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puis le x siècle, elle n'a cessé de tenir un rang distingué dans toutes les carrières honorables, telles que la magistrature (1), les conseils souverains, la diploinatie et le sacerdoce.

Elle vint s'établir à Gand vers l'an 965, en la personne de Pietro, appartenant à une famille sénatoriale de Rome, et petit-fils d'un guerrier célèbre, Honorius, qui, en l'an 880, à la tête d'une légion, contribua à délivrer la Calabre et l'Apulie, envahies par les Sarrasins de la Sicile. Ce Pietro, aussi distingué par sa valeur que par sa naissance, ayant été remarqué parmi les chevaliers lombards par Arnould-le-Jeune, comte de Flandre, s'attacha au service de ce prince, et reçut de sa libéralité la terre de Mude, dont ses descendants ont adopté et conservé le surnom pendant plus de trois siècles.

Gerem, quatrième seigneur de Mude, prit part, en 1096, à la première croisade. Pendant son séjour en Orient, il reçut le surnom d'Eutracheleus (de ε”, bon, et τpáɣnlos, cou), traduction grecque du nom de ses ancêtres Boni colli, surnom traduit par les mots Goelhals après son retour en Flandre. Ces noms, dans la suite, ont subi diverses modifications. Celui d'Eutracheleus fut latinisé par contraction en Eu collus, et celui de Goet-hals, paraphrasé par Als-goet (2), devint le cri d'armes de cette illustre famille. Enfin, dans

(1) En France les préjugés nationaux plaçaient la magistrature après l'épée. Dans les Pays-Bas, au contraire, la magistrature tenait le premier rang, parce qu'elle y exerçait la puissance souveraine. C'est là surtout qu'on pouvait faire la juste et entière application de cet adage si connu et si rarement compris chez nous Cedant arma toga.

(2) Algoëtus, ou sa traduction grecque (nav άyalòs), Panagathus 770 zio, q

2

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L'abbé, Feller parle de ces différents noms dé la maison de Goethals dans son Dictionnaire historique,

de Gand,« Cette famille de Goethals, dit article de Henri

établie dans la ville

de Gand depuis plus de 700 ans, est une des plus honorables de la Flandre. Elle a fourni d'excellents sujets à l'église, à la magistrature, à la république des lettres. Elle est connue dans l'hisLoire sous les dénominations diverses de Gredals, Golthal, Algoe tus, Eucollus, Eutrachelens et Panagathus. » wah si, li

les temps reculés, quelques-uns de ses membres, comme Henri de Gand et François de Bruges, furent désignés dans les chroniques par le lieu de leur naissance: Quod nonnullæ ibi familiæ sint, quibus ab urbibus cognomen datum. (Valère André, Bibliotheca Belgica, in-4°, Bruxelles, 1759, p. 446).

Lorsque l'armée des croisés s'avança vers Jérusalem, affranchissant par de rudes combats toutes les places de la Palestine qui environnaient la cité sainte, Gerem, sire de Mude, eut le bonheur de délivrer, au péril de sa vie, trois jeunes vierges chrétiennes qu'un maure de Joppé était sur le point d'immoler à la vengeance de son prophète. Cette action généreuse, admirée de toute l'armée, et louée publiquement par Robert, comte de Flandre, détermina ce seigneur, pour en perpétuer le souvenir, à orner son écu de 3 bustes de jeunes filles. Un maure tenant une tige de 3 roses et surmontant l'écu, achevait de compléter le symbole de cette particularité mémorable (1).

Les monuments nombreux qui attestent la grandeur originaire de cette famille, ses nobles alliances, sa participation continuelle à tous les événements qui ont marqué dans l'histoire de Flandre, ont été mis récemment en lumière par une plume savante et exercée. Nous voulons parler des Esquisses biographiques extraites des tablettes généalogiques de la maison de Goethals, publiées par M. le chevalier L'Évêque de la Basse-Moûturie, et dont il est fait mention avec de justes éloges dans le Journal de l'Institut historique (t. IV, p. 266). C'est dans ce livre curieux que nous avons puisé les faits intéressants et les preuves fondamentales de cette généalogie. Nous y renvoyons ceux de nos lecteurs qui préfèrent aux déductions rigou

(1) M. le Mayeur, dans son poème sur la Gloire Belgique, chant VIII, p. 303, a rappelé ce fait dans le quatrain suivant :

Boni-Colle, ancien nom, l'effroi du Sarrasin,
Sous le nom de Goethals qu'il tient du souverain,
Ayant sauvé les jours de trois jeunes captives,
Fait orner son blason de leurs têtes naïves.

DONATI:

reuses de l'ordre généalogique une esquisse à grands traits des illustrations d'une famille. Cet ouvrage ne laisse rien à désirer à l'érudition et au goût, et par la nouveauté de son plan il restera comme un modèle en cette matière (1).

I. HONORIUS, capitaine et chevalier romain, issu de race sénatoriale, vivait dans la seconde moitié du neuvième siècle. Les Sarrasins, maîtres d'une partie de la Sicile et de la Calabre, ayant fait une invasion dans l'Apulie (appelée vulgairement la Pouille), le pape Jean VIII confia à Honorius le commandement d'une cohorte pour marcher contre les infidèles. Dans un combat qui précéda l'engagement général où les chrétiens furent vainqueurs (880), Honorius reçut du chef des Musulmans un violent coup de cimeterre au défaut du beaume, et dont son haubert le garantit. Il fut à cette occasion surnommé Boni colli (Bon col), surnom qui passa à sa postérité (2).

II. Giovano ou Jean, Ier du nom, fils d'Honorius, épousa Judith DONATI, rappelée avec lui, ainsi qu'Ho-' norius, dans une bulle du pape Benoît VII, en faveur de Pietro Bonicolli, leur fils, seigneur de Mude, datée de Rome le vi des calendes de juin (26 mai) de la 4 année de son pontificat (976), par laquelle le saint

(1) Indépendamment des sources où l'on a puisé les preuves historiques du présent travail, il convient de rappeler qu'il a été extrait, quant à la partie généalogique, de tableaux dressés sous le sceau de leur office: 1° en 1654, par messire Adrien Colbran, Jer roi d'armes des Pays-Bas et de Bourgogne; 2° en 1711, par les hérauts d'armes messires Joseph van den Leene, Louis van Ursel, Platzart et R. de Grez; 3o en 1744, par messire Jaerens, roi d'armes du titre du Toison-d'Or. Le cadre restreint de ces tableaux ne comportant le plus souvent qu'une simple mention des faits, on a cru devoir, pour plus d'ordre et de clarté, y ajouter les dates, soit d'après les monuments publics, soit d'après les titres de famille.

(2) L'histoire d'Honorius et sa filiation jusqu'aux seigneurs de Mude ont été reconnues et certifiées par quatre diplômes des comtes de Flandre, des 31 janvier 1398, 6 décembre 1432, 6 mai 1505 et 11 décembre 1546. (Voyez aussi le poème de la Gloire Belgique, t. 1, p. 374).

père, sur la prière de ce seigneur, lui fit remettre par un moine de Saint-Bavon appelé Baudouin, député par Arnould II, comte de Flandre, à la cour de Rome, des reliques des saints Marcellin, Maximin et Quirinien, pour être déposées dans les églises de Saint-Bavon, près de Gand, de Saint-Jean et de Sainte-Pharaïlde de la même ville. (L'original en parchemin de cette charte existe aux archives de la ville de Tournay).

III. Pietro BONICOLLI, Ier du nom, fils de Giovano et de Judith Donati, après avoir été armé chevalier à Milan, et s'être distingué dans les tournois. fut l'un des sept chevaliers lombards qu'Arnould-le-Jeune, comte de Flandre, attacha à sa cour, lorsqu'il ramena d'Italie, vers 965, Roselle, fille du roi Bérenger, qu'il y avait épousée. Pietro Bonicolli rendit de grands services au comte de Flandre dans les guerres du Hainaut de 973 à 977. Il en reçut pour récompense le territoire seigneurial de Mude-lès-Gand (1) avec l'éminente dignité de dapifer. Il est désigné (Petrus Bonicollius, dapifer, et dominus de Muda) comme témoin d'une donation faite par le comte Arnould à la chapelle de Sainte-Pharaïlde à Gand. La charte est datée du 6 jour (18 juin) après la fête de la Pentecôte, 987. Pietro avait épousé avant son départ d'Italie N... UBERTI. Il en eut un fils, qui suit,

(1) La terre de Mude comprenait tout le terrain limité par la Lys et le hameau de Meulestede, qui forme le quartier et le faubourg de Muye ou Muyde. Gerem Goethals, Ier du nom, pour subvenir aux frais de son voyage en Palestine, la vendit, en l'année 1095, à Robert II, comte de Flandre, à la réserve du titre seigneurial et d'un tiers du terrain, qui conserva tous les priviléges du fief principal, avec la haute et basse justice. Deux cents ans plus tard les descendants de Gerem se trouvaient encore possesseurs du nom de Mude; mais la portion qui leur restait était particulièrement désignée sous le nom de Herscip van den Nyenlande (seigneurie de la Nouvelle-Terre) ou seulement Nyenlande. Elle est aujourd'hui comprise dans l'enceinte de la ville de Gand, où elle forme la paroisse de Saint-Sauveur. Le nom de la rue principale, Muyde-straete, celui de la rue de Nieuwlandt, l'église et l'hospice Saint-Jacques, fondés en 1283 par Henri de Gand, sont les seuls vestiges que ce quartier ait conservés de la domination de ses anciens maîtres.

UBERTI:

IV. Arnould, Ier du nom, sire DE MUDE, scella, en 997, l'acte d'une donation faite par Baudouin IV, comte de Flandre, à la chapelle de Sainte-Pharaïlde. Il prit part avec ce même comte, en 1006, à la prise de Valenciennes, et concourut à la défense de cette ville lorsque Robert, roi de France, Henri, roi de Germanie, et Richard, duc de Normandie, vinrent en faire le siége, que la valeur des Flamands les força de lever. Arnould Ier eut pour femme Anne DE de gueules, au GHISTELLES, et pour fils et successeur Arnould II, qui

DE GHISTELLES:

chevron d'her

mine.

DE COMINES ancien : d'or, à un écusson de gueules, chargé d'une croix de vair.

suit.

V. Arnould BONICOLLI, IIe du nom, sire DE MUDE, est cité parmi les seigneurs qui prirent part à la guerre soutenue par Baudouin V, comte de Flandre, et le duc de Lothier, contre l'empereur Henri III, guerre dans laquelle les princes confédérés s'emparèrent du pays de Waes, du comté d'Alost, du château de Gand, puis des places de Nimègue et de Verdun. Ces hostilités, qui durèrent pendant treize ans, ne cessèrent que par le traité de Cologne en 1057. On voit dans le Zwarten boek, p. 275 (aux archives du Franc de Bruges), la charte d'une donation faite par le châtelain de Gand à l'abbaye de Saint-Pierre en 1065, et dans laquelle Arnould, sire de Mude, figure comme témoin. Celui-ci avait épousé Jeanne DE COMINES, dont il eut trois fils:

1. Baudouin Ier, dont nous parlerons ci-après;

2o Gerem qui fut sous-prieur de l'abbaye de Saint-Bavonlès-Gand, où il mourut le 2 des ides de décembre 1107. L'obituaire de ce monastère le désigne ainsi : • Reveren» dus pater Gerelmus, filius Arnoldi Bonicolli, domini de Muda et Joanne de Comines »;

3° Jean, surnommé de Courtray, parce qu'il s'y était fixé, après avoir épousé la fille du bailli de cette ville. Il en eut un fils :

Juste Goethals, de Courtray, célèbre par le duel qu'il soutint à Ypres contre André Booren, en 1116, et dans lequel il eut l'insigne honneur d'avoir pour l'un de ses champions son souverain même, Baudouin VII, surnommé à la Hache, comte de Flandre. Le sujet intéressant de ce duel judiciaire est rapporté avec de grands détails dans les chroniques de Flandre. La

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