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le premier pas dans la création de ces services à vapeur, que l'Angleterre a organisés sur une vaste échelle, et qui, jusqu'à présent, étaient dans notre pays demeurés à l'état de projet.

» Vous savez, Messieurs, que dans un mois environ, le premier des bâtiments à vapeur qui inaugurera cette voie nouvelle quittera notre port pour

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se rendre à Rio-Janeiro. Le jour du départ de la Guyenne méritera d'être inscrit dans les fastes de Bordeaux. Ce service deviendra, nous n'en doutons point, et nous le désirons ardemment, le commencement d'une ère nouvelle pour les relations de la France avec de riches contrées vers lesquelles va se diriger un courant d'affaires qu'alimentera la réforme des tarifs douaniers. Depuis une dizaine d'années, et grâce à la création des lignes à vapeur, les échanges entre l'Angleterre et le Brésil ont acquis un développement des plus considérables; il ne saurait en être autrement en France, et, ne l'oublions pas, c'est le pays tout entier qui recueillera les résultats heureux qu'amènera le nouveau service ayant son point d'attache dans notre port. Nous remplirons un devoir et nous ferons un acte de justice en signalant le zèle intelligent et l'activité que les administrateurs des messageries ont apportés dans la création de la ligne dont nous verrons l'inauguration dans un mois. Aux termes du cahier des charges, ils pouvaient ne l'ouvrir qu'au mois de février 1862; ils devanceront considérablement cette époque, et notre cité leur doit, sous ce rapport, une sincère reconnaissance. »

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ARTICLE II.

DES DOCKS.

Les docks sont de création anglaise; ce sont des bassins bordés de magasins et destinés à recevoir les navires et les marchandises.

Le système des docks, appliqué depuis longtemps en Angleterre et en Hollande, y a fortement contribué au développement de la prospérité commerciale.

Il est facile de comprendre l'économie des docks: Les docks jouissent du privilége d'entrepôt.

Possédés et administrés en général par des compagnies, ces établissements se chargent de faire, pour le compte des négociants, toutes les opérations de douane et toutes les mains-d'oeuvre commerciales.

Les marchandises une fois dans les magasins des docks, inventoriées et classées par ordre de nature de produits, la compagnie remet au négociant un ou plusieurs récépissés, à l'aide desquels il peut opérer la vente. Si le propriétaire des marchandises le désire, la compagnie lui délivre également des billets ou warrants transmissibles par endossement et représentant en général de 60 à 70 p. 100 de la valeur des marchandises reçues dans le dock.

Il faut reconnaître qu'une telle organisation a pour résultat incontestable de faciliter les opérations du commerce, de diminuer les frais, de centraliser le marché, de mobiliser constamment le capital de la place et de doter le port d'un immense développe

ment de magasins et de quais parfaitement appropriés aux besoins du commerce et à la rapidité de son action.

Toutefois, l'établissement des docks a rencontré en France des obstacles sérieux. Depuis peu d'années seulement, ceux de Paris, de Marseille et du Havre commencent à produire des résultats assez remarquables; leur création dans le port de Bordeaux a éprouvé jusqu'ici la résistance la plus vive.

Plusieurs projets ont été cependant présentés depuis 1840, pour l'établissement des docks à Bordeaux. Le plan généralement adopté et indiqué par la chambre de commerce elle-même consistait à construire le bassin des docks dans le vaste emplacement compris entre la fabrique Johnston, le Magasin des vivres et le chemin de la Barde. Ce bassin, divisé en plusieurs compartiments par des écluses, serait facilement entretenu et présenterait une profondeur plus que suffisante pour les navires du plus fort tonnage. Le système des récépissés et des warrants y serait établi de la manière la plus favorable et combiné avec les habitudes commerciales de la place.

Ce sont là certainement des propositions bien séduisantes pour le présent et surtout pour l'avenir. Les adversaires des docks à Bordeaux ont publié dans plusieurs écrits les motifs de leur opposition.

Selon eux, la rade de Bordeaux n'a pas besoin de docks, puisqu'elle possède un port capable de recevoir plus de navires que son commerce ne peut en employer; que ses quais sont vastes, commodes,

parfaitement organisés pour le chargement et le déchargement des marchandises; qu'enfin, tous les quartiers commerçants contiennent un nombre immense de magasins en grande partie inoccupés.

Construire des docks à Bordeaux serait donc détruire la beauté naturelle du port et ruiner une partie des propriétés urbaines.

Le système des warrants, convenable à l'organisation commerciale des Anglais, n'aurait chez nous ni avantage ni succès; c'est ce qu'ont démontré les expériences déjà faites.

On peut d'ailleurs obtenir l'avantage des warrants en créant des magasins généraux, ayant le privilége d'entrepôt, et cela sans creuser un bassin inutile, sans faire des dépenses immenses en pure perte, sans abandonner le port magnifique que la nature nous a donné.

Les partisans des docks sont loin d'avoir laissé ces arguments sans réponse.

La chambre de commerce, d'abord hésitante, a consciencieusement étudié la question; en 1855, elle déclarait, dans une lettre adressée à M. le Préfet, qu'elle regardait les docks comme des établissements fort utiles aux grands ports commerciaux, et qu'il était certain que dans un délai plus ou moins long, ils deviendraient indispensables à Bordeaux.

Tout nouvellement, M. Basse, président de la chambre, répondant aux questions du congrès scientifique, a fait connaître son opinion avec la plus grande netteté.

Il est démontré pour lui que les docks produisent une économie notable dans les frais, économie profitable à l'expéditeur comme au destinataire, et rejaillissant avantageusement sur le fabricant et le consommateur. Ces établissements, dit-il, opérant la réunion en un seul lieu des marchandises d'un même marché, les commerçants trouveront toujours avantageux d'opérer sur les places où la facilité du choix dans un même local répondra largement aux goûts et aux besoins de toutes les classes d'acheteurs. D'un autre côté, le développement toujours croissant du commerce maritime de Bordeaux appelle nécessairement la création des docks avec les avantages qui leur sont inhérents.

Tel est l'état actuel de la question, et tout nous fait espérer qu'elle recevra avant peu dans notre port une solution conforme aux véritables intérêts du commerce.

Outre ces questions, notre chambre de commerce ne cessa d'étudier toutes celles qui intéressaient la place de Bordeaux, notamment le remorquage des navires, les bassins de carénage, les passes du fleuve, le transport dans nos colonies des coolies indiens, le bureau Veritas, etc.

Revenons maintenant aux réformes successives des tarifs douaniers.

La demande de convertir en législation définitive les décrets réformateurs du pouvoir exécutif ne fut pas accueillie par le corps législatif avec une grande faveur; le rapporteur blâma le Gouvernement de ses

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