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(Dessin de ROBIDA.)

Le connétable de Clisson rapporte à son hôtel, rue Vieille-du-Temple. (Extrait du vol. Paris de Siècle en Siècle. Edition Librairie Illustrée.)

Je suis Pierre de Craon, votre ennemi; vous m'avez offensé tant de fois, qu'il vous faut le payer aujourd'hui. En avant! cria-t-il à ses gens; je tiens celui que je voulais.

Et, le premier, il donna l'exemple de frapper. Les serviteurs du connétable étaient sans armes; lui-même n'avait qu'un petit coutelas de deux pieds de long. Seul, il commença

table, quelques-uns furent étonnés; leurs coups étaient mal assurés; ils attaquèrent avec peur, car la trahison n'est jamais hardie. Le conné. table les repoussait de son mieux avec son coutelas, et se tenait ferme à cheval.

Enfin, il fut atteint d'un coup sur la tête et tomba sans mouvement. Il s'était adossé à la porte d'un boulanger. Cet homme était

encore levé, et chauffait son four. Entendant le bruit, il avait entr'ouvert sa porte. Le connétable, en tombant, acheva de la pousser: sa tête et une partie de son corps se trouvèrent ainsi dans la boutique. Le boulanger le tira tout à fait au dedans; ce fut ce qui le sauva. Messire Pierre et ses gens ne pouvaient entrer à cheval par cette porte; ils n'osèrent pas mettre pied à terre. Il Allons-nous-en, dit-il, en voilà assez. est mort, ou, du moins, il ne réchappera pas du coup qu'il a reçu à la tête.

Ils prirent tout de suite le chemin de la porte Saint-Antoine, et se sauvèrent au plus vite. Alors, les serviteurs du connétable, qui s'étaient dispersés, revinrent et trouvèrent leur maître entre les mains de ce boulanger, baigné dans son sang et n'ayant nulle apparence de la vie. Ils commencèrent à pleurer et à crier.

Bientôt, la nouvelle en arriva à l'hôtel SaintPaul. Le roi allait se mettre au lit.

Ah! sire! lui dit-on, nous ne devons pas vous cacher le grand malheur qui vient d'arriver dans Paris.

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Quel malheur, et à qui? dit le roi.

A votre connétable, sire! à messire Olivier de Clisson, qui vient d'être tué.

Tué! reprit le roi, et par qui?

On ne le sait pas; mais c'est ici près, dans la rue Sainte-Catherine.

Vite, des flambeaux, s'écria le roi, je veux l'aller voir.

I jeta une houppelande sur ses épaules et partit sans attendre sa garde ni sa suite. Il entra dans la boutique. On avait déshabillé le connétable; il commençait à recouvrer ses sens.

Ah! connétable, comment Vous sentezvous? dit le roi.

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Regardez mon connétable, leur dit le roi, et sachez me dire ce qu'il y a à craindre. Je suis désespéré de sa blessure.

Pendant qu'ils examinaient, il demandait toujours impatiemment s'il y avait danger de mort; quand on lui eut dit que non et que, dans quinze jours, le blessé pourrait monter à cheval, le roi fut bien content.

Dieu soit loué, dit-il, c'est une très heureuse nouvelle. Connétable, soignez-vous, et ne vous inquiétez pas. Cette affaire me regarde, et les traîtres seront punis.

Merci de votre bonne visite, dit le connétable d'une voix éteinte; que Dieu vous le rende:

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Le roi envoya chercher le prévôt de Paris et lui ordonna de faire courir après le traître Craon. Mais le prévôt était en peine de savoir la route qu'il avait suivie. Il n'en eût pas été ainsi, s'il y avait encore eu des portes à la ville, et des chaînes dans les rues. On se souvint, pour lors, que c'était par le conseil du connétable que, dix ans auparavant, le roi les avait fait ôter pour punir les Parisiens en revenant de Rɔsebecque.

Les poursuites, quelque diligence qu'on y mit, furent donc inutiles. On sut que sire de Craon était arrivé à huit heures du matin à Chartres, s'y était reposé quelques mo-. ments chez un chanoine, son ancien serviteur, et de là avait continué sa route vers le Maine. Ses gens, qui n'étaient pas si bien montés, n'avaient pu le suivre et s'étaient dispersés en se cachant. Deux d'entre eux et un page furent pris dans un village à sept lieues de Paris. On les amena sur-le-champ devant le Châtelet. Quatre jours après le crime, ils furent condamnés. D'abord, ils eurent le poing coupé dans la rue Sainte-Catherine; puis, on les conduisit aux Halles, où ils eurent la tête tranchée. Leurs corps furent ensuite suspendus au gibet. Le concierge de l'hôtel de Craon subit la même condamnation. Le chanoine de Chartres, chez qui messire Pierre s'était arrêté, fut, malgré la renommée dont il jouissait, condamné à passer le reste de ses jours dans un cachot au pain et à l'eau.

Ces châtiments des serviteurs du sire de Craon ne suffirent pas à la justice et à la colère du roi. Dès le lendemain, toute la ville de Paris avait été en rumeur et en indignation de ce forfait. Le sire de Coucy arriva aussitôt chez son vieux compagnon et frère d'armes, qu'il aimait depuis si long. temps. Tous les autres seigneurs s'empres sèrent de lui témoigner leur attachement. Le duc de Touraine venait sans cesse le visiter, et ne faisait qu'animer le roi, en lui remontrant que c'était une insulte à son autorité, et une tentative pour troubler le royaume. Ainsi le procès du sire de Craon ne tarda pas à être instruit. Il fut ajourné; n'ayant pas comparu, il fut au ban, et ses biens confisqués. Son hôtel de Paris fut démoli et le terrain donné au cimetière SaintJean. La rue de Craon, qui passait tout au long, reçut le nom de rue des Mauvais-Garçons. L'amiral fut chargé d'aller prendre possession du beau château de la Ferté-Bernard, où l'on croyait que le sire de Craon pouvait être caché. Il n'y trouva que sa femme, Jeanne de Châtillon, et sa fille. Il les chassa demisans leur laisser nul asile; il y avait pour plus de quarante mille écus de meubles en ce château. Les autres terres furent ainsi distribuées. Le duc de Touraine en eut la plus grande part.

nues,

(Histoire des Ducs de Bourgogne. Barante.)

L'Hôtel de Guise

Dans l'immense hôtel magnifiquement installé et meublé, orné de peintures murales du Primatice, décoré de tapisseries merveilleuses qui étaient, d'après Sauval, avec celles du Vatican et du Louvre, les plus belles du monde, les Guises tenaient une véritable cour et pouvaient loger une suite considérable de gentilshommes attachés à leur fortune, garnison qui s'augments, aux jours critiques, de soldats et de partisans nombreux.

A François de Guise, défenseur de Metz, as

parlementaires ou sorbonnistes, les gens d'épée cherchant le bon parti, les bourgeois remuants, les terribles Seize. Le fil de toutes les intrigues secrètes aboutit ici et c'est d'ici que part le signal de toutes les complications qui viennent embrouiller et compléter l'anarchie du pauvre

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Autant et plus que le Louvre, l'hôtel de Guise a trempé dans le sang de la SaintBarthélemy; la tentative d'assassinat de Maurevel sur Coligny y fut tramée, et c'est le duc de Guise, dans son hôtel changé en place de guerre et rempli de soldats, qui organisa

sassiné sous Orléans par Poltrot de Méré, succéda Henri de Guise, le Balafré, qui devait périr à Blois. Dans l'Etat bouleversé par les factions, au moment le plus terrible des guerres de religion, la maison de Guise si rapidement élevée, n'ayant plus de frein à ses ambitions, pouvait tout espérer. Elle avait déjà les cœurs d'une bonne partie des Français détachés des Valois dégénérés; Paris conquis par ses curés et ses prédicateurs, par les meneurs fanatiques, était Guisard. Les Guise pouvaient nourrir l'espoir de culbuter les fils de l'Italienne Catherine de Médicis, de rejeter sa Gascogne ou supprimer le Béarnais, cet Henri de Bourbon que Charles IX avait épargné à la SaintBarthélemy, puis, cet héritier du trône écarté, d'enlever le trône de France au roi des Mignons, à cet Henri III méprisé, que les ciseaux de la duchesse de Montpensier comptaient bien tonsurer pour en faire frère Henri de Valois.

En ces années tumultueuses, de 1560 à 1594, l'hôtel de Guise est une citadelle rivale du Louvre. C'est là que les ligueurs prennent le mot d'ordre, les gens de robe, intrigants,

le massacre, donna l'ordre au prévôt des marchands et aux échevins de préparer leurs ge Aux coups du tocsin, l'hôtel de Guise s'c et lâche par la ville ses bandes de forc tandis que Guise lui-même, à la tête d'une troupe, marche sur la maison de l'amiral faire exécuter sous ses yeux ce que Ma avait manqué deux jours auparavant.

Pendant les années qui suivent, Gu aussi roi, sinon plus, que cet Henri Il lequel il ne cache pas son mépris. Les tilshommes de l'hôtel de Guise insultent journellement les mignons du roi et lui tuent les plus aimés, Quélus et Maugiron, tombés dans les fameux duels de trois contre trois, aux Tournelles, près de la Bastille. Guise est le vrai roi de la ville de Paris, le roi de la très sainte Ligue dont il tient tous les fils avec ses frères Mayenne et le cardinal de Guise, jouant même avec adresse, pour l'opposer au roi de Navarre, de son oncle le cardinal de Bourbon. De ce vieillard, ils ont l'air de faire l'héritier éventuel du trône, dont cha. que pas semble les rapprocher, pas assez vite,

cependant, au gré de l'impatience de la sœur des Guise, l'ardente et vindicative duchesse de Montpensier, qui, à elle seule, suffirait à en tretenir toutes les intrigues, toutes les machi nations de la maison, à maintenir à la température voulue, dans la cuve parisienne, le bouillonnement des passions révolutionnaires savamment malaxées.

L'heure étant venue, l'insurrection parisienne étant bien préparée, tous les rôles sus, la place des barricades, faites de tonneaux remplis de terre, adoptée, les chefs de quartiers nommés, les capitaines guisards introduits et cachés, le duc de Guise, malgré la défense du roi, entre dans Paris. C'est un triomphe, une ovation sans fin, de la porte Saint-Denis à l'hôtel de Soissons où, tout d'abord, il se rend pour saluer la reine mère. Puis il a l'audace de se présenter au Louvre, où peu s'en faut qu' .ne trouve ce qui l'attend à Blois.

Sire, tenez-vous M. de Guise pour votre ami ou votre ennemi? dit au roi le colonel des gardes, Alphonso d'Ornano; il ne faut qu'un mot sans vous en donner autrement peine et je vous apporte aujourd'hui sa tête à vos pieds.

Mais Henri III ne dit pas le mot, il n'ose, cette fois. Il ne se sent pas assez fort dans Paris, au milieu de ce peuple dont il a entendu jusque sous ses fenêtres les cris d'amour fré nétiques pour les Guise, << de qui la France, a-t-on dit, est folle, car c'est trop peu de dire

amoureuse ».

Rentré à l'hôtel de Guise, le Balarré prend les dernières mesures pour le corps à corps avec le roi; l'hôtel de Guise devient un arsenal et un quartier général. Dans le jour, ce ne sont qu'allées et venues de gentilshommes, de cu rés, de capitaines et de bourgeois; les meneurs populaires sont les plus caressés par les princes lorrains. Pendant la nuit, on amène à l'hôtel grande provision d'armes. Le roi, de son côté, fait venir des troupes.

Le jeudi 12 mai 1588, la mine éclate, un immense réseau de barricades couvre la ville. Tout le monde marche sous la direction des diseniers et quarteniers, dans la fumée des arquebusades; les suisses sont cernés, culbu tés et désarmés. Guise, toute la journée, resta aux fenêtres de l'hôtel de Guise, surveillant son œuvre et occupé à donner des ordres. A quatre heures, la révolte étant partout maî tresse et les troupes qui n'étaient pas prison.. nières rabattues sur le Louvre, Guise sortit de son hôtel en pourpoint blanc tailladé, avec une suite de gentilshommes. Les rues autour de l'hôtel sont pleines de monde; à sa vue, c'est une frénésie d'enthousiasme, les gens des barricades, la foule qui se presse, bourgeois et bourgeoises l'acclament.

Il ne faut plus lanterner, crient des gens, il faut le mener à Reims!

On l'étourdit, par les rues, de tant de cris de: « Vive Guise! », qu'il ne fait que lever son grand chapeau et qu'il feint d'en être fâché.

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Mes amis, c'est assez; messieurs, c'est trop. Criez Vive le roi!

Il est presque au but, maintenant; il ne reste plus, pour achever l'œuvre, que la suppression d'Henri 111, et c'est, il y compte bien, ce que les Parisiens fanatisés vont faire sans qu'il ait besoin d'y mettre la main. Déjà, des gens à lui excitaient le peuple à compléter sa victoire par la prise du Louvre! Allons prendre et barricader ce bougre de roi dans son Louvre! criait-on aux carrefours changés en places d'armes.

Toute la nuit se passe ainsi, tumultueuse; les bourgeois de la Ligue ont saisi les portes de la ville, ce qui permet aux partisans des Guise d'accourir; ils s'emparent de l'Hôtel de Ville et de l'Arsenal et bloquent la Bastille; les barricades touchent le Louvre et tout semble présager une grande attaque du château.

Ce vendredi, la reine-mère monte en sa chaise, et, péniblement, à travers la foule armée, à travers les retranchements des rues << si dru semées », où elle obtient difficilement passage, elle se dirige vers l'hôtel de Guise, quartier général de l'insurrection déchaînée. Elle tente une dernière démarche auprès du duc de Guise, le suppliant d'éteindre tant de feux allumés et de venir s'entendre avec le roi, disposé à toutes les concessions. Le duc de Guise répond froidement qu'il n'y peut plus rien, que le peuple est un taureau échappé qu'on ne peut plus retenir : il déplore l'état des choses, mais, quant à aller au Louvre, il s'y refuse absolument, ne voulant se mettre à la merci de ses ennemis.

Cette démarche, cependant, sauve peut-être le roi, car, pendant ces négociations, les colonnes ligueuses qui se préparent à marcher sur le Louvre ne reçoivent point les ordres de Guise et l'appoint de soldats dont le courage éprouvé doit donner de la vigueur à l'attaque. Guise tergiverse et va laisser échapper la proie qu'il tient presque en sa main. Henri III, prévenu par sa mère, comprend que, s'il reste un instant de plus, il est perdu, et il se décide à une fuite précipitée.

Jamais plus il ne remettrait le pied dans Paris; il ne devait le revoir que de loin, des hauteurs de Saint-Cloud, quand il essaya de tenir son serment d'y rentrer par la brèche. Mais alors l'arrêta le couteau du cordelier Jacques Clément, mis en la main du moine par la duchesse de Montpensier qui, à la journée des Barricades, n'aurait pas eu les hésitations de son frère.

Dans son journal, l'Estoile raconte qu'à la nouvelle de cette fuite qui renversait tous les plans des Guisards, « un quidam dit que les deux Henri avaient tous deux bien fait les ânes », l'un pour n'avoir pas eu le cœur d'exécuter ce qui avait entrepris, c'est-à-dire de faire tuer Henri de Guise à sa visite au Louvre et fait donner sérieusement ses troupes au commencement du soulèvement, et l'autre pour avoir, le lendemain, laissé échapper la bête qu'il tenait en ses filets.

L'hôtel de Guise, n'ayant point réussi à force ouverte, reprit sa politique de feintes et de machinations, qui devaient bien étonner le bon badaud ligueur ne voyant pas plus loin que le bout de sa hallebarde; le duc de Guise, pour reprendre contact avec le roi réfugié à Chartres, ouvrit les négociations par une sin gulière ambassade, une procession de capucins conduite par frère Ange, un Joyeuse qui s'était fait moine et qui, plus tard, redevint homme d'épée. C'était une procession ridi. cule ou, plutôt, une mascarade.

En tête des capucins, frère Ange, déguisé en Jésus-Christ couronné d'épines, lié et garrotté, marchait sous les coups de fouet entre deux femmes représentant Marie et Madeleine; des soldats venaient derrière en costumes burlesques, portant, en guise de casques, des marmites renversées et brandissant de vicilles armes rouillées.

On négocia; par un accord signé entre le roi et les princes, le duc de Guise fut nommé lieutenant-général du royaume. S'y croyant tout autant qu'à Paris le maître de la situation, il alla aux Etats, réunis à Blois, où les élections avaient envoyé une majorité ligueuse, où le président du Tiers était la Chapelle-Marteau, un des Seize, un des chefs de la journée des Barricades, devenu prévôt des marchands de par les Guise.

Cette fois, le roi osa et deux des Guise périrent le Balafré et le Cardinal.

A l'hôtel de Guise, il ne restait plus que Mayenne et la duchesse de Montpensier; la déchéance du roi fut proclamée dès qu'arriva la nouvelle du meurtre et Mayenne, prenant la présidence du Conseil général de l'Union, se nomma lieutenant-général. Paris vécut dans l'effervescence révolutionnaire on pendit, on emprisonna les royaux et les politiques, pendant que l'armée de Mayenne manœuvrait autour de Paris contre l'armée royale formée des troupes combinées d'Henri de Valois et d'Henri de Navarre. Quand, à la fin de juil. let 1589, les deux rois vinrent attaquer Paris, les Seize firent « resserrer» en toutes les prisons de Paris environ trois cents bourgeois des plus apparents et notables, pris comme otages, et la duchesse de Montpensier, à l'hô tel de Guise, eut des conférences avec le petit cordelier Jacques Clément, amené par le prieur Bourgoin. Bien caressé et catéchisé Saint Cloud, et son couteau vengea l'assassinat de Blois.

L'hôtel de Guise savourait la joie de la vengeance; la duchesse et les gentilshommes prirent l'écharpe verte en signe d'allégresse; mais tout n'était pas fini, car il restait Henri de Navarre, devenu le grand adversaire. Celui-ci, après sa victoire d'Ivry, revint attaquer Paris. Dans la ville assiégée, affamée. affolée, le foyer révolutionnaire entretenu par les Guise flamba si fortement, devint si dangereux, les Seize, en vrai Comité de Salut public, poussés par le curé Boucher, qui était une sorte de

Marat pensionné par l'Espagne, allèrent si loin dans leurs fureurs démagogiques que Mayenne, les voyant dépasser de beaucoup ses plans, dut se hâter d'intervenir et de faire pendre quelques-uns de ceux qu'il avait précédemment le plus caressés.

Mais après cinq années encore d'agitations, l'hôtel de Guise, d'où sont sortis tant de maux pour la France et pour Paris en particulier, ce palais de la Ligue responsable de toutes les horreurs déchaînées, des férocités de la popu lace guisarde, de la guerre civile, de l'appel aux Espagnols, de la terrible famine du siège, l'hôtel de Guise est enfin vaincu.

Le fils du Balafré et Mayenne lui-même, peu après, essoufflé par cinq années de campagnes, firent leurs accommodements avec Henri IV, victorieux partout, maître de Paris, oint de la Sainte-Ampoule et rentré dans le giron de l'Eglise catholique. L'hôtel de Guise, humilié, déçu dans ses ambitions, n'est plus ce quartier général de la rébellion qu'il a été tant d'années; Mayenne s'en va bâtir un hôtel particulier, en face de celui de Sully, son vieil ennemi, dans la rue Saint-Antoine. L'hôtel de Guise, silencieux maintenant, reste, pendant un siècle encore, aux mains des descendants du Balafré, seigneurs opulents qui ont renoncé aux grands rêves et dont l'ambition ne trouble plus l'Etat. On ne loge plus de conspirateurs à l'hôtel de Guise; ses immenses bâtiments, que la foule des traîneurs d'épée ne remplit plus, donnent l'hospitalité à des protégés de la maison de Lorraine, à de tranquilles gens de lettres, entre lesquels Corneille pendant quelque temps.

(Paris de Siècle en Siècle.)

موعة

A. ROBIDA.

L'Hôtel de Soubise

C'est dans l'ancienne antichambre de la reine Marie-Thérèse qu'on a placé le scul portrait que le musée de Versailles possède de Mine de Soubise, à côté de ceux de Mlle de la Vallière et de Mmes de Montespan et de Maintenon, faisant face tous les quatre au Louis XIV peint sur un cheval blanc par Ch. Lebrun. Cette toile, très mal éclairée, est un peu moins insignifiante que tant de portraits de femmes de la fin du dix-septième siècle. En regardant de près la peinture et comparant les détails avec différents passages des mémoires où SaintSimon a décrit le genre de beauté de la mère du cardinal de Rohan, on arrive à accepter comme authentique l'inscription tracée sur la toile même : « Anne Chabot de Rohan, princesse de Soubise. » Les cheveux sont, sinon d'un roux rutilant, au moins d'un blond dou teux (il faut tenir compte du mauvais état du tableau). Le visage est charmant de forme et de teint; les yeux, d'un brun clair, paraissent un peu petits et bridés, mais fort brillants;

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