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refus non motivé est une insulte faite à la bonne foi de l'autre, de nature à le mécontenter et même à provoquer, suivant les circonstances, une demande en indemnité du préjudice occasionné. La ratification est essentiellement nécessaire dans le cas où elle a été réservée, ou lors d'une „, sponsio" (§ 84) pour qu'elle puisse devenir obligatoire pour la partie intéressée. Dans ces cas encore elle fait remonter les effets du traité jusqu'au moment de sa conclusion. Relativement aux pouvoirs tacites, (84 in fine), la ratification seule fournit la certitude complète de leur étendue. Mais il est constant en même temps qu'elle peut être suppléée par des actes équivalents et notamment par l'exécution tacite des stipulations arrêtées.1

TIERCE-INTERVENTION LORS DE LA CONCLUSION D'UN TRAITÉ.

§ 88. Sont regardés comme non essentiels pour la validité des traités publics, ou comme choses accidentelles: 1. Les bons offices (bona officia) employés par une tierce personne ou une tierce puissance, soit dans le but d'ouvrir la voie aux négociations des parties intéressées, soit dans celui de les faire reprendre après qu'elles ont été interrompues. Ils peuvent être proposés soit par une initiative spontanée, soit par suite d'une demande ou d'un engagement contracté (§ 83). Ils n'emportent aucune responsabilité des conseils donnés (consilium), à moins qu'elle n'ait été expressément stipulée;

2. la médiation proprement dite (mediatio), lorsqu'une tierce puissance, avec le consentement des parties intéressées, participe d'une manière régulière aux négociations jusqu'à

Bynkershoek, Quaest. jur. publ. II, 7. Klüber, loc. cit. Wheaton, loc. cit. § 4. Wildman I, 172. Riquelme I, 176. Les opinions des anciens auteurs sont résumées dans Wicquefort, l'Ambassad. II, 15. Martens § 42 ne diffère qu'en ce qu'il pense que la ratification d'une partie entraine celle de l'autre. Une opinion analogue qui repose tout entière sur des considérations tirées du droit privé, se trouve dans Leonhardi, Austrägalverfassung. p. 319 suiv. Des exemples de traités non ratifiés se trouvent dans Martens et Klüber, aux endroits cités, et dans Pölitz, Völkerr. p. 158. La ratification d'un traité est surtout un point important du droit constitutionnel. 1) Grotius II, 15. 17. Wheaton § 3 in fine.

leur conclusion, en sorte que les explications réciproques ne peuvent être données qu'en sa présence et par son intermédiaire.' Personne ne peut imposer une médiation: mais dès qu'elle a été acceptée, le gouvernement médiateur doit faire des propositions équitables, donner son avis sur celles faites par l'une des parties et repousser celles qui lui paraissent injustes. Il lui est interdit d'employer la force: une médiation armée serait contraire au droit libre des traités et constituerait un commencement d'hostilités." Les fonctions du médiateur cessent avec la conclusion d'un traité, dont il n'a ni le pouvoir ni le devoir de garantir l'exécution. Elles cessent encore par la rupture des négociations du côté de l'une des parties intéressées.

Une tierce puissance peut en outre, par un acte formel, déclarer son adhésion à un traité précédemment conclu, tant à la suite qu'en dehors d'une invitation préalable des parties principales. A cet égard on distingue les espèces suivantes:

1o Accession d'une tierce puissance comme partie principale, lorsque le traité contient des stipulations à son égard, ou est de nature à modifier ses rapports internationaux. Par là elle devient partie co-contractante directe;

2o accession d'une tierce puissance à l'effet de faire approuver par elle les dispositions qui peuvent lui nuire, et par laquelle elle renonce notamment aux exceptions contre sa validité;

3o accession solennelle par pure convenance, afin de donner au traité plus de solennité ou une espèce de témoignage de sa valeur. Ce qui a lieu surtout dans le cas où l'on fait approuver un traité par une tierce puissance supérieure ou envers laquelle on doit observer certains devoirs

1) V. là-dessus des observations étendues dans Bielfeld, Institutions politiques. II, 8, § 17. Vattel § 328. de Steck, Essais sur plusieurs matières. n. 1. Martens, Völkerr. § 172. Klüber, Droit des gens. § 160. Wheaton, Intern. Law. III, 2, § 16. Des exemples nombreux sont cités par Wicquefort, l'Ambassadeur. II, 11. Moser, Vers. VIII, p. 421 suiv. 2) V. Vogt, Europ. Staatsrelationen. V, n. 1.

3) Moser, Vers. VIII, p. 306 suiv. 314. de Steck, Ausführung politischer und rechtlicher Mater. no. 2, p. 49. Klüber § 161.

de déférence. Celle-ci ne contracte par là aucun engagement: seulement elle ne pourra plus invoquer son ignorance du contenu du traité.

MODALITÉS DES TRAITÉS.

§ 89. En ce qui concerne leur contenu, les traités publics, de même que les conventions privées, peuvent dépendre de certaines conditions, de certains délais et de certaines modalités. Par rapport à leur importance, on les distingue en traités préliminaires et définitifs. Les premiers ne constituent le plus souvent que des "pacta de contrahendo", ou n'établissent qu'un état provisoire. Les seconds se subdivisent encore en traités principaux et accessoires, dont les derniers sont conclus quelquefois entre d'autres parties que les premiers. Lors de la rédaction des traités on adopte ordinairement celle par articles, et l'on distingue quelquefois les articles principaux des accessoires. Souvent la teneur du traité proprement dit est accompagnée d'additions ou d'articles additionnels, publics ou secrets, sans que toutes ces circonstances influent en aucune manière sur la validité des diverses stipulations.

OBJET ET DIVISION GÉNÉRALE DES TRAITÉS.

§ 90. Les traités internationaux ont pour objet soit certaines prestations de droit ou réelles d'une durée limitée, soit des rapports permanents d'alliance. Ce double but peut naturellement, d'une manière principale ou accessoire, être combiné dans la même convention.2

A la première catégorie appartiennent les innombrables traités relatifs à des intérêts politiques, par lesquels les États souverains s'accordent certains droits, d'après les modes usités en matière civile, par voie unilatérale ou réciproque, avec ou sans

1) Moser, Vers. VIII, 55. X, 2. 356.

2) A ce sujet Martens, Klüber et d'autres auteurs divisent d'une manière analogue les traités en transitoires, en alliances et en traités mixtes. On ne peut contester tout au plus que ces dénominations. Mais la distinction de Pölitz, Völkerr. § 50 suiv. entre traités politiques et privés, nous paraît très-peu heureuse.

un équivalent correspondant; quelquefois ils ont aussi pour objet de déterminer, de préciser plus exactement, ou de faire cesser des rapports de cette nature déjà établis. Tels sont notamment les traités de cession ou de renonciation moyennant vente, échange ou donation;

les traités de limites;

ceux de partage;
ceux de prêt;

l'établissement de servitudes publiques;

les traités qui ont pour objet de constituer une souveraineté
en fief, pourvu qu'ils ne portent par là aucun préjudice
à un droit de suzeraineté déjà établi (jus curiae);
les traités de succession.

Ces différentes espèces sont régies en général par les mêmes principes qui, fondés pour la plupart sur le droit romain, se sont développés d'une manière uniforme et se retrouvent dans les lois de tous les États de l'Europe chrétienne. Il faudra seulement excepter ceux que les intérêts particuliers d'un État ont introduits dans son droit privé, par exemple ceux qui concernent les formes des actes ou qui, par égard pour les moeurs d'une nation, prohibent certains autres. Ainsi il est incontestable que dans les traités commutatifs, où l'une des parties s'engage à donner ou à faire quelque chose moyennant un équivalent, une garantie est due pour cause d'éviction et à raison des défauts cachés dont l'absence a été une clause tacite de la convention. Mais la perte ou les détériorations, survenues depuis par force majeure ou par accident, ne sont pas une cause de résiliation des traités."

1) Ainsi les pactes successoriaux relatifs à la souveraineté d'un prince régnant, ne doivent pas être regardés comme illicites par cela seul que le droit romain et quelques Codes modernes (Code Nap. art. 791) les proscrivent en matière civile.

2) Souvent elle est stipulée expressément; v. Günther, Völkerrecht. II, p. 135.

3) De même en cas de partage de biens communs. L. 11. pr. Dig. de eviction. Les auteurs du droit naturel sont toujours très-divisés sur la question de savoir qui supporte la perte de la chose aliénée mais non livrée. V. Grotius II, 12. 15. Pufendorf V, 5. 3.

Il nous paraît inutile de nous livrer à de plus amples développements sur les rapports qui, dans ces diverses espèces, existent entre le droit international et le droit privé d'un État, tant à cause de leur grande rareté, que des précautions employées aujourd'hui dans la rédaction des traités.

TRAITÉS D'ASSOCIATION.

§ 91. Les traités d'association des États et des souverains, qui ont pour objet une réunion permanente dans un but déterminé, sont d'une portée bien supérieure à celle des associations privées. Le droit public de l'ancien monde distinguait à cet égard entre „amicitia, hospitium, foedus."1 La pratique moderne des États distingue entre alliances et confédérations.

2

Les traités d'alliance, dans l'acception la plus large, sont ceux qui règlent la conduite politique de plusieurs États ou souverains, soit entre eux, soit envers d'autres, dans un intérêt commun ou individuel, d'une manière générale ou dans des cas déterminés, et leur imposent des charges égales ou inégales.

Les Confédérations ou traités d'associations proprement dits, qui sont conclus en vue d'une réalisation de buts communs par des institutions communes et durables.

Nous traiterons de ces deux espèces par la suite. Serait regardé comme entaché de nullité le traité qui accorderait à l'un des associés la totalité des bénéfices, ou qui l'affranchirait de toute contribution aux pertes.3 L'idée d'une société léonine étant contraire au principe de la société, il faut seulement excepter le cas où l'une des parties, après avoir pris connaissance de cette inégalité, a consenti, par voie de donation, à affranchir l'autre de toute contribution aux charges communes.*

1) L. 5. § 2. Dig. de captiv.

2) D'autres distinctions se trouvent dans Pufendorf VIII, 9.
3) Code Nap. art. 1855.

4) Tous les Codes s'accordent sur le principe, ainsi que les anciens auteurs. Grotius II, 12. 24. Pufendorf V, 8. 3. Cependant la restriction que nous avons ajoutée, est incontestable à l'égard des personnes capables de contracter. Stryk, De diversis sociorum pactis. Hal. 1708. p. 26. de Neumann, loc. cit. § 731. V. aussi Allgem. Landrecht für die preufs. Staaten. I, 17. 245.

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