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nant à la France et détruire les établissemens de com- 1830 merce fondés sous leur protection.

A la possession d'un territoire assez considérable se joignait pour nous, sur la côte d'Afrique, le droit exclusif de la pêche du corail sur une étendue d'environ soixante lieues de côtes, droit également reconnu par nos traités avec la Porte et avec la régence d'Alger. Ces traités stipulaient que nous paierions pour ce privilège une redevance annuelle qui, fixée originairement à 17,000 Fr., avait été portée à 60,000, lorsque ce privilège nous avait été rendu en 1817. MaisTMTM deux ans étaient à peine écoulés, que le dey nous déclara inopinément que nous avions à choisir entre renoncer à notre privilège, ou lui payer annuellement 200,000 Fr. L'intérét de notre commerce fit consentir le gouvernement à cette augmentation de charges; et cependant, malgré l'exactitude avec laquelle nous> acquittàmes ce droit, le dey fit publier, en 1826, un manifeste qui permettait à toutes les nations la pèche du corail sur les côtes de la régence d'Alger, mesure qui nous privait d'un privilège dont le dey voulait cependant continuer à recevoir le prix.

A ces griefs généraux se joignent une foule d'of-t fenses particulières, nous ne parlerons ici que des principales et de celles qui sont postérieures à la re

stauration.

En 1814, le dey intima au consul général, M. Du-' bois - Thainville, l'ordre d'arrêter définitivement les comptes de plusieurs sujets algériens, créanciers de la France; et comme le consul représentait qu'il ne pou vait le faire sans y être autorisé par son gouvernement, le dey le renvoya immédiatement d'Alger. Les événemens des cent jours nous forcèrent à dissimuler acet outrage, et un nouveau consul fut envoyé en 1816; mais le dey ne eonsentit à l'admettre que moyennant le paiement préalable d'une somme de 100,000 Fr.ca titre de présent gratuit.

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En 1818, le brick français le Fortuné fut atta qué et pillé par les habitans du territoire de Bonne sans que l'on put obtenir du dey aucune réparationg

En 1819, le dey répondit à la sommation collective de l'amiral français Jurien et de l'amiral anglais Freet-> mantle, qui venaient, pas suite des résolutions arrê tées au congrés d'Aix-là-Chapelle, l'inviter à renoncen

1830 à la piraterie, qu'il prétendait se réserver le droit de mettre en esclavage les sujets de toutes les puissances qui n'auraient pas des traités avec lui, et qui n'entretiendraient pas dans ses Etats de consuls par les mains de qui des redevances ou tributs lui seraient payés.

En 1825, malgré la teneur expresse des traités et sous prétexte de contrebande, le dey fit forcer et visiter la maison de l'agent consulaire français à Bonne. Le résultat de cette visite prouva la fausseté de l'accusation, et cependant le dey ne nous donna aucune satisfaction de cette offense.

Les droits qui doivent être perçus pour nos marchandises, dans les ports de la régence, sont déterminés par des traités: en 1825; le dey exigea arbitrairement de nos négocians à Bonne des droits beaucoup au-dessus de ce tarif.

A l'exemple de ce que d'autres grandes puissances avaient fait pour plusieurs Etats, la France accorda, en 1825, sa protection au pavillon romain. Les deys d'Alger et de Tripoli, et le bey de Tunis, reconnurent successivement que cette mesure était justi-, fiée par les rapports qui nous unissent au chef de notre religion, et ils s'engagèrent solennellement à respecter, à l'égal du nôtre, le pavillon romain. Mais, dix-huit mois après avoir souscrit à cet engagement, le dey d'Alger fit arrêter et confisquer deux bâtimens romains. Le prix de ces navires et de leur chargement fut partagé entre le dey et les corsaires capteurs, et nos réclamations ne purent obtenir que la mise en liberté des équipages.

Les violations de nos traités devinrent de plus en plus fréquentes dans les années 1826 et 1827. l'audace du dey s'accroissant par l'impunité. On le vit alors refuser positivement de reconnaitre nos capitulations avec la Porte. Ce fut aussi à cette époque que les Algériens commencèrent à exiger des capitaines de nos navires marchands qu'ils rencontraient en mer, de venir sur leur bord pour la vérification de leurs expéditions, ce qui était directement contraire au traité de 1719: il arriva que, tandis que le capitaine du båtiment français la Conception laissait ainsi vérifier ses papiers à bord d'un armement algérien, son propre navire reçut la visite d'hommes détachés par le corsaire,,

qui enlevèrent des caisses, de l'argent, et les autres 1830 objets qu'ils trouvèrent à leur convenance.

Mais indépendamment de ces griefs multipliés, l'insolence et la mauvaise foi du dey, dans l'affaire des juifs algériens Bacri et Busnach, ne laissèrent bientôt plus à S. M. d'autre parti à prendre que celui auquel elle s'est déterminée, en déclarant la guerre à cette régence. Des fournitures faites sous le consulat et l'empire avaient constitué les sieurs Bacri et Busnach créanciers sur le trésor d'une somme qui n'était point liquidée à l'époque de la restauration. Une transaction passée entre les commissaires du Roi et le fondé de pouvoir des intéressés, le 28 Octobre 1819, et approuvée par le Roi et par le dey d'Alger, régla définitivement cette créance à 7 millions, qui durent être payés par douzièmes, à compter du ler Mars 1820. Mais il fut expressément stipulé (art. 4.) que les sujets français qui auraient eux-mêmes des réclamations à faire valoir contre les sieurs Bacri et Busnach pourraient mettre opposition au paiement, et qu'une somme égale au montant de leurs réclamations serait tenue en réserve jusqu'à ce que les tribunaux français eussent prononcé sur le mérite de leurs titres de créance.

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Conformément à cette disposition, les sujets français furent invités à produire leurs réclamations, et la somme s'en étant élevée à environ 2,500,000 Fr., le trésor royal paya aux sieurs Bacri et Busnach 4,500,000 Fr., qui restaient sur le total du montant reconnu de la dette, et il versa l'autre partie à la caisse des dépôts et consignations.

Cette mesure n'était que l'exécution littérale de la. convention du 28 Octobre. Mais le dey ne tarda pas à prétendre que les tribunaux français.ne jugeaient pas assez vite, qu'il fallait que le gouvernement français intervint pour hater leur action, et enfin que le trésor royal devait lui remettre à lui-même la somme contestée, ajoutant que les sujets français viendraient ensuite à Alger pour faire valoir devant › lui leurs ré

clamations.

Dentelles prétentions étaient contraire à la convention du 28 Octobre: elles l'étaient aussi à la dignité du gouvernement français, qui n'aurait pas pu même y consentir sans dépasser son pouvoir, puisqu'il n'était pas maitre d'intervenir dans des débats judiciaires, et

1830 de transférer à d'autres l'examen de causes dont les tribunaux étaient seuls désormais appelés à connaitre. Ces explications furent données à diverses reprises au chef de la régence, qui n'en tint aucun compte, et qui persista à demander, comme condition du maintien de ses relations avec la France, le paiement immédiat de la somme entière de 7. millions. Dans une lettre qu'il adressa lui-même au ministre des affaires étrangères, cette alternative était énoncée d'une manière si hautaine, que M. le baron de Damas ne croit pas devoir y répondre directement, et qu'il se borna à transmettre un nouvel exposé de l'affaire au consul général du Roi à Alger, en lui prescrivant de s'en expliquer verbalement avec le dey. M. Deval n'avait pas encore reça cette lettre quand il se présenta, suivant l'usage, au palais du dey, la veille des fêtes musulmanes. Ce prince ayant demandé au consul général s'il n'était pas chargé de lui remettre une réponse à sa lettre, et celui-ci ayant répondu négativement, il porta subitement à M. Deval plusieurs coups d'un chassemouches qu'il tenait à la main, en lui ordonnant de sortir de sa présence.

Après un tel excès, commis publiquement sur le réprésentant de la France, le gouvernement du Roi ne pouvait plus prendre conseil que de sa dignité offensée. Cet outrage comblait la mesure des procédés injurieux de la régence. Tout rapport était désormais devenu impossible entre la France et elle, avant qu'une réparation éclatante n'eût vengé l'honneur national. M. le baron de Damas prescrivit au consul général de la demander, ou d'abandonner immédiatement Alger. Cette réparation fut refusée, et M. Deval avait à peine quitté la ville, que le dey envoya l'ordre au gouverneur de Constantine de détruire par le fer et le feu les établis semens français en Afrique; cet ordre fut promptement exécuté, et le fort de Lacalle fut ruiné de fond en comble.

Le Roi envoya devant Alger une division; de ses vaisseaux, avec ordre de maintenir un blocus rigoureux. Les résultats de cette mesure, prolongée pendant trois ans, n'ont pas répondu, malgré le zèle et le courage de nos marins, aux espérances qu'elle avait fait concevoir; le blocus a coûté à la France près de 20 millions, sans avoir causé à l'ennemi un dommage assez réel

pour le déterminer à nous donner les satisfactions con- 1830 venables et à nous demander la paix.

Il importait à la dignité de la France et aux intérêts des sujets du Roi engagés dans des transactions commerciales avec le nord de l'Afrique, et dont les bâtimens étaient sans cesse menacés par les corsaires de la régence d'Alger, que l'on adoptât un système nouveau, plus énergique et plus décisif; néanmoins le gouvernement du Roi, voulant ne porter la guerre sur le territoire algérien que lors qu'elle serait reconnue évidemment nécessaire, se détermina à faire encore une tentative auprès du dey. Dans le courant de Juillet 1820, M. le capitaine de vaisseau de La Bretonnière fut envoyé à Alger, avec ordre d'entamer une négociation, si la régence paraissait disposée à faire droit à nos justes griefs. Cette tentative, qui faisait si noblement ressortir la modération de la France, échoua contre l'opiniâtreté du dey et un dernier outrage à notre pavillon, une dernière violation des droits les plus sacrés chez tous les peuples, vint mettre le comble aux attentats de la régence, et rendre désormais toute conciliation incompatible avec l'honneur national. Au moment où M. de La Bretonnière sortait du port, une décharge générale de toutes les batteries voisines fut faite sur le bâtiment parlementaire, qui fut atteint par quatre-vingts boulets. Le feu ne cessa que lorsque le vaisseau se trouva entièrement hors de portée.

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Tel est l'exposé succinct des griefs dont le Roi se dispose à tirer vengeance: violation des principes du droit des gens; infraction aux traités et aux conven-> tions; exactions arbitraires; prétentions insolentes opposées aux lois du royaume et préjudiciables aux droits des sujets français; pillage de nos bâtimens; violation du domicile de nos agens diplomatiques; insulte publique faite à notre consul; attaque dirigée contre la pavillon parlementaire; le dey semble avoir tout épuisé pour rendre une guerre inévitable, et pour animer le courage de nos soldats, auxquels est réservée la noble mission de venger la dignité de la couronne, et de délivrer la France et l'Europe du triple fléau que les. puissances chrétiennes ont enduré trop long-temps: l'esclavage de leurs sujets, les tributs que le dey exige d'elles, et la piraterie, qui ôte toute sécurité aux côtes

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