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tume de donner un nom à tout navire a une origine immémoriale. Mais les législations modernes seules ont attaché de l'importance à ce que chaque navire porte, à sa poupe, d'une manière apparente et nettement visible, le nom qui lui est attribué (Allemagne, loi du 28 juin 1873, § 2. — Angleterre, Merchant Shipping act. France, loi du 6 mai 1841, art. 21 ; décret du 19 mars 1852, art. 6; règlement général du 7 novembre 1866, art. 171. Comp. circulaire du ministre la marine du 4 avril 1885). En France, le nom du navire ne peut être changé ; en Angle terre, l'autorisation du Board of Trade est nécessaire; aux EtatsUnis, un acte du Congrès. Le choix des intéressés n'est pas limité pour le nom à donner à des navires. Il n'existe point, sauf en Autriche (loi du 7 mai 1879), de dispositions qui défendent de donner à un navire le nom d'un autre navire. Des dispositions en ce sens seraient d'ailleurs peu pratiques, tout au moins pour des marines nombreuses. Le nom ne saurait donc suffire à lui seul pour caractériser un navire; il doit être complété par la détermination d'autres éléments.

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605. Après le nom, il faut indiquer comme élément de détermination le domicile. Tout navire doit avoir un port d'attache. Il est indiqué sur la poupe comme le nom lui-même. C'est le lieu où le navire a été inscrit sur le registre d'immatriculation. D'après quelques législations étrangères, la détermination du port d'attache sert à résoudre d'importantes questions de compétence (Code allemand, art. 455).

606. Le jaugeage est un autre élément constitutif de l'individualité du navire, de son état civil. En France, le propriétaire doit faire opérer le jaugeage par les agents de la douane et le nombre de tonneaux obtenu est gravé au ciseau sur des faces du maître bau, c'est-à-dire de la poutre transversale qui correspond à la plus grande largeur du bâtiment (art. 142 à 144 du Règlement général du 7 novembre 1866). Il y a diverses méthodes de jaugeage d'où des difficultés pour l'acquittement de certains droits dans les ports, car on perçoit les droits sur les navires d'après leur contenance : c'est ainsi que le procédé français donnait aux navires une capacité plus grande d'un sixième que le procédé anglais. On a fini pas suivre dans la plupart des pays une méthode unique. La méthode, dite Moorsom, a été adoptée par l'Allemagne, l'Angleterre, le Danemark, les Etats-Unis, la France, l'Italie, les Pays-Bas, la Norvège, etc. Il résulte de nombreuses déclarations que, quand un navire a été jaugé par cette méthode dans un pays, on ne doit pas recommencer à calculer sa contenance lorsqu'il arrive dans un autre pays (1).

(1) La question du jaugeage des navires a fait l'objet de certaines difficultés à propos de la perception des droits de transit sur les navires traver

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606'. Les aéronefs, comme les navires, doivent avoir une nationalité. La nationalité des aéronefs est d'une grande importance à divers égards. Sans parler de l'application des principes du droit international en cas de guerre, il faut en effet qu'au cours de ses voyages l'appareil aérien puisse, à l'étranger, en cas de contestation, réclamer le concours et la protection des agents nationaux et que, s'il commet quelque violation du droit des gens, on puisse savoir à quelle nation adresser des réclamations. I se peut, d'autre part, que des privilèges soient accordés à certains pavillons dans un Etat, le transport des personnes et des marchandises entre deux points du territoire peut être réservé aux seuls aéronefs indigènes. Il y a encore, au point de vue du droit civil, commercial et criminel, un grand intérêt à savoir si un aéronef est national ou étranger: il en sera ainsi toutes les fois qu'un conflit de lois doit trouver sa solution dans l'application de la loi du pavillon. Il faut, en outre, que les aéronefs n'aient qu'une seule nationalité. En cette matière, comme en toute autre. les doubles nationalités seraient la source de grandes difficultés. — L'attribution d'une nationalité déterminée présente dans le système de la convention du 13 octobre 1919 un intérêt primordial, puisque, en principe du moins, d'après son article 5, la navigation aérienne internationale y est réservée aux aéronefs ayant la nationalité de l'un des Etats contractants (n°* 531").

Sur les deux points qui précèdent, l'accord est en doctrine à peu près général. Quelques auteurs seulement, comme Meili et Pillet, ont soutenu qu'il fallait assimiler l'aéronef à une automobile et qu'il n'y avait pas lieu de lui reconnaître à proprement parler une nationalité (1). Blachère propose de distinguer entre les gros vaisseaux aériens affectés aux transports qui, comparables à des navires, doivent avoir une nationalité, et les aéronefs privés de luxe et de tourisme, qui, analogues aux automobiles, ne doivent pas recevoir de nationalité (2). La nécessité d'une nationalité, et d'une nationalité unique, pour les aéronefs a été proclamée par le congrès juridique international de Vérone en 1910, par les congrès du Comité juridique international de l'aviation de Paris en 1911 et de Prague en 1922, par l'Institut de droit internatio

sant le canal de Suez: une commission internationale fut convoquée à ce sujet à Constantinople à la fin de 1873 (V. Livre jaune français, Affaire du canal de Suez, novembre 1875). Comp. ci-dessus, n° 5127.

(1) V. observations de M. M. Meili et Pillet, Annuaire de l'Institut de droit international, t. XXIV, pp. 308 et 306.

(2) Blachère, L'air voie de communication et le droit, p. 143.

A la conférence de

nal dans sa session de Madrid en 1911. navigation aérienne de Paris de 1910, presque tous les Etats ont été d'avis qu'il fallait attribuer une nationalité propre aux aéronefs; seuls, la Suisse et les Pays-Bas, les assimilant à des automobiles, se sont prononcés en sens contraire. Le droit conventionnel qui régit actuellement la navigation aérienne est favorable à l'idée de nationalité. En effet, la convention internationale du 13 octobre 1919, dans son article 6, donne aux aéronefs une nationalité et, dans son article 8, ne leur permet de n'en avoir qu'une seule. Les accords bilatéraux que diverses nations ont signés depuis 1919 supposent tous que des aéronefs peuvent avoir une nationalité. C'est enfin les mêmes principes que consacrent les lois ou les projets de loi interne des Etats (V. notamment règlement espagnol du 25 novembre 1919, art. 1 et 2; arrêté belge du 27 novembre 1919, art. 1 et 6; arrêté suisse du 27 janvier 1920, art. 2 et 10; projet de loi français du 26 mars 1920, art. 1 et 3, devenu la loi du 31 mai 1924, art. 4, etc.).

S'il faut reconnaître une nationalité et une seule nationalité aux aéronefs privés, il en doit être de même pour les aéronefs publics. Ceux-ci doivent se rattacher nécessairement à un Etat, puisqu'ils servent à accomplir certaines de ses fonctions essentielles.

606*. 1° Eléments de la nationalité. Il est désirable qu'une entente intervienne entre les Etats pour la détermination de la nationalité des aéronefs. Car, à défaut de cette entente, il se pourrait qu'un navire aérien fût considéré comme national à la fois par les lois de deux pays différents. Mais sur quelles bases une semblable entente peut-elle s'établir? D'après quelles règles 'faut-il déterminer la nationalité d'un aéronef ?

En ce qui concerne les aéronefs publics, la solution ne peut donner lieu à discussion. Ils ont la nationalité de l'Etat dont ils dépendent.

La question est moins simple pour les aéronefs privés. Pour établir leur nationalité, il est en effet possible de s'attacher à des circonstances diverses. Et, en fait, de nombreux systèmes ont été proposés.

1° Un premier système, soutenu par M. Armengaud, prétend qu'il faut prendre en considération le lieu de construction de l'aéronef, qui est comme son lieu de naissance : l'origine de l'aéronef doit fixer sa nationalité (1). Il paraît difficile d'admettre que tous les aéronefs qui sont construits dans un pays et

(1) Armengaud, Revue juridique internationale de la locomotion aérienne, 1912, p. 114.

qui peuvent être vendus à toutes les nations du monde doivent garder la nationalité de leur pays d'origine en quelques mains qu'ils se trouvent. En fait, ce n'est pas par lui-même, mais par ceux qui en disposent, qu'un aéronef affirme sa personnalité.

2o D'après une autre opinion, qu'ont défendue MM. Blachère, Divald, Dor, Oppenheim, un aéronef doit recevoir la nationalité du pays où il a son port d'attache, c'est-à-dire où est située la station d'où il part et où il rentre habituellement lors de ses voyages (1). Les partisans de cette théorie font remarquer que le port d'attache est un fait aisé à reconnaître et qu'ainsi un Etat pourra tenir sous sa surveillance tous les aéronefs existant sur son territoire, puisque ceux-ci seront tous des aéronefs de sa nationalité. Mais à ce critérium aussi des objections peuvent être faites. Le port d'attache n'est facile à distinguer que pour les dirigeables qui demandent des installations considérables; les appareils d'aviation, au contraire, n'ont besoin que du plus simple des hangars ; ils pourront dans ces conditions en avoir beaucoup. Comment pour eux déterminera-t-on le port d'attache ? Celui-ci, d'ailleurs, est susceptible de varier au gré du maître de l'aéronef. La surveillance des aéronefs ne sera pas nécessairement plus facile avec ce système qu'avec tous les autres qu'on peut imaginer, car au-dessus d'un Etat il volera toujours de nombreux appareils qui n'auront pas leurs hangars sur son territoire. Une dernière objection, des plus graves, peut être enfin adressée à la théorie du port d'attache, aussi bien qu'à celle du lieu de construction. Avec elles, des étrangers auront dans un pays des aéronefs possédant la nationalité de ce pays, et que celui-ci devra protéger comme étant ses nationaux quoiqu'ils puissent être parfois utilisés contre ses intérêts par leur propriétaire n'est-il pas à craindre qu'au jour d'une mobilisation, des aéronefs ne s'envolent de leur port d'attache ou de leur pays d'origine pour aller servir l'Etat de leur maître ? Ces théories auront encore pour effet que des agents diplomatiques et consulaires seront obligés d'intervenir en faveur d'une personne étrangère à raison du fait qu'elle possède un avion battant pavillon de leur pays.

3o Troisième système il faut attribuer aux aéronefs la nationalité du pays où ils sont immatriculés. C'est le système qui, en 1911, fut approuvé avec certaines réserves par l'Institut de droit international (2). Il compte en doctrine d'assez nombreux parti

(1) Blachère, op. cit., p. 145. Divald, Revue de la locomotion aérienne, 1922, p. 501. Dor, Revue de la locomotion aérienne, 1912, p. 124. Oppenheim, Annuaire de l'Institut de droit international, t. XXIV, p. 307. (2) Annuaire de l'Institut, t. XXIV, p. 346.

sans : MM. Perowne (1), Edouard Rolin, Fiore, Weiss, Albéric Rolin, Politis s'en sont fait les interprètes. Son avantage est de faire dépendre la nationalité d'un fait qui apparaît à tous les yeux et qu'il n'est pas aussi facile de changer que le port d'attache. Il ne saurait cependant être accepté. Permettant à des. étrangers d'avoir dans un pays des aéronefs de sa nationalité, il se heurte aux mêmes objections que les systèmes précédents. I aboutit à deux conséquences particulièrement dangereuses pour la défense nationale: a) Des nationaux, par l'immatriculation de leurs aéronefs à l'étranger, pourront priver leur Etat du droit de requérir ces aéronefs et ainsi l'empêcher de renforcer sa flotte aérienne. b) Un pays étant désireux d'avoir des renseignements sur un autre pays, les nationaux du premier pourront, avec l'immatriculation de leurs aéronefs dans le second pays, espionner à l'aise ce pays sous son propre pavillon.

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4° On a encore soutenu que la nationalité d'un aéronef devait être déterminée par le pays dans lequel son propriétaire est domicilié. Ce critérium est celui qui fut présenté en 1912 par les membres allemands du Comité juridique international de l'aviation. Il paraît plus rationnel que ceux antérieurement indiqués ; car, en s'arrêtant non plus à la situation de l'aéronef mais à la situation de son propriétaire, il tient compte du fait que l'appareil aérien n'est dans la réalité qu'un instrument passif entre les mains de celui qui le dirige et dont le propriétaire répond. — Mais il est toujours susceptible des mêmes critiques que ces systèmes. Il en ressort en effet qu'un Etat donnera sa nationalité à tous les appareils existant sur son territoire, qu'ils appartiennent à ses nationaux ou à des étrangers, et qu'un Etat ne pourra faire porter sa marque par des aéronefs domiciliés dans un pays étranger quoiqu'ils appartiennent à ses nationaux. D'où cette double conséquence qu'un Etat devra protéger des aéronefs dont le propriétaire est étranger et peut-être lui est hostile et que, sans action sur les aéronefs de ses nationaux domiciliés à l'étranger, il ne pourra pas les rappeler si les circonstances l'exigent. Avec le système du domicile, la nationalité d'un appareil aérien sera au surplus essentiellement variable, car le propriétaire d'un aéronef peut à tout instant changer de domicile.

5° C'est encore à la situation du propriétaire qu'on se tient dans un cinquième système ; seulement, au lieu d'avoir égard au domicile de celui-ci, on s'attache à sa nationalité. Cette théorie a été proposée pour la première fois par M. Paul Fauchille en 1901, et acceptée par MM. Gemma, Henry-Coüannier, de Lapra

(1) Revue de la locomotion aérienne, 1912, p. 118.

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