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même ne fait mention du ciel; aucune prophétie n'a trait à la gloire du royaume des cieux. Puis il continue: Que dirai-je encore? Consultez les hommes choisis de Dieu. au milieu de l'humanité tout entière, depuis le commencement du monde jusqu'à Jean, vous ne trouvez chez eux aucune parole, aucun acte qui révèle les douceurs du royaume céleste. Arrivez donc à Jean, et écoutez cette parole qui fait tressaillir de joie, qui nous annonce la miséricorde et la gloire, l'abondance de la grâce; cette parole que Dieu avait cachée, que l'ange n'avait pas publiée, que les patriarches et les prophètes avaient ignorée faites pénitence car le royaume de Dieu est proche. Douce et belle parole donnant à la fois la loi de la pénitence, et annonçant le royaume des cieux; il convenait qu'elle tombât pour la première fois de la bouche de celui qui a jeté les fondements du nouveau Testament. Le même auteur ajoute: Depuis Adam jusqu'à Jean, notre voix s'est convertie en larmes; parce qu'il y avait abondance de péché, sans pénitence, il y avait double matière à gémissement. Jean paraît, et il nous fait connaître le remède à la blessure, la pénitence pour le péché et le pardon pour l'iniquité. Telle est la première parole qu'il prononça, lorsqu'il criait dans le désert : et la voix de la tourterelle s'est fait entendre dans notre pays; elle nous a enseigné un nouvel hymne en l'honneur de Dieu, l'hymne de l'action de grâces et de la louange. La miséricorde éclate, le pécheur est pardonné, la piété règne, la justice ne veut pas réclamer ses droits, et le Seigneur.miséricordieux cherche l'occasion de pardonner au lieu de frapper.

Pour nous montrer l'aptitude de Jean, à rendre témoi

gnage de Jésus-Christ, l'évangéliste fait l'histoire de sa vie vraiment sainte. Il commence par l'austérité de son

costume.

Jean portait un cilice où une tunique faite de poil de chameau, ce qui nous enseigne que, pour réprimer les révoltes de la chair, nous devons porter des vêtements grossiers. Jean, dit saint Jérôme, avait un vêtement fait non pas de laine, mais de poil; celui-ci est le signe d'une vie austère, celui-là d'une vie molle et efféminée. Les serviteurs de Dieu, dit saint Chrysostôme, portent un vêtement, non pas pour flatter les yeux, ou pour ménager leur chair, mais pour couvrir leur nudité.

De l'austérité du costume de Jean, l'Évangéliste passe à sa continence. Il avait une ceinture de peau, c'est-à-dire une courroie faite avec des peaux sèches et dures d'animaux, autour des reins, qui sont le siége de la luxure, pour mortifier sa chair et la dompter; car il la crucifia avec ses vices et ses convoitises, ce qui est le propre de tous ceux qui appartiennent à Jésus-Christ. C'était la coutume chez les Juifs, dit saint Jean Chrysostôme, de se servir de ceintures de laine; c'est pourquoi Jean voulant donner un exemple d'austérité, se ceignait d'une ceinture de peau. Mais, quelle est la signification allégorique de la tunique et de la ceinture de Jean? Saint Chrysostôme nous l'apprend 1: Jean était vêtu, c'est-à-dire la Loi que Jean personnifiait, d'une tunique de poils de chameau. Il ne pouvait pas en avoir une de laine d'agneau, duquel il est écrit: Voici l'Agneau de Dieu qui efface les péchés du monde. Il avait une ceinture de peau autour des reins, parce que les

Saint Chrysostôme: Hom. 10, in Matth.

Juifs ne regardent comme péché que ce qui est péché extérieur. Notre Seigneur Jésus-Christ que l'Apocalypse de saint Jean nous fait voir entre les sept candélabres, avait une ceinture d'or, non pas autour des reins, mais sur la poitrine. La Loi est ceinte aux reins, mais Jésus-Christ, c'est-à-dire l'Évangile, ne regarde pas seulement à l'extérieur, mais sonde les pensées de l'âme. L'Évangile ne permet pas même la pensée; la Loi ne reconnaissait de culpabilité que dans l'acte extérieur.

L'évangéliste passe enfin à l'abstinence et au régime sobre et frugal de Jean. Il se nourrissait de locustes, c'està-dire de certaines herbes et de miel sauvage. Telle était la nourriture des pauvres dans ce pays. Le mot locuste a plusieurs significations, d'après un vers très connu :

Radices, herbas, et aves, sic esse locustas.

Les racines, les herbes les oiseaux, voilà ce qu'on entend par locustes ou sauterelles. Ce sont de petits animaux qui volent en sautant; on les trouve dans le désert de Judée; les pauvres les font frire dans l'huile pour leur nourriture. Mais il n'est pas à croire 'que Jean ait mangé des locustes, dans ce sens, lui qui ne mangeait pas même de pain; ni qu'il ait mangé des choses frites, lui qui ne mangeait rien de cuit. Les autres sens du mot locustæ sont donc plus probables; ainsi encore aujourd'hui, dans ces contrées, il y a un herbe qu'on appelle langusta, c'est-àdire locusta; et on dit que c'est celle dont se nourrissait le bienheureux Jean-Baptiste.

Quant au miel sauvage d'abeilles on le trouve dans les troncs des arbres; ou bien, selon Raban-Maur, ce sont des

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feuilles d'arbres blanches et tendres, qui, broyées dans les mains, ont un goût comme celui du miel. On trouve encore dans ces pays du miel de calamelle; les calamelles sont des roseaux pleins de miel, c'est-à-dire d'un suc très-doux. On les appelle aussi cannamelles, du mot canna, canne, et mellis miel.

Par ce que nous venons de voir de sa vie dans le désert, Jean nous prouve clairement, qu'il considère comme rien ce monde et toutes ses douceurs, puisqu'il se revêt d'un vêtement si grossier, et se donne une nourriture peu abondante et sans apprêt. Il ne prenait que ce qui était absolument nécessaire à sa subsistance. Ceux-là suivent son exemple qui disent avec saint Paul: Ayant la nourriture et le vêtement, nous sommes contents. Comme il prêchait la pénitence, en bon maître, il donne en sa personne l'exemple et la règle de la vie que doivent mener les pénitents. La terre lui servait de lit, un antre de demeure, les poils de chameau de vêtement, une peau de ceinture; l'eau était son breuvage, les herbes, sa nourriture. Il nous montre ainsi non-seulement à mépriser le monde et ses attraits, mais encore à pleurer les péchés du genre humain tout entier ; il laisse ainsi un exemple très-utile à la postérité.

Ainsi, tout en saint Jean prêchait la pénitence: son nom, qu'il avait reçu par la grâce de Dieu; l'endroit où il était, un désert; son vêtement, un cilice; sa nourriture, des herbes; et ses discours, qui enseignaient la pénitence.

Saint Jean est le modèle du prédicateur de l'Évangile. Et d'abord, 1o relativement à la doctrine; car, à l'exemple de Jean, le prédicateur chrétien doit prêcher la pénitence, les vérités qui nous éloignent du péché, et celles qui nous tournent vers la conquête du royaume céleste. 2° Quant à

la continence, il est dit que Jean portait une ceinture autour des reins, pour montrer au prédicateur qu'il doit être continent. C'est pourquoi le Seigneur, envoyant Jérémie prêcher, lui dit: Ceins tes reins. 3° Quant au genre de vie, et cela sous deux rapports, qui regardent et le vêtement et la nourriture.

Celui donc qui ordonne la pénitence et les austérités, qui prêche et reprend les autres, doit faire voir qu'il fait pénitence; il doit se revêtir d'un costume austère, se nourrir sobrement, pour pouvoir blâmer dans les riches les défauts contraires à ces qualités. L'austérité de vie est exigée pour le prédicateur de l'Évangile; c'est pourquoi l'apôtre dit: Je châtie mon corps et je le réduis en servitude, de crainte que, après avoir prêché les autres, je ne sois moi-même réprouvé. Saint Jérôme dit à ce sujet : Le vêtement, la nourriture et le breuvage de saint Jean montraient l'austérité que doivent avoir les prédicateurs de l'Évangile dans leur vie. Et saint Chrysostôme: Il fallait que le précurseur du Seigneur, prophète et apôtre de Jésus-Christ, se donnât tout à Dieu en méprisant toutes les choses de ce monde. Aussi, est-ce avec raison que le Seigneur lui-même l'appelle un ange, car, étant en ce monde, il méprisait le monde en menant une vie angélique. Or, si celui qui était si saint, plus pur que le ciel, plus élevé que les prophètes, sans égal parmi les hommes, macérait ainsi son corps par la pénitence, méprisait les jouissances éphémères de ce monde avec ses richesses, quelle excuse pourrons-nous avoir devant Dieu, après tant de bienfaits de Jésus-Christ rèçus, après de si grands et de si nombreux péchés commis, si nous n'avons pas imité la mortification de saint Jean; si nous nous sommes livrés, au

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