Images de page
PDF
ePub

Le froment croîtroit à Madagascar dans la même abondance que le riz. Il a été cultivé autrefois avec fuccès dans l'établissement que nous poffédions à la pointe méridionale de l'ifle fous le nom de Fort Dauphin. On y trouve encore aujourd'hui de beaux épics de froment qui y fut cultivé anciennement, & qui depuis que nous en avons été chaffés, s'eft femé annuellement de lui-même, & croît pêlemêle avec les herbes naturelles du pays. Les terres y font d'une fertilité inconcevable; les infulaires font intelligents & adroits. Dans les quartiers où les Arabes n'ont point pénétré, ils ont les fimples loix de la nature, & les mœurs des premiers hommes. Ces loix & ces mœurs font plus favorables à l'agriculture que toutes nos fublimes fpéculations, que nos traitės les plus complets fur les meilleures pratiques, que tous ces moyens employés de nos jours pour ranimer par

:

mi nous, un art que nos mœurs nous font regarder avec mépris, ou traiter avec légéreté, qui eft fans ceffe harcelé, fans ceffe opprimé par une foule d'abus fortis de nos loix mêmes,

Ifle de Bourbon,

A 200 lieues environ à l'Eft de Madagascar, on trouve nos deux Ifles. de Bourbon & de France, dont le fol eft naturellement auffi fertile que celui de Madagafcar, & qui jouiffent d'un climat beaucoup plus heureux, La premiere de ces Ifles n'a aucun port; elle est peu fréquentée par nos vaiffeaux, Les habitants y ont confervé des mœurs fimples; l'Agriculture y eft affez floriffante. L'Ifle de Bourbon produit du froment, du riz, du maïs pour les befoins de fes habitants, & même pour fournir à une petite par tie de ceux de l'Ifle de France. La culture y eft la même qu'à Madagascar,

les troupeaux de bœufs & de moutons qui y ont été transportés de cette grande Ifle y réuffiffent d'autant mieux, qu'on a eu l'attention d'y transporter auffi le gramen nommé fatak, que j'ai dit ci-devant être un excellent pâturage.

La plus grande partie des terres de cette Ifle eft employée à la culture du caffier. Les premiers plants de cet arbriffeau y ont été apportés en droiture de Moka. Le caffier fe multiplie par fes graines qui fe fement d'elles-mêmes; il exige peu de culture; elle se réduit à donner 3 ou 4 labours à la jeune plante pendant la premiere année, pour la débarraffer du voisinage des mauvaises herbes qui lui déroberoient fa fubfiftance. Dès la feconde année, elle croît fans foins: fes branches, qui naiffent à fleur de terre, & qui s'étendent horisontalement, étouffent par leur nombre toutes les plantes étrangeres qui pourroient

croître

croître à leur tour; au bout de 18. mois, le caffier commence à rapporter fon fruit; & dès la troisieme année, il donne une pleine récolte. On plante ces arbriffeaux en échiquier à la distance de fept pieds environ les uns des autres ; & lorfqu'ils s'élevent trop, on les rabaiffe en les coupant à 2 pieds de terre.

Le caffier demande une terre légere, & il réuffit mieux dans le fable prefque pur, que dans une bonne terre. On obferve, à l'Ifle de Bourbon, que chacun de ces arbriffeaux rappor toit annuellement l'un dans l'autre une livre de caffé. Ce fruit mûrit & fe recueille, à l'Ile de Bourbon, dans un temps fec; ce qui lui donne un grand avantage fur les caffés de nos Illes de l'Amérique, qui ne mûriffent & ne fe recueillent que dans les faifons de pluie. Le caffé, après avoir été cueilli, demande à être defféché; c'eft pourquoi on l'expose au soleil pendant plu

B

fieurs jours jufqu'à ce que la feve paroiffe extrêmement feche & racornie. Alors, on les dépouille de la pulpe; ce qui fe fait avec des pilons dans de grandes auges de bois.

L'Ile de France.

L'Ile de France poffede deux excellents ports, où vont relâcher tous nos vaiffeaux employés, en temps de paix, au commerce des Indes & de la Chine, en temps de guerre, à la défense de nos établiffements. Cette Isle eft par conféquent moins ifolée que celle de Bourbon. L'adminiftration & les mœurs de l'Europe y ont plus d'influence. Elle renferme des terres auffi fertiles que celles de Bourbon; des ruiffeaux, qui ne tariffent jamais, l'arrofent dans tous les fens comme un jardin, & néanmoins les récoltes y manquent fouvent. Elle eft presque toujours dans la difette.

« PrécédentContinuer »