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M. JOURDAIN.

Je comprends cela à cette heure.
LE MAÎTRE DE MUSIQUE.

Voulez-vous voir nos deux affaires?

Oui.

M. JOURDAIN.

LE MAÎTRE DE MUSIQUE.

Je vous l'ai déjà dit, c'est un petit essai que j'ai fait autrefois des diverses passions que peut exprimer la musique.

Fort bien.

M. JOURDAIN.

LE MAÎTRE DE MUSIQUE, aux musiciens. Allons, avancez. (4 M. Jourdain. ) Il faut vous figurer qu'ils sont habillés en bergers.

M. JOURDAIN.

Pourquoi toujours des bergers? On ne voit que cela partout.

LE MAÎTRE A DANSER.

Lorsqu'on a des personnes à faire parler en musique, il faut bien que, pour la vraisemblance, on donne dans la bergerie. Le chant a été de tout temps affecté aux bergers, et il n'est guère naturel, en dialogue, que des princes ou des bourgeois chantent leurs passions.

M. JOURDAIN.

Passe, passe. Voyons.

DIALOGUE EN MUSIQUE.

UNE MUSICIENNE, DEUX MUSICIENS.

LA MUSICIENNE.

Ux cœur, dans l'amoureux empire,

De mille soins est toujours agité:

On dit qu'avec plaisir on languit, on soupire;
Mais, quoi qu'on puisse dire,

Il n'est rien de si doux que notre liberté.

PREMIER MUSICIEN.

Il n'est rien de si doux que les tendres ardeurs
Qui font vivre deux cœurs

Dans une même envie :

On ne peut être heureux sans amoureux désirs;
Otez l'amour de la vie,

Vous en ôtez les plaisirs.

SECOND MUSICIEN.

Il serait doux d'entrer sous l'amoureuse loi,
Si l'on trouvait en amour de la foi:

Mais, hélas! ô rigueurs cruelles !
On ne voit point de bergères fidèles ;
Et ce sexe inconstant, trop indigne du jour,

Doit faire pour jamais renoncer à l'amour.

PREMIER MUSICIEN.

Aimable ardeur!...

LA MUSICIENNE.

Franchise heureuse!...

SECOND MUSICIEN.

Sexe trompeur!...

PREMIER MUSICIEN.

Que tu m'es précieuse!

LA MUSICIENNE.

Que tu plais à mon cœur!

SECOND MUSICIEN.

Que tu me fais d'horreur !

PREMIER MUSICIEN.

Ah! quitte, pour aimer, cette haine mortelle.

LA MUSICIENNE.

On peut, on peut te montrer

Une bergère fidèle.

SECOND MUSICIEN.

Hélas! où la rencontrer ?

LA MUSICIENNE.

Pour défendre notre gloire,

Je te veux offrir mon cœur.

SECOND MUSICIEN.

Mais, bergère, puis-je croire

Qu'il ne sera point trompeur ?

LA MUSICIENNE.

Voyons par expérience

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Je trouve cela bien troussé; et il y a là-dedans de petits dictons assez jolis.

LE MAÎTRE A DANSER.

Voici, pour mon affaire, un petit essai des plus beaux mouvemens et des plus belles attitudes dont une danse puisse être variée.

Sont-ce

M. JOURDAIN.

t-ce encore des bergers?

LE MAÎTRE A DANSER.

C'est ce qu'il vous plaira. ( Aux danseurs.) Allons.

ENTRÉE DE BALLET.

(Quatre danseurs exécutent tous les mouvemens différens et toutes les sortes de pas que le maître à danser leur commande.)

FIN DU PREMIER ACTE.

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