Images de page
PDF
ePub

α

«

« choses. Comme il avait souvent éprouvé la bonne et la mauvaise fortune, il ne croyait rien au-dessus de ses espérances et de son audace, et mesurait ses desseins bien plus à << la grandeur de son courage qu'au mauvais << état de ses affaires, bien résolu, si son entreprise ne réussissait point, de faire une fin digne d'un grand roi, et de s'ensevelir lui« même sous les ruines de son empire plutôt << que de vivre dans l'obscurité et dans la bas

[ocr errors]
[ocr errors]

<< sesse. >>

J'ai choisi Monime entre les femmes que Mithridate a aimées. Il paraît que c'est celle de toutes qui a été la plus vertueuse et qu'il a aimée le plus tendrement. Plutarque semble avoir pris plaisir à décrire le malheur et les sentimens de cette princesse. C'est lui qui m'a donné l'idée de Monime; et c'est en partie sur la peinture qu'il en a faite que j'ai fondé un caractère que je puis dire qui n'a point déplu. Le lecteur trouvera bon que je rapporte ses paroles telles qu'Amyot les a traduites; car elles ont une grâce dans le vieux style de ce traducteur que je ne crois point pouvoir égaler dans notre langue moderne.

[ocr errors][merged small][merged small]

Cette-ci étoit fort renommée entre les

Grecs, pour ce que, quelques sollicitations que lui fit faire le roi en étant amoureux, jamais ne voulut entendre à toutes ses poursuites jusqu'à ce qu'il y eût accord de mariage passé entre eux, et qu'il lui eût envoyé

[ocr errors]

«

[ocr errors]

«

[ocr errors]

«

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

le diadème ou bandeau royal, et appelé royne. La pauvre dame, depuis que ce roi l'eut épousée, avoit vécu en grande déplai<< sance, ne faisant continuellement autre chose que de plorer la malheureuse beauté de son corps laquelle, au lieu d'un mari, lui avait donné un maître; et, au lieu de compagnie « conjugale, et que doit avoir une dame d'honneur, lui avoit baillé une garde et garnison d'hommes barbares qui la tenoit « comme prisonnière loin du doux pays de la Grèce, en lieu où elle n'avait qu'un songe << et une ombre de biens; et, au contraire, avoit réellement perdu les véritables, dont elle jouissoit aux pays de sa naissance. Et quand l'eunuque fut arrivé devers elle, et lui eut fait commandement de par le roi qu'elle eût à mourir, adonc elle s'arracha d'alentour de la tête son bandeau royal, et « se le nouant à l'entour du col, s'en pendit. Mais le bandeau ne fut pas assez fort, et se << rompit incontinent. Et lors elle se prit à dire : O maudit et malheureux tissu, ne me serviras-tu point au moins à ce triste service? En disant «< ces paroles, elle le jeta contre terre, crachant dessus, et tendit la gorge à l'eu" nuque. »

«

«

[ocr errors]

«

«

«

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

Xipharès était fils de Mithridate et d'une de ses femmes qui se nommait Stratonice. Elle livra aux Romains une place de grande importance, où étaient les trésors de Mithri

date, pour mettre son fils Xipharès dans les bonnes grâces de Pompée. Il y a des historiens qui prétendent que Mithridate fit mourir ce jeune prince pour se venger de la perfidie de sa mère.

Je ne dis rien de Pharnace car qui ne sait pas que ce fut lui qui souleva contre Mithridate ce qui lui restait de troupes, et qui força ce prince à se vouloir empoisonner, et à se passer son épée au travers du corps pour ne pas tomber entre les mains de ses ennemis. C'est ce même Pharnace qui fut vaincu depuis par Jules César, et qui fut tué ensuite dans une autre bataille.

PERSONNAGES.

MITHRIDATE, roi de Pont et de quantité

d'autres royaumes.

MONIME, accordée avec Mithridate, et déjà déclarée reine.

PHARNACE, fils de Mithridate, mais de XIPHARES. différentes mères.

[ocr errors]

ARBATE, confident de Mithridate, et gou-
verneur de la place de Nymphée.
PHOEDIME, confidente de Monime.
ARCAS, domestique de Mithridate.
GARDES.

(La scène est à Nymphée, port de mer sur le Bosphore Cimmérien, dans la Taurique Chersonnèse.)

TRAGÉDIE.

ACTE PREMIER.

SCÈNE PREMIÈRE.

XIPHARÈS, ARBATE.

XIPHARES.

On nous faisait, Arbate, un fidèle rapport.
Rome, en effet, triomphe, et Mithridate est mort.
Les Romains, vers l'Euphrate, ont attaqué mon père,
Et trompé, dans la nuit, sa prudence ordinaire.
Après un long combat, tout son camp dispersé,
Dans la foule des morts, en fuyant, l'a laissé;
Et j'ai su qu'un soldat, dans les mains de Pompée,
Avec son diadème a remis son épée.

Ainsi, ce roi, qui seul a, durant quarante ans,
Lassé tout ce que Rome eut de chefs importans,
Et qui, dans l'Orient balançant la fortune,
Vengeait de tous les rois la querelle commune,
Meurt, et laisse après lui, pour venger son trépas,
Deux fils infortunés qui ne s'accordent pas.

« PrécédentContinuer »