AVERTISSEMENT. LES Discours qui composent la première partie de ce Cours de Littérature ont été prononcés à l'Athénée de Paris, en 1810 et 1811, tels que je les publie. Je n'en ai changé ou retranché que les choses qui m'ont paru exiger des corrections, et celles qui, tenant à des localités, eussent perdu leur intérêt pour les lecteurs, toujours plus dédaigneux qu'un auditoire. La date de leur énonciation dans ce volume et dans les volumes suivants, prouvera que les variations. de la politique ne m'ont pas fait dévier de la ligne philosophique et littéraire que je m'étais invariablement tracée. Je déclare que je me sens plus jaloux de mes principes de conscience, que de mes dogmes sur les belles-lettres, persuadé, comme je l'établis en ce travail, que la PROBITÉ est le fonds 418077 et la principale disposition naturelle à tout poëte, à tout prosateur, qui aspire à se rendre utile par ses écrits. Il m'a semblé que je devais laisser à cette suite de leçons orales la forme qu'elle avait reçue dans mes séances publiques, et que cette marche, qui garde plus de mouvement que les ́chapitres d'un traité, produirait encore cette heureuse illusion, par laquelle le lecteur se croit l'auditeur d'une conférence animée avec l'homme qui lui expose ses opinions sur la doctrine. COURS ANALYTIQUE DE LITTÉRATURE GÉNÉRALE. PREMIÈRE PARTIE. INTRODUCTION. 0060000000000000 PREMIÈRE SÉANCE. Vues générales sur l'importance d'une analyse exacte dans tous les genres de la littérature. MESSIEURS, CHARGÉ d'entreprendre un Cours de Littérature générale, mon premier soin dut être de rechercher quelle fut l'origine des belles - lettres, et quels en sont les moyens et la fin: j'ai vu qu'elles naquirent du besoin de nous communiquer nos sentiments et nos pensées, qu'elles tiennent de l'agrément le pouvoir de plaire et d'instruire, et que leur but est l'utilité. De toutes les connaissances que l'homme veut acquérir, la plus nécessaire, celle que sa curiosité poursuit avec le plus d'ardeur, c'est la connaissance de l'homme. Le desir qu'il ressent de se pénétrer lui-même a le plus exercé son génie. La nécessité, le soin de sa conservation, l'intérêt de ses plaisirs, tout le porte à s'étudier ce penchant l'oblige à tourner des regards attentifs sur ses semblables pour se mieux connaître: il considère leurs passions pour les comparer avec les siennes : l'intime liaison de son individu avec ceux de son espèce, le prévient qu'il ne saura ce qu'il est qu'en sachant bien ce qu'ils sont ; et que, de même, il ne jugera des autres que par lui. Les choses inanimées ne l'intéressent que par leurs relations avec sa propre existence: son esprit ne s'attache à démêler l'instinct des animaux que par les rapports qu'il trouve en eux avec un instinct plus complet, qu'il nomme sa raison: les images des générations passées ne le touchent qu'en ce qu'elles lui semblent les exemplaires de ses actions présentes, et des actions futures qui les suivront: il cherche dans leurs différences le perfectionnement que le temps lui promet, ou les altérations qu'il lui fait subir: enfin, la nature entière n'est l'objet des spéculations de l'homme que par le besoin qu'il éprouve d'approfondir son être |