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et Janvier, évêque de Naples, dans l'oraison funèbre de saint Paulin. Ajoutez encore à tant de saints Martyrs, famille entière des Cantiens, Martyrs d'Aquilée, dont Fortunat a chanté la victoire; Sirus de Gènes, Eutiche de Férentino, Procule, Sabin, Erasme, Césaire, Marthe, Julienne, et le fameux saint Christophe, dont les Actes sont si défectueux, tous préconisés par saint Grégoire-leGrand, et tant d'autres enfin, dont les noms se lisent dans les auteurs ecclésiastiques, et que nous sommes contraints d'omettre pour passer à d'autres preuves.

8. Sentimens des Pères du 4 et 5° siècle, touchant le nombre des Martyrs.

Si nous consultons maintenant les Pères du quatrième et du cinquième siècle, touchant le nombre des Martyrs, ils nous diront tous qu'il est presque infini. Des milliers de Martyrs, disait saint Augustin à son peuple, vous environnent de tous côtés. Mille et mille Martyrs, dit-il ailleurs, ont rougi la terre de leur sang. La terre, depuis Etienne, dit-il en un autre endroit, regorge du sang des Martyrs. Et écrivant contre Fauste, il lui dit des milliers de nos Martyrs se présenteront devant vous (1). Il les compte par légions; il assure qu'on ne peut les compter; et, à l'occasion de la pêche de saint Pierre, il se fait à lui-même cette question: Mais quoi, y aura-t-il tant de Saints dans le ciel ? Et il répond ainsi : Oui; car enfin, sans parler des fidèles qui d'une vie sainte passent à une vie bienheureuse, quand il n'y aurait que les seuls Martyrs, quelle prodigieuse multitude! C'est le sentiment de saint Athanase, de saint Ambroise, de saint Jérôme, de saint Chrysostôme,

(1) Serm. 4. de temp. Serm. 300. Serm. 313. Serm. 3121 Trac. 113. in Joan., serm. 252, cap. 8.

de saint Astère, et généralement de tous les Pères et de tous les auteurs ecclésiastiques.

9. Réponse à une objection de Dodwel, prise d'Origène mal entendu.

Voici un passage d'Origène, qui semble favoriser l'opinion de Dodwel, et qui toutefois bien entendu, lui devient tout à fait inutile. Ce savant Père écrivant contre Celse (1), lui dit qu'on peut facilement compter les chrétiens qui sont morts pour leur religion, parce qu'il en est mort peu, et seulement de temps en temps et par intervalle. Mais Origène, par ces paroles, ne prétend prouver autre chose, sinon que les persécutions qui s'étaient élevés contre les fidèles, n'avaient pas été si violentes, qu'elles eussent été capables d'exterminer entièrement les chrétiens, et qu'on pouvait dire qu'il n'en était mort que très-peu, si on les comparait à ceux qui restaient. Dieu, ajoute-t-il, s'opposant à la ruine générale de ces hommes consacrés à son culte. Il faut remarquer ici que le dessein d'Origène n'est autre chose que de montrer à Celse que la religion chrétienne ne devait pas sa naissance à une sédition et à un esprit de révolte, comme ce philosophe le reprochait faussement aux chrétiens, puisqu'ils n'ont jamais eu recours aux armes » pour défendre leur vie contre ceux qui l'attaquaient, et » que leurs lois, au contraire, les obligent de tendre le cou à leurs ennemis, et de se laisser égorger comme de paisibles brebis. Ainsi, de peur que cette douceur et » cette patience ne vînt à causer leur ruine entière, et afin » que les plus faibles ne fussent pas exposés sans cesse aux frayeurs d'une mort toujours prochaine, Dieu, par sa

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(1) Lib. III.

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>> bonté, avait bien voulu pourvoir à leur sûreté, et avait » d'un seul clin-d'œil renversé les cruels projets de leurs ennemis, et rendu leurs efforts impuissans, en sorte que >> ni les rois, ni les gouverneurs de province, n'avaient plus aucun pouvoir de leur nuire. Et il est certain, par d'autres passages d'Origène, qu'il était fort persuadé de cette multitude de Martyrs. « Il n'y « Il n'y a point de ville, dit-il

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» dans une de ses homélies (1), où le nom des chrétiens » ne soit en horreur; tous les hommes, de quelque rang » et de quelque condition qu'ils soient, s'unissent ensem» ble pour les détruire. Il dit ailleurs (2) : nous voyons tous les jours plusieurs personnes qui savent fort bien » que s'ils confessent Jésus-Christ, on les fera mourir et qu'au contraire, ils seront renvoyés absous et mis en liberté, s'ils le renoncent cependant leur foi est si grande et leur piété si sincère, qu'elle leur fait mépriser généreusement la vie, et courir volontairement à la mort. Et dans son commentaire sur l'épître aux Romains (3), » il assure qu'on voit souvent des hommes qui se présentent devant les juges, de leur propre mouvement et sans }) Ꭹ être forcés, et qui croient que c'est peu pour eux d'en>> durer quelques affronts pour Jésus-Christ, s'ils ne souf>>frent encore pour lui la mort la plus cruelle. Il dit enfin,

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en un autre endroit (4), que quoiqu'il y ait une peine » de mort décernée contre ceux qui se trouveront aux as» semblées des fidèles, elles ne laissent pas d'être très-nom>> breuses. » Le lecteur remarquera qu'Origène écrivait ceci avant les horribles boucheries des Décius, des Valériens et des Dioclétiens.

Mais le grand Irénée, plus ancien qu'Origène, et parfai

(1) Hom. 9, in Josue. (2) Lib. 2. contra Celsum. (3) Cap. 5. (4) Lib. 1 contrà Celsum.

tement instruit des affaires de l'Eglise grecque et de l'état de l'Eglise latine, ayant reçu de celle-là les premières connaissances de la religion chrétienne, et vivant actuellement dans celle-ci; le grand Irénée, dis-je, n'admet pas seulement cette multitude de Martyrs, mais il veut qu'elle soit la marque à laquelle on puisse reconnaître la véritable Eglise, et la discerner des autres sectes. C'est dans son livre contre les hérésies, c'est-à-dire dans un ouvrage composé, de l'aveu même de Dodwel, avant la persécution de l'Eglise de Lyon et au commencement de l'empire de Marc-Aurèle. Voici ses paroles (1): «Partout où l'Eglise se rencontre, cette sainte >> Mère envoie au ciel avant elle, par le Martyre, une >> multitude de ses enfans, qu'elle offre au Père comme un » gage de l'extrême amour qu'elle a pour lui. Mais les autres assemblées non-seulement n'ont point de Martyrs;.......... >> il n'y a que l'Eglise qui aime à souffrir les opprobres, » pour témoigner à Dieu quel est l'excès de sa charité, et quelle est la grandeur de la foi qui lui fait confesser

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>> hautement Jésus-Christ. Souvent on l'a vue s'affaiblir par la perte de son sang et de ses membres, puis tout » à coup se rétablir, reprendre de nouvelles forces, et re» devenir mère d'un plus grand nombre d'enfans. » Nous rapporterons les témoignages des autres Pères, lorsque nous traiterons des persécutions en particulier. Voyons cependant s'il est vrai qu'Eusèbe soit aussi favorable à Dodwel, qu'il ose s'en vanter.

10. Réponse à une objection de Dodwel, tirée d'Eusèbe.

Eusèbe, comme nous l'avons déjà remarqué, avait recueilli dans deux ouvrages différens, les noms de tous les

(1) Lib. 4, c. 64.

Martyrs qui avaient pu venir à sa connaissance : le premier de ces recueils comprenait les Martyrs anciens; et le second, les Martyrs qui de son temps avaient souffert dans la Palestine. Nous donnerons celui-ci tout entier, et lorsque nous y aurons joint ce que le même auteur rapporte ailleurs de la même persécution, le lecteur pourra juger si Dodwel peut avec justice prétendre d'avoir Eusèbe dans son parti. A l'égard du premier recueil, qui ne se trouve plus depuis plusieurs siècles, Dodwel nous dit d'un ton affirmatif, que par l'histoire même d'Eusèbe on doit conclure qu'il ne contenait qu'un très-petit nombre de Martyrs. Il nous aurait fait plaisir de produire ces passages prétendus de l'histoire ecclésiastique, puisqu'il est constant, par divers endroits de cette histoire, que son auteur a reconnu une infinité de Martyrs, quoiqu'en effet il n'en ait nommé que très-peu. Nous ne chercherons point d'autres interprètes de la pensée d'Eusèbe, qu'Eusèbe même (1). Il dit donc que, durant la persécution de Trajan, plusieurs fidèles soutinrent généreusement le combat, quoiqu'ils se vissent attaqués de tous côtés par divers tourmens. Il assure que, sous Antonin, la constance d'une infinité de Martyrs se fit admirer de tout l'univers. Il décrit la persécution que Sévère alluma, pendant laquelle on vit d'illustres athlètes combattre pour la piété et pour la foi, dans toutes les Eglises du monde. Il parle dans les mêmes termes des persécutions de Dèce et de Valérien.

Pour ce qui regarde Prudence, l'on ne peut pas dire qu'il favorise le moins du monde Dodwel, si l'on ne nous fait voir que ce prince des poètes chrétiens s'est engagé à chanter dans ses vers tous les Martyrs qui furent jamais. Il fait l'éloge de plusieurs, il ne dit rien aussi de plusieurs; mais il est

(1) Lib. 3, c. 33. L. 5, initio. L. 6, c. 2.

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