenir compte des traditions historiques de la nation, du caractère et des tendances des habitants. Ne doivent-ils pas, en outre, obtenir l'assentiment des habitants et ne faut-il pas demander au suffrage populaire de ratifier les accords ? (V. infra, no 561 et s.).

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557. En droit privé, entre particuliers, la possession de la chose d'autrui pendant un certain laps de temps, généralement fixé à trente années, entraîne acquisition de la propriété de cefte chose, à condition qu'elle soit continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque et exercée à titre de propriétaire (3). C'est ce qu'on appelle l'usucapion ou la prescription acquisitive. Le principe de la prescription doit-il s'appliquer, en droit international, dans les rapports des Etats, comme en droit privé, dans les relations des particuliers ? La question est controversée en doctrine. Un certain nombre d'auteurs la résolvent par la négative. De ce nombre sont Heffter-Geffcken, von Holtzendorff, Klüber, von Liszt, F. de Martens, G. F. de Martens, Mérignhac, ven Ullmann (4); quelques-uns d'entre eux, comme Klüber et

(1) Funck-Brentano et Sorel, op. cit., p. 156.

(2) V. spécialement Audinet, De la prescription acquisitive en droit international, R. D. I. P., t. III, p. 313. Ralston, Prescription, A. J., 1910. p. 133.

(3) Art. 2229 code civil français. V. Aubry et Rau, Cours de droit civil français, 4e édit.. §§ 216 et 217, t. II, pp. 369 et 371.

Von

(4) V. Heffter-Geffcken, op. cit., § 12. Von Holtzendorff, Handbuch des Völkerrechts, t. II, p. 255. Klüber, op. cit., §§ 6 et 12. Liszt, op. cit., p. 159. F. de Martens, op. cit., t. I, p. 460. G. F. de

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