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banque n'est qu'une caisse d'escompte; la concur– rence des capitaux ne peut qu'augmenter les avantages du commerce; plus l'escompte sera facile, plus les affaires devront se développer. La banque propose, il est vrai, l'émission exceptionnelle de billets au porteur. Qui peut nier le bien qui résultera de ce nouveau ressort de circulation? Si l'établissement prospère, il doublera les moyens conventionnels d'échange; si, comme vous le dites, l'opinion publique doit repousser ce papier, les conséquences de la banque n'auront aucun inconvénient pour le numéraire.

Le Gouvernement n'eut pas de peine à reconnaître le vrai au milieu de ces discussions; du reste, plusieurs établissements de ce genre prospéraient déjà sur quelques-unes de nos places. La banque de Bordeaux fut autorisée pour trente ans, par ordonnance du 23 novembre 1818, et ses statuts furent publiés le 8 décembre suivant.

L'article 11 portait :

« Les opérations de la banque consistent: 1° A escompter de toutes personnes des lettres de change et autres effets de commerce à ordre, à des échéances déterminées qui ne pourront excéder quatre mois sur Bordeaux et cent jours sur Paris, souscrits par des commerçants et autres personnes notoirement solvables; 2° à se charger pour le compte des particuliers et des établissements publics du recouvrement des effets qui lui seront remis; 3° à recevoir en comptes-courants les sommes qui lui seront versées par des particuliers et des établissements publics,

et à payer les sommes dont on aura disposé sur elle et les engagements à son domicile jusqu'à concurrence des sommes encaissées; 4° à tenir une caisse des dépôts volontaires pour tous les lingots et monnaies d'or et d'argent de toute espèce et de tout titre. >>

Aux termes de l'article 12, la banque n'admit à l'escompte que des effets de commerce garantis par la signature de trois personnes au moins, notoirement solvables.

L'article 14 établit que la banque pourra émettre des billets à vue et au porteur; que la moindre coupure de billets sera de 500 fr., avec réserve d'émettre des coupures de 250 fr. sous l'autorisation préalable de l'État; qu'enfin, l'émission des billets cumulée avec le montant des sommes dues par la banque dans les comptes-courants ne pourra jamais excéder le triple du capital numéraire existant et appartenant à la banque.

L'article 24 porte enfin que l'escompte sera perçu à raison du nombre de jours, et que cet escompte ne pourra excéder 5 p. 100, à moins d'une autorisation expresse du Gouvernement.

La banque de Bordeaux commença ses opérations le 1er juillet 1819, et pendant plus de onze ans, elle eut à lutter contre des obstacles et des oppositions de toute nature. Lorsque la crise de 1830 éclata, elle se trouvait dans une position défavorable, et si elle n'eût songé qu'à sauver son capital, elle eût restreint ses opérations et cherché à réaliser autant que

possible; mais en agissant ainsi, elle eût compromis l'existence d'un grand nombre de maisons. La banque n'hésita pas, au contraire, à courir les chances de tout perdre pour sauver la place d'une perturbation générale. Il faut lui rendre justice, dans toutes les crises commerciales qui ont eu lieu à Bordeaux depuis 1820, la banque de Bordeaux s'est fait un devoir d'en adoucir autant que possible les conséquences, en maintenant le taux modéré de son escompte et en facilitant de son mieux la marche des affaires.

En 1846, une délibération de la banque de France demanda que celles des départements fussent converties en succursales. Ce projet donna lieu aux discussions les plus vives; mais il favorisait l'esprit de centralisation qui régnait alors; il présentait aussi, il faut le reconnaître, plusieurs avantages financiers. La chambre législative le consacra par une loi du mois de mars 1848; et à l'expiration de son privilége, la banque de Bordeaux liquida son ancienne situation, et fut soumise au régime qui la gouverne aujourd'hui.

Pendant que la banque s'organisait à Bordeaux, la chambre de commerce s'occupait de régulariser la position de la place relativement à l'entrepôt réel. Aux termes de l'article 25 de la loi du 8 floréal an XI, les villes auxquelles l'entrepôt était accordé ne pouvaient en jouir qu'à la charge de fournir sur le port des magasins convenables, sûrs et réunis en un seul corps de bâtiment, pour y établir le dit entrepôt, à l'effet de quoi le plan du local devait être

soumis au Gouvernement, qui, après l'avoir fait examiner, l'adopterait par un arrêté spécial.

Cependant, depuis plus de quinze ans, cette disposition légale était restée sans exécution à Bordeaux les magasins particuliers, servant à l'entrepôt réel, étaient divisés et séparés du centre des affaires; les déchets sur certaines marchandises y étaient considérables; d'autres marchandises ne pouvaient même pas s'y conserver; les risques d'incendie étaient immenses; on ne trouvait pas à les faire couvrir, ou bien on ne le pouvait qu'à des prix ruineux. Les frais de toute sorte nombreux et considérables, contribuaient à éloigner les affaires de notre place. Le commerce avait demandé plusieurs fois l'extension de l'entrepôt fictif, en signalant les inconvénients du système d'entrepôt réel, mais ces réclamations n'avaient amené que de bien faibles concessions, et le Gouvernement, dominé par les besoins du trésor, n'en était pas moins demeuré ferme sur les principes qui forment la base de l'entrepôt réel.

Dans cette position, c'était un devoir pour la chambre de commerce de Bordeaux de chercher à procurer à l'entrepôt réel, auquel on était contraint de se soumettre, les seules améliorations que l'état des choses permettait, en donnant au commerce un local conforme aux prescriptions de la loi, ayant l'avantage d'être plus central, mieux approprié à la conservation des diverses natures de marchandises: où les assurances contre l'incendie fussent faciles et les frais de toute sorte moins onéreux.

Le nouvel entrepôt fut donc construit sur un emplacement très-convenable, faisant face au port, au centre des quartiers du grand commerce.

Afin qu'on puisse se former une idée de l'économie de frais que le nouvel entrepôt a procuré au commerce, il nous suffit de comparer, pour quelquesuns des principaux articles, ce qu'on payait avant la construction des magasins et ce qu'on paie actuelle

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Si l'on applique ces différences à l'ensemble du mouvement d'une place de commerce comme Bordeaux, on peut juger de l'importance économique qui a dû en résulter depuis plus de quarante ans.

Ce fut à l'époque que nous décrivons qu'eut lieu sur notre fleuve la première application des bâtiments à vapeur : le bateau la Garonne, de cinquante chevaux, fut lancé, le 3 août 1818, pour faire le service entre Bordeaux et Pauillac. En peu d'années, le nombre de ces bateaux, destinés à la navigation

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