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nom propre; le nom de Christ est un nom commun et de mystère. Le nom de Christ est un nom de grâce, mais le nom de Jésus est un nom de gloire. Ainsi, de même qu'après avoir reçu la grâce du baptême du Christ, nous sommes appelés chrétiens, ainsi, parvenus à la patrie céleste de Jésus, nous serons nommés Jésuites, c'est-à-dire sauvés par le Sauveur. Ainsi, il y a une aussi grande différence entre le nom de Christ et celui de Jésus, qu'entre la grâce et la gloire. Moralement, selon le Vénérable Bède1, comme le Christ, dans sa circoncision corporelle, reçoit le nom de Jésus, ainsi les élus, dans leur circoncision spirituelle, participent de ce nom; et comme les fidèles sont appelés chrétiens du nom du Christ, les saints seront appelés sauvés du nom du Sauveur. Et ce nom leur est prédestiné de toute éternité dans les desseins du Créateur, bien avant ⚫ leur entrée dans le sein de l'Église.

Le nom de Jésus est au-dessus de tout nom, et il n'y a point sous le ciel d'autre nom qui soit donné aux hommes, par lequel il nous faille être sauvés 2. Selon saint Bernard 3, ce nom est un miel dans la bouche, une mélodie dans les oreilles, une joie dans le cœur. Ce nom prêché resplendit comme un phare; médité, il nourrit ; invoqué, il adoucit et fortifie. Ce nom, dit Pierre de Ravenne, a rendu la vue aux aveugles, l'ouïe aux sourds, la parole aux muets, la vie aux morts; il a fait marcher les boiteux; la vertu de ce nom a chassé le démon des corps qu'il tourmentait. Jésus est un nom doux, dit saint Anselme *, un nom délec

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table, un nom qui fortifie le pécheur, un nom d'une bienheureuse espérance. O Jésus, sois donc pour moi Jésus! Le nom de Jésus a une admirable vertu, selon cette parole de l'Apôtre 1: Vous êtes lavés, sanctifiés et justifiés au nom de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Le nom de Jésus a la vertu de laver la tache du péché; il a la vertu de sanctifier, en effaçant la coulpe, et la vertu de justifier en pardonnant la peine due au péché. Or, comme dans tout péché il y a trois choses, la tache, la coulpe et la peine due au péché, ces trois choses sont remises, détruites par le nom de Jésus. C'est pourquoi saint Jean dit2 : Vos péchés vous sont remis à cause de son nom. A ce nom, fléchit tout genou dans le ciel, sur la terre et dans les enfers. Quiconque invoquera ce nom sera sauvé. C'est en parlant de son nom que le Seigneur dit lui-même : Tout ce que vous demanderez à mon Père en mon nom, il vous l'accordera3. Nous devons donc nous servir de ce nom dans toutes nos prières, adresser toutes nos suppliques au nom du Christ, et c'est pourquoi l'Église finit toutes ses oraisons par cette formule ou quelque autre semblable: Par le Christ, NotreSeigneur.... Celui-là ne demande pas au nom de Jésus, qui demande une chose contraire à la volonté divine, à son salut ou à celui du prochain; il est même évident qu'il demande contre ce saint nom. Jésus est donc appelé proprement et véritablement Jésus (Sauveur), parce que nous ne pouvons obtenir le salut qu'en son nom; c'est pourquoi il dit de lui: Je suis l'alpha et l'oméga, le principe et la fin *.

II, Corinth. 6.

2 I, Jean, 2.
3 Saint Jean, 14,

4 Sanit Jean, 8,

Ainsi, de même que toutes choses ont été faites par le Verbe éternel, toutes choses sont réparées, élevées et finies par le Verbe uni à la chair.

Et voici le second mystère accompli en ce jour : Jésus a commencé à répandre son sang sacré pour nous, puisque sa chair a été coupée avec le couteau de la circoncision. Jésus-Christ commença de bonne heure à souffrir pour nous, et celui qui n'a jamais commis le péché commence aujourd'hui à porter la peine due au péché. Ce n'est pas seulement dans l'âge viril, mais dès son enfance, que le Seigneur a voulu répandre son sang pour nous. L'enfant Jésus pleura donc aujourd'hui ; il pleura à cause de la douleur qu'il ressentit en sa chair, car il eut une véritable chair, une chair passible comme les autres hommes. Mais, en le voyant pleurer, pensez-vous que sa Mère put retenir ses larmes? Elle pleura donc elle-même. Compatissons à leur douleur, et pleurons avec Celui qui a pleuré amèrement aujourd'hui. Nous devons nous réjouir dans ces solennités à cause de notre salut que le Seigneur avait toujours en vue; mais nous devons aussi nous attrister et compatir aux angoisses qu'il a endurées pour nous. Excitons-nous encore à supporter pour nos propres péchés les épreuves qui sont dans l'ordre de la Providence, lorsque nous voyons notre Sauveur tant souffrir pour les péchés des autres. C'est la pensée de saint Bernard : Qui ne rougirait, dit-il, d'éviter pour ses propres fautes le moindre châtiment, quand il sait que le Christ a souffert, non pour ses propres fautes, mais pour les fautes d'autrui, de si horribles tortures?

Il faut remarquer que Jésus a répandu, six fois différentes, son sang pour nous. Premièrement, dans sa

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circoncision, et ce fut là le commencement de notre Rédemption; secondement, dans son agonie, où il montra le désir extrême qu'il avait de notre salut; troisièmement, dans la flagellation, et quatrièmement, lorsqu'il fut couronné d'épines : là fut le mérite de notre rédemption, car il était écrit que nous serions guéris par la douleur de ses plaies; cinquièmement, dans le crucifiement, et là fut le prix de notre rédemption, car Jésus payait une dette qu'il n'avait pas contractée; sixièmement enfin, lorsqu'on lui ouvrit le côté, et là fut le signe et le sacrement de notre rédemption. Nous devons, en effet, être purifiés par l'eau du baptême, lequel tire son efficacité du sang du Christ. Six leçons ressortent pour nous de ces six circonstances : nous devons être circoncis spirituellement et bannir le péché de nos âmes; nous devons souffrir pour opérer notre salut; nous devons dompter notre chair; nous devons orner notre âme de toutes les vertus; nos membres doivent être les esclaves des commandements du Seigneur pour les accomplir; enfin nous devons avoir le cœur blessé de l'amour de Dieu

Vous voyez combien de fois le Christ a répandu son sang pour notre rédemption. Où sont maintenant vos larmes, vos gémissements, vos actions de grâces pour une si grande effusion de sang? Venez, adorons, prosternonsnous devant lui, pleurons devant le Seigneur qui nous a faits1 et qui nous a rachetés si généreusement, car, comme le dit saint Bernard, bien qu'une seule goutte de ce sang trèsprécieux eût suffi pour racheter tout l'univers, le Christ a voulu le répandre en abondance, pour nous démontrer son

1 Psaume 94.

amour et exciter notre reconnaissance; chez lui le rachat est abondant 1.

Comme nous l'avons dit, l'institution de la circoncision remonte à Abraham. Il fut le premier qui confessa sa foi en un seul Dieu, et il reçut la circoncision, qui fut désormais le signe qui distingua les fidèles des infidèles. Abraham crut, avant la circoncision, qu'il aurait un fils, selon la promesse du Seigneur, et, en signe de sa foi, il reçut la circoncision, afin qu'il comprît que sa foi l'avait justifié. La circoncision fut donc d'abord donnée à Abraham pour récompenser sa foi, et afin que ce patriarche, qui différait des autres nations par sa foi, en différât aussi par le signe de la circoncision; afin encore que le peuple qui devait naître de sa race fût reconnu pour le peuple de Dieu, par le signe particulier de la circoncision, distingué de toutes les autres nations, et considéré comme le légitime descendant de celui qui avait reçu la circoncision pour récompense de sa foi. Si quelque circoncis était tué dans une bataille, on le distinguait facilement des gentils, on savait qu'il descendait d'une race sainte, et on lui donnait la sépulture. Dans le désert, où les descendants d'Abraham vivaient sans être mêlés aux gentils, la circoncision n'était pas pratiquée.

La circoncision fut encore donnée comme remède du péché originel et pour réprimer la concupiscence de la chair. Elle était une préparation à la grâce de la foi, car la circoncision était une certaine profession de la loi de Moïse que l'on voulait observer, comme le baptême est la profession de la loi évangélique; or, la circoncision était

1 Psaume 129.

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