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Grand Dieu, tes jugemens font remplis d'équité.
Toujours tu prends plaifir à nous être propice:
Mais j'aitant fait de mal, que jamais ta bonté
Ne me pardonnera, qu'en bleflant ta juftice.

Oui, Seigneur, la grandeur de mon impiété
Ne laille a ton pouvoir que le choix du fupplice:
Ton interet s'oppofe à ma felicité,

Et ta clémence meme atend que je périffe.

Contente ton défir, puisqu'il t'eft glorieux :

Offenfe-toi des pleurs qui coulent de mes ieux :

Tone, frape, il eft temps; rends-moi guerre pour guerre.

J'adore en périffant la raison qui t'aigrit :

Mais deffus quel endroit tombera ton tonerre,

Qui ne foit tout couvert du fang de Jefus-Chrift?

Du Rondeau.

Une ingénieufe fimplicité fait le caractere propre du Rondeau.

Le rondeau né gaulois a la naïveté. Defpr.

Le rondeau commun eft composé de treize Vers qui font ordinairement de dix fyllabes.

Les rimes de ces treize Vors doivent être femblables, huit masculines & cinq féminines, ou fept mafculines & fix féminines.

Après le huitieme Vers & à la fin du rondeau, il y a un refrain qui n'et autre chofe que la répétition d'un ou de plufieurs des premiers mots du premier Vers. Mais ce refrain doit être amené avec efprit, & faire un fens avec ce qui le précede.

Comme il ne doit y avoir que trois rimes féminines dans les huit premiers Vers, on peut mettre de fuite trois Vers de rime mafculine, qui font le cinquieme, le fixieme & le feptieme: ce qu'on ne fait pas ordinairement dans les cinq derniers Vers.

Le rondeau a deux repos néceffaires, un après le cinquieme Vers, & T'autre après le premier refrain. Nous en donnerons deux pour exemples, dont le premier contient les regles du rondeau même.

Ma foi, c'est fait de moi, car Ifabeau
M'a conjuré de lui faire un rondeau :
Cela me met en une peine extrême.

Quoi treize Vers, huit en eau, cinq en ême !

Je lui ferois auffi-tôt un barcau.

En voila cinq pourtant en un monceau :
Faifons-en buit en invoquant Bródeau,
Et fuis mettons par quelque ftraragême,
Ma foi, c'eft fuit.

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Si je pouvois encor de mon cerveau
Tirer cinq Vers, l'ouvrage feroit beau :
Mais cependant me voilà dans l'onzieme.
Et fi je crois que je fais le douzieme :
En voilà treize ajuftés au niveau,

Ma foi, c'est fait.

A la fontaine où s'enivre Boileau,
Le grand Corneille & le facre troupeau
De ces Auteurs que l'on ne trouve guere,
Un bon rimeur doit boire à pleine aiguiere,
S'il veut donner un bon tour au rondeau.
Quoique j'en boive auffi peu qu'un moineau,
Cher Benferade, il faut te fatisfaire,
T'en écrire un. Hé! c'eft porter de l'eau
A la fontaine.

De tes refrains un livre tout nouveau
A bien des gens n'a pas ea l'heur' de plaire :
Mais quant à moi, j'en trouve tout fort beau,
Papier, dorure, images, caractere,

Hormis les Vers qu'il falloit laiffer faire
A la fontaine,

De l'Epigramme.

L'Epigramme eft une petite piece de Vers qui doit être terminée par une penfee vive, ingenieufe & brillante, ou par un bon mot: ce que l'on appele la chute ou la pensée de l'épigramme; & elle ne doit contenir qu'autant de Vers qu'il en faut pour amener cette penfée. C'est pourquoi il n'y en entre guere plus de dix ou douze.

L'Epigramme plus libre, en fon tour plus borné,
N'eft fouvent qu'un bon mot de deux rimes orné,

Au reste, elle n'est assujétie à aucune regle particuliere pour le mélange des rimes & pour la mefure des Vers, qui dépendent de la volonté du Poête. En voici une pour exemple :

Certain Huiffier étant à l'Audience,

Crivit toujours, Paix-là, Meffieurs, Paix-là :
Tant qu'à la fin tombant en défaillance,
Son teint pålit, & fa gorge s'enfia.
On court à lui. Qu'est-ceci, qu'est-cela?
Maitre Perrin, du fecours, il expire.
Bref on le faigne, il revient, il refpire.
Lors ouvrant l'oeil clair comme un bafilic,
Voilà, Meffieurs, fe prit-il à leur dire,
Ce que l'on gagne à parler en public.

856 ABRÉGÉ DES REGLES DE LA VERSIFICATION FRANÇOISE.

Du Madrigal.

Le Madrigal eft une autre petite piece de Vers dont la chute moins vive & moins frapante que celle de l'epigramme, doit toujours avoir quelque chofe de fin & de delicat. Il n'a pas ordinairement moins de fix Vers, & il peut en avoir jufqu'à dix-fept, que l'on peut même quelquefois partager en ftances, fans aucune regle particuliere. En voici un fait à la louange de Louis XIV.

Les Mufes à l'envi travaillant pour la gloire
De Louis, le plus grand des Rois,
Orneront de fon nom le temple de mémoire:
Mais la grandeur de fes exploits,
Que l'espri: humain ne peut croire,
Fera que la pofterité,

Lifant une belle hiftoire,
Doutera de la verite.

Des Vers libres.

On appele Vers libres ceux qui n'ont aucune uniformité ni pour le nombre deses ni pour le mélange des rimes, & qui ne font point partagés en ces, cfl à dire, que dans les pieces en Vers libres, un Auteur peut entreméler les rimes à fon choix, & donner à chaque Vers tel nombre de fyllabes qu'il juge à propos, fans fuivre d'autres regles que les redes générales de la Verfification.

On met ordinairement en Vers libres les fujets qui ne demandent qu'un ftyle fimple & familier, comme les fables, les contes, & même quelquefois les comédies, ou les poemes deftinés à être chantés, comme les Opéra & les Cantates.

Dans les Vers libres, fur-tout dans ceux qui font faits pour la mufique, il eft permis de mettre trois Vers de fuite fur la inême rime, mafculine ou féminine.

Au refte, nous renvoyons à l'Art Poétique de M. Defpréaux, ceux qui voudront avoir une connoiffance plus exacte & plus étendue de la Poéfie Françoife.

FIN.

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thongues,

Enjambement des. Vers.

Transposition des mots,

Mots à éviter dans les Vers,

Des Licences dans la Versification,

Rencontre des Voyeles,

Des Voyeles qui forment ou ne forment pas de Diph

820.

823.

825.

826.

827.

De la Césure,

ART. II. De la Rime,

De la Rime Masculine et Féminine

De ce qui suffit ou ne suffit pas pour la Rime,

En quelles occasions il faut faire accorder la Rime avec

828.

83a.

834.

ibid.

835.

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Retranchement de l's dans certains Verbes

844.

ART. III. Du mélange & de la combinaison des Vers,

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Regles pour les Stances de nombre impair

1. Stances de cinq Vers,

II. Stances de sept Vers,

III. Stances de neuf Vers,

De quelques Ouvrages composés de Stances,

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Du Sonet,

Du Rondeau,

De l'Epigramme,

Du Madrigal,

Des Vers libres,

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Fin de la Table de l'Appendice.

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