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médie en trois Actes. Quoiqu'il ne fe trou- 1690. ve que huit Scènes Françoifes dans le Recueil de Gherardy, elles font cependant appercevoir que le fujet eft à peu près le même que celui des Femmes fçavantes de Moliere: Ces Scènes font autant bonnes qu'aucune du tems. Tortillon bon Bourgeois a deux filles Angelique & Ifabelle; dont l'une livrée toute entiere à l'Étude, ne veut point entendre parler de mariage, & l'autre traveftie en Homme, fe fait Capitaine d'Infanterie fous le nom du Chevalier de Finbec; elle enrolle par fubtilité l'Arc-en-Ciel, ancien ami de fon Pere. Arleq. devenu amoureux d'Angelique, entre prend de lui faire goûter les maximes de l'Amour, qu'il débite d'une façon fi fpirituelle & fi galante, qu'elle confent à lui donner fa main. Le peu de liaison de ces Scènes Françoises les unes aux autres empêche de voir ce que devient Ifabelle. La Sc. de Tortillon avec Pierrot paroît être la premiere, parce qu'elle annonce le fujet, ('commencement de régularité qui s'augmente fucceffivement.) Tortillon fe plaint de fa malheureuse Étoile, qui lui a donné deux filles fi différentes de lui, qui n'a, dit-il, ni cœur ni étude. La Sc. entre Tortillon & Angelique eft très-bonOn voit le ridicule d'une Fille, qui fur un vain étalage de Sciences, contrarie toutes les paroles de fon Pere & méprife avec beau

ne.

1690. coup de dédain tous les Partis qu'il lui propofe, foutenant qu'un bon Livre vaut mieux qu'un mauvais mari. La Sc. de la Confulta-, tion, quoiqu'ifolée, eft fort plaifante Arleg. déguifé en Veuve vient pour confulter de quelle maniere on peut s'y prendre pour fruftrer fes Enfans du bien de leur Pere, afin davantager du tout le jeune Homme à qui la Veuve veut fe remarier, mais Tortillon avouant. fon infuffifance renvoye cette Veuve à fa fille, Angelique, qui lui reproche fon indignité. C'eft une Critique affés jufte de la conduite, de la plupart des Veuves coquettes. Arleg. y fait une peinture très-rejouiffante des dou ceurs qu'il goûtoit dans fon ménage. La Sc. de l'Enrollement eft du bon Comique. D'a*Il y a bord, l'Arc-en-Ciel fe plaint à Tortillon*, de préfumer ce qu'on a décidé que les Avocats auroient que c'étoit le pas fur les Marchands. Que la Justice raqui exif- dote..... Que les Gens de robe n'ont qu'à soit alors. venir déformais rechercher les filles des Mar

lieu de

un Procès

chands.... Qu'il en auroit trois mille......
Oui, trois mille, qu'elles ne feroient jamais
pour ces Meffieurs. Tortillon pour diffiper
le chagrin de fon ancien ami, lui propofe le
mariage de fa fille Ifabelle avec fon fils Oc-
tave. L'Arc-en-Ciel lui déclare
que ce fils
eft un vrai garnement qui n'a ni conduite ni
raison; qu'il s'eft amouraché d'une Veuve qui
a des Enfans, plûtôt que d'époufer une Fem

me neuve, & qu'aulieu de profiter des heu- 1690 reux talens qu'il avoit pour devenir un grand Procureur, il a abandonné l'Etude pour prendre une Brette & un Manteau rouge, & qu'aulieu de vouloir perpétuér le nom de l'Arc-enCiel, il s'eft avifé de fe faire appeller le Baron de Tricolor. Dans le tems que Dans le tems que Tortillon fait l'éloge du caractére, de la douceur & de l'obéiffance de fa fille Ifabelle, qualités, dit-il, capables de faire revenir Tricolor à la raison fi elle l'époufoit; cette fille fe préfente fous l'habit de Capitaine: Tortillon furpris de ce traveftiffement, & ne fçachant à quoi attribuer -cette mafcarade, fe retire. Isabelle restée feule avec l'Arc-en-Ciel, & par le fecours de Mezetin qui fait le Rolle de Sergent d affai-res, vient about d'enroller ce pauvre Vieillard après l'avoir fait boire à la fanté du Roi, & fans qu'il ait aucune méfiance du tour qu'on lui joue. Ceci représente affés au naturel les artifices dont on fait ufage pour furprendre les fimples. Cette Scène a beaucoup de reffemblance avec la Comédie de la Fille Capitaine. La Sc. du Profeffeur d' Amour est allés bien dialoguée. Les Préceptes galans d'Arlequin font un effet fi rapide dans l'efprit d'Angelique, qu'il l'a dégoûte de l'Étude, & vient about de lui perfuader que la véritable science d'une Femme eft d'être belle & de plaire, aulieu que les Livres ne fervent qu'à la rendre

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690. fouvent très-infuportable. C'est dommage qu'une caufe auffi effentielle à l'Homme, produife au Sexe des effets fi dangereux, & que la malice & la vérité juftifient fi communément cette pensée!

1691.

30. LA COQUETTE on L'ACADEMIE DES DAMES, Comédie. Gherardy la rapporte prefqu'entiere dans fon Recueil, à l'exception de quelques Scènes Italiennes. Le Titre en annonce le fujet, que voici en peu de mots. Colombine, fille de M. Trafiquet, donnant dans la Coquetterie la plus rafinée, reçoit avec le même empreffement les hommages de tout le monde, jufqu'à ne pas dédaigner même ceux de fon Valet Pierrot. Parmi fes Adorateurs Nigaudin Robin ridicule, & un certain Capitaine fanfaron, donnent matiere à des Scènes fort comiques; mais fon Pere la destine à un Baillif du Maine, qui arrive en pestant contre les embarras de Paris, & fait devant fon futur Beaupere tout ce qu'il faut pour le dégoûter de fon alliance. Colombine, qui, malgré fa Coquetterie, n'aime véritablement qu'Octave, met tout en ufage pour rendre encore plus ridicule ce nouveau venu du Maine dans l'efprit de fon Pere; pour cet effet elle perfuade au Baillif de quitter fa Charge & de fe faire Marquis; Celui-ci donne dans le Paneau. Octave qui

craint de fon côté que fa Maîtreffe ne change 1691. en faveur du Manceau, lui fait rendre des vifites par Mezetin & Pafcariel, habillés en Femmes pour la dégoûter du, Perfonnage. Non content de cette tentative, Octave les fait encore traveftir en Bohemiens, qui, accompagnés de quelques autres fourbes, rencontrent le Baillif, & fous prétexte de lui dire fa Bonne-avanture, le détournent toutà-fait du mariage. Enfin Colombine lui dit, que puifqu'il s'eft fait Marquis pour lui plaire, elle veut bien l'époufer, mais à condition qu'il fera reçu dans fon Académie. La cérémonie de la reception eft fort grotesque; on l'habille en Femme, & on lui peint le vifage de rouge & de blanc, Trafiquet, furpris de trouver fon gendre futur dans cet équipage, lui dit qu'il ne veut point donner fa fille à un fou, & le renvoye dans fon Pais; le Baillif s'en confole, en difant qu'il faut qu'un Provincial ait bien le diable au corps pour venir s'équiper d'une Femme à Paris. Il n'eft pas difficile de s'appercevoir que l'intrigue & le dénouement de cette Comédie ont bien du rapport avec celles de Pourceaugnac & du Bourgeois Gentilhomme. Cette Piéce avec quelques corrections pourroit être placée au Repertoire.

31. ARLEQUIN ESOPE, Comédie en 1691.

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