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& que fon réveil le trouve enféveli dans l'onde amère. Ici s'élève une tempête furieufe qui répand la terreur dans tout l'équipage. Amis, s'écrie Pierre, réuniffons nos efforts, doublons la manœubaiffons les voiles, n'abandonnons pas le gouvernail, & garantiffons du naufrage le divin maître que nous avons fur notre bord. Il dit: mais les vents emportent le fon de fa voix; je fupprime le refte de l'hiftoire que tout le monde connoît, & que l'Auteur raconte très poëtiquement.

Satan, piqué des victoires continuelles de l'Homme-Dieu, cherche de nouvelles reffources dans le Confeil de fes Démons qu'il convoque fur le Liban.

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prononce un difcours plein de fureur, & il rapporte tout ce qui s'eft paffé entre Dieu & lui depuis la création du monde jufqu'au temps où il vit Jefus dans le Jourdain. On peut regarder ce difcours comme un abregé poëtique de l'ancien & du nouveau Teftament. Le récit du maffacre des Innocens eft plein de force & d'imagination : c'est un tableau qui peut figurer avec ceux de le Brun & de Michel Ange.

Satan n'est pas toujours fidéle dans la

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plûpart de fes portraits; on fent fur-tout que la prévention conduit fon pinceau, quand il peint les compagnons du Sauveur. Voici l'idée qu'il donne à fon Confeil des Difciples du Fils de Dieu. « Le premier eft un nommé Si»mon, homme violent, emporté, généreux jufqu'à fe facrifier fans réserve pour fes amis; mais préfomptueux au point de croire que rien ne lui eft impoffible. André, frère de ce Simon, "eft un homme fi attaché aux promef» fes d'un Libérateur futur, qu'il n'a » pas hésité à croire Jefus fur fa parole. Jacques eft un efprit vain, qui, quoique nourri dans une profeffion obfcu»re, aime le fafte & les grandeurs. » L'ambition " feule fon ame; il occupe » ne s'eft attaché à Jefus, que dans l'efpérance d'obtenir une des premieres places de fon Royaume futur. Efprit » fublime, mais non encore développé, » Jean fe plaît à la fpéculation; il s'é» gare quelquefois dans fes propres vi

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» hons. Néanmoins fon cœur femble fait pour l'amitié; il lui manquoit un ami; il croit l'avoir trouvé dans Jefus. » Quelle piété ! Il a abandonné fon pere vieux & caduc, pour fuivre un incon

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»nu. Thomas eft un de ces efprits forts qui n'admettent que l'évidence, & ne » fe rendent qu'à la démonftration palpable. Comme il fuppofe tous les » hommes vendus au menfonge, il ne croit que ce que fes fens lui perfua»dent. Malgré tout cela, foit deftin, » foit prévention, il n'a pas douté un » moment en s'attachant à Jesus. Judas Ifcariot eft un homme fombre, atrabilaire, & fimple en apparence, mais » dans le fond, avare, diffimulé, fourbe, traître, hypocrite; il fçait prendre » toutes fortes de formes. Quant à Philippe Jacques, Barthelemi, Thadée & Jude, ils font fans génie, fans »naissance, fans lettres, crédules, igno»rans & fimples. « A préfent que vous les connoiffez, ajoûte Satan, vous pourrez mettre à profit leur ignorance ou leur foibleffe.

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Quand il eut fini fon difcours, chacun opina felon fon rang. Le résultat de la délibération fut d'employer les charmes d'une beauté mortelle pour triompher du Fils de Dieu. Bélial, le Démon de la Volupté, fut chargé de cette entreprife; il jette les yeux fur. Madeleine pour féduire le Sauveur. Ma

deleine étoit d'une race noble & ancienne, & comptoit plufieurs fouverains Pontifes & des Rois mêmes parmi fes -ayeux. Elle poffedoit la Terre de Magdalel, dont les revenus auroient fuffi à -P'entretien d'un Prince. Sa beauté, fa jeuneffe, fon efprit fin & délicat, relevés par les richeffes & la naiffance, lui attirèrent bien - tôt l'hommage de tous les cœurs.; un goût décidé pour les 5. grandes paffions la firent regarder.com-me l'Héroïne de la galanterie. Dans un Palais fomptueux elle avoit une >Cour compofée de la plus brillante Jeuneffe de la Gréce; & elle poffédoit le grand art de faire croire à chacun en particulier qu'il l'emportoit fur fon rival. Telle étoit la beauté célébre de -la Capitale de la Judée. Un jour que dans un bofquet de myrthe, couchée fur un tapis de verdure, elle refpiroit ala fraîcheur du matin, Bélial, travefti en Ange de lumière, fe-préfente à elle a avec toutes les graces de l'Amour. Il s'approche avec un fouris aimable, & il lui -parle sen ces termes: Reine des cœurs plus brillante que la courageufe Judith, plus belle que la généreufe Efther, plus féduifante que la blonde Bethfabée,

plus piquante que la brune Dalila, c'eft peu d'avoir rangé des Princes fous tes loix; une conquête manque à ta gloire, & la feule qui puiffe t'immorcalifer il eft dans Ifraël un homme qui réunit en lui le Héros & le Philofophe; c'eft celui que le Ciel te deftine; c'est fon Miniftre qui te l'annonce. En prononçant ces dernières paroles, il laisLa tomber une boëte aux pieds de Madeleine, & il difparut. Madeleine eut la curiofité d'ouvrir la boëte, & il en fortit fept Efprits malins qui s'emparèrent d'elle par l'organe de fes fens. Livrée à ces nouveaux tyrans, elle ne penfe plus qu'à foumettre le Héros dont on lui a parlé. La premiere chofe qu'elle fait c'eft de congédier tous fes amans, & fçachant que fa fœur eft honorée de l'amitié du Sauveur, elle la conjure de lui ménager avec lui une entrevûe. Arrête, téméraire, répond fa fœur toute indignée. Eft-ce à Marthe qu'on doit faire une pareille propofition? Tu ofes afpirer à foumettre fous tes loix le Meffie; tu ferois trop heureufe de vivre à jamais fous les frennes. Ce premier refus ne rebuta pas la belle Péchereffe. Elle fit de nouvelles inftances; & fa four fe

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