Images de page
PDF
ePub

des principes les plus féconds de l'économie politique en mettant obstacle à ce que l'activité industrielle fût vivifiée par l'émulation et le mouvement commercial largement étendu par la concurrence.

ARTICLE V.

DROITS PERÇUS SUR LE COMMERCE DE BORDEAUX
PENDANT LES XVI ET XVII SIÈCLES (1).

Le tarif suivant est tiré d'un ancien état des droits perçus sur le commerce bordelais, en 1550, sous le règne d'Henri II. On y remarquera la modicité des droits et les avantages considérables dont les Anglais jouissaient sur notre place.

Droits d'entrée.

1° Sur toutes marchandises, droit de comptablie, savoir :

Régnicoles, 8 deniers tournois par livre.
Bourgeois, francs de droits.

Étrangers, 12 deniers tournois par livre.
Anglais, 6 deniers tournois par livre.

Les étrangers, sans distinction, payaient, en outre, 2 deniers par livre pour la petite coutume.

2° Sur toutes marchandises venant de Libourne, Blaye et Bourg: toutes personnes, 12 deniers tournois par livre;

3o Vins du haut pays entrant pour être vendus aux Chartrons toutes personnes, 14 deniers pour

(1) Delurbe, Anciens Statuts de Bordeaux.

livre; plus, 26 livres tournois par tonneau de droit

de traite;

4° Mêmes vins pour être exportés, toutes personnes, 2 deniers pour livre.

Droits de sortie.

1° Sur toutes marchandises, droits de comptablie :
Régnicoles, 6 deniers pour livre.
Bourgeois, francs de droits.

Étrangers, 12 deniers pour livre.

Anglais, 6 deniers pour livre.

2° Vins bordelais :

Régnicoles, 20 sous tournois par tonneau.
Bourgeois, francs pour leur crû.

Id.,

pour autre crû, 10 sous par tonneau.

Étrangers, 20 sous par tonneau.

Toutes personnes payaient, en outre, pour la sortie des mêmes vins, 12 deniers par tonneau, droit de petite coutume, et 10 sous 6 deniers par navire pour droits de Cordouan et de branche de cyprès.

3o Vins du haut pays : Toutes personnes, 20 sous par tonneau de droit de traite et grande coutume; plus, 10 sous 6 deniers par navire pour droit de Cordouan et branche de cyprès.

4o Sur toutes marchandises chargées à Libourne, Blaye et Bourg 12 deniers tournois pour livre de droit de comptablie.

5o Blés chargés pour l'exportation à Bordeaux, Libourne, Blaye et Bourg, droit de traite et grande coutume, savoir :

Froment, 20 sous tournois par tonneau.
Seigle, 13 sous 4 deniers par tonneau.
Autres grains, 10 sous 4 deniers.

Droits étrangers.

Avant 1669, les droits anglais sur les vins français étaient très-peu élevés. En 1693 seulement, ils furent portés à 8 livres sterling par tonneau, soit 200 fr. En 1697, le droit fut élevé à 4 schellings par gallon, ce qui fait environ 1,200 fr. par tonneau. Que serait devenue l'Europe si, au lieu d'entrer dans une carrière de jalousie et de ruines, les rois n'eussent songé qu'à rendre leurs peuples invincibles dans la lutte du commerce des arts et de l'industrie !

Avant de quitter ce premier tarif, remarquons que ce fut peu d'années après sa date que l'on vit naître en France les premiers actes de ce système prohibitif ou protectionniste qui fut la plus grande cause de retard dans les progrès de la fortune publique. M. Amé, dans son excellent ouvrage sur l'Étude économique des tarifs, cite, en effet, une ordonnance de 1572, qui combine la prohibition à l'entrée des toiles, des velours, des satins, des armes et des harnais anglais, avec la défense d'exporter les lins, laines, chanvres et filasses.

Pour se rendre un compte exact du tarif que nous venons de rappeler, nous allons donner quelques notions sur la valeur des monnaies qui existaient à cette époque :

Le franc bordelais valait 15 sous tournois.

La livre bordelaise, 12 sous tournois.
Le sou bordelais, 7 deniers tournois.

Le sterling d'or, 9 livres 13 sous 4 deniers.
Le sou sterling, 10 sous tournois.

Le denier sterling, 10 deniers tournois.

Le denier bordelais, la moitié d'un denier tournois.

La livre tournois valait à peu près 1 franc d'aujourd'hui.

Depuis les réformes de Colbert, en 1664, il y eut en France trois sortes de provinces, quant au mode de perception et au chiffre de l'impôt 1° Les provinces qui avaient consenti à l'établissement des droits nouveaux et que l'on appelait les cinq grosses fermes; 2° les provinces étrangères, c'est-à-dire celles qui avaient la faculté d'importer chez elles les marchandises étrangères, et d'exporter leurs propres productions sans être soumises aux droits de traite, mais qui, si elles voulaient commercer à l'intérieur, se trouvaient arrêtées par une armée d'employés qui repoussaient tous leurs produits, à moins qu'elles n'acquittassent les droits; 3° enfin, les provinces réputées étrangères, savoir celles qui s'étaient soumises à l'établissement de certains bureaux intérieurs. La Guyenne fut comprise dans cette dernière classe, et voici les droits établis à Bordeaux, pendant le XVIIe siècle et la plus grande partie du XVIIIe siècle, sauf quelques modifications de détail que nous signalerons à leur époque.

Droit de comptablie.

Le droit de comptablie dont nous venons de donner un ancien tarif, comprit, depuis cette époque, deux droits distincts jusque-là, savoir: la grande et la petite

coutume.

En 1041, Guillaume de Geoffroi, duc de Guyenne, pour rétablir le monastère de l'abbaye de SainteCroix, qui avait été pillé et brûlé par les Sarrasins, le dota du droit de petite coutume; les religieux en firent cession aux maire et jurats, au mois de janvier 1303.

Quant à la grande coutume, la ville de Bordeaux en avait toujours joui jusqu'à l'édit du mois d'août 1550, par lequel Henri II, en rendant tous ses biens et revenus à la ville, en excepta les droits de la grande et de la petite coutume, qui furent réunis à la couronne.

Les droits de comptablie étaient à l'entrée, 3, p. 100 pour les Français, et 62 p. 100 pour les étrangers sur toutes sortes de marchandises. A la sortie, les vins payaient une livre tournois de grande coutume, et un sou tournois de petite, par tonneau.

Droit de convoi.

Ce droit porte avec lui sa définition; il fut admis vers la fin du XVIe siècle pour l'armement des vaisseaux qui devaient convoyer les navires et maintenir la sûreté de la navigation dans les rivières et à l'embouchure de la Gironde. La Chronique bordelaise cite un arrêt de 1586, portant établissement d'un

« PrécédentContinuer »