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sion imaginaire où toutes leurs ambitions fussent à leur aise. On la trouva dans l'étude et dans la pratique de la loi. Mais tout dans cette nouvelle découverte fut imaginaire: autel, temple, Ville-Sainte, la résidence de différens corps législatifs, les époques des assemblées nationales, les familles, les tribus, les armées et même les combats. Mais comme les auteurs de cette découverte renonçaient à regret à la réalité des choses, on voit leurs esprits dans une réaction continuelle et pénible. Ils s'efforcent à la fois de ne point céder le terrain et de se faire illusion sur les pertes qu'ils ont faites. La raison qui passe du monde réel dans une région idéale, croit avancer lorsqu'elle recule; se roidit contre la nécessité, se trouble et outre tout. Chaque docteur, chaque précepteur exige qu'on l'appelle grand, sublime, prince et roi, malgré les haillons qui le couvrent. Il prend son vieux fauteil pour la chaire de Moïse, et chacun de ses disciples s'imagine entendre Dieu parler sur le Sinaï. Voici en peu de mots l'état des choses qui a enfanté le Talmud de Babylone (303 77250) et qui a été perpétué jusqu'à nous, moyennant l'étude de ses doctrines. Il est à présumer que les écoles d'Orient fournirent tous les matériaux pour commenter la Mischna de Juda le Saint, ainsi que venaient de le faire celles d'Occident; mais les deux Ghémares conservent entr'elles tant de points d'analogie qu'elles paraissent dérivées en grande partie de la même source.

Tous les historiens juifs qui parlent de la compilation de la Ghémara de Babylone 65) sont presque unanimes sur trois circonstances principales:

1o. Qu'un directeur d'école nommé R. Ache fut le premier à compiler ce commentaire, mais que la mort l'empêcha de le conduire à son terme.

2°. qu'il eut pour collaborateur un autre docteur de la loi appelé R. Avina ou Ravina.

1

65) Voy. les livres Chalcheleth Hakkabala fol. 35. p. 1. Halikoth Olam C. 1. §. 10 et 13. Juhasin p. 75. b. et 117. b. Zemach David à l'année 4260 et autres.

3o. qu'un certain R. Jose y mit la dernière main 73 ans après la mort de R. Ache; car dans cet intervalle de temps les calamités furent trop grandes pour penser à continuer ce travail.

L'opinion' plus reçue porte que R. Ache est mort l'an de J. Ch. 427 et que par conséquent R. Jose a fait la clôture du Talmud de Babylone vers la fin du Ve siècle ou vers le commencement du VI 6 6 ).

Ce qui peut confirmer cette opinion et rectifier en même temps la chronologie du Talmud de Jérusalem, c'est que le Koran a été évidemment composé après la Ghémara de Babylone, car on lit les mêmes fables dans l'un et dans l'autre code. Telles sont p. ex. la fable du mont Sinaï suspendu sur la tête des Israélites et prêt à les ensévelir sous ses ruines, s'ils osaient refuser d'accepter la loi de Dieu et l'autre des démons qui prêtèrent leur main d'oeuvre à la construction du temple de Salomon 67). Il est même probable que Mahomet a voulu faire allusion au Talmud lorsqu'il a fait dire à Dieu en parlant des Juifs: J'ai apporté à Moïse le livre, et l'Alfarcan pour vous servir de guide 6 8), car c'est comme s'il avait dit: je lui ai confié la loi écrite et la loi orale qui sert à expliquer la première. Ces passages, ainsi que plusieurs autres semblabes, suffisent pour nous convaincre que Morinus n'a pas raison de mettre la rédaction du Talmud de Babylone dans le VIIIe siècle, lorsqu'il est certain qu'elle a été faite avant le Koran qui tombe nécessairement entre les années 571 et 625 de J. Ch. Il suit de là également que le Talmud de Jérusalem, dont la composition précède d'un siècle, environ, celle du Talmud de Babylone; rentre naturellement dans l'époque que nous lui avons assignée. Si ce dernier aussi contient des expressions qui n'ont été en usage qu' après le VII° siècle c'est qu'elles ont dû passer de quelque glose postérieure dans le texte.

66) Wolf ib. p. 685–691.

67) Chabb. 88. a. Sura VII, 172. Gillin 168. a. Sura XXXVIII, 39. cf. Sura XXI, 82 etc.

68) Sura II, 53.

Le Chaldéen était la langue qu'on parlait dans le pays où la Ghémara de Babylone a été compilée; mais les Chaldéens eux-mêmes, en avaient déjà beaucoup altéré les formes primitives. Il ne nous sera pas difficile d'imaginer combien les Juifs ont dû enchérir sur cette altération; en jetant un coup d'oeil sur ce qu'ils font maintenant lorsqu'ils adoptent les langues des non-Juifs pour familières. Qu'on n'aille pas m'objecter que cette illation du vulgaire des temps modernes aux docteurs de la loi des temps anciens est exagerée; car il est incontestable que les auteurs du Talmud de Babylone ont presque aussi peu respecté les règles grammaticales, que la masse des Juifs d'aujourd'hui. De là vient, comme nous l'avons fait remarquer dans notre Théorie, que la langue talmudique n'a presque pas de grammaire et que difficilement elle pourrait en avoir. En lisant ce Talmud on est tenté de soupçonner qu'il n'a pas été tiré des écoles, mais des ateliers de tout genre. Ses rédacteurs sont des marchands de vin, des charbonniers, des forgerons etc. etc. qui non seulement y ont inséré les idiotismes et les proverbes du peuple, mais ils y ont versé aussi beaucoup de contes et de traditions populaires.

Cependant c'est par trois qualités principales qu'il se distingue du Talmud de Jérusalem, savoir:

1o. par la confusion qu'il répand sur toutes ses doctrines et qui pourrait bien lui avoir valu le nom de

(babli).

2o. par la subtilité ou la souplesse que les esprits des docteurs de la loi de ce temps déploient dans la lutte inégale qu'ils avaient à soutenir contre la violence et une dure nécessité.

30. par l'amertume et la haine qu'il respire contre toutes les nations qui avaient contribué à l'esclavage des Juifs, et sur-tout contre les Chrétiens dont le culte s'enracinait et se propageait de plus en plus vers le quatrième siècle, en élevant des prétentions et des plaintes contre la Synagogue.

Quoique nous ayons déjà donné l'arrangement du Talmud de Babylone dans la Théorie du Judaïsme nous croyons indispensable de le répéter ici, mais sous un autre

point de vue. Nous le présenterons ici en forme de catalogue alphabétique propre à familiariser nos lecteurs avec la nomenclature de toutes les parties d'un code aussi compliqué, et à leur servir comme de répertoire. En effet par ce catalogue on pourra reconnaître à quel ordre du Talmud chaque traité appartient, où on doit le chercher et combien de Sections et de Mischnes il contient.

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73 (Gittin, Divorces). Nachim | IV. IX. | 75.

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D (Zavim, Pollués). Tahoroth IX. | V. 32.

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