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les enfans qui naiffent le quinzième jour de la Lune font d'une complexion amoureufe. Il étoit né ce jour là, & cepen dant il ne fe fentoit pas pour les feme mes un un penchant bien vif. Cette idée le chagrina; il fe mit dans la tête que, pour l'honneur de l'Aftrologie, il devoit s'attacher à d'autres femmes qu'à Madame Qufle. Il entreprit de fe faire aimer d'une jeune Veuve riche & jolie. L'Hippomane, ce fameux philtre dont les Anciens & les Modernes ont tant parlé fut le premier moyen dont il réfolut de fe fervir pour vaincre l'in fenfibilité de fa Maîtreffe. Il employa enfuite du poil du bout de la queue d'un Loup, fe frotta du jus de verveine, porta fur fa poitrine la tête d'un Milan, & fit un beaume de moëlle de Loup d'ambre gris, & de poudre de Chypre. La jeune Veuve s'amufa quelque temps de ces folies; il n'en fallut pas davantage pour faire croire à M. Oufle qu'il étoit aimé. Mais fon afcendant natal ne devoit pas le borner à une feule femme; il fit donc une feconde Maîtreffe. C'étoit une jeune Coquette qui vivoit fous la conduite d'une prétendue Tante. M. Qufle voulut d'abord em

ployer fes enchantemens; mais il apprit que l'or étoit de tous les philtres le plus efficace. Il en donna, & fut adoré. Comme il devint lui-même extrêmement amoureux, il crut que cette fille pourroit bien l'avoir enforcelé. Pour détruire ce charme, il prit une des chemises de fa Maîtreffe, piffa par la manche droite, & fe flatta, felon le Grimoire, d'avoir vaincu le maléfice.

La feconde Partie de cet ouvrage contient un difcours de M. Oufle fur les Spectres & les Revenans. L'Auteur a ramaffé tout ce qu'on raconte de plus ridicule touchant l'apparition des Efprits. Tantôt ce font de grands Phantômes blancs qu'on voit affis dans des ftalles de Chanoines; tantôt ce font de longues figures noires qui apparoiffent dans des refectoires de Moines, & qui fe difent damnées pour n'avoir point obfervé la règle. Un Empereur voit dans un étang un Spectre qui a l'épée à la main; un Prince eft averti de fà mort par un Phantôme qui fe préfente à lui dans un Bal. Un homme heurte du pied contre une tête de mort; elle parle & fe recommande à fes prières. Un Efprit prend plaifir à ôter les lunettes à un Vieillard

& à lui déchirer fon Livre d'Heures. Plu fieurs perfonnes quittent le bain avec précipitation, parce que du fond de la cuve fortent des hommes noirs qui les chaffent à coups de pieds dans les feffes. Un père revient de l'autre Monde, dévore fon fils, & ne lui laiffe que la tête. Un amant vient après la mort trouver fa maîtreffe fous la figure d'un Serpent: la Dame le prend fans qu'il lui faffe aucun mal; elle le nourrit dans une boëte, & quand elle donne à manger à fes amis, elle fait tremper dans leurs verres la tête de ce Serpent.

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La troifiéme Partie préfente 'des objets différens on y traite à fond tout ce qui appartient à l'Aftrologie judiciaire. M. Oufle étoit l'homme du monde qui donnoit le plus dans cette fuperftition. Il croyoit fermement que les fi gnes céleftes ont des occupations importantes à notre égard; qu'ils font continuellement attentifs à nous envoyer des influences pour nous tourmenter ou nous faire plaifir; & que nous avons, à chaque partie de notre corps, des fils attachés, que les Aftres tirent ou lâchent comme des Pantins, felon le mouvement ou le repos qu'ils veulent nous donner. On

réfute ces rêveries dans quaranté Arti cles, après lefquels on conclut très-féricufement qu'il eft faux que « le Soleil » gouverne la tête, la Lune le bras droit, » Venus le bras gauche, Jupiter l'efto» mach, Mars les tefticules, Mercure le pied droit, & Saturne le pied gauche.»

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Une pratique très-fameufe parmi les Aftrologues, c'eft la conftruction du Talifman. M. Oufle vous foutient qu'une mouche d'airain, empreinte des influences de certains Aftres, chaffoit autrefois les mouches du Marché aux Bœufs de Rome, de la grande Boucherie de Tolède, & du Réfectoire des Moines de Mailleras en Poitou.

Il n'eft pas moins crédule fur l'article des Démons, & fur la puiffance qu'on leur attribue. Cette matière occupe toute la quatrième Partie. M. Oufle, aidé de fon fils aîné l'Abbé Doudou, auffi fuperftitieux que fon père, fait fur ce fujet un difcours admirable, dont voici la fubftance. Il y a des Diables & des Diableffes. Les Diableffes ont paru dans le Monde quelque temps avant les Diзbles. Elles conçurent ceux-ci du premier homme, pendant que, par cha grin ou par dégoût, il refufoit de coucher

avec fa femme. Outre les Diables nés de cet infâme commerce, il y en a d'au tres qui le font devenus par punition; tels font les ames des enfans morts nés des hommes tués en duel, & des femmes qui périffent en couche. Ces mau vais Efprits multiplient entre eux comme les hommes ; l'air en eft rempli, & les étoiles n'ont été placées au Firmament, que pour les empêcher de monter jufques dans les Cieux. Ils fe font voir quelquefois aux hommes, & fe déguifent en brin de paille, en laitues, em truyes, en afnes, en gueux, en Moines & en Avocats. On a remarqué qu'on ne les a jamais vûs paroître fous la figure d'une colombe ou d'un agneau. M. Oufle diftingue deux fortes de Diables, les Incubes & les Succubes. Les premiers font ceux qui couchent avec les femmes & qui en abufent. Les feconds fe changent en femmes, & ont à faire avec les hommes. Quand les Diables prennent la figure d'un homme, elle est toujours ef froyable & mal proportionnée. Si c'eft celle d'une femme,fes pieds font des têtes de dragons; elle eft comme une Veuve, verue de noir; mais cruelle, & rompant bras & jambes à tous ceux qu'elle ren

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