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par la machine pneumatique, absorbent 35,5 centimètres cubes d'air atmosphérique. Réduit en une poudre impalpable passée au tamis, le même charbon de buis n'absorbe que 20,8 centimètres cubes d'air, c'est-à-dire, 4,25 fois le volume qu'il avait à l'état solide; et comme par la pulvérisation il est réduit à occuper un espace de 7,3 centimètres cubes, le volume de l'air absorbé n'est que le triple de celui du charbon compacte. Ainsi, l'absorption paraît être diminuée par la destruction des cellules du charbon : elle paraît être en proportion inverse avec le diamètre interne de ces cellules.

La présence d'un gaz dans le charbon favorise éminemment l'absorption d'un autre gaz. D'après les expériences de Saussure, un charbon saturé d'azote, porté dans le gaz oxygène, retient une plus grande quantité d'azote et absorbe plus de gaz oxygène qu'il n'en faudrait selon les simples lois de l'absorption, applica bles au charbon. Le charbon saturé de gaz oxygène se comporte de la même manière à l'égard de l'hydrogène, et le charbon saturé d'hydrogène est de même à l'égard de l'azote, tandis que l'azote n'admet pas, d'après Saussure, l'absorption du gaz acide carbonique. La loi que Dalton assigne à l'absorption par l'eau des gaz mélangés ne trouve donc point ici son application. Cependant, il est possible que ces divergences que présente l'absorption par le charbon proviennent de ce que le gaz oxygène, ainsi con. densé, a éprouvé, dans quelque cas, une véritable combinaison chimique, en donnant naissance à du gaz acide carbonique. La magnésie, l'ardoise happante, l'asbeste, l'hydrophane, le quartz et le plâtre, absorbent plus de gaz azote que d'hydrogène; au con. traire, toutes les matières organiques absorbent plus d'hydrogène que de gaz azote.

D'après Saussure, la pression de l'air a la même influence sur l'écume de mer (magnésite) que sur le charbon; car, 13,87 centimètres cubes d'écume de mer absorbent, à 0, m. 723 de pression, 42,5 centim. cub. de gaz azote; et, à 0, m. 238 de pression, 50,5 cent. cub. Si des corps solides sont, d'après ce que nous venons de dire, susceptibles d'absorber des gaz, nous pouvons admettre que l'absorption est encore plus forte pour les vapeurs, puisque celles-ci perdent plus facilement leur élasticité.

Tout corps solide paraît attirer l'humidité de l'atmosphère, même lorsque l'air n'en paraît pas saturé. La quantité de vapeur ainsi absorbée varie selon l'état et la nature des corps, ainsi que selon l'état hygrométrique de l'air. Leslie a démontré avec quelle avidité le trapp en décomposition, la balle d'avoine, etc., absorbent la vapeur d'eau: pour faire congeler de l'eau sous le récipient de la machine

pneumatique, il avait disposé de la poudre de trapp sèche, de manière à faire absorber la vapeur d'eau, à mesure qu'elle se formait par l'action du vide.

D'après Rumford, 100 parties en poids de bois de sapin séché absorbent à l'air, en été, 10 parties d'eau, et 24 en hiver. Il est reconnu que des minéraux pulvérisés, l'oxyde de cuivre, etc., peuvent absorber une forte proportion d'eau, en restant peu de temps exposés à l'air. Enfin, il est facile de s'assurer que plus l'air est saturé de vapeur d'eau à une température donnée, plus les corps absorbent d'humidité; et comme la quantité de vapeur absorbée peut se reconnaître par le poids, ainsi que par diverses modifications dans la forme, ces corps peuvent servir d'hygromètres. C'est ce qui leur a valu le nom d'hygrométriques. Buchner a observé que du papier humecté d'une huile volatile, ou même que des fleurs, comme les roses, le sureau, le verbascum, etc., perdent leur odeur après avoir été fortement séchés, mais la recouvrent aussitôt, si on les expose à l'air humide, ou qu'on les arrose.

C'est ce qui explique une expérience curieuse d'Engelhard, d'après laquelle 12,75 livres de semence d'anis, qui étaient exposées à l'air depuis vingt ans et n'avaient plus qu'une faible odeur, fournirent, lorsqu'on les eut arrosées, 3 318 onces d'huile volatile, à la distillation. Saussure présumait déjà que les parfums des fleurs ne s'évaporent qu'avec l'humidité qui les

entraîne.

Absorption par les liquides. On doit ranger dans cette classe :

10 L'absorption des gaz oxygène et chlore par le phosphore liquéfié et par des métaux en fusion, ou d'autres combinaisons de corps simples, dans lesquelles disparaît la forme de gaz ou de vapeur;

2o L'absorption du gaz oxygène par des solutions salines et celle du gaz ammoniac par des acides liquides;

3o L'absorption de la vapeur d'eau par l'acide sulfurique et par quelques autres fluides avides d'eau ;

4° L'absorption de toute espèce de gaz par l'eau, par l'esprit-de-vin, par l'huile ou d'autres fluides, soit acides, soit neutres.

Les trois premières divisions sont évidemment du ressort de la chimie : la combinaison est toujours accompagnée de dégagement de calorique. Plusieurs cas d'absorption du n° 4 sont également chimiques; pour les autres, la question n'est pas encore résolue.

L'eau, mise en contact avec un gaz, n'en peut absorber qu'une portion déterminée; quand elle est arrivée à ce point, elle en est saturée et laisse sans l'absorber tout l'excédant.

Pour savoir quelle quantité de gaz l'eau absorbe, dans différentes circonstances extérieu

res, il faut employer de l'eau parfaitement pure, c'est-à-dire de l'eau non-seulement débarrassée, par la distillation, des sels qu'elle pourrait contenir, mais encore qui ne renferme plus rien des gaz que s'assimile toute eau exposée à l'air. Elle est privée de gaz par l'ébul-' lition, ou par le vide, ou par ces deux moyens à la fois.

La quantité de gaz que l'ean absorbe, dépend :

1° De la nature du gaz,

2o De la pression extérieure,
3o De la température,

4o De la présence d'autres espèces de gaz.
Une mesure d'eau absorbe en volumes :
Gaz fluoborique.

ammoniac.

700. J. Davy.

780. Thomson.

chlorhydrique. 516. Thomson.

fluo-silicique.

sulfureux.

oxyde de chlore.

cyanogène.

263. J. Davy.

33. Thomson.

7. Stadion.
4,5. Gay-Lussac.

hydrogène sélénié. 3. Berzelius.

Combien l'eau, mélangée de deux ou de plusieurs gaz, tous également absorbables, admetelle de chaque espèce de gaz? En cherchant à résoudre cette question, Dalton est parvenu à établir la loi suivante : La proportion de l'absorption d'un mélange de gaz dépend de la densité du résidu non absorbé : elle est, par conséquent, la même que si l'eau était réunie avec chacun de ces gaz à la même température. Exemple: l'air contient, dans 100 volumes, 21 volumes d'oxygène et 79 volumes de gaz azole; l'eau en contact avec l'air absorbera autant de fois 0,21 d'oxygène et 0,79 de gaz azote qu'elle aurait absorbé de chaque gaz pris isolément; et comme l'oxygène est plus facilement absorbé que le gaz azote, l'eau se laisse imprégner d'une proportion d'oxygène plus grande que celle qui, mêlée à 7 vol. d'azote, constitue l'air; en d'autres termes, si 1 volume d'eau absorbe vol. d'oxygène et vol. de gaz azote, 1 vol. d'eau, en contact avec l'air, absorbera X 0,00778 vol. d'oxygène et X=0,01975 vol. de gaz azote ; ce volume d'eau absorberait donc 0,02753 mesures d'un air contenant 28,2 pour 100 d'oxygène. Si l'eau est en contact avec une petite quantité d'air, elle ne peut pas absorber autant de gaz oxygène que lorsque l'air offre une. large surface; en effet, dans le résidu, la proportion d'azote est augmentée : il y a moins de 0,21 d'oxygène et plus de 0,79 d'azote.

Brownrigg avait déjà remarqué que de l'eau gazeuse minérale, contenue dans un vase bouché avec une vessie flexible, ne développe aucun gaz à une faible chaleur, et qu'à une plus grande température, elle n'en dégage qu'une partie; tandis que cette même eau, exposée au

contact de l'air, perd bientôt son acide carbonique.

Lorsqu'on veut préparer de l'eau minérale artificielle avec de l'eau contenant de l'air, il faut soumettre le gaz acide carbonique à une pression de 3 à 4 atmosphères; le gaz est alors absorbé, et on expulse presque tout l'air, en laissant échapper, par un robinet, les dernières portions mêlées de gaz acide carbonique; on peut alors imprégner l'eau d'une grande quantité de gaz acide carbonique.

MM. Gay-Lussac et de Humboldt dégagèrent l'air de différentes sortes d'eaux, par une longue ébullition. Le volume d'air ainsi dégagé de l'eau de neige et de l'eau de Seine était environ 0,04 du volume de l'eau ; ils constaterent que 100 volumes d'air retirés de l'eau distillée contiennent 32, 8 en oxygène; que l'air retiré de l'eau de pluie en contient 31,0 volumes; l'air retiré de l'eau de neige, 28,7 vol.; l'air retiré de l'eau de Seine, de 29,1 vol. à 31,9, vol. Selon ces mêmes expérimentateurs, l'eau retient plus fortement l'oxygène que le gaz azote : en recueillant, en 4 fractions, l'air dégagé de l'eau de Seine, on remarque que la première contient, en 100 volumes, 23,7, la seconde 27,4, la troisième 30,2, et la quatrième 32,5 volumes de gaz oxygène. Le premier air, dégagé de l'eau de neige, produit seulement 24 vol., le second 26,9, le troisième 29,6, le quatrième 32, et le cinquième 34,8, pour 100 volumes d'oxygène, Lorsque de l'eau saturée par les gaz dont le mélange constitue l'air, cède un de ces gaz à un autre corps, elle absorbera de nouveau ce gaz dans la même proportion. C'est ainsi que Priestley trouva que de l'eau qui s'était corrompue dans une grande auge de bois, et dont l'oxygène avait été absorbé par la matière organique, recouvrait cet oxygène par l'agitation, et désoxygénait si complétement l'air, que le résidu ne pouvait plus se combiner avec le gaz nitreux. Dalton confirma cette observation.

Quelles que soient la quantité et la nature du gaz absorbé par l'eau, la congélation l'expulse entièrement. Ce fait a été constaté par divers physiciens. Carradori remplit un vase de glace, et le boucha hermétiquement; quand tout fut fondu, il couvrit l'eau d'huile. Des poissons introduits dans cette eau y moururent soudain; tandis qu'ils vivaient dans la même eau où l'on avait fait entrer de l'air. Ces expériences, répétées par Brownrigg et par d'autres physiciens, détruisent l'assertion de Hassenfratz, qui avait prétendu que l'eau de neige contenait plus d'oxygène que toute autre eau, et que c'était à cette circonstance qu'elle devait son action particulière sur la végétation.

Si daus un vase contenant de l'eau légère

ment chauffée on projette des fragments de verre, de métal anguleux, ou qu'on y plonge un bâton de verre, un fil de fer, etc., on voit à l'instant ces corps se couvrir d'une quantité de bulles de gaz. Ersted a cherché à rendre compte de ce fait, en supposant qu'une bulle de gaz ne peut se produire, au milieu d'un fluide homogène, et que cette production n'a lieu qu'en contact avec le vase ou avec l'air à la surface du liquide, ou, enfin, avec un corps étranger, introduit dans le liquide.

D'après les expériences de Lucas (Annales de chimie et de physique, tome XII, page 402), répétées et confirmées par Chevillat, l'argent est le seul métal qui, sans perdre son aspect métallique, absorbe, pendant sa fusion à l'air libre, une quantité notable d'oxygène; il la perd en se solidifiant, comme l'eau perd, par la congélation, tous les gaz qu'elle contenait.

Dalton a prétendu que l'absorption des gaz par les liquides était une action purement mécanique ; il croyait même avoir trouvé que cette absorption suivait la loi des cubes des densités; mais cette opinion n'a pas pu résister aux raisons péremptoires que lui ont opposées MM. Gay-Lussac, Humboldt, Saussure, et Thom. son. Une des plus fortes objections qu'on puisse lui opposer est l'élévation de température au moment de l'absorption, ainsi que la densité du composé, qui se trouve toujours audessous de la densité moyenne du gaz et du liquide. La liquéfaction des gaz par la pression a jeté un nouveau jour sur les phénomènes de l'absorption. H. Davy et Faraday ont démontré, de la manière la plus nette, que les gaz sont d'autant plus faciles à absorber, qu'ils sont faciles à liquéfier. Ainsi, l'hydrogène et l'azote, qu'on n'a pu encore liquéfier, sont moins absorbables que l'acide carbonique, qui peut être facilement réduit à l'état liquide.

Voyez, outre les ouvrages cités dans le cours de cet article,

Humboldt et Gay-Lussac, Annales de chimie, tre séric, tome 53.

Dalton, Annales de chimie, 2o séric, tome 1. Th. de Saussure, Bibliothèque britannique, avril, mai, juin 1812.

Berzelius, Traité de chimie, tome 1, pag. 321.
Thénard, Traité de chimie, tome 1, pag. 63.
HOEFER.

ABSORPTION. Absorptio; absorbere. (Physiologie.) On entend par absorption, en physiologie, une action par laquelle les fluides présentés aux différentes surfaces des corps organisés y sont pompés, en plus ou moins grande quantité, pour aller de là contribuer à de nouvelles fonctions. On voit, d'après cette définition, que l'absorption, dont l'exhalation n'est qu'une conséquence, est sans contredit le plus général des phénomènes

organiques, puisque, non-seulement dans les végétaux, mais encore chez les animaux, depuis l'infusoire, depuis le polype à tissu homogène, jusqu'à l'homme à organes si compliqués, les actes physiologiques ne s'accomplissent que par l'absorption, la vie n'est entretenue que par l'absorption.

L'absorption est-elle une action vitale? estelle une action purement physique, ou, pour mieux dire, mécanique? Les opinions sont partagées à cet avis, et chacune d'elles est soutenue par des hommes dont le nom peut faire autorité.

Nous ne remonterons point plus haut que Bichat, que nous regardons comme le véritable fondateur de la science de l'organisme. Ce grand physiologiste n'admettait point que les phénomènes de la porosité ou de l'imbibition pussent avoir lieu dans les tissus vivants; d'après lui, les propriétés vitales, en lutte continuelle avec les lois physiques, avaient toujours le dessus, tant que la vie persistait.

L'absorption, selon Bichat et son école, s'accomplit sous l'influence d'un système nerveux particulier, du système nerveux ganglionnaire, qui se montre chez tous les êtres organisés, mais qui existe seul dans les végétaux. Les vaisseaux absorbants reçoivent des nerfs l'impression vitale qui leur est nécessaire pour l'accomplissement de leurs fonctions; ils sont donc pourvus de deux facultés la sensibilité et la contractilité organique, à l'aide desquelles ils perçoivent d'abord la sensation produite par le liquide, puis se contractent pour l'admettre et le faire avancer. Ces deux actes, qui sont le dernier point auquel puisse remonter l'analyse physiologique, puisque sentir et se contracter sont les premiers actes par lesquels se mani. feste la vie; ces deux actes, disons-nous, sont toujours indépendants de l'encéphale, quand il existe; mais pour n'être point perçus par le centre nerveux cérébral, ils n'en sont pas moins réels; ce sont des actes et non une propriété. Bichat admettait même que les orifices des vaisseaux absorbants sont doués d'un tact qui ne leur laisse point admettre indifféremment tous les liquides. « Une membrane séreuse, dit-il, est une surface absorbante, mais une surface absorbante vitale; elle sait faire un choix entre le bon et le mauvais, admettre ce qui convient à l'écononie, repousser ce qui lui est contraire. >>

M. Magendie soutient au contraire que les membranes vivantes, dont on a exagéré, à tort, les propriétés vitales, n'absorbent que comme une membrane inerte. « L'un des préjugés les plus fâcheux qui aient régné et qui règnent encore dans la médecine, dit-il au début d'une leçon, c'est de supposer que tout être vivant, animal ou végétal, est soumis à

des lois indépendantes de celles qui gouvernent les autres corps de la nature. » Il faut dire cepen. dant que les expériences dont le savant professeur du Collège de France appuie son opinion, ne sont rien moins que concluantes. L'ecchy. mose, plus ou moins étendue, qui survient à la suite d'une contusion, est le résultat de l'imbibition, dit M. Magendie. Cela est possible; mais le fait même de la contusion n'a-t-il point apporté une profonde perturbation dans les propriétés vitales, qui, dans ce cas, ont été surmontées par les propriétés physiques? L'empoisonnement par absorption, rapporté par le même expérimentateur, comme preuve de la porosité des tissus, ne détruit pas plus l'opinion qui reconnaît l'action vitale des vaisseaux absorbants, que l'empoisonnement par l'estomac ne prouve contre l'action digestive de ce viscère.

On ne peut nier toutefois que, dans certains cas, la perméabilité, la porosité des tissus ne donnent lieu à des phénomènes d'imbibition. Mais, de ce que, quelquefois, les tissus organisés restent jusqu'à un certain point soumis à l'empire des lois physiques; de ce que certains liquides, sous certaines conditions, peuvent être absorbés par imbibition, conclure que les choses doivent toujours se passer de même, c'est être par trop exclusif. Comment admettre, d'ailleurs, que, par les seules lois de la capillarité, l'absorption s'exerce dans les corps organisés au delà du point de saturation de l'action capillaire? Comment un polype, habitant de l'eau, pourrait-il absorber continuellement en vertu de la seule capillarité des cavités de son tissu pulpeux, puisque, les cavités capillaires remplies, il n'y a plus d'introduction nouvelle possible? Dans les tissus vivants, il y a absorption continuelle, parce qu'il y a, comme nous l'avons dit au commencement de cet article, exhalation continuelle.

Un académicien, habile expérimentateur, M. Dutrochet, a fait de son côté des expérien. ces qui semblent au premier coup d'œil infirmer l'action contractile des tissus ; il a démon. tré que, sous certaines conditions, si, par exemple, deux liquides de densité différente sont séparés par une membrane organique, il a démontré que sous ces conditions il s'établit un double courant d'absorption et d'exhalation, le liquide le moins dense étant attiré par celui qui l'est le plus. Selon que l'imbibition du liquide a lieu de dehors en dedans, ou de dedans en dehors, il y a endosmose ou exosmose. Ce phénomène fut d'abord attribué à l'électricité; deux fluides de nature différente, séparés par une membrane, composaient, disait-on, une sorte d'appareil voltaïque, dans lequel se formait un courant électrique. Mais des observations ultérieures ont renversé cette ENCYCL. MOD. T. 1.

hypothèse, et les phénomènes d'endosmose et d'exosmose ont été rapportés uniquement à la capillarité. C'est sur ces deux faits que M. Dutrochet fait reposer ses principes de statique végétale; l'ascension de la séve est, selon lui, le résultat de l'endosmose, il a de plus appliqué cette loi à tous les corps organisés. Cependant, quelque habilement qu'ait été présenté le fait de l'endosmose, il est difficile de se rendre compte, par lui seul, de tous les phénomènes vitaux. Par l'endosmose, le liquide arrivera bien au lieu de sa destination, mais tel qu'il a été absorbé, à moins qu'il ne s'opère en route un mélange chimique; jamais il n'y aura de nutrition, de transformation, de création de nouveaux principes, de sécrétions. Que si l'on place dans un vase rempli d'eau deux baguettes de saule de même calibre et de même longueur, l'une frappée de mort, l'autre dans toute la vigueur de la végé tation, l'endosmose aura lieu dans la première; mais le liquide arrivera au sommet tel qu'il a été introduit, sans se combiner avec elle, sans la faire croftre, sans lui faire pousser de branches (1). Dans la seconde, au contraire, l'eau absorbée ne se bornera point à s'élever dans le tissu ligneux; elle s'y combinera, le fera grandir, favorisera le développement de ses rameaux : ce ne sera plus l'eau que l'on retrou vera, mais bien de nouveaux produits. Pourquoi rien de semblable ne se passe-t-il dans le premier cas? Parce que l'endosmose est une action mécanique, et rien de plus : il lui manque la vie ; il lui manque l'incitation nerveuse, qui fait de l'absorption une fonction, en donnant aux parties la sensibilité et la contractilité.

Quels sont les vaisseaux à l'aide desquels s'opère l'absorption chez l'homme et chez les animaux supérieurs? Cette question est encore le sujet de controverses qui sont loin d'être terminées.

Les anciens ne connaissaient que les vaisseaux sanguins; ils leur accordèrent donc les fonctions d'absorption. Cependant quelques anatomistes de l'école d'Alexandrie observèrent déjà les vaisseaux lactés, et les virent se rendre aux glandes du mésentère. Dans les temps modernes, les découvertes de quelques savants, et surtout d'Aselli, fixèrent de nouveau l'attention sur les vaisseaux lymphatiques; après Aselli, les travaux de Bartholin, de Guillaume Hunter, jetèrent un nouveau jour sur l'absorption. Une doctrine complète fut alors établie, et les vaisseaux lymphatiques, dont Jean Hunter, Cruikshank, Mascagni et d'autres anatomistes avaient complété la description, furent seuls chargés de la fonc. tion d'absorber.

(1) Les curieuses expériences de M. Boucherie sur les bois reposent sur ce fait : nous en rendrons compte au mot BOIS. 4

Cette opinion cessa cependant d'être exclu sive; M. Magendie et quelques autres physiologistes, sans dépouiller complétement les vaisseaux lymphatiques de leur propriété absorbante, démontrèrent que les radicules veineuses servent de véhicule à la plus grande partie du liquide absorbé.

Nous avons déjà parlé de l'opinion qui étatablit que l'absorption se fait par une sorte d'imbibition, et que les liquides pénètrent dans nos tissus comme l'eau pénètre dans une éponge. Il en résulte que, dans l'état actuel de la science, trois modes d'absorption sont admis, et que l'expérience les avoue tous les trois, bien qu'aucun d'eux ne soit exclusif. Les vaisseaux lymphatiques, les veines, et le tissu perméable, dans quelques cas, concourent donc à cette fonction.

L'absorption, chez les êtres les plus simples du règne organique, comme chez les animaux les plus complexes, se distingue en absorption externe ou composante, et en absorption interne ou décomposante. A l'aide de la première, l'être vivant puise, par tous les points de sa surface extérieure, les matériaux de sa nutrition, dans le milieu qui l'environne, air ou eau; par la seconde, la matière, destinée à être rejetée au dehors, est retirée de tous les points de l'organisme. Dans les deux cas, les substances absorbées subissent une élaboration, une transformation. L'air et l'eau, par exemple, se changent en produits organiques sous l'influence de la vie, et les produits organiques, de leur côté, se modifient pour devenir perspirables. Ce mouvement de composition et de décomposition, à un tel état de simplicité, constitue la vie tout entière chez certains êtres, tels que les algues, les conferves, les polypes, et s'opère indistinctement par toutes les parties du parenchyme homogène de la plante ou de l'animal.

Mais en s'élevant dans l'échelle des êtres organisés, on voit le mécanisme de l'absorption se compliquer de plus en plus; toute la surface de l'être n'est plus propre à cette fonction; une épaisse écorce, une couche cornée ou épidermique forme une barrière entre une portion de l'organisme et le milieu ambiant; des organes spéciaux, extérieurs dans les végétaux, comme les racines et les feuilles; intérieurs dans les animaux, comme les voies digestives et respiratoires, restent chargés des fonctions absorbantes. Et remarquons que ces fonctions deviennent de pius en plus complexes; que les matériaux nutritifs, chez l'homme, par exemple, ne sont point assimilés à son tissu aussitôt qu'ils sont puisés en dehors; mais qu'après avoir été élaborés par une première absorption, ils sont charriés sous forme de sang dans toute l'économie, et que pendant cette circulation ils sont assimi

lés à chaque organe, qui puise ainsi, dans le fluide commun, ce qui convient à sa réparation et à son accroissement.

Si l'absorption de composition est dans un exercice continuel, il est évident que l'absorp tion de décomposition ne doit jamais s'arrêter; elle fait disparaître les molécules qui ont servi pendant un certain temps à la composition des organes, afin que de nouvelles molécules viennent les remplacer. Ce double phénomène a été mis hors de doute par les expériences de Duhamel, tout récemment répétées par M. Dutrochet. Quand on fait manger de la ga. rance à de jeunes poulets, leurs os se teignent en rouge; au bout d'un certain temps, si l'on interrompt cette nourriture, la couleur rouge disparaît.

Il nous resterait à examiner le fait, l'acte de l'absorption, dans les différentes surfaces, dans les différents organes, dans les différents tissus; mais ces détails ont leur place dans les articles spéciaux consacrés aux différentes fonctions, tels que : DIGESTION, NUTRITION, RESPIRATION, etc.

A. DUPONCHEL.

W. Cruikshang, Essays on the anatomy of the absorbent vessels of the human body, Londres, 1787, traduit la même année en français, par Petit-Radel. J. Hunter, Observations on certain parts of the animal œconomy, Londres, 1786.

Walther, Mémoire sur la resorption, dans le recueil de l'Académie de Berlin, 1786-1787.

Magendie, Mémoire sur les organes de l'absorp tion chez les mammifères, lu à l'Institut en 1809.

Id., Memoire sur le mécanisme de l'absorption chez les animaux à sang rouge et chaud, lu à l'institut en 1820.

Id. Précis élémentaire de Physiologie, 2o éd. 1825; t. II, pp. 188 à 228 et 257 à 286.

M. Fodera, Recherches expérimentales sur l'absorption et l'exhalation, Mémoire couronné par l'Institut, Paris, 1824, in-8°.

Dutrochet, Nouvelles recherches sur l'endosmose et l'exosmose, etc. Paris, 1828, in-8°.

ABSTENTION DE LIEU. (Législation.) Mesure de haute police employée pour soustraire l'offensé aux violences de l'offenseur, et la société au danger que ferait craindre la présence de certains malfaiteurs.

Un arrêt célèbre, rendu le 13 avril 1778 par le parlement de Paris, fit défense aux sieurs Queyssat d'approcher de dix lieues des villes de Castillon et de Bordeaux, pendant la vie du sieur Daumade, sous peine de puni tion corporelle.

Les déclarations du 8 janvier 1819 et du 1er juillet 1822, les décrets du 19 ventôse an 13 et du 17 juillet 1806, défendent aux forçats libérés de résider dans la ville, faubourgs et banlieue de Paris, ni à la suite de la cour, ni à Versailles, Fontainebleau et autres lieux où il existe des palais royaux, ni dans une ville de guerre, ni à moins de trois myriamètres de la frontière et des côtes, ni dans les ports où des bagnes sont établis.

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