Fit porter secrétement 20,000 liv.. a l'Hôtel-Dieu de Clermont. Ses vues pacifiques ne se manifestèrent jamais mieux que pendant son épiscopat. Il se faisoit un plaisir de rassembler des Oratoriens et des Jésuites à sa maison de campagne, et de les faire jouer ensemble. Le cardinal de Fleuri, qui craignoit que les Jansenistes ne pussent se glorifier d'un si illustre défenseur, le ménageoit; et Massillon, sans aimer beaucoup ce ministre avoit pour lui les mêmes ménagemens. Il disoit quelquefois en plaisantant sur cette politique timide et réciproque: M. le Car dinal et moi nous nous craignons mutuellement et nous sommes ravis tous deux d'avoir rencontré un poltron. Il poussa cette poltronnerie, dont il convenoit si naïvement, jusqu'à n'oser confier son séminaire aux Oratoriens ses anciens confrères parce que le cardinal demanda la préférence pour d'autres. On prétend que Massillon crut avoir à se repentir de cette foiblesse : J'ai, dit-il, ouvert la porte à l'ignorance pour avoir la paix; j'aurois du penser que dans les prêtres l'ignorance est bien plus à craindre que les lumières. Son diocèse le perdit en 1742. Il mourut le 28 septembre, âgé de 79 ans. Son nom est devenu celui de l'éloquence même. Personne n'a plus touché que lui. Préférant le sentiment à tout il remplit l'ame de cette émotion vive et salutaire qui nous fait aimer la vertu. Quel pathétique! Quelle connoissance du cœur humain ! Quel épanchement continuel d'une ame pénétrée ! Quel ton de vérité, de philosophie, d'humanité! Quelle imagination, à la fois vive et sage! Pensées justes et délicates; idées brillantes et magnifiques; expressions élégantes, choisies, sublimes harmonieuses " ; images éclatantes et naturelles; coloris vrai et frappant; style clair net, plein, nombreux, également propre à être entendu par la multitude et à satisfaire l'homme d'esprit, l'académicien et le courtisan tel est le caractère de l'éloquence de Massillon, sur-tout dans son Petit-Carême. Il sait à la fois penser, peindre et sentir. On a dit de lui, et on l'a dit avec raison, qu'il étoit à Bourdaloue, ce que Racine étoit à Corneille. Pour mettre le dernier trait à son éloge, il est, de tous les orateurs François, celui dont les étrangers font le plus de cas, quoiqu'ils lui reprochent, avec M. Marmontel, d'avoir manqué quelquefois d'énergie et de profondeur. Le neveu de cet homme célèbre nous a donné une bonne édition des ŒUVRES de son oncle, à Paris, en 1745 et 1746, en 14 vol. grand in-12, et 12 tomes petit format. On y trouve I. Un Avent et un Carême complets. C'est surtout dans les sermons de morale, tels que sont presque tous ceux de son Avent et de son Carême, qu'il faut chercher le véritable génie de Massillon. Il excelle dit M. d'Alembert, dans la partie de l'orateur, qui seule peut tenir lieu de toutes les autres, dans cette éloquence qui va droit à l'ame, mais qui l'agite sans la déchirer. Il va chercher au fond du cœur ces replis cachés où les passions s'enveloppent; et il les développe avec une onction si affectueuse et si tendre, qu'il subjugue moins qu'il n'entraine. Sa diction, toujours facile, élégante et pure, est par-tout de cette simplicité noble sans laquelle il n'y a ni bon goût ni véritable éloquence: simplicité qui, étant réunie dans Massillon, à l'harmonie la plus séduisante et la plus douce, en emprunte encore des graces nouvelles. Ce qui met le comble au charme que fait éprouver ce style enchanteur, c'est qu'on sent que tant de beautés ont coulé de source, et n'ont rien coûté à celui qui les a produites. Il lui échappe même quelquefois, soit dans les expressions, soit dans les tours, soit dans la mélodie si touchante de son style, des négligences qu'on peut appeler heureuses, parce qu'elles achè vent de faire disparoître l'empreinte du travail. C'est par cet abandon de lui-même , que Massillon se faisoit autant d'amis que d'auditeurs. Il savoit, que plus un orateur paroît occupé d'enlever l'admiration moins ceux qui l'écoutent sont disposés à la lui accorder. II. Plusieurs Oraisons funèbres, des Discours, des Panégyriques, qui n'avoient jamais vu le jour. III. Dix Discours connus sous le nom de Petit-Carême. IV. Les Conférences Ecclésiastiques, qu'il fit dans le Séminaire de Saint-Magloire en arrivant à Paris; celles qu'il a faites à ses curés pendant le cours de son épiscopat; et les Discours qu'il prononçoit à la tête des Synodes qu'il assembloit tous les ans. Dans la conférence sur l'usage des revenus ecclésias– Liques, Massillon semble prédire au clergé ce qui lui est arrivé. Après s'être élevé contre le fantôme de la vanité, du nom et de la naissance, contre le faste qui avilissoit un état saint, il dit que les mondains se plaignent que les clercs tout seuls vivent de dans l'opulence, tandis que tous les autres états souffrent. L'hérésie, en usurpant, les siècles passés, les biens consacrés à l'église, n'allégua point d'autres prétextes. L'usage profane que la plupart des ministres faisoient des richesses du sanctuaire, l'autorisa à l'arracher de l'autel; et que sais-je si le même abus, qui règne parmi nous, n'attirera pas un jour à nos successeurs la même peine. V. Des Paraphrases; touchantes sur plusieurs Pseaumes. L'illustre auteur de tant de beaux morceaux, auroit souhaité qu'on eût introduit en France l'usage établi en Angleterre, de lire les Sermons au lieu de les prêcher de mémoire : usage commode, mais qui fait perdre à l'éloquence toute sa chaleur. Il lui étoit arrivé, aussi bien qu'à deux autres de ses confrères, rester court en chaire précisé ment le même jour. Ils prê→ choient tous les trois en différentes heures un Vendredi-Saint. Ils voulurent s'aller entendre alternativement. La mémoire manqua au premier; la crainte saisit les deux autres, et leur fit éprou ver le même sort. Quand on demandoit à notre illustre orateur quel étoit son meilleur Sermon? Celui que je sais le mieux, répondoit-il. On attribue la même réponse au P. Bourdalouc. Le célèbre Père de la Rue pensoit comme Massillon, que la coutume d'apprendre par cœur étoit un esclavage, qui enlevoit à la chaire bien des orateurs, et qui avoit bien des inconvéniens pour ceux qui s'y consacroient. (Voy. son article.) L'abbé de la Porle a recueilli, en un vol. in-12, les idées les plus brillantes et les traits les plus saillans répandus. dans les ouvrages du célèbre évêque de Clermont. Ce recueil, fait avec choix, a paru à Paris en 1748, in-12, et forme le 15° volume de l'édition grand in-12, et le 13 du petit in-12; il est intitulé Pensées sur différens sujets de morale et de piété, tirées, etc. On a publié, en 1792, in-8°, ses Mémoires de la minorité de Louis XV, intéressans par beaucoup de faits particuliers, et par des détails sur l'intérieur de la cour. Ils prouvent que Massillon étoit très-instruit en matière de gouvernement, et qu'il avoit jeté un coup d'œil attentif et juste sur les événemens dont il fut témoin, et sur les acteurs qui occupoient alors la grande scène du monde. Le style en est facile et simple, quelquefois même négligé; mais la clarté du récit et la netteté des développemens marquent une main exercée écrire. MASSINGER, (Philippe ) poëte Anglois, fut élevé à Oxford, et quitta ensuite l'université de cette ville, pour aller à Londres, où il se livra tout entier à la poésie. Ses Tragédies et ses Comédies furent applaudies. It les composoit conjointement avec les plus célèbres poëtes Anglois de son temps, etc. Ses Œuvres ont été recueillies, 1779, 4 volum. in-8.0 L'auteur mourut à Southwark en 1640. MASSINISSA, Voyez MASI comme des chefs-d'œuvre. Son burin est ferme et gracieux. On prétend qu'il s'étoit fait une manière de graver toute particulière, et qu'au lieu de faire agir sa main sur la planche, (comme c'est l'ordinaire) pour conduire le burin selon la forme du trait que l'on y veut exprimer, il tenoit au contraire sa main droite fixe, et avec la main gauche il faisoit agir la planche, suivant le sens que la taille exigeoit. Plusieurs de nos graveurs modernes suivent cette manière. Cet habile artiste, membre de l'académie royale de Peinture mourut à Paris en 1702, âgé de 66 ans. II. MASSON, (Innocent le) Chartreux, né à Noyon en 1628 fut élu général en 1675, et fit rebâtir la grande Chartreuse, qui avoit été presque entièrement réduite en cendres. Il s'acquit un nom par sa vertu et par ses livres de piété. Son meilleur ouvrage est sa nouvelle Collection des Statuts des Chartreux, avec des notes savantes, Paris, 1703, in-folio, très-rare. Il y a cinq parties. La cinquième, contenant les Priviléges de l'ordre, manque quelquefois. Il avoit donné, en 1683, l'Explication de quelques endroits des Statuts de l'Ordre des Chartreux, petit in-4°, qui doit avoir 166 pages. Ceux qui finissent à la page 122, ne sont pas complets. C'est une réponse à ce que l'abbé de Rancé avoit dit des Chartreux dans ses Devoirs de la vie monastique. Cet auteur mourut le 8 mai 1703, à 76 ans, après avoir été pen-. dant toute sa vie ennemi déclaré des disciples de Jansénius, qui no l'ont pas épargné dans leurs écrits. C'étoit, selon eux, un mauvais théologien et un faux mystique; mais ils l'ont jugé trop sévèrement. III. MASSON, (Antoine) religieux Minime, mort à Vindans un âge avancé, se fit un nom dans son ordre par sa piété, par son savoir et par ses ouvrages. Les principaux sont: I. Questions curieuses, historiques et morales sur la Genèse, in-12. II. L'Histoire de No et du Déluge universel, 1687, in-12. III. L'Histoire du Patriarche ABRAHAM, 1688, in-12. IV. Un Traité des marques de la Prédestination, et quelques autres Ecrits de piété, nourris de passages de l'EcritureSainte et des Pères. cennes en 1700, IV. MASSON,.(Jean) ministre Réformé, mort en Hollande vers 1750, étoit originaire de France, et s'étoit retiré en Angleterre, pour y professer en liberté sa religion. Les lettres lui doivent plusieurs ouvrages. Les principaux sont; I. Histoire critique de la République des Lettres, depuis 1712 jusqu'en 1716, en 16 vol. in-12. L'érudition est profonde, mais maussade. Masson écrivoit en pédant; l'auteur du Mathanasius l'a eu en vue dans plusieurs de ses remarques. On pouvoit lui appliquer ces vers du chevalier de Cailly: Dieu me garde d'être savant y II. Les Vies d'Horace, d'Ovide et de Pline le Jeune, en latin, 3 vol. in-8. Elles sont assez estimées, et l'on y trouve des recherches qui peuvent servir à éclaircir les ouvrages de ces auteurs. Dacier, attaqué par Mas son, se défendit d'une manière victorieuse. Sa défense est à la tête de la 2e édition de sa Traduction des Euvres d'Horace, III. Histoire de Pierre Bayle et de ses Ouvrages, Amsterdam, 1716, in-12. Elle lui est du moins communément attribuée à présent, quoiqu'on l'eût donnée d'abord à la Monnoye.... Voyez xIII Martin, n.o iv de ses ouvrages, V. MASSON DES GRANGES (Daniel le) prêtre, né en 1700, mort en 1760, à 60 ans, avoit autant d'esprit que de piété. Les particularités de sa vie sont ignorées; mais on connoît beaucoup son excellent ouvrage intitulé: Le Philosophe moderne, ou l'Incrédule condamné au tribunal de sa raison, 1759, in-12; réimprimé en 1765, avec des additions considérables. Les vérités que l'auteur traite, sont rebattues; mais il les présente danş un nouveau jour, et, en dépouillant les preuves de la Religion.de ce qu'elles ont de trop abstrait, il les met à la portée de tout le monde. Son style est ingénieux, mais un peu affecté. VI. MASSON ( Antoine ) graveur, né à Thoury près d'Orléans, en 1636, mort en 1700, à 64 ans, ne doit pas être confondu avec Benoit MASSON, sculpteur habile, né à Richelieu, et mort en 1684, dont les statues se voient à Versailles. Antoine excelloit dans les portraits. VII. MASSON DE MORVILLIERS (N.) poëte médiocre, mais écrivain correct, a publié divers ouvrages relatifs à la géographie, et plusieurs pièces de vers dans les recueils qui leur étoient consacrés. On lui doit: 1. Abrégé de la Géographie de la France, 1774, 2 volum. in-12. II. Autre sur la Géographie de l'Italie, 1774, in-12. III. Autre sur la Géographie de l'Espagne et du Portugal, 1776, in-12. IV. Divers articles sur la Géographie moderne insérés dans l'Encyclopédie méthodique. Masson est mort à Paris dans le mois de septembre 1789. MASSON, (Papire) Voyez PAPIRE-MASSON. MASSON, Voyez MAÇON et PEZAI. MASSOULIÉ, (Antonin) né à Toulouse en 1632, se fit Dominicain en 1647; il fut prieur dans la maison du noviciat à Paris, puis provincial de la province de Toulouse, enfin assistant du général de son ordre, en 1686. Ce modeste religieux refusa un évêché, qui lui fut offert par le grand duc de Toscane. Il mourut à Rome, le 22 janvier 1706, à 74 ans, honoré des regrets et de l'estime des savans de son ordre. Son principal ouvrage est un livre en 2 vol. infolio, intitulé: Divus THOMAS sut interpres. Son but principal est de prouver que les sentimens de l'école des Dominicains, sur la Prémotion physique, la Grace et la Prédestination, sont véritablement les sentimens de St. Thomas, et non pas des inventions de Bannez, comme quel ques adversaires des Thomistes l'ont prétendu. On voit par cet ouvrage, qué l'auteur avoit beaucoup lu, et qu'il s'étoit attaché sur-tout à St. Paul, à St. Augustin, à St. Bernard et à St. Thomas. Il réfuta aussi les Quié tistes dans deux Ecrits, publiés i-12, 1699 et 1703. MASSUET, (Dom Réné) Bénédictin de la congrégation de Saint-Maur, né à Saint-Quen de Mancelles, au diocèse d'Evreux, en 1665, donna au public: I. Une édition de St. Irenée, imprimée chez Coignard, à Paris, in-fol. 1710, plus ample et plus correcte que les précédentes, et enrichie de Préfaces, de Dissertations et de Notes. Ses Dissertations répandent un nouveau jour sur des matières qui peut-être n'avoient jamais été bien éclaircies. II. Le cinquième volume des Annales de l'Ordre de Saint-Benott. III. Une Lettre d'un Ecclésiastique au R. P. E. L. J. (Révérend Père Etienne Langlois, Jésuite) dans laquelle il répond à une brochure contre l'édition de St. Augustin, donnée par ses confrères. IV. Une seconde édition du St. Bernard, de D. Mabillon. Dom Massuet mourut le 19 janvier 1716, à 50 ans. Son érudition, son application au travail, sa piété et les qualités de son cœur, méritèrent les éloges et les pleurs de sa congrégation. C'étoit un homme d'un vrai mérite, plein de probité et de politesse. MASTELLETA, (JeanAndré Donducci, dit) peintre, né à Bologne en 1577, entra d'abord dans l'école des Carache, et étudia quelque temps les ouvrages du Parmesan; mais on ne peut point dire qu'il ait travaillé dans le goût de ces grands maitres. Il se fit une manière séduisante, sans vouloir consulter la nature. Il employoit le noir plus qu'aucune autre couleur, et cette affectation dépare ses ouvrages. Ce peintre, né avec un naturel mélancolique, affoiblit son esprit par ia |