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MYRTIL.

Et que,

Et, dans un rang pareil, j'oserais espérer
Que peut-être l'amour me feroit prélérer :
Mais l'inégalité de bien et de naissance,
Qui peut d'elles à moi faire la différence...
Al! leur rang de mon cæur ne viendra point à bout;
Et vos divins appas vous tiennent lieu de tout.
Je vous aime; il suffit; et dans votre personne
Je vois rang, biens, trésors, états, sceptre, couronne ;
Et des rois les plus grands m'offrit-on le pouvoir,
Je n'y changerois pas le bien de vous avoir.
C'est une vérité toute sincére et pure ;
Et pouvoir en douter est me faire une injure.

MÉLICERTE.
Hé bien! je crois Myrtil, puisque vous le voulez,
Que vos væux par leur rang ne sont point ébranlés,

bien qu'elles soient nobles , riches , et belles, Votre cæurm’aime assez pourme mieuxaimerqu'elles Mais ce n'est pas l'amour dont vous suivez la voix; Votre père, Myrtil , réglera votre choix ; Et de inême qu'à vous je ne lui suis pas chère, Pour préférer à tout une simple bergère. Non, chère Mélicerte, il n'est père, ni dieux, Qui me puissent forcer à quitter vos beaux yeux ; Et toujours de mes væux reine comme vous êtes...

MÉLICERTE. Ah! Myrtil, prenez garde à ce qu'ici vous faites : N'allez point présenter un espoir à mon caur, Qu'il recevroit peut-être avec trop de douceur, Et qui, tombant après comme un éclair qui passe, Me rendroit plus cruel le coup de ma disgrace. Quoi! faut-il des serments appeler le secours, Lorsque l'on vons promet de vous aimer toujours ? Que vous vous faites tort par de telles alarmes , Et connoissez bien peu le pouvoir de vos charines ! IIé bien ! puisqu'il le faut, je jure par les Dieux, Et, si ce n'est asscz, je jure par vos yeux ,

MYRTIL.

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MYRTIL.

Qu'on me tuera plutôt que je vous abandonne.
Recevez-en ici la foi que je vous donne;
Et souffrez que ma bouche, avec ravissement,
Sur cette belle main en signe le serınent.

MÉLICERTE.
Ah! Myrtil, levez-vous, de peur qu'on ne vous voie.
Est-il rien... ? Mais, ô ciel on vient troubler ma joie.

SCÈNE IV.
LICARSIS, MYRTIL, MÉLICERTE.

MYRTIL.

LICARSIS

Ne vous contraignez pas pour moi.

MÉLICERTE,

Quel sort fàcheux!

å part.

LICARSIS.

Cela na va pas mal, continuez tous deux.
Peste! mon petit fils, que vous avez l'air tendre ?
Et qu'en maitre déjà vous savez vous y prendre!
Vous a-t-il, ce savant qu'Athènes exila,
Dans sa philosophie appris ces choses-là ?
Et vous qui lui donnez, de si douce manière ,
Votre main à baiser, la gentille bergère,
L'honneur vous apprend-il ces inignardes douceurs
Par qui vous débauchez ainsi les jeunes caurs?
Ah! quittez de ces mots l'outrageante bassesse,
Et ne m'accablez point d'un discours qui la blesse.
Je veux lui parler, moi. Toutes ces amitiés...

MYRTIL.

LICARSIS.

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MYRTIL.

Je ne souffrirai point que vous la maltraitiez.
A du respect pour vous la naissance m'engage.
Mais je saurai sur moi vous punir de l'outrage.
Oui, j'atteste le ciel que, si, contre mes vaux,
Vous lui dites encor le moindre mot fàcheux,
Je vais, avec ce fer qui m'en fera justice,

Au milieu de mon sein vous chercher un supplice, Et par mon sang versé lui marquer promptement L'éclatant désaveu de votre emportement.

MÉLICERTE. Non, non, ne croyez pas qu'avec art je l'enflamme, Et que mon dessein soit de séduire son àme. S'il s'attache à me voir, et ine veut quelque bien, C'est de son mouvement, je ne l’y force en rien. Ce n'est pas que mon caur veuille ici se défendre De répondre à ses vœux d'une ardeur assez tendre; Je l'aime, je l'avoue, autant qu'on puisse aimer: Mais cet amour n'a rien qui vous doive alarmer; Et pour vous arracher toute injuste créance, Je vous promets ici d'éviter sa présence, De faire place au choix où vous vous résoudrez, Et ne souffrir ses væux que quand vous le voudiez.

SCÈNE V.

LICARSIS, MYRTIL.

MYRTIL.

LICARSIS.

Hé bien! vous triomphez avec cette retraite,
Et dans ces mots votre âme a ce qu'elle souhaite :
Mais apprenez qu'en vain vous vous réjouissez,
Que vous serez trompé dans ce que vous pensez,
Et qu'avec tous vos soins, teute votre puissance,
Vous ne gagnerez rien sur ma persévérance.
Comment! à quel orgueil, fripon, vous vois-je aller!
Est-ce de la façon que l'on me doit parler. ?
Oui, j'ai tort, il est vrai; mon transport n'est passage.
Pour rentrer au devoir, je change de langage,
Et je vous prie ici, mon père, au nom des dieux,
Et par tout ce qui peut vous être précieux,
De ne vous point servir dans cette conjoncture
Des fiers droils que sur moi vous donne la nature:

MYRTIL.

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Ne m'empoison nez point vos bienfaits les plus doux.
Le jour est un présent que j'ai reçu de vous ;
Mais de quoi vous serai-je aujourd'hui redevable
Si vous me l'allez rendre, hélas ! insupportable ?
Il est , sans Mélicerte , un supplice à mes yeux ;
Sans ces divins appas rien ne m'est précieux ,
Ils font tout mon bonheur et toute mon envie;
Et si vous me l’otez, vous m'arrachez la vie.

LICARSIS, à part.
Aux douleurs de son âme il me fait prendre part
Qui l'auroit jamais cru de ce petit pendard ?
Quel amour? quels transporis ! quels discours pour

son âge ! J'en suis conlus, et sens que cet amour m'engage.

MYRTIL, se jetant aux genoux de Licarsis.
Voyez, me voulez-vous ordonner de mourir?
Vous n'avez qu'à parler, je suis prêt d'obéir.

LICARSIS,
Je n'y puis plus tenir, il m'arrache des larmes,
Et ses tendres propos me font rendre les armes.

'à parl.

MYRTIL.

Que si dans votre cœur un reste d'amitié
Vous peut de mon destin donner quelque pitié,
Accordez Mélicerle à mon ardente envie,
Et vous serez bien plus que me donner la vie.

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MYRTIL.

Vous ferez pour moi que son oncle lcblige A me donner sa main?

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LIC ARSIS.

O père le meilleur qui jamais ait été !
Que je baise vos mains après tant de bonté.
Ah! que pour ses enfants un père a de foiblesse !
Peut-on rien refuser à leurs mots de tendresse ?
Et ne sent-on pas certaios mouvements doux,
Quand on vient à songer que cela sort de vous?

MYRTIL.

Metiendrez-vous au moins la parole avancée?
Ne changerez-vous point, dites-moi, de pensée ?

LICARSIS.

Non.

MYRTIL.

Me permettez-vous de vous désobéir, Si de ces sentiments on vous fait revenir ? Prononcez le mot.

LICARSIS.

MYRTIL.

Oui. Ah! nature, nature!
Je m'en vais trouver Mopse, et lui faire ouverture
De l'amour que sa nièce et toi vous vous portez,
Ah! que ne dois-je point à vos rares bontés!

(seul.)
Quelle heureuse nouvelle à dire à Mélicerte!
Je n'accepterois pas une couronne offerte,
Pour le plaisir que j'ai de courir lui porter
Ce merveilleux succès qui la doit contenter.

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Ah! Myrtil, vous avez du ciel reçu des charmes Qui nous ont préparé des matières de larmes,

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