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pour monsieur votre père; et je n'ai pu souffrir qu'un honnête homme comme lui fût exposé à la honte de tous les bruits qui pourraient suivre une action comme la vôtre.

ORONTE.

Je vous suis, seigneur Eraste, infiniment obligė.

ERASTE.

Adieu, monsieur. J'avais toutes les ardeurs du monde d'entrer dans votre alliance, j'ai fait tout ce que j'ai pu pour obtenir un tel honneur: mais j'ai été malheureux, et vous ne m'avez pas jugé digne de cette grace. Cela n'empêchera pas que je ne conserve pour vous les sentiments d'estime et de vénération où votre personne m'oblige; et, si je n'ai pu être votre gendre, au moins serai-je éternellement votre serviteur.

ORONTE.

Arrêtez, seigneur Eraste; votre procédé me touche l'ame, et je vous donne ma fille en mariage.

JULIE.

Je ne veux point d'autre mari que monsieur de Pourceaugnac.

ORONTE.

Et je veux, moi, tout à l'heure, que tu prennes le seigneur Eraste. Cà, la main.

JULIE.

Non, je n'en ferai rien.

ORONTE.

Je te donnerai sur les oreilles.

BRASTE.

Non, non, monsieur; ne lui faites point de violence, je vous en prie.

ORONTE.

C'est à elle à m'obéir, et je sais me montrer le maître.

ERASTE.

Ne voyez-vous pas l'amour qu'elle a pour cet homme-la? et voulez-vous que je possède un corps dont un autre possèdera le cœur?

ORONTE.

C'est un sortilège qu'il lui a donne; et vous verrez

qu'elle changera de sentiment avant qu'il soit peu. Donnez-moi votre main. Allons.

Je ne...

JULIE.

ORONTE.

Ah! que de bruit! Çà, votre main, vous dis-je. Ah! ah! ah!

KRASTE, à Julie.

Ne croyez point que ce soit pour l'amour de vous que je vous donne la main; ce n'est que monsieur votre père dont je suis amoureux, et c'est lui que j'épouse.

ORONTE. kon

Je vous suis beaucoup obligé; et j'augmente de dix mille écus le mariage de ma fille. Allons, qu'on fasse venir le notaire pour dresser le contrat.

ERASTE.

En attendant qu'il vienne, nous pouvons jouir du divertissement de la saison, et faire entrer les masques que le bruit des noces de monsieur de Pourceaugnac a attirés ici de tous les endroits de la ville.

SCENE X:

TROUPE DE MASQUES DANSANTS ET CHANTANTS.
UN MASQUE, en Égyptienne.

Sortez, sortez de ces lieux,
Soucis, Chagrins, et Tristesse;
Venez, venez, Ris et Jeux,
Plaisirs, Amours et Tendresse.
Ne songeons qu'à nous réjouir,
La grande affaire est le plaisir.

CHOEUR DE MASQUES chantant.
Ne songeons qu'à nous réjouir,
La grande affaire est le plaisir.
L'ÉGYPTIENNE.

A me suivre tous ici

Votre ardeur est trop commune;
Et vous êtes en souci

De votre bonne fortune :

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Tout n'est rien, si l'amour n'y mêle ses ardeurs.

L'ÉGYPTIENNE.

Il n'est point, sans l'amour, de plaisirs dans la vie.

TOUS DEUX ENSEMBLE.

Soyons toujours amoureux,
C'est le moyen d'être heureux.

CHOEUR.

Sus, sus, chantons tous ensemble,
Dansons, sautons, jouons-nous.
UN MASQUE, en pantalon.
Lorsque pour rire on s'assemble,
Les plus sages, ce me semble,
Sont ceux qui sont les plus fous.

TOUS ENSEMBLE.

Ne songeons qu'à nous réjouir,
La grande affaire est le plaisir.
PREMIERE ENTREE DE BALLET.
Danse de sauvages.

SECONDE ENTRÉE DE BALLET.

Danse de Biscayens.

FIN DE M. DE POURCEAUGNAG,

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AVANT PROPOS.

Le roi, qui ne voit que des choses extraordinaires dans tout ce qu'il entreprend, s'est proposé de donner à sa cour un divertissement qui fùt composé de tous ceux que le théâtre peut fournir; et, pour embrasser cette idée, et enchainer ensemble tant de choses déréglées, Sa Majesté a choisi pour sujet deux princes rivaux, qui, dans le champêtre séjour de la vallée de Tempé où l'on doit célébrer la fête des jeux Pythiens, régalent à l'envi une jeune princesse et sa mère, de toutes les galanteries dont ils se peuvent aviser.

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