Madame ARGANTE. Ouais! Et où fommes-nons donc? Allons, petite ridicule, qu'on donne tout-à-l'heure la main à Monfieur. VALERE. Non pas, Madame, s'il vous plaît. M. GRIFO N. Qu'est ce à dire? VALERE. Avec votre permission, mon pere, cela ne fera pas, je vous allure. M. GRIFON. Cela ne fera pas! Que dites-vous à cela, Monfieur le Muficien? SCAPIN. Vous avez là an grand garçon bien mal morigenć, Monfieur. M. GRIFON. Pendard! VALERE. Que diroit-on dans le monde, fi, en ma présence, je vous laiffois faire une action aussi extravagante que celle-là M. GRIFON. Quoi donc, extravagante? Comment donc? A ton pere, malheureux ! A votre pere! MARINE. SCAPIN. A votre propre pere! VALERE. Quand il feroit mon pere cent fois plus qu'il ne l'eft encore, je ne fouffrirai point que l'amour lui faffe tourner la cervelle jufqu'à ce point-là. M. GRIFON. Mais quelle Comédie jourons-nous donc ici? Je vous demande pardon pour mon fils, Madame. Madame ARGANTE. Cela n'eft rien. J'ai bien des excufes à vous faire pour ma fille, Monfieur. MARINE. Voilà des enfans bien obftinés. Mais auffi pourquoi vous exposer à vous marier, fans favoir fi Monsieur votre fils le voudra bien ? M. GRIFON. S'il le voudra bien? SCAPIN. Monfieur, avec trois ou quatre cents piftoles ne pourrions-nous point le mettre à la raifon? M. GRIFON. Je l'y mettrai bien fans cela. Madame ARGANTE: Et moi, je vous réponds de cette petite impertimente-la; elle vous époufera, ou je la mettrai dans un lieu d'où elle ne fortira de long-tems. LEONOR. J'y demeurerai plutôt toute ma vie, que d'époufer un homme que je n'aime point. SCENE-IX. Madame ARGANTE, M. GRIFON, VALERE, S CAPIN. ELL M. GRIFON. s'en va, Madame. Madame ARGANTE. Ne vous mettez pas en peine, je faurai la réduire; elle fera votre femme aujourd'hui, ou vous mourrez de mort fubite. SCENE X. M. GRIFON, VALERE, DE SCAPIN. M. GRIFON. E mort fubite! Voilà à quoi vous m'exposez, Monfieur le coquin, Laiffe-moi faire, je veux l'épou fer à ta barbe ; je m'en vais dépenser tout mon bien pour m'en faire aimer; je lui donnerai des préfens, des bijoux, des maifons, des contrats, des cadeaux, des feftins, des férénades; des férénades, Monfieur le Muficien; & je lui ferai des enfans, pour te faire tenrager. SCAPIN, à part. Oh! pour celui-là, on vous en défie. SCENE X I. VALERE, SCA PIN. VALER E. NON, Scapin, il n'y a point d'extrémité où je ne me porte pour empêcher ce mariage-là. SCAPIN. Doucement, Monfieur, nous abaifferons fes fumées d'amour. Il ne la tient pas encore. J'ai pris le foin d'une férénade; il vient de négocier un certain collier: laiflez-moi faire. Mais le diable eft que nous n'avons point d'argent. VALERE. Ah! mon pauvre Scapin, cherche, imagine, invente des moyens pour en trouver; engage tour, vends tout, donne tout. SCAPIN. Hé que diable engager, que vendre? Pour tout meuble & immeuble, vous n'avez que votre habit & le mien; encore le Tailleur n'eft-il pas payć. VALERE. Quoi ! tu ne peux trouver.... SCAPIN. Depuis que je travaille pour vous, les refforts de mon efprit emprunteur font diablement ulés.... Mais quoi!. VALERE. SCAPIN. Laiffez-moi un peu rêver tout seul, J'ai ma sérénade en tête; fi je pouvois avoir feulement de quoi payer les Muficiens dont je me veux fervir.... A quoi bon?..... VALERE. SCAPIN. J'ai besoin de me recueillir, vous dis-je; laissezmoi en repos, & allez fortifier Léonor dans le deffein de ne point épouser votre pere. VALERE, à part. Il faut vouloir tout ce qu'il veut, j'ai besoin de lui, |