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GÉRONTE. Je meurs d'envie de le voir : faites-le moi vite venir.

VALÈRE. Je le vais quérir

:

SCÈNE II.

GÉRONTE, JACQUELINE, LUCAS.

JACQUELINE. Par ma fi, monsieu, ceti-ci fera justement ce qu'ant fait les autres. Je pense que ce sera queussi queumi; et la meilleure médecaine que l'an pourrait bailler à votre fille,ce seroit , selon moi, un biau et bon mari, pour qui alle eût de l'amiquié.

GÉRONTE. Ouais! nourrice m'amie , vous vous mêlez de bien des choses !

LUCAS

Taisez-vous, notre minagère. Jacquelaine; ce n'est pas à vous à bouter là votre nez.

JACQUELINE. Je vous dis et vous douze que tous ces médecins n'y font rian que de l'iau claire ; que votre fille a bee soin d'autre chose que de ribarbe et de séné, et qu'un mari est un emplatre qui garit tous les maux des filles.

CÉRONTE. Est-elle en état maintenant qu'on s'en voulûtchare ger avec l'infirmité qu'elle a ? et lorsque j'ai été dans le dessein de la marier, ne s'est-elle pas opposée à mes volontés ?

JACQUELINE Je le crois bian; vous li vouliez bailler eun homme qu’alle n'aime point. Que ne preniais-vou monsieu Liandre, qui li touchoit au cæur ? alle auroit été fort obéissante; et je m'en vais gager qu'il

се

a

la prendroit, li, comme alle est , si vous la li vouillais dunner.

CÉRONTE. Ce Léandre n'est pas ce qu'il lui faut; il n'a pas du bien comme l'autre.

JACQUELINB. Il a eun oncle qui est si riche, dont il est hériquié!

GEKONTB. Tous ces biens à venir me semblent autant de chansons. Il n'est rien tel que ce qu'on tient; et l'on court grand risque de s'abuser, lorsque l'on compte sur le bien qu'un autre vous garde. La mort n'a pas toujours les oreilles ouvertes aux veux et aux prières de messieurs les héritiers ; et l'on a le temps d'avoir les dents longues , lorsqu'on attend, pour vivre, le trépas de quelqu'un.

JACQUELINE. Enfin, j'ai toujours ouï dire qu'en mariage, comme ailleurs, contentement passe richesse. Les pères et les mères ont cette maudite coutume de deinander toujours : Qu'a-t-il ? et Qu'a-t-elle ? et le compère Piarre a marié sa fille Simonette au gros Thomas, pour un quarquié de vaigne qu'il avoit davantage que le jeune Robin, où alle avoit bouté son amiquié; et v'là que la pauvre criature en est devenue jaune comme eun coing, et n'a point profité tout depuis ce temps-là, C'est un bel exemple pour vous, monsieu. On n'a que son plaisir en ce monde ; et j'aimerois inieux bailler à ma fille eun bon mari qui li fat agriable que toutes les rentes de la Biausse,

CÉRONTE. Peste! madame la nourice, comme vous dégoisez! Taisez-vous, je vous prie ; vous prenez trop de soin, et vous échauffez votre lait, LUCAS, frappant à chaque phrase qu'il dit, sur l'épaule

de Géronte, Morgue ! tais-toi, tu es une im nte. Monsieu n'a que faire dc tes discours, et il sait ce qu'il a à faire. Mêle-toi de donner à teter à ton enfant, sans tant faire la raisonneuse. Monsieu est le père de sa fille; et il est bon et sage pour voir ce qu'il li faut.

GÉRONTE.
Tout doux! Oh! tout doux !
LUCAS, frappant encore sur l'épaule de Géronte.

Monsieu, je veux un peu la mortifier, et li appren. dre le respect qu’alle vous doit.

GÉRONTE.
Oui. Mais ces gestes ne sont pas nécessaires.

SCÈNE III.

VALÈRE, SGANARELLE, GÉRONTE, LUCAS,

JACQUELINE,

VALÈRE. Monsieur, préparez-vous. Voici votre médecin qui entre.

GÉRONTE, à Sganarelle. Monsieur, je suis ravi de vous voir chez moi, et nous avons grand besoin de vous.

en robe de médecin , avec un chapeau des

plus pointus. Hippocrate dit..... que nous nous couvrions tous deux.

CÉRONTE. Hippocrate dit cela ?

SGANARELLE,

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GERONTE.

SGANARELLE.

Puisqu'Hippocrate le dit, il le faut faire.

Monsieur le médecin , ayant appris les merveilleuses choses...

GÉRONTE.
A qui parlez-vous, de grâce ?

SGANARELLE.
A vous.

GÉRONTE. Je ne suis pas médecin.

SGANARELLE.
Vous n'êtes

pas
médecin ?

GÈRONTE.
Non, vraiment.

SGANARELLE, Tout de bon ?

GÉRONTE. Tout de hon. (Sganarelle prend un bâton , et frappe Gérontc.) Ahl ah ! ah!

SGANARELLE. Vous êtes médecin maintenant; je n'ai jamais eu d'autres licences.

GÉRONTE , à Valère.
Quel diable d'homme m'avez-vous là amené ?

VALÈRE. Je vous ai bien dit que c'étoit un médecin goguenard.

GÉRONTE. Oni: mais je l'envoierois promener avec ses geguenarderies.

LUCAS. Ne

pre nez pas garde à monsieu; ce n'est que pour rire.

GÉRONTE. Cette raillerie ne me plaît pas.

SGANARELLE. Monsieur , je vous demande pardon de la liberté que j'ai prise.

GÉRONTE. Monsieur, je suis votre serviteur.

SGANARELLE, Je suis fâché...

ça,

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Que j'ai eu l'honneur de vous donner.

GÉRONTE. Ne parlons plus de cela. Monsieur, j'ai une fille qui est tombée dans une étrange maladie.

SGANARELLE, Je suis ravi, monsieur, que votre fille ait besoin de moi ; et je souhaiterois, de tout mon cæur, que vous en eussiez besoin aussi, vous et toute votre faanille , pour vous témoigner l'envie que j'ai de vous servir.

GÉRONTE.
Je vous suis obligé de ces sentiments.

SGAN ARELLE.

Je vous assure que c'est du meilleur de mon âme que je vous parle.

GÉRONTE.
C'est trop d'honneur que vous me faites.
Comment s'appelle votre fille ?

GÉRONTE.
Lucinde.

SGANARELLE.

SGANARELLE.

Lucinde! Ab!beau nom à médicamenter!Lucinde!

GÉRONTE.
Je m'en vais voir un peu ce qu'elle fait.

SGANARELLE.

Qui est cette grande femme-là ?

GÉRONTE.
C'est la nourrice d'un petit enfant que j'ai.

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