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terrestre est formé de grains de sable; quiconque voudra faire en avant un seul pas doit être des vôtres jusqu'à ce qu'il vous quitte. Un roi donne une loi plus libérale, applaudissez en demandant celle qui doit suivre. Un ministre ne montre que des intentions progressistes, donnez-le pour modèle. Un grand seigneur affecte de bouder ses priviléges, mettez-vous sous sa direction; s'il veut s'arrêter vous êtes à temps de le laisser, il restera isolé et sans force contre vous, et vous aurez mille moyens de rendre impopulaires ceux qui seront opposés à vos projets. Tous les mécontentements personnels, toutes les déceptions, toutes les ambitions froissées peuvent servir la cause du progrès en leur donnant une bonne direction.

« L'armée est le plus grand obstacle au progrès du socialisme; toujours soumise par son éducation, par son organisation, sa discipline et sa dépendance, elle est un puissant levier pour le despotisme. Il faut la paralyser par l'éducation morale du peuple. Quand on aura fait passer dans l'opinion générale, l'idée

què l'armée faite pour défendre le pays, ne doit, dans aucun cas, se mêler de la politique intérieure et doit respecter le peuple, on pourra marcher sans elle et même contre elle, sans danger.

« Le clergé n'a que la moitié de la doctrine sociale, il veut comme nous la fraternité qu'il appelle la charité. Mais sa hiérarchie et ses habitudes en font un suppôt d'autorité, c'està-dire, de despotisme; il faut prendre ce qu'il a de bon et couper le mal. Tâchez de faire pénétrer l'égalité dans l'Église et tout marchera. La puissance cléricale est personnifiée dans les jésuites. L'odieux de ce nom est déjà une puissance pour les socialistes, servez-vous-en. »>

Est-il possible d'attaquer plus carrément les bases fondamentales de la société, à savoir l'autorité? La préméditation est formelle, le but est manifeste, la preuve concluante; Mazzini le déclare lui-même, c'est l'édifice social qu'il faut renverser en détruisant le principe de sa vitalité, en brisant sa clé de voûte l'autorité. Que doivent faire encore les sociétés secrètes pour arriver à la réalisation de leurs

espérances? Leur chef va vous le dire en terminant.

« Associer, associer, s'écrie-t-il, associer; tout est dans ce mot. Les sociétés secrètes donnent une force irrésistible au parti qui peut les invoquer. Ne craignez pas de les voir se diviser; plus elles se diviseront, mieux ce sera. Toutes vont au même but par des chemins différents; le secret sera souvent violé, tant mieux; il faut du secret pour donner de la sécurité aux membres, mais il faut une certaine transparence pour inspirer de la crainte aux stationnaires. Quand un grand nombre d'associés recevant le mot d'ordre, pour répandre une idée et en faire l'opinion publique, pourront se concerter pour un mouvement, ils trouveront le vieil édifice percé de toutes parts et tombant comme par miracle au moindre souffle du progrès. Ils s'étonneront eux-mêmes de voir fuir devant la seule puissance de l'opinion, les rois, les seigneurs, les riches, les prêtres qui formaient la carcasse du vieil édifice social. Courage donc et persévérance. »

Voilà ce que le chef des sociétés secrètes en

Italie écrivait sous le pontificat de Grégoire XVI, et deux années avant la venue de Pie IXau trône de saint Pierre. Déjà les rameaux parasites du socialisme couvraient la surface de la Péninsule cherchant à étouffer la religion dans la personne de ses ministres, la propriété dans la personne de ceux qui possèdent, les droits réciproques dans la personne des princes.

Mazzini va plus loin encore, et si fort que l'on soit, on frémit d'horreur en lisant dans un ouvrage, publié à Naples par Benedetto Cantalupo, la suivante organisation de la jeune Italie:

« Art. 1er. La société est instituée pour la destruction indispensable de tous les gouvernements de la Péninsule et pour former un seul État, de toute l'Italie, sous la forme républicaine.

« Art. 2. En raison des maux dérivant du régime absolu et de ceux plus grands encore, des monarchies constitutionnelles, nous devons réunir tous nos efforts pour constituer une république une et indivisible.

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« Art. 30. Les membres qui n'obéiront point aux ordres de la société secrète, et ceux qui en dévoileront les mystères, seront poignardés sans rémission.

« Art. 31. Le tribunal secret prononcera la sentence en désignant un ou deux affiliés pour son exécution immédiate

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« Art. 32. L'affilié qui refusera d'exécuter la sentence prononcée, sera reconnu parjure et comme tel mis à mort sur-le-champ.

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« Art. 33. Si la victime condamnée parvient à s'échapper elle sera poursuivie sans relâche, en tout lieu, et le coupable sera frappé par une main invisible, se fût-il réfugié sur le sein de sa mère ou dans le tabernacle du Christ.

« Art. 34. Chaque tribunal secret sera compétent, non-seulement pour juger les adeptes coupables, mais encore pour faire mettre à mort toutes les personnes qu'il aura vouées à la mort.

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