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LETTRE

DeM. FRERON à M. le Chevalier de C**** de l'Académie de Nancy.

V

Ous me marquez, Monfieur, que vous êtes très-étonné que le fieur Duchefne, Libraire, vous ait envoyé un nouveau Cahier de mes LETTRES SUR QUELQUES ÉCRITS DE CE TEMPS, cotté No. 63, après que je vous avois écrit. moi-même que je difcontinuois cet Ouvrage Périodique, & que je m'arrêtois au dernier Ordinaire No. 62 ; c'est-àdire, aux deux premiers Cahiers, ou auxcent-quarante-quatre premières Pages du Tome Treizième. J'ai tenu parole, Monfeur; mais le Libraire Duchefne, pour des raifons que vous pénétrez aisément, n'a pas jugé à propos que fon Treiziéme Volume reftât imparfait : il le fait ache ver par une autre main. Ainfi, Monfieur, je n'ai, ni n'aurai la moindre part à la continuation des trois Cahiers qu'il doit donner pour completter ce Treizième Volume. Ce n'eft pas pour déprimer fe travail de celui qui s'en eft chargé, mi dans la vue de nuire à mon ancien Libraire, que je fais ce defaveu; c'eft

uniquement pour que l'on ne m'attribue pas ce qui n'eft ni ne fera de moi, & que les gens de Lettres qui feront bien ou mal traités dans ces trois Ordinaires ne me fçachent ni bon ni mauvais gré des éloges ou des critiques qui s'y trou

veront.

Il étoit au refte affez inutile qu'on achevât ce Treiziéme Volume: Ces fortes d'Ouvrages ne font pas du nombre de ceux qui demandent nécessairement une fuite chaque Cahier, chaque Lettre, chaque Article même, étant en quelque forte un petit Ouvrage complet. Il n'y avoit donc aucun inconvénient ( fi ce n'eft pour le Libraire) que mes LETTRES SUR QUELQUES ECRITS DE CE TEMPS ref taffent dans l'état où je les avois laiffées. Les perfonnes qui les prenoient auroient fait relier les deux Cahiers excédans à la fin du Douziéme Tome, ou au commen. cement du premier Volume de l'ANNÉE LITTÉRAIRE, qui eft la fuite immédiate du Cahier 62 de mes LETTRES, & qui fe diftribue régulièrement tous les dix jours chez LAMBERT, Libraire, rue & à côté de la Comédie Françoife.

D'ailleurs l'Auteur de l'ANNÉE. LITTÉ RAIRE a annoncé dans l'Avertiffement de fon premier Cahier, qu'il commen

pas

çoit précisément où j'en étois refté,&qu'it parleroit même de quelques Livres dont je n'avois achevé de rendre compte; moyennant quoi les trois Ordinaires que Duchefne fait faire deviennent abfolu ment inutiles pour le Public, le Public, par la rail'Auteur de l'ANNÉE LITTÉ que RAIRE & le Continuateur de mes LETTRES fe rencontreront néceffairement, & feront dans le cas de parler des mêmes Ouvrages.

fon

Voilà, Monfieur, l'explication de l'embarras où vous vous êtes trouvé en recevant à la fois & l'ANNÉE LITTÉRAIRE annoncée comme la fuite de mes LETTRES, & le Cahier 63 de ces mêmes LETTRES, que vous croyiez & que je croyois moi-même interrompues. J'ai l'honneur d'être, &c.

MONSIEUR,

A Paris ce

9 Mars 1754*

Votre très-humblé & très - obéiffant ferviteur,FRERON.

P. S. Je viens de parcourir ce Cahier G3 de Duchefne, & j'ai été affez furpris. d'y trouver un Article d'Abdéker que vous lirez à peu de chofes près dans le troifième Cahier de L'ANNÉE LITTÉ

RAIRE. Il faut encore vous expliquer ce double emploi. Lorfque je rompis avec le Sieur Duchefne, ce petit Article étoit déja imprimé. J'allai chez l'Imprimeur, & ne voulant pas que cet Article eût lieu, je le priai de rompre la Planche. Il me promit de le faire; mais l'Ouvrier qu'il chargea de fes ordres à cer égard, aima mieux obéir au Sieur Duchefne qui demanda que l'on confervât cet Article. On m'assura cependant le lendemain à l'Imprimerie que la Planche étoit rompue. Dans cette confiance l'Auteur de L'ANNÉE LITTÉRAIRE en a fait ufage, & l'a inféré tel que je l'avois fait, & non tel qu'il fe trouve dans le Cahier 63 de Duchefne. On y a fait quelques petits changemens au commencement & à la fin, qui ne font nulle ment de moi. Je vous demande. mille pardons, Monfieur, de vous entretenir de ces petites mifères; mais vous avez voulu fçavoir la vérité, je vous l'ai dite. En un mot, je ne reconnois pour vraie fuite de mon dernier Cahier 62. que L'ANNÉE LITTÉRAIRE ; quoique le Sieur Duchefne dife à tout le monde à Paris & écrive dans toutes les Provinces que c'est moi qui achève fon Treizième Vo lume..

217

L'ANNÉE

LITTERAIRE.

UN

LETTRE X.

Hiftoire de Jeanne Darc.

Ne jeune Villageoife fans expérien ce quitte la maifon de fon père,

vient à la Cour, commande les Armées, bat les Anglois,& fauve la France : voilà, Monfieur, ce qu'il y a de très-certain dans l'hiftoire de la fameuse Pucelle d'Orleans. Mais cette fille étoit-elle fufcitée de Dieu pour maintenir Charles VII fur le Trône? Ou bien ne fit-elle que fe prêter à une intrigue de Courtifans qui la jugèrent propre à jouer le rôle d'infpirée, pour relever le courage abbatu des François & tirer le Roi de fon affoupiffement? C'eft un problême qu'on fe fatte de réfoudre dans un Livre nouveau, dont voici le titre féraphique: Hiftoire de Jeanne Darc, Vierge, Héroïne & Martyre d'Etat, fufcitée par la ProviTome I.

K

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