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jusqu'à nous? L'Évangéliste nous l'apprend en ajoutant: Deum nemo vidit unquam; jamais aucune créature n'a vu Dieu de la vue de compréhension; car, dit saint Chrysostôme1, si jamais ni les anges ni les archanges, ni les chérubins ni les séraphins n'ont vu Dieu, à plus forte raison nulle créature mortelle. Tant que nous vivons sur cette terre, dit saint Grégoire 2, nous pouvons bien voir Dieu sous quelques figures, mais nous ne saurions le contempler dans sa nature et dans son essence; et l'âme la plus favorisée des grâces du Saint-Esprit ne saurait parvenir jusque-la.

Cependant (et ceci ne contredit pas ce qui vient d'être dit), l'homme spirituel qui sait mourir entièrement au monde et à toute affection charnelle et terrestre, peut s'élever à la contemplation de la Sagesse éternelle qui est Dieu.

3

Celui qui meurt entièrement à lui-même et au monde, dit saint Augustin 3, pourra parvenir à cette intuition divine.

Celui qui comprend véritablement Dieu, ajoute l'Evangéliste, c'est le Fils unique de Dieu, qui est et qui demeure dans le sein, c'est-à-dire dans le plus intime de son Père, auquel il est coéternel; c'est Lui qui a révélé à ses fidèles serviteurs son essence et sa nature, en leur découvrant les profondeurs cachées de la divinité, en les instruisant du mystère de la Trinité et de plusieurs autres que la Loi et les prophètes avaient tenus secrets. JésusChrist est venu enseigner ces grandes vérités aux hommes

1

Saint Chrysostôme : Hom. 14, in Joan.

2 Saint Grégoire: Lib. XVIII, Moral., cap. xxxvII.

* Saint Augustin: Lib. XII, in Gɩnes., cap. xxvII.

pour les établir et les fortifier dans la foi divine, et leur montrer ainsi le chemin du salut, qui est lui-même, Lui, comme il le dit, la voie, la vérité et la vie. Le Fils de Dieu fait homme, dit le vénérable Bède, en expliquant ces paroles de saint Jean, nous a enseigné ce que nous devons croire de la mystérieuse unité dans la Trinité; de quelle manière nous pouvons parvenir à ces sublimes contemplations et ce que nous devons faire pour y arriver.

CHAPITRE XIX

SAINT JEAN CONFESSE DEVANT LES JUIFS

QU'IL N'EST PAS LE CHRIST, MAIS SEULEMENT SON PRÉCURSEUR ET SON MESSAGER

La conception et la naissance merveilleuses de saint Jean; la sainteté de sa vie, la doctrine admirable et la nouveauté du baptême qu'il prêchait, portaient le peuple juif à penser qu'il était peut-être le Christ promis dans la Loi et qui devait venir pour le délivrer. Les Pharisiens yoyant que cette opinion se propageait de plus en plus, se déclarèrent contre saint Jean, mécontents de ce qu'il s'était arrogé le droit de baptise rcontrairement à la Loi et à leur tradition; mais doutant eux-mêmes s'il n'était pas le Messie, ils envoyèrent de Jérusalem vers lui, parce qu'il était issu de la race sacerdotale, des prêtres et des lévites instruits dans la Loi, pour lui demander qui il était et pourquoi il baptisait. Pourtant, ces Scribes et ces Phari

siens pouvaient bien savoir qu'il n'était pas le Christ, puisque le Sauveur promis devait naître de la tribu de Juda, et que saint Jean était de la tribu de Lévi.

A l'occasion de cette demande : qui êtes-vous, adressée à saint Jean qui avait été sanctifié dès le sein de sa mère, chacun doit s'adresser à lui-même quatre questions importantes, touchant sa nature, sa personne, sa forme et sa stature. Ayez soin de vous considérer vous-même sous ces quatre rapports, afin que vous puissiez répondre à Dieu quand il vous interrogera. La première question peut se formuler ainsi : Qui êtes-vous par votre nature? et à cette question se présente une triple réponse. Par votre corps vous êtes terre, afin de vous abaisser et de triompher de l'orgueil; par votre âme vous êtes esprit, afin de vous élever au-dessus de l'amour des biens terrestres et périssables; par votre corps et par votre âme réunis, vous êtes une créature raisonnable, afin de vous conduire toujours selon la raison et de fuir une vie molle et sensuelle. Or, si Dieu vous demandait en ce moment: Qui êtes-vous? O orgueilleux! pourrait-il vous dire, vous avez changé votre nature; vous n'êtes plus cette terre qui doit s'abaisser, mais comme l'air, vous avez voulu vous élever; vous n'êtes plus cet esprit qui ne doit s'attacher qu'aux choses spirituelles, mais vous êtes devenu chair en savourant les choses terrestres; vous n'êtes plus cette créature raisonnable qui doit n'avoir que la raison pour guide, mais vous vous êtes ravalé au niveau des brutes en vivant comme elles.

La seconde question est ainsi conçue: Qui êtes-vous dans votre personne? Lorsqu'un jour vous frapperez à la porte du ciel, en disant : Seigneur, Seigneur, ouvrez-moi,

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