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Je hais.... ces gens....

Dont la fiere grandeur d'un rien fe formalife,

De crainte qu'avec elle on ne familiarife.

IE, avec l'e ouvert ou fermé, n'eft ordinairement que d'une fyllabe, de quelque confone qu'il foit fuivi, comme dans ciel, troifie-me, fievre, pie-ce, amitié, ba-ri-ere, pa-pier, pre-mier, &c.

Il faut obferver que dans les Verbes en ier de la premiere conjugaison, ie forme deux fyllabes à l'infinitif, à la feconde perfone du pluriel du préfent de l'indicatif, ou de l'impératif, & au participe paffif. Ainfi il faut prononcer, étu-dier, confi er, déli-er, mari-er; vous étudi-ez, vous confi-ez, vous déli-ez, vous mari-ez; étudi-é, confi-é, déli-é, mari-é.

IAI, dans la premiere perfone du prétérit de ces Verbes, fe prononçant comme ié, forme auffi deux fyllabes: J'étudi-ai, je confi-ai, je déi-ai, je mari-ai.

On prononce de même, vous ri-ez, vous fouri-ez, impié-té, inqui-et, inqui-éter, inquiétude, hardi-effe, matéri-el, effenti-el, & quelquesautres mots en el de plus d'une fyllabe.

HIER, s'emploie quelquefois en une feule fyllabe, comme dans ce Vers:

Hier j'étois chez des gens de vertu finguliere.

Mais on en fait plus communément deux fyllabes, comme dans ce Vers:

Mais hier il m'aborde, & me ferrant la main,
Ah! Monfieur, m'a-t-il dit, je vous atends demain,

11 eft d'une feule fyllabe dans avant-hier.

Le bruit court qu'avant-hier on vous affaffina.

Io, eft communément de deux fyllabes, comme dans violence, violon, di-océfe. On pouroit en excepter, fio-le & pio-che.

Prends la fiole où....

Je crains en ce défordre extrême.....

OE, ne fait qu'une fyilabe, comme dans boë-te, coë-fe, mo-ële, pole, excepté dans poe-fie, po-éme, po-ère.

Oi, avec le fon de l'o & de l'è ouvert, n'eft jamais que d'une fyllabe, comme dans roi, voi, voi-là, emploi, &c.'"

UE, avec l'e ouvert ou fermé, eft toujours de deux fyllabes, comme

dans duel, tu-er, tu-é, attribu-er, attribi, fu-er, fu-i.

UI, ne forme qu'une fyllabe, comme dans lui, ce-lui, dédui-re, conftrui-re, fuir, fui, aigui-fer, &c. excepté dans ru-ine, ru-iner, bru-ine. IAI, eft de deux fyllabes dans ni-ais il eft quelquefois de deux & quelquefois d'une feule dans bi-ais, bi-aifer, ou biais, biaiser.

:

IAU, eft toujours de deux fyllabes, comme dans mi-auler, besti-aux, provinci-aux, impéri-aux, &c.

IEU,

IEU, fe prononce ordinairement en deux fyllabes, comme dans pi-eux, odi-eux, furi-eux, pré-cieux excepté dans cieux, Dieu, lieu, lieu-tenant, mi-lieu, mieux, pieu, é-pien, effieu, vieux, ieux.

OUE, avec l'e ouvert ou fermé, eft de deux fyllabes, comme dans jou-et, lou-er, lou-é, avou-er, avoué : excepté dans fouer & foue-ter. Our, eft de deux fyllabes, comme dans ou-ir, ou-i, jou-ir, jou-i, éblouir, ébloui, excepté dans bouis, & dans oui, marquant affirma

tion.

Et deux fois de fa main le beuis tombe en morceaux.

IAN & IEN, avec le même fon, forment deux fyllabes, comme dans étudi-ant, fortifi-ant, ri-ant, li-ant, cli-ent, pati-ent, impatience, expedient, expé-rience: il faut feulement excepter vian-de

Autour de cet amas de viandes entaffees,

Regnoit un long cordon d'alouetes preces.

IEN, avec le fon qui approche de celui de l'é fermé, ne forme ordnairement qu'une feule fyllabe, dans les noms fubftantifs, les noms poffefifs, les verbes, & les adverbes, comme dans bien, chien, rien, mien, tien, fien, je viens, je tiens, combien, &c. excepté li-en, parce qu'il vient du Verbe lier de deux fyllabes.

len, eft de deux fyllabes, quand il termine un nom adjectif d'état, de profeffion, ou de pays, comme dans Grammairi-en, comedi-en mufici-en, hiftori-en, gardi-en, magici-en excepté chrétien.

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ION n'eft d'une fyllabe que dans les premieres perfones du pluriel de l'imparfait de l'indicatif, du conditionel préfent, du préfent & de l'imparfait du fubjonctif des Verbes, quand il ne fe trouve pas, avant la terminaifon de ces perfones, uner précédée d'une autre confone. Il est de deux fyllabes dans les premieres perfones du pluriel du préfent de l'indicatif ou de l'impératif des Verbes qui ont l'infinitif en ier, & dans quelque autre mot que ce puiffe être, comme dans nous étudions, nous confi-ons, nous déli-ons, nous mari-ons, nous ri-ons, li-on, religi-on, uni-on, pa-on, vifi-on, créati-on, &c.

OIN, n'est jamais que d'une fyllabe, comme dans coin, foin, be foin, apointement, &c.

Enjambement des Vers.

Les Vers n'ont ni grâce, ni harmonie, quand ils enjambent les uns fur les autres, c'eft-à-dire, quand le fens demeure fufpendu à la fin d'un Vers, & ne finit qu'au commencement du Vers fuivant: ce qui arive principalement toutes les fois que le commencement d'un Vers eft régime ou dépendance néceffaire de ce qui fe trouve à la fin du Vers précédent, comme dans ceux-ci :

C'étoit votre nourice. Elle vous ramena,
Suivit exactement l'ordre que lui donna
Votre pere, &c.

Mm m'm m

où l'on voit que votre pere a une liaison néceffaire avec la fin du Vers précédent, puifqu'il eft le nominatif du Verbe donna.

Cette régle eft effentiele dans les Vers d'un ftyle noble & férieux : on s'en difpenfe néanmoins quelquefois dans les Vers d'un flyle familier, comme dans les comédies, les fables, les contes, les épîtres, &c. Mais l'harmonie, en quelque flyle que ce pût être, ne feroit pas bleffée, fi le régime ou la dépendance d'un Vers s'étendoit jufqu'à ia fin du Vers fuivans, coinme dans ceux-ci :

L'amour effentiel à notre pénitence,

Doit être l'heureux fruit de notre repentance.
Mais admire avec moi le fort dont la pourfuite
Me fait courir alors au piège que j'évite.

Tranfpofition des Mots.

Quoique le langage de la Poéte Françoife ne foit pas différent de celui de la Profe, & qu'on y emploie communément les mêmes mots; il est cependant permis d'y faire dans la conftruction de la phrafe certaines tranfpofitions que la Profe n'admetroit pas, & qui contribuent beaucoup à l'harmonie & à la nobleffe des Vers. Mais il faut toujours faire ces tranfpofitions avec efprit & avec goût, de maniere qu'elles n'apportent ni dureté, ni obfcurité dans les Vers.

Elles confiftent à changer l'ordre naturel des mots : ce qui peut se faire de plufieurs manieres.

I. En mettant le nominatif après le verbe, comme on le met autfi quelquefois en Profe. Ainfi dans ces Vers:

Ce traitement, Madame, a droit de vous furprendre ;
Mais enfin, c'est ainsi que fe venge Alexandre.

l'ordre naturel feroit, c'est ainfi qu'Alexandre fe venge.

II. En mettant le régime abfolu à l'accufatif avant le régime qui le gouverne ce qui ne doit pourtant fe faire qu'avec beaucoup de réserve, comme dans ces Vers:

y

Le fort vously voulut l'une & l'autre amener,

Vous pour porter des fers, elle pour en donner.

Vous direz à celui qui vous a fait venir,
Que je ne lui faurois ma parole tenir.

L'ordre naturel & indifpenfable en Profe, feroit, le fort voulut vous omener l'une & l'autre, &c. que je ne faurois lui tenir ma parole.

III. En mettant un nom au génitif avant celui dont il dépend, comme dans ces Vers:

Celui qui met un frein à la fureur des flots,
Sait aufli des méchans arrêter les complots!

au lieu de dire, fait auf arrêter les complots des méchans.

IV. En mettant le régime relatif au datif ou à l'ablatif, avant le verbe auquel il a raport, comme dans ces Vers:

Quels charmes ont pour vous des ieux infortunés,
Qu'à des pleurs éternels vous avez condamnés.

au lieu de dire, que vous avez condamnés à des pleurs éternels.

La Grece en ma faveur eft trop inquiétée:
De foins plus importants je l'ai crue agitée.

au lieu de dire, je l'ai crue agitée de foins plus importans.
V. En mettant entre le verbe auxiliaire & le participe, des mots
qui ne s'y foufriroient pas en Profe, comme dans ces Vers:

Aujourd'hui même encore une voix trop fidele

M'a d'un trifte défaftre apporté la nouvele.

au lieu qu'il faudroit dire en Profe, m'a apporté la nouvele d'un trifte défaftre.

Le Ciel enfin pour nous devenu plus propice

A de mes ennemis confondu la malice.

au lieu de dire, a confondu la malice de mes ennemis.

VI. Enfin en mettant avant le verbe tout ce qui peut en dépendre, & ce qui devroit naturélement être mis après. Ce font le plus communément les prépofitions avec leurs régimes, comme on le reconnoîtra fans peine dans les Vers fuivans:

A ce difcours, ces rivaux irrités,

L'un fur Pautre à la fois fe font précipités.
Pour la veuve d'Hector fes feux ont éclaté.
Contre mon ennemi laiffe-moi m'affurer.

Si la foi dans fon caur retrouvoit quelque place.

Par de fteriles vaux penfez-vous m'honorer ?

Peuple ingrat! Quoi toujours les plus grandes merveilles,
Sans ébranler ton cœur, fraperont tes oreilles !

Mots à éviter dans les Vers.

Comme un des principaux objets de la Poéfie eft de flater agréable. ment l'oreille, on doit en banir tous les mots qui pouroient la choquer, on parce qu'ils feroient trop rudes, ou parce qu'ils auroient quelque conformité de fon avec d'autres mots déja employés dans le même Vers, ou parce que la répétition n'en feroit ni nécessaire ni agréable, ou enfin parce qu'ils feroient trop bas & qu'ils fentiroient trop la Profe.

Il eft un heureux choix des mots harmonieux.
Fuyez des mauvais fons le concours odieux.
Je Vers le mieux rempli, la plus noble penfée,
Ne peut plaire à l'efprit, quand l'oreille eft bleffee.

M m m m mij

Le goût & le difcernement apuiés d'une lecture réfléchie des meilleurs Pootes, contribueront à faire éviter ces défauts, mieux que toutes les regles que l'on pouroit donner.

Nous nous contenterons d'indiquer ici quelques-uns des mots qui apartienent à la Prote, & que l'on ne doit faire entrer que très-rarement dans les Vers, fur-tout dans ceux qui ont un peu de nobleffe.

Ce font les conjonctions: c'est pourquoi, parce que, pourvu que, puis, ainfi, car, en effet, de forte que, d'autant que, outre que, d'ailleurs, &c. Celui & celle, quand ils font relatifs à quelques noms précédens : lequel, laquelle, lefquels, &c.

De la Céfure.

La Céfure eft un repos qui coupe les Vers en deux parties, dont chacune s'appele Hemistiche, c'est-à-dire, demi-Vers. Et ce repos bien ménagé contribue beaucoup à la cadence & à l'harmonie des Vers François.

Les regles que l'on peut donner fur la céfure, font renfermées dans ces trois Vers de M. Defpréaux :

Ayez pour la cadence une oreille fevere.

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Que toujours dans vos Vers le fens coupant les mots,
Sufpende l'hemifliche, en marque le repos.

Il n'y a que des vers de douze fyllabes & ceux de dix qui aient une céfure les autres, c'est-à-dire, ceux de huit, de fept & de fix fyllabes, n'en ont point.

La céfure des Vers de douze fyllabes ou des Vers alexandrins, eft à la fixieme fyllabe, en forte qu'elle partage ces Vers en deux parties égales, comme dans ceux-ci:

Juftes, ne craignez point-le vain pouvoir des hommes:
Quelque eleves qu'ils foient,-ils font ce que nous fommes.

La céfure des Vers de dix fyllabes ou des Vers communs, eft à la quatrieme fyllabe, & elle coupe ces Vers en deux parties inégales, dont la premiere eft de quatre fyllabes, & la derniere de fix, comme dans ceux-ci :

L'efclave craint-le tyran qui l'outrage:

Mais des enfans-l'amour eft le partage.

Quand on dit que la céfure des Vers alexandrins eft à la fixieme fyllabe, & que la céfure des Vers communs eft à la quatrieme, on entend qu'après l'une ou l'autre de ces fyllabes, il doit y avoir un repos naturel qui mette un intervalle entre le premier & le fecond hemiftiche en forte qu'on puiffe les diftinguer en récitant les Vers, fans forcer & fans obfcurcir le fens de la phrafe. Ainfi la céfure eft vicieufe, quand le mot qui la forme & qui termine le premier hémitliche, ne peut être féparé du mot fuivant dans la prononciation.

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