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ches fines, par des critiques de bon goût Les vûes philofophiques de M. de Cabu fac font dans fon ouvrage le point le plus eftimable. Tous les Arts ont une af finité entre eux; & l'on voit qu'en parlant de celui dont il traite, il faifit avec adresse l'occasion de répandre des préceptes lumineux, des facilités heureufes fur plufieurs autres Arts trop négligés & trop peu connus. L'embelliffement, la perfection, la gloire de l'Opera François, paroiffent fur - tout l'objet de fa généreufe ambition. Il prouve que l'idée de ce Spectacle eft une des plus belles productions de l'efprit humain ; & l'on découvre dans les perfpectives qu'il laiffe entrevoir, l'état honorable dans lequel il feroit poffible de le porter avec du zèle, du foin & du génie. Ainfi, tandis qu'une main étrangère & ennemie veut détruire le Temple des Mufes, un vrai Patriote, un Philofophe, qui l'eft fans affiche & fans rudeffe, le foutient avec dignité. Il eft à fouhaiter qu'il écrive ainfi fur les autres Parties de notre fcène Lyrique. Ce Traité de la Danfe, divifé en trois petits Tomes, fe trouve chez Durand, Libraire Rue S. Jacques.

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La Revue des Théâtres.

Le vingt-deux Décembre de l'année dernière a vû naître & mourir fur la Scène Italique cette Comédie en vers, en un Acte. L'Auteur, M. de Chévrier, a cru fans doute lui donner une nouvelle vie en le faifant imprimer; mais, fi je puis me fervir de cette comparaifon, c'est fe faire inhumer le vifage découvert, comme cela fe pratique dans quelques Pays. On lit à la tête un Avertiffement où l'Auteur dit : « J'aurois defiré que le Public judicieux, s'accommodant à ma tran» quillité, eût pu voir d'un œil Philofophi » que les manœuvres odieufes que la baffeffe » & la méchanceté ont employées pour

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faire tomber ma Comédie. »Ne voilà t-il pas encore,Monfieur, la Philofophie en jeu? Que dites-vous d'un Poëte qui vous parle de fa tranquillité le jour d'une première représentation? En vérité, je n'y connois plus rien. Ou c'est en impofer au Public, ou c'eft exprimer un fentiment réel. Dans l'un ou l'autre cas, je ne puis eftimer un homme de Lettres; & pour ne parler que de la dernière hypothèse, je vous avoue que j'aurois trèsmauvaise idée d'un Ecrivain qui ne fen

tiroit point cette inquiétude, cette émotion, ces entrailles de père, fi naturelles à l'humanité qui fe reproduit de façon ou d'autre. Les Corneilles, les Racines & les Molières n'étoient affurément pas tranquilles lorsqu'ils donnoient une Piéce nouvelle. Mais, quand j'y penfe, nos Auteurs modernes font très-bien d'avoir ou d'affecter cette ftoïque indifférence. Ils feroient trop à plaindre, s'ils étoient ou s'ils paroiffoient fenfibles. Au refte, comme M. de Chévrier attribue à des manœuvres odieufes la chute de fa Piece, & que probablement fes foupçons tombent für des perfonnes qui en font très-innocentes, je me crois obligé de le tirer d'erreur; de l'affûrer que c'est uniquement fa faute, fi fa Comédie n'a pas eu le fuccès dont il s'étoit Aatté, &, que le Public l'a vû jouer d'un ail trèsPhilofophique. Il convient lui-même dans fon Avertiffement, que le ton qu'il a pris eft trop dur; que fes fcènes font trop Longues; que le férieux bon fens de fes pera fonnages peut auffi lui avoir été préjudiciable. Tout cela eft vrai, parce qu'il ne faut être ni dur, ni prolixe, ni férieux dans une Comédie. Mais il s'en prend encore au Vers Alexandrin qu'il a choifi i

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& qui, felon lui, n'est pas fait pour la Comédie Epifodique; ce que je ne pense pas. La mesure du vers est, en général, la chofe du monde la plus indifférente. Il s'agit d'être ingénieux, vif, faillant, agréable & naturel. Nous avons mille fcènes charmantes en Vers Alexandrins. Outre les défauts que l'Auteur re-connoît lui-même, il y en a dans fa Piéce beaucoup d'autres qui lui ont échappé. Le vice dominant eft la trivialité des reproches qu'il fait à tous nos Spectacles. Il ne dit que ce qu'on entenà dire tous les jours, & le plus fouvent il ne le dit pas mieux qu'on ne l'entend dire. La Critique joue le grand role dans cet Acte à tiroir; elle ne quitte point la Scène; elle reçoit les vifites de la Mode, de la Comédie mo derne, d'un Acteur Tragique, de l'Opéra, de la Comédie Italienne elle-même, d'une Danfeufe, & d'une Chanteuse d'Ita lie. Cette idée n'étoit pas mauvaife, & ce cadre pouvoit renfermer de jolis por raits, une fatyre fine & enjouée. Mais la Critique au lieu de prendre le ton de la bonne plaifanterie, le feul qui con vienne au Théatre, ne dit à tous ces Perfonnages que des vérités qures & com

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munes, & ne leur débite qu'une morale trifte. Les Ballets, le ton langoureux ou sophistique de la Comédie Françoife & le jeu forcé de quelques Ac teurs de ce Théatre, les Bouffons à l'Opéra, les minauderies des Danfeuses, les Lazzis trop répétés chez les Italiens, le vuide de leurs Piéces, & leur peu de talent pour jouer le François, qu'ils rendent Gothique,felon notre Auteur : voilà, Monfieur, en général l'objet de la mauvaife humeur & des traits de la Critique.

Cette Pièce, toute défectueufe qu'elle eft, prouve cependant que l'Auteur ne manque ni d'efprit ni de talent. Et je crois qu'il en mettroit davantage dans fes Ecrits, s'il s'appliquoit à l'étude des bons modèles, & s'il ne fe livroit point à fa facilité; malheureux don de la Nature qui perd une foule de jeunes Ecrivains. M. de Chévrier caractérise affez bien les Piéces Italiennes :

o > .sil Un Fourbe intelligent, échauffé par l'Amour, Vient tromper Arlequin, qui le dupe à fon tour Caroline s'en plaint ; Pantalon la marie; Et Scapin en jurant finit la Comédie.i Le Parterre enchanté demande un Menuet; Et fans favoir pourquoi, chacun fort fatisfait

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