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combien il avait eu raison. Il eut des ennemis, mais aussi il eut des amis confiants et déterminés. Il rallia presque touts les Anglais autour de son trône, parce qu'il fut avec constance le chef de ceux qui l'avaient appelé et soutenu et de ceux qui se joignaient à ce parti. Cette conduite a seule établi la maison d'Hanovre sur le trône d'Angleterre.

« Ma maxime, dit ce prince après son arrivée « en Angleterre, est de ne jamais abandonner <«< mes amis, de rendre justice à tout le monde, « et de ne craindre personne. » En citant ces paroles, un historien remarque « que ce principe << est d'autant plus estimable, que la maxime << contraire est plus généralement répandue, sur« tout parmi les princes, c'est de faire peu ou << rien pour leurs amis, parce qu'ils ne les crai«gnent point, et de tout faire pour leurs enne<< mis, afin de se les attacher. »

En 1817, Lord Castlereagh dit dans la Chambre des Communes : « Je déclare que dans ces << derniers temps, l'Angleterre a dû sa puissance « et sa gloire à la division constante de cette « Chambre en deux partis franchement et loya<«<lement prononcés. » M. Ponsonby s'opposa à une motion, en disant « qu'elle tendait à détruire << la noble prévalence des partis. »

IV.

Un gouvernement libre exige cette franchise dans les paroles et dans les actions. Le parti qui gouverne dans une république, le parti royaliste dans une monarchie, doivent avoir cette franchise, ou succomber. Le gouvernement de ces pays doit se rallier à ce parti, marcher à sa tête, ou périr dans la honte.

Ce principe a été connu dans tous les pays libres; et on l'a suivi, même en passant d'un parti dans un autre, comme en restant attaché à celui qu'on avait pris. Lorsque César eut déclaré ses desseins, le consul Lentulus dit au sénat : « Le sénat et la république peuvent dispo« ser de moi, si l'on veut opiner avec hardiesse << et courage; mais si l'on ménage César, si l'on «cherche sa faveur, je songerai à mes propres «< intérêts. Je peux aussi regagner son amitié et << sa bienveillance. » Scipion, l'autre consul, parla dans le même sens.

Eh bien ! dans un gouvernement libre, si l'on veut adopter la maxime de ne tromper personne, on arrive nécessairement à former un parti. Car les hommes s'unissent naturellement par un sentiment commun. Ils sentent que leur force vient de leur union, et par cela même ils s'attachent à leur opinion, à leurs sentimens et au parti qui soutient les mêmes sentimens.

Mais nos honnêtes gens, au milieu des périls de la monarchie, étaient bien contents d'euxmêmes, en s'écriant : Je ne suis d'aucun parti. Ils le répétaient en voyant auprès d'eux un parti redoutable; et le ministère n'étant pas à la tête d'un parti, entraînait dans une ruine inévitable un trône qu'il séparait de ses vrais appuis.

CHAPITRE VI.

Citation d'une pensée remarquable de M. Royer-Collard sur la souveraineté du peuple. Paroles qui me sont adressées par M. Benjamin Constant. Ma réponse. Comment le Moniteur était rédigé en 1792. Le parti libéral attaque toujours les royalistes, rappelle avec dérision l'amnistie accordée aux militaires qui avaient suivi le roi à Gand, étend son acharnement jusqu'à l'ancienne gloire de la France. Je lui réponds, et je cite la Campagne mémorable de Turenne en 1674. Nouvelle maxime des circonspects: union et oubli.

EN parlant sur le genre de gouvernement que nous avons adopté, j'ai souvent cité à la tribune les principes et les usages anglais. Beaucoup d'autres députés ont fait de même; et M. le général Lamarque a dit dans un ouvrage sur l'armée,

ce sont précisement les Anglais que je veux vous citer. Mais aussi, combien de fois nos hommes de bien ne se sont-ils pas écriés : Nous ne sommes pas Anglais. Vérité indubitable; mais ce n'était pas alors qu'il fallait l'invoquer. C'était lorsque l'Assemblée constituante prenait le mauvais chez ce peuple, et laissait le bou, par une imitation maladroite; lorsqu'elle prenait le poison sans le contre-poison, lorsque sa vanité ne pouvant se dissimuler qu'elle ne faisait qu'imiter, cherchait à paraître différente dans ses lois, et se complaisait même à parler avec mépris des meilleures institutions de ce pays. C'est ce sentiment d'une vanité puérile qui surtout a contribué à lui faire imaginer une assemblée unique en législation. C'était alors qu'il fallait dire: Nous ne sommes pas Anglais, n'imitez ce peuple en rien, laisseznous nos anciennes institutions; mais aujourd'hui, après avoir pris maladroitement chez ce peuple le jury, la liberté de la presse, le pouvoir législatif en trois branches, et les élections et la pairie, laissez-nous comparer ce qu'il a avec ce que nous avons. Car, pour juger il faut comparer. Lorsque Bossuet et Montesquieu ont approfondi le gouvernement et les lois de Rome, lorsque le premier s'en servait pour instruire son auguste élève, je ne sache pas que personne leur ait dit : Nous

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