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dit saint Chrysostôme, autre celui de Notre-Seigneur. Le premier préparait à la pénitence, le second donne la grâce par laquelle le Saint-Esprit venant en ceux qui le reçoivent avec foi, les purifie, comme par le feu, de tous leurs péchés, et nettoie toutes les souillures de l'âme et du corps. Nous sommes baptisés par Jésus-Christ dans le SaintEsprit, dit le vénérable Bède 1, non seulement au jour de notre baptême, lorsque nous sommes lavés de tous nos péchés dans cette fontaine de vie, mais encore lorsque chaque jour, par la grâce de ce même Esprit, nous sommes embrasés d'ardeur pour accomplir ce qui est agréable à Dieu. Il y a donc trois sortes de baptême : baptême d'eau dans le fleuve; baptême de feu dans la pénitence; baptême de sang dans le martyre.

Saint Jean, après avoir rendu témoignage du premier avénement de Jésus-Christ, pour inspirer la crainte aux Juifs, leur parle aussi de son second avénement, lorsqu'à la fin des siècles, ce même Jésus-Christ viendra dans toute sa puissance juger tous les hommes. Il ajoute donc : Cujus ventilabrum in manu ejus, le van est dans ses mains. Le van, ventilabrum, est un instrument dont on se sert en Palestine pour nettoyer le blé. La paille et le blé unis ensemble sont placés dans le van, à l'aide duquel on lance le tout en l'air; la paille alors s'envole et le blé demeure ainsi purifié. Saint Jean parle ici par métaphore; par le van, il veut nous faire comprendre le discernement du souverain Juge qui alors distinguera les bons des méchants et les séparera les uns des autres comme le van sépare le froment de la paille; et quand il dit dans sa main, in manu, il

1 Bède In Lucæ cap. III.

nous désigne sa puissance suprême, car Dieu le Père a remis à son Fils tout pouvoir de juger. Alors il nettoiera, il purifiera l'aire, aream, c'est-à-dire son Église, dans laquelle maintenant la paille est mêlée au bon grain, ou les méchants avec les bons; mais au jour du jugement suprême, ils seront séparés les uns des autres. Il rassemblera le froment dispersé dans plusieurs lieux, Et congregabit triticum, c'est-à-dire les bons et les justes, lesquels, à la manière du froment, sont blancs à l'intérieur par la pureté de leur âme, mais à l'extérieur sont rouges par la patience dans les peines et les souffrances, graves dans leurs mœurs, utiles aux autres par leurs discours et leurs bons exemples; et il les serrera dans son grenier, c'est-à-dire dans le royaume des cieux. Quant à la paille, paleas, c'est-à-dire quant aux méchants et aux réprouvés, ces hommes légers par orgueil, pâles par envie, fragiles par colère, desséchés par avarice, infructueux par paresse, vils et abjects par concupiscence charnelle, il les brûlera dans le feu éternel de l'enfer au milieu d'affreux tourments. Dès cette vie, sans doute, Dieu purifie son Église, lorsque quelques-uns de ses membres sont retranchés de sa communion par sentence judiciaire, à cause de certains péchés publics, ou lorsqu'ils sont enlevés de ce monde par la mort; mais cette purification sera parfaite au jugement dernier, lorsque tous les scandales en seront retranchés par le ministère des anges. Saint Jean enseigna encore bien d'autres choses aux peuples, les instruisant et les exhortant à la pratique du bien par ses paroles et par ses exemples; ce qui nous montre que de ses actes et de ses discours, comme de ceux de Jésus-Christ, un petit nombre seulement est rapporté dans les Évangiles.

Tirons maintenant les conséquences morales de ce qui vient d'être dit. Saint Jean nous instruit ici de la manière dont nous devons vivre, dont nous devons prêcher, dont nous devons porter des fruits de salut; premièrement, par l'austérité de sa vie sous le rapport de la nourriture, du vêtement et de la retraite dans laquelle il demeure; secondement, par la vérité de sa doctrine touchant Dieu, touchant lui-même, touchant le prochain; troisièmement, par ses œuvres fructueuses, en prêchant, en baptisant, en rendant meilleur le peuple qui vient à lui. Par sa vie, il est le modèle des religieux; par sa doctrine, celui des prédicateurs; par ses actes, celui des prélats. Si les prédicateurs lui ressemblaient, on verrait bientôt tout Jérusalem, c'està-dire les religieux, toute la Judée, c'est-à-dire les clercs, et tous les pays voisins, c'est-à-dire les laïcs, accourir en foule confesser leurs péchés, quelque grands et quelque nombreux qu'ils fussent, et Jésus-Christ venir avec eux pour les sanctifier par ses paroles, sa grâce et ses exemples. Pour mieux faire comprendre encore tout ce qui précède, l'évangéliste en détermine d'une manière précise le théâtre, en disant : Tout ceci se passa en Béthanie, où Jean baptisait. Saint Jean, nous dit saint Chrysostôme dans sa 16 homélie sur le Précurseur, ne prêchait point dans une maison particulière ou dans un lieu retiré, mais passant le Jourdain, il annonçait publiquement le Messie à la multitude qui accourait recevoir son baptême. Il est dit que Jean baptisait en Béthanie, qui signifie maison d'obéissance, pour nous montrer d'abord que c'était par pure obéissance qu'il était venu annoncer Jésus-Christ qui devait s'immoler pour le salut du monde; pour apprendre aux hommes que s'ils veulent être purifiés de la tache origi

nelle contractée par la désobéissance de leur premier père, ils doivent s'approcher du sacrement avec humilité et avec soumission; enfin pour signifier que la vertu d'obéissance convient spécialement aux nouveaux baptisés.

Il y a deux petites villes qui portent le nom de Béthanie; une située en deçà du Jourdain, à deux milles de Jérusalem, sur le versant du mont des Oliviers, où Lazare fut ressuscité; l'autre, dont nous parlons, qui est sur le Jourdain, mais du côté opposé, à une journée environ de Jérusalem, où Jean baptisait, et sur les confins qui séparaient les Juifs des Gentils, pour nous apprendre qu'il venait offrir son baptême aux uns et aux autres. C'est également avec raison que l'évangéliste dit que Jean baptisait au delà du Jourdain, car les Gentils accouraient à son baptême en plus grand nombre que les Juifs.

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