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huit cycles semblables dans les pérégrinations des enfants de Coxcox, ce qui donne quatre cent seize ans ; et que la sortie des peuples mexicains d'Aztlan a eu lieu l'an 1038 de l'ère chrétienne.

Quoi qu'il en soit, il est impossible de ne pas reconnaître dans le court récit que nous venons de donner de précieuses réminiscences de la Bible le déluge universel, l'arche voguant sur les eaux, Noé et ses enfants, le corbeau, la colombe, le rameau d'olivier, les quinze patriarches, pères de toutes les nations, la confusion des langues, etc., etc. Une étude plus approfondie du monument nous montre encore le mont Ararat, les autels érigés à la divinité, le Téocallì construit comme la tour de Babel, etc.

COYLLOU, un des dieux célestes des anciens Péruviens. C'était sans doute l'une des étoiles.

COYOCOPCHILL, Grand Esprit, ou Maître de la vie. C'était le nom du souverain Dieu chez les Acansas, peuple de l'Amérique septentrionale.

COZUMEL, idole adorée dans l'ile du même nom, près du Mexique. Elle avait la figure humaine, d'un aspect terrible et affreux. Elle était placée dans un temple de forme carrée, bâti de pierres et d'une architecture passable. On avait ménagé derrière l'idole une fausse porte par laquelle le prêtre rendait ses oracles sans être aperçu; et le peuple croyait naïvement recevoir les réponses de la bouche de l'idole.

CRABUS, divinité égyptienne.

CRADIAS, air de marche qu'on jouait pendant qu'on conduisait les victimes expiatoires chez les Athéniens. Ces victimes étaient frappées avec des branches de figuier, non, d'où est venu à cet air le nom de Cradias.

CRAINTE. Les Grecs et les Romains en avaient fait une divinité, fille de Mars et de Vénus, selon Hésiode, ou fille de la Nuit, d'après Cicéron. Les Corinthiens, après avoir inhumainement massacré les deux enfants de Médée, furent affligés d'une mortalité qui sévissait particulièrement sur les enfants; l'oracle, consulté à cet effet, ordonna d'apaiser les mânés des enfants de Medée et d'ériger une statue à la Crainte. Cette déesse avait aussi un temple à Lacédémone, près du tribunal des Ephores. Tullus Hostilius, dans un combat livré aux Sabins, voyant les Romains saisis de crainte et d'épouvante, voua un temple à la Paleur et à la Crainte. Dans ces serments on joignait la Crainte aux autres divinités qu'on prenait à témoin. Les Romains distinguaient Timor, la Crainte, de Formido, l'Effroi, de Pavor, la Peur, et de Terror, la Terreur.

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CRANE, déesse qui passe pour être l'épouse de Janus. On l'appelle encore Carna ou Cardea. Il y a des mythologistes qui la regardent comme étant la même que la Lune; d'autres veulent qu'elle soit la protectrice des portes, des gonds et des serrures. Les Romains en faisaient la fête le premier juin. On lui faisait ce jour-là des offrandes de lard et de bouillie composée de fèves et de farine de

froment. Cette fête avait, dit-on, été établic par son fils Cranus, qui lui avait dédié un bois sur les bords du Tibre.

CRAPAUD. Les sauvages américains qui habitaient sur les bords de l'Orénoque rendaient aux crapauds les honneurs divins. Loin de chercher à détruire ces sales animaux, ils les gardaient avec soin sous des pots, pour en obtenir de lá pluie ou du beau temps, selon leurs besoins; et ils étaient tellement persuadés qu'il dépendait de ces animaux de l'accorder, qu'ils les fouettaient chaque fois que leurs prières n'étaient pas promptement exaucées.

CRATAIS OU CRATÉIS, déesse des devins et des enchanteurs, mere de la fameuse Scylla. Il en est parlé dans le douzième chant de l'Odyssée.

CREATION. Voy. COSMOGONIE, au Supplé

ment.

CRÉCELLE, instrument de bois qui sert à appeler les fidèles à l'église pendant les trois derniers jours de la semaine sainte, époque où l'on ne sonne plus les cloches en signe de deuil. On croit que l'usage de la crécelle est plus ancien que celui des cloches, et on peut voir à l'article CLOCHES que les chrétiens d'Orient qui habitent les pays musulmans se servent encore à présent, sinon de crécelles proprement dites, du moins d'instruments de bois pour appeler pendant toute l'année les fidèles aux saints offices. Les mystiques tant de l'Orient que de l'Occident prétendent que ces sortes d'instruments ont pour but de rappeler le souvenir du bois de la croix.

CREDENCE, espèce de table ou buffet placé dans le chœur des églises. Il y en a une de chaque côté de l'autel, si la place le permet. La grandeur de la table n'est pas déterminée, mais elle doit être couverte d'une nappe bien blanche qui l'environne entièrement et descende jusqu'à terre. Sur la crédence qui est du côté de l'épître on met tout ce qui est nécessaire pour la célébration du sacrifice, mais il ne doit point y avoir d'image. Celle qui est du côté de l'évangile sert à mettre les vases sacrés. Voy. l'art. CREDENCE du Dictionnaire de Liturgie.

CRÉNÉES, nom des Naïades ou nymphes des fontaines, qu'on disait filles de Jupiler.

CREOBOROS, c'est-à-dire, qui dévore les chairs. Plusieurs savants croient que ce mot grec est l'étymologie du nom de Cerbère, le chien infernal, qu'on appelait encore Créophage (xpeopóyos, aprobopós).

CREPI, de crepare, craquer ou claquer; nom des Luperques, tiré du bruit des laniè res dont ils frappaient ceux qu'ils rencontraient.

CREPITUS, ou le dieu Pet, divinité révérée dans la ville de Péluse en Egypte. Saint Jérôme, sur Isaïe, livre xII, chap. 46, s'exprime ainsi : Taceo de formidoloso et horribili cepe, et crepitu ventris inflati, quæ Pelusiaca religio est. On a dit que ce prétendu dieu avait été pareillement vénéré des Romains, l est probable qu'on aura pris le change à la vue de certaines statuettes représentant un

jeune enfant penché en avant et se pressant le ventre comme pour se débarrasser des flatuosités qui le molestent. Mais toutes les statuettes n'étaient pas des dieux.

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CREPUSCULE DES DIEUX. L'Edda appelle ainsi le jour fatal marqué pour la fin du monde. Trois hivers terribles et consécutifs l'annonceront aux enfants des hommes. La neige tombera des quatre coins de la terre, les vents souffleront avec furie, la gelée durcira la terre. Age barbare! âge d'épée! âge de tempêtes! âge de loups! Les frères se souilleront du sang de leurs frères, les fils seront les assassins de leurs pères, l'ami n'épargnera point son ami, l'adultère et l'inceste passeront à peine pour des crimes. Alors les monstres rompront leurs chaînes et s'échapperont; le grand dragon se roulera dans l'Océan, et dans ses mouvements, terre sera inondée et ébranlée, les arbres déracinés, et les rochers se heurteront. Le loup Fenris déchaîné ouvrira sa gueule énorme, qui touche à la terre et au ciel, le feu sortira de ses yeux et de ses naseaux; il dévorera le soleil; un autre monstre emportera la lune; le grand dragon vomira sur les eaux et dans les airs des torrents de venin. Les étoiles s'enfuiront, le ciel se fendra, et l'armée des géants et des mauvais génies, conduite par Surtur et suivie de Loke, pénètre dans le ciel par celle ouverture, passe le pont de Bifrost, et se range en bataille pour attaquer les dieux. Aussitôt Heimdal, le portier des dieux, sonne de sa trompette bruyante, les dieux se réveillent et s'assemblent, le grand frêne agite ses branches, le ciel et la terre sont pleins d'effroi. Les dieux s'arment, les héros se rangent en bataille. Odin paraît, revêtu de son casque d'or et de sa brillante cuirasse; son large cimeterre est dans ses mains. Il attaque le loup Fenris, il en est dévoré; mais Vidar, s'avançant aussitôt, appuie son pied sur la mâchoire inférieure du monstre, prend l'autre de sa main, et le déchire ainsi jusqu'à ce qu'il meure. Thor terrasse le grand serpent, mais en le frappant il recule de neuf pas, et tombe étouffé dans les flots de venin que le grand serpent exhale en mourant. Tyr attaque le terrible chien nommé Garme, et ils se tuent tous deux. Frey est abattue par Surtur; Loke et Heimdal se terrassent mutellement. Surtur lance sur la terre un feu qui consume tout et dont la flamme s'élève jusqu'au ciel.

Mais bientôt une nouvelle terre sort du sein des flots, ornée de vertes prairies; les champs y produisent sans culture, les calamités y sont inconnues, un palais y est élevé plus brillant que le soleil, et tout couvert d'or; c'est là que les justes habiteront et se réjouiront pendant les siècles. Alors le Puissant, le Vaillant, celui qui gouverne tout, sort des demeures d'en haut pour rendre la justice divine. Il prononce ses arrêts, il établit les sacrés destins qui dureront toujours. Il y a une demeure éloignée du soleil dont les portes sont tournées vers le nord, le poison y pleut par mille ouvertures. Elle n'est composée que de cadavres de serpents; il y coule

des torrents infects dans lesquels sont plongés les parjures, les assassins et ceux qui séduisent les femmes mariées. Un dragon noir et ailé vole sans cesse autour, et dévore continuellement les corps des malheureux qui y sont renfermés.

CRIERIENS, fantômes des naufragés, qui, dans l'opinion superstitieuse de l'île de Sain en Bretagne, demandent la sépulture, désespérés d'être, depuis leur mort, ballottés par les événements. Lorsqu'ils entendaient ce murmure sourd qui précède l'orage, les anciens s'écriaient Fermons les portes; écoutez les Criériens, le tourbillon les suit.

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CRIOBOLE, en grec xpoбóλos, sacrifice d'un bélier; cérémonie expiatoire en l'honneur de Cybèle; Noël prétend que ces sortes de sacrifices ne remontent pas au delà du I siècle de l'ère chrétienne. Voici la description que nous en donne Prudence: On creusait dans la terre une fosse profonde, que l'on couvrait de planches percées. Le grand prêtre, revêtu de tout l'appareil de sa dignité, et plus souvent encore la personue qui avait besoin de cette expiation, descen dait dans la fosse, et recevait sur ses habits, sur la tête, sur les yeux, dans la bouche et les oreilles, le sang fumant de la victime qu'on immolait sur cette espèce de pont percé à jour. L'immolation d'un taureau s'appelait Taurobole, celle d'un bélier, Criobole, et celle d'une chèvre, Egobole. La victime égorgée, les prêtres retiraient le corps, et la personne sortait de la fosse toute couverte de sang. Dans cet état hideux, elle se montrait au peuple, qui se prosternait devant elle. Dès lors elle était regardée comme sanctifiée pour vingt ans. Gruter parle cependant d'un orateur qui, par la vertu de ces sacrifices, ful régénéré pour toujours, sous l'empire de Valens et de Valentinien. Au témoignage de saint Grégoire de Nazianze, Julien l'Apostal se soumit lui-même à cette bizarre expiation dont l'effet était une parfaite purification, l'ablution de tous les crimes et une complète régénération morale. Ces sacrifices étaient offerts à Cybèle, à laquelle on joignait quelquefois Alys; mais il est probable qu'ils tiraient leur origine de l'Orient, et qu'ils faisaient partie du culle de Mithra. C'étaient souvent les villes et les provinces qui en faisaient les frais; quand c'était un particulier, on le marquait ordinairement dans l'inscription. Les femmes étaient admises à ce genre d'expiation, et deux personnes pouvaient s'unir pour la recevoir. Elle durait trois jours, et une des cérémonies devait avoir lieu à minuit, ce qui la faisait appeler Mesonyctium. Voy. Taurobole.

CRIOPHORE, c'est-à-dire porte-bélier. C'était un jeune homme qui, dans une fête de Mercure, célébrée à Thèbes, faisait le tour des murailles de la ville, en portant sur ses épaules un agneau ou un bélier, en mémoire de ce que le dieu avait préservé la ville de la peste, qui commençait à y exercer ses ravages, en portant de la même manière un bélier autour des murs.

CRISTALLOMANCIE. Delrio distingue cette

sorte de divination de la catoptromancie, ou divination par les miroirs. Il croit que la cristallomancie consistait à se servir de fragments de cristal enchâssés dans un anneau, ou même unis et façonnés en forme de cylindre, dans lesquels on suppose que le démon résidait.

CRITHOMANCIE, sorte de divination qui consistait à considérer la pâte des gâteaux qu'on offrait en sacrifice, et la farine d'orge (xpion) qu'on répandait sur les victimes, pour en tirer des présages.

CRIUS, personnage qui sans doute aura fourni l'occasion du mythe de la Toison d'or. C'était le gouverneur de Phryxus, qui, étant allé en Colchide avec son élève, y fut immolé aux dieux, et l'on suspendit sa peau aux murs du temple. Le nom de crius, en grec xplós, signifiant bélier, donna lieu à la fable selon laquelle Phryxus aurait passé l'Hellespont sur un bélier.

CROCODILE, animal sacré dans plusieurs parties de l'Egypte, entre autres à Coptos, à Arsinoé, à Thèbes, et aux environs du lac Maris. Les Egyptiens de ces cantons s'efforçaient d'en apprivoiser un, et lorsqu'ils en étaient venus à bout, ils lui ornaient les oreilles de pierres précieuses et d'autres ornements d'or, et le nourrissaient de viandes consacrées. Après sa mort, ils l'embaumnaient et le déposaient dans des urnes que l'on plaçait dans le labyrinthe servant de sépulture aux rois; on a rapporté en France plusieurs momies de crocodiles très-artistement embaumées. Les Ombites poussaient même la superstition jusqu'à se réjouir de voir leurs enfants enlevés par ces animaux, considérant comme très-heureux ceux qui en étaient dévorés. — Dans le reste de l'Egypte, on les regardait avec horreur et on en tuait autant qu'on pouvait. La religion ajoutait encore à la haine naturelle qu'inspire un monstre aussi redoutable. Typhon, meurtrier d'Osiris, et l'ennemi de tous les dieux, en avait pris autrefois la forme. Cependant, d'après M. Champollion, le crocodile était aussi l'emblème de Souk (Cronos ou Saturne). Suivant Plutarque, le crocodile est le symbole de la Divinité, parce qu'il n'a point de langue (1), et que Dieu, sans proférer une parole, imprime dans le silence de nos cœurs les lois de l'équité et de la sagesse. En langue hiéroglyphique, il était aussi le symbole de la tyrannie dans le gouvernement. Les Egyptiens croyaient que les vieux crocodiles avaient la vertu de deviner, et c'était un bon présage lorsqu'ils prenaient à manger de la main de quelqu'un, et un mauvais lorsqu'ils le refusaient. Achille Tatius dit que si l'on compte les dents du crocodile, on trouvera que leur nombre égale celui des jours de l'année. C'est peut-être pour cela que les Egyptiens mirent l'image du soleil dans une barque portée par un crocodile. Enfin les Egyptiens, adorateurs des crocodiles, disaient que pendant les sept jours consacrés à

célébrer la naissance d'Apis, ces animaux, oubliant leur férocité naturelle, ne faisaient aucun mal à personne, et qu'au huitième jour après midi ils redevenaient féroces comme à l'ordinaire. Ils prétendaient encore que ces crocodiles, par respect pour la déesse Isis, qui s'était autrefois servie d'une barque faite de l'écorce du papyrus, ne faisaient aucun mal à ceux qui naviguaient sur le Nil dans des barques faites de cette plante.

Les Rejangs, peuples de l'ile de Sumatra, vénèrent les crocodiles; il en est de même dans l'ile de Timor. Les habitants de cette dernière lui sacrifient quelquefois une jeune vierge. Les radjas eux-mêmes sont obligés d'aller leur faire leur offrande à leur avénement au trône. Deux Européens qui avaient tué un de ces animaux furent considérés comme horriblement souillés, et ne purent rentrer en relation avec le prince et les habitants qu'après avoir été soumis à de nombreuses ablutions, eux et leurs vêtements. Les insulaires de Bornéo rendent également hommage à ces dangereux ani

maux.

Voy. les Dictionnaires de la Bible et des Sciences occultes, art. CROCodile.

CROCOTA, de xpóxos, safran ; robe jaune, ornée de fleurs en broderie, que portaient ordinairement Bacchus et ses compagnons. Hercule est aussi appelé Crocophore, de la robe jaune de la reine Omphale, qu'il portait en filant auprès d'elle.

CRODO, fameuse idole des anciens Germains, à laquelle ils consacraient des temples, et qu'ils honoraient par des sacrifices de victimes humaines. La statue de ce dieu le représentait sous la forme d'un vieillard dont la tête était couverte d'une forte et longue chevelure. De la main gauche il tenait une roue, et de la droite un seau rempli de fleurs. Un tablier blanc lui ceignait le corps. Ses pieds étaient nus; l'un était posé sur une borne, l'autre sur le dos tranchant du poisson que nous nommons perche. Voici ce qu'on lit à ce sujet dans les Chroniques saxonnes : « La divinité de ce pays (Habsbourg) et des nations voisines a été honorée, pendant plusieurs siècles, sous le nom de Crodo. Cette idole était placée un pied sur une borne et l'autre sur une perche, poisson dont l'espèce abonde dans les mers d'Allemagne. La situation de cette idole exprimait la résolution où étaient les habitants de Habsbourg d'opposer constamment aux efforts réunis de leurs ennemis une résistance invincible. Le Crodo était représenté nupieds sur le dos tranchant de la perche; et les Germains voulaient dire par là qu'ils aimeraient mille fois mieux marcher nu-pieds sur des rasoirs que de souffrir l'esclavage Le tablier blanc qui ceignait l'idole était le symbole de la liberté nationale. Ce dieu tenait encore une roue dans la main gauche, et cette roue indiquait l'alliance qui unissait entre eux les Germains. Le seau couvert de

(1) C'était la croyance ancienne. Le fait est que le crocodile a une langue, mais peu épaisse et engagée dans des téguments.

DICTIONN DES RELIGIONS. I.

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roses, que le Crodo avait dans la main droite, désignait la fértilité du pays et l'abondance des fruits et des moissons. » Mais nous ne balançons pas à adopter une explication toute différente du savant Jean-Michel Heineccius, qui nous paraît plus naturelle et plus satisfaisante: « L'idole, dit-il, a la tête couverte d'une longue chevelure, et, selon moi, ces cheveux représentent les rayons du soleil; car c'est ainsi que tous les peuples sauvages et civilisés ont représenté cet astre. La roue que l'idole a dans sa main gauche marque le ciel, qui paraît être dans un mouvement perpétuel. Le seau rempli de fleurs désigne la terre. La perche ne peut, ce me semble, représenter autre chose que l'eau; et les pieds nus de Crodo indiquent les divers événements de la nature; en sorte que l'ensemble du dieu n'est autre chose que l'image de la nature. » Cette divinité était aussi adorée à Hartès, bourg près de Goslar; sa statue subsistait encore sous le règne dé Charlemagne, qui la fit abattre.

CROISADE (CONFRERIE), en espagnol, cruciata; société ou confrérie distincte de l'Inquisition, établie en Espagne non pour poursuivre les bérétiques, mais pour veiller sur les mœurs des catholiques, et les déférer s'ils manquent à leurs devoirs de chrétiens. Cette société était autrefois aussi redoutable que puissante, parce que les archevêques, les évêques et presque tous les grands d'Espagne en faisaient partie. Les Espagnols sont persuadés que c'est à l'inquisition et à la Croisade qu'ils sont redevables de ce que leur pays est demeuré exempt d'hérétiques, tandis que ceux-ci sont maintenant dominants dans plusieurs Etats de l'Europe.

Il y avait encore un ordre de chevalerie composé uniquement de dames, et qui s'appelait Croisade. Voy. CROIX (Ordre de la).

CROISADES(GUERRES SAINTES), expéditions militaires faites par les chrétiens de l'Europe contre les infidèles, ainsi nommées parce que tous ceux qui en faisaient partie portaient sur leurs habits une croix rouge, comme marque de leur engagement. On en comple huit principales, qui eurent lieu depuis l'an 1096 jusqu'à l'an 1291; elles avaient pour but la délivrance de la terre sainte et des chrétiens orientaux du joug musulman. Nous allons donner au lecteur un tableau succinct de ces pieuses et célèbres expéditions.

Première croisade. En 1093, Pierre, surnommé l'Ermite, natif d'Amiens en Picardie, revenant du pèlerinage de la terre sainte, alors fort en vogue, peignit avec des couleurs si vives au pape Urbain II la triste situation des chrétiens de Jérusalem, et les profanations auxquelles était exposé le tombeau de Jésus-Christ, que le pape, touché de son éloquence, l'envoya dans toute l'Europe pour exciter les princes et les peuples à prendre les armes contre les mahomélans. Ce projet occupait les papes depuis longtemps; Pierre parut propre à le faire réussir: on trompait pas. Les discours touchants et pathétiques du zélé pèlerin enflammèrent tous les cœurs d'un saint zèle. Urbain seconda ses

ne se

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prédications par deux conciles convoqués pour le même sujet. Dans celui de Clermont en Auvergne, présidé par le pape lui-même, en 1093, les assistants, électrisés par les paroles d'Urbain, s'écrièrent d'un commun accord Dieu le veut! Dieu le veut! Ce cri devint par la suite le signe de ralliement des croisés. Cependant, malgré tant de soins, il n'y eut guère que la France et quelques parties de l'Allemagne qui s'armèrent pour cette entreprise. Les autres nations se contentèrent d'y applaudir. Les seigneurs français prirent la croix à l'envi; une infinité de gens de tout âge, de tout sexe et de toute coudition, suivit leur exemple. Cette prodigieuse multitude n'était point réunie sous un sent chef. Chaque seigneur avait sous ses drapeaux une troupe de croisés. Ils ne partirent pas tous ensemble, et ne suivirent pas la même route; mais ils étaient convenus de se retrouver à Constantinople. L'an 1096,il partit de France et d'Allemagne plus de 260,000 croi sés. La première troupe marchait sous la conduite d'un pauvre gentilhomme français, nommé Gautier Sans-Avoir; il fut suivi de près par Pierre l'Ermite, à la tête d'environ 40,000 hommes. Une troisième troupe de 15,000, dirigée par Godes calc, prêtre allemand, commit tant de désordres dans la Hongrie, que les peuples se réunirent contre les croisés et les taillèrent en pièces. Enfin il partit une quatrième troupe d'environ 200,000 croisés, et comme ils étaient sans chef et par conséquent sans discipline, on ne tarda pas à voir parmi eux les tristes effets de la licence et du désordre; ils s'avisèrent de se jeter sur tous les juifs qu'ils trouvèrent dans les villes où ils passaient, et ils exercèrent leur cruauté sur ces malheureux à Cologne, à Trèves, à Mayence, à Vorms. Comme on usait à leur égard de représailles, il n'en ar riva qu'un petit nombre à Constantinople. L'empereur Alexis, qui n'attendait qu'un corps de troupes prêt à marcher sous ses ordres, fut alarmé à la vue d'une pareille multitude, et employa toutes sortes de moyens pour les traverser. Bref, la plupart de ceux qui avaient pris les devants avec Pierre l'Ecmite périrent par le fait de leur imprudence, de leurs désordres et des ennemis qu'ils s'étaient faits.

Mais l'armée des princes se comporta avec plus de prudence, et obtint un plus heureux succès. Elle avait pour chefs Godefroy de Bouillon, Eustache et Baudouin, ses deux frères, Hugues de Vermandois, Robert il, duc de Normandie, Boëmond, prince de Tarente, et Tancrède, son neveu. S'etant réunis près de Nicée, leur armée se trouva forte de 100,000 cavaliers, et de 600,000 fantassins, en comptant les femmes. Avec ces forces, ils remportèrent plusieurs victoires contre les infidèles. Les faits les plus importants de cette expédition sont : la bataille de Dorylee (1097), où les musulmans furent entièrement défaits; la prise de Nicée, d'Éde-se (1097), d'Antioche (1098) et celle de Jérusalem (1099). Les croisés formèrent dans cette dernière ville un rovaume chrétien, dont ils deferè

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rent la couronne à Godefroy de Bouillon, et dans les villes voisines, plusieurs principautés, où régnèrent les autres chefs des croisés. Godefroy, tout en acceptant l'autorité de roi, refusa la couronne qu'on lui présentait, disant qu'il ne consentirait jamais à porter une couronne d'or dans un lieu où le Sauveur du monde en avait porté une d'épines. Peu de jours après, ce héros vainquit les sultans d'Egypte et de Babylone, dont l'armée était composée de plus de 400,000 hommes d'infanterie et de 100,000 de cavalerie. Il étendit ses conquêtes dans la Palestine, et se rendit tributaires les émirs de Ptolémaïde, de Césarée, d'Antipatride et d'Ascalon.

2 Croisade. L'illustre abbé de Clairvaux, ce vertueux solitaire plus répandu et plus considéré dans le monde que ne le fut jamais aucun ministre, aussi puissant et plus respecté dans l'Europe qu'aucun monarque, fut choisi par le pape Eugène III, autrefois son disciple, pour précher la seconde croisade (1146). Saint Bernard s'acquitta de cette commission avec son éloquence ordinaire; il entraîna tous les esprits. Ce fut de ses mains que le roi de France Louis le Jeune et l'empereur Conrad Ill regurent la croix. On voulut engager saint Bernard à marcher à la tête des croisés, mais il refusa cet emploi dangereux, et se contenta de promettre à l'armée, de la part de Dieu, le plus heureux succès. Mais les deux princes n'éprouvèrent que des revers. Ils étaient cependant sur le point de prendre Damas (1148), lorsque la discorde se glissa entre les seigneurs des deux armées la perfidie des Grecs s'en méla. La débauche et les maladies ravagèrent ces nombreuses troupes, qui se montaient au moins à 300,000 hommes, et les deux princes furent contraints de revenir en Europe. L'insuccès de cette seconde croisade fut attribué principalement aux desordres des croisés, et regardé comme un châtiment de Dieu.

3 Croisade. Elle fut entreprise sous le pontificat de Clément Ili, et préchée par Guillaume, archevêque de Tyr, et le cardinal Albano (1188). Il s'agissait de reconquérir Jérusalem, retombée au pouvoir des infidèles l'année précédente. Trois souverains partirent avec de nombreuses armées pour la terre sainte Philippe Auguste, roi de France, Richard Coeur-de-Lion, roi d'Angleterre, et Frédéric Barberousse, empereur d'Allemagne. Mais le succès ne répondit point à l'espérance générale. L'armée de Frédéric fut presque entièrement détruite en Asie, et luimême périt en Cilicie (1190); une fâcheuse rivalité s'établit ensuite entre Richard et Philippe et les empêcha de faire les conquêtes qu'ils pouvaient se promettre avec une armée de 300,000 hommes; Philippe revint en France, après la prise d'Acre (1191), et tout le courage de Richard n'aboutit qu'à obtenir du fier Saladin, soudan d'Egypte, une trêve de trois ans.

Croisade. L'Allemagne eut l'honneur de la quatrième croisade, que plusieurs princes de l'Empire, tant ecclésiastiques que séculiers, entreprirent en 1195, sous la conduite

de l'empereur Henri VI. On vit avec étounement parmi les croisés, Marguerite de France, Sœur de Philippe Auguste, et veuve de Béla, roi de Hongrie. Cette courageuse princesse se distingua dans cette expédition, à la tête de ses troupes. Plusieurs villes prises, plusieurs batailles gagnées contre les infidèles, semblaient annoncer l'entière défaite des musulmans, lorsque les conquêtes des croisés furent arrêtées par la mort de l'empereur,

en 1198.

5 Croisade. Préchée par Foulques de Neuilly, sous le pontificat d'Innocent Ill, la cinquième croisade fut entreprise par Baudouin IX, comte de Flandre, Boniface II,' marquis de Montferrat, et Henri Dandolo, doge de Venise. L'armée des chrétiens n'alla pas plus loin que Constantinople. Elle en chassa d'abord l'usurpateur Alexis l'Ange, et plaça sur le trône Alexis le Jeune (1203); mais l'année suivante elle reprit Constantinople sur Ducas Murtzuphe. Des chrétiens, armés contre les infidèles, exercèrent dans une ville chrétienne toutes les cruautés que leur suggérèrent l'avarice et la débauche, et poussèrent l'impiété jusqu'à danser avec des femmes dans le sanctuaire de sainte-Sophie. Baudouin, le plus puissant des croisés, usurpa le trône dont il avait chassé un autre usurpateur; il fut le premier empereur latin de Constantinople. Les autres princes se disputèrent les dépouilles des Grecs et se partagèrent les lambeaux de leur empire. Un petit nombre passa en Syrie et périt par la peste ou par les armes des musulmans.

Nous ne donnons pas le nom de croisade à une multitude d'enfants qui, sédui s par des maîtres fanatiques auxquels ils entendaient répéter sans cesse ce passage du psaume: Seigneur, vous avez tiré des enfants votre gloire la plus parfaite, s'imaginèrent que c'était à eux qu'était réservé l'honneur de délivrer le saint sépulcre de la domination des Sarrasins. Ils prirent la croix, au nombre de 60,000, tant en France qu'en Allemagne, et se mirent en route (1213); mais un grand nombre s'égarèrent dans les forêts et les déserts, d'autres périrent de chaud, de faim et de soif; quelques-uns passèrent les Alpes, mais ils furent dépouillés et chassés par les Lombards; d'autres s'embarquèrent à Marseille et furent submergés par la tempête, ou vendus aux Sarrasins par leurs conducteurs.

6 Croisale. Il y avait longtemps que Jérusalem avait été reprise par les infidèles ; cependant on s'obstinait toujours en Europe à nommer un roi de Jérusalem. Jean de Brienne, gentilhomme illustre, mais pauvre, qui avait hérité de ce titre, commença la sixième croisade en 1217, avec André, roi de Hongrie, et plusieurs autres princes et seigneurs. Des commencements peu favorables rebutèrent le roi de Hongrie, qui se retira. Il fut remplacé par ie comte de Hollande, par le cardinal Albano et par plusieurs autres princes et prélats, qui, réunis sous les ordres de Jean de Brienne, formaient une armée de près de 100,000 hommes. La ville de Damiette fut assiégée et prise par les croisés,

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