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mie de chette pauvre ainfain, no petite Madelaine, que tu m'as laichéé pour gaige de ta foi?

M. DE POURCEAUGNAC.

Voilà deux impudentes carognes!

LUCETTE.

Beni, Françon; beni, Jeannet; beni toustou, beni toustoune, beni fayre beyre à un payre dénaturat la duretat qu'el a per nautres.

NERINE.

Venez, Madelaine, men aiufain, venez-ves-en ichi faire honte à vo père de l'impudainche qu'il a.

SCENE X.

ORONTE, M. DE POURCEAUGNAC, LUCETTE,
NERINE, PLUSIEURS ENFANTS.

LES ENFANTS.

Ah! mon papa! mon papa! mon papa!

M. DE POURCEAUGNAC.

Diantre soit des petits fils de putain !

LUCETTE.

Coussy, trayte, tu nou sios pas dins la darnière confusiu de ressaupre à tal tous enfants, et de ferma l'aureillo à la tendresso paternello? Tu nou m'escaperas pas, infame: yeu te boli seguy pertout, et te reproucha ton crime, jusquos à tant que me sio beniado, et que t'ayo fayt penjat, couquy, te, boli fayre penjat.

NÉRINE.

Ne rougis-tu mie de dire ches mots là, et d'être insainsible aux cairesses de chette pauvre ainfaint? Tu ne te sauveras mie de mes pattes: et en dépit de tes dains, je ferai bien voir que je sis ta femme, et je te ferai pindre.

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Au secours! au secours! Où fuirai-je? je n'en puis plus.

T. VI.

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ORONTE, à Lucette et à Nérine.

Allez, vous ferez bien de le faire punir; et il mérite d'être pendu.

SCENE XI.

SBRIGANI, seul.

Je conduis de l'œil toutes choses, et tout ceci ne va pas mal. Nous fatiguerons tant notre provincial, qu'il faudra, ma foi, qu'il déguerpisse.

SCENE XII.

M. DE POURCEAUGNAC, SBRIGANI.

AWAM. DE POURCEAUGNAC.

Ah! je suis assommé. Quelle peine! quelle maudite ville! Assassiné de tous côtés !

SBRIGANI.

Qu'est-ce, monsieur? Est-il encore arrivé quelque chose?

M. DE POURCEAUGNAC.

Oui; il pleut en ce pays des femmes et des lave

ments.

Comment done?

SBRIGANI.

M. DE POURCEAUGNAC.

Deux carognes de baragouineuses me sont venties accuser de les avoir épousées toutes deux, et me menacent de la justice.

SBRIGANI.

Voilà une méchante affaire; et la justice en ce pays-ci est rigoureuse en diable contre cette sorte de crime.

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M. DE POURCEAUGNAC. is 19 Oui; mais quand il y aurait information, ajournement, décret et jugement obtenu par surprise, défaut et contumace, j'ai la voie du conflit de jurisdiction pour temporiser et venir aux moyens de nullité qui seront dans les procédures.

WANDER SEBRIGANI.

Voilà en parler dans tous les termes; et l'on voit bien, monsieur, que vous êtes du métier.

M. DE POURCEAUGNAC.

Moi! point du tout; je suis gentilhomme.

SBRIGANI.

Il faut bien, pour parler ainsi, que vous ayez étudié la pratique.

M. DE POURCEAUGNAC.

à

Point; ce n'est que le sens commun qui me fait juger que je serai toujours reçu mes frais justificatifs, et qu'on ne me saurait condamner sur une simple accusation, sans un récolement et confrontation avec mes parties.

SBRIGANI.

En voilà de plus fin encore.

M. DE POURCEAUGNAC.

Ces mots-là me viennent sans que je les sache.

SBRIGANI.

Il me semble que le sens commun d'un gentilhomme peut bien aller à concevoir ce qui est du droit et de l'ordre de la justice, mais non pas à savoir les vrais termes de la chicane.

M. DE POURCEAUGNAC.

Ce sont quelques mots que j'ai retenus en lisant les romans.

1

Ah! fort bien.

SBRIGANI.

M. DE POURCEAUGNAC.

Pour vous montrer que je n'entends rien du tout à la chicane, je vous prie de me mener chez quelque avocat pour consulter mon affaire.

SBRIGANI.

Je le veux, et vais vous conduire chez deux hommes fort habiles: mais j'ai auparavant à vous avertir de n'être point surpris de leur manière de parler; ils ont contracté du barreau certaine habitude de déclamation, qui fait que l'on dirait qu'ils chantent, et vous prendrez pour musique tout ce qu'ils vous diront.

M. DE POURCEAUGNAC.

Qu'importe comme ils parlent, pourvu qu'ils me disent ce que je veux savoir.

SCENE XIII.

M. DE POURCEAUGNAC, SBRIGANI, DEUX
AVOCATS, DEUX PROCUREURS, DEUX
SERGENTS.

PREMIER AVOCAT, traînant ses paroles en chantant.
La polygamie est un cas,
Est un cas pendable.

SECOND AVOCAT, chantant fort vite et bredouillant.
Votre fait

Est clair et net;

Et tout le droit,
Sur cet endroit,

Conclut tout droit.

Si vous consultez nos, auteurs,

Législateurs et glossateurs,
Justinian, Papinian,

Ulpian et Tribonian,

Fernand, Rebuffe, Jean Imole,
Paul Castre, Julian, Barthole,
Jason, Alciat et Cujas

Ce grand homme si capable,

La polygamie est un cas,

Est un cas pendable.

ENTRÉE DE BALLET.

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Danse de deux procureurs et de deux sergents, pendant que le SECOND AVOCAT chante les paroles qui suivent:

Tous les peuples policés.

Et bien senses,

Les Français, Anglais, Hollandais,
Danois, Suédois, Polonais,

Portugais, Espagnols, Flamands,
Italiens, Allemands,

LE

Sur ce fait tiennent loi semblable;
Et l'affaire est sans embarras.

La polygamie est un cas,
Est un cas pendable.

LE PREMIER AVOCAT chante celles-ci :
La polygamie est un cas,

Est un cas pendable.

(M. de Pourceaugnac, impatienté, les chasse.)

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