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BODLEIAN

25 MAR 1930

LIBRARY

ET

L'ANTIQUITÉ

DEUXIÈME PARTIE

SHAKESPEARE ET LES TRAGIQUES GRECS

INTRODUCTION

Que la tragédie de Shakespeare est le développement naturel et régulier de la tragédie grecque. Définition des termes classique et romantique. La tragédie néo-classique; caractère artificiel du genre, beauté extraordinaire des œuvres.

Dans cette seconde série d'études sur Shakespeare et l'Antiquité, qui n'a de commun avec la première que le titre, je me propose de comparer Shakespeare et les tragiques grecs.

Les différences de la tragédie de Shakespeare avec celle des Grecs, quelque profondes qu'elles soient devenues, ne sont nullement des oppositions radicales de nature et d'origine; elles ne sont que le fruit lent et régulier d'un simple développement historique. Le théâtre moderne tout entier, romantique aussi bien que néo-classique, a ses racines dans le théâtre grec1. A

1. Certaines formes déterminées, qui tenaient au culte poétique de Bacchus, ont péri; mais notre tragédie classique, et tout le drame moderne, malgré tant d'innovations et de différences, relèvent de l'ancienne tragédie grecque. » - J. Girard, le Sentiment religieux en Grèce.

«Le drame grec posa la première et glorieuse assise de ce qui devait être, quand l'histoire aurait assez marché, le drame romantique. »> Littré, Littérature ét histoire.

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partir du moment où Eschyle détacha du choeur lyrique un second personnage et fonda ainsi la tragédie, celle-ci se développa si rapidement qu'en moins d'un siècle elle avait déjà parcouru les phases principales de son évolution. C'est là un fait extrêmement remarquable, dont la critique n'a peut-être pas senti ou fait ressortir assez l'importance. Si Shakespeare, comparé à Sophocle, semble n'offrir encore avec ce poète qu'un contraste presque absolu sur tous les points, il diffère déjà beaucoup moins d'Euripide, et je ne sais en vérité si, d'Eschyle à Euripide, la distance n'est pas au moins aussi considérable que d'Euripide à Shakespeare. Euripide s'écarte sensiblement du type de la tragédie classique, tel que l'avaient conçu ses deux grands devanciers; il est vraiment, avec les poètes de la comédie nouvelle, le fondateur du drame romantique en pleine Grèce et en pleine antiquité. Avec lui et avec Ménandre, le drame commence à devenir ce qu'il est dans Shakespeare: une image de la vie humaine; non plus une représentation religieuse d'actions héroïques et idéales, mais une peinture de la réalité. Aristophane, conservateur étroit des vieilles traditions, ennemi de toute sorte de nouveauté, combattait la révolution littéraire d'Euripide aussi passionnément que la révolution morale de Socrate, et il faisait un crime au poëte d'introduire sur la scène la vie commune et les habitudes vulgaires. Plus tard Ménandre, héritier direct d'Euripide, admit le pathétique dans ses comédies. Térence et Plaute traduisirent ou imitèrent Ménandre et firent connaître au monde, longtemps avant Shakespeare, des pièces de théâtre où le comique et le tragique étaient mêlés. Ce caractère du drame moderne n'est pas le seul qu'on retrouve dans l'antiquité; il y en a d'autres et de plus importants, que la suite de ces études mettra en lumière; mais ce qui précède suffit pour montrer entre les anciens tragiques grecs et le grand poète anglais une filiation manifeste. L'avenir était contenu en germe dans le passé, et avant que les cent premières années de l'existence de la tragédie fussent révolues, on entrevoyait déjà tout ce qu'elle deviendrait plus tard.

C'est, si je ne m'abuse, cette évolution historique, et c'est elle seulement, qui autorise et qui justifie une étude comparative

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