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Il les lisait, ou les parcourait. Il m'a souvent parlé d'ouvrages que je ne connaissais pas; et cependant, on entend dire touts les jours qu'il ne lisait rien, qu'il était inappliqué. Ce bruit vague, devenu une horrible calomnie, sera repoussé par toutes les personnes qu'il recevait dans des entretiens familiers.

Je crois que le malheur de Charles X est venu d'avoir plus écouté ses ministres que lui-même. Il lui a manqué d'avoir un ami qui le connait bien, dont l'âme eût répondu à la sienne, et qui l'ent toujours déterminé à suivre ses propres séntiments, à se laisser aller à ses inclinations naturelles; uu ami qui lui eût fait remarquer que les succès politiques d'Henri IV venaient surtout d'avoir agi et parlé avec l'abandon d'une àme expansive, dont il suivait toutes les inspirations; et que l'obéissance imposée aux Français par Louis XIV, venait surtout de ce qu'il déployait dans ses actions et dans ses discours un instinct de grandeur qui était en lui. Ces deux rois, avec des qualités bien différentes, furent toujours euxmêmes, et ne furent pas un instant différents d'eux-mêmes : c'est en cela que se trouvera toujours le plus grand ascendant d'un roi. Chrles X, une fois sur le trône, fut trop porté à voir dans les hommes qu'il avait choisis une habilité à laquelle il croyait devoir céder.

que

Je suis convaincu qu'il n'avait qu'une route à suivre pour affermir sa couronne, la route de la grandeur. Charles X y était propre par ses qualités naturelles. Je me rappelle que lui parlant un jour sur ce sujet avec chaleur, je lui dis dans la route des pensées nobles et grandes, mille fautes d'administration n'ébranlaient trône, mais que dans la route opposée, une seule faute pouvait saper ses fondements: il était de cette opinion; il avait en lui-même la conviction de cette vérité.

pas un

Louis XVI a péri, victime de ses vertus, qui toutes tendaient à l'affaiblissement du trône.

Charles X, avec des vertus capables d'affermir le trône, a été malheureux, parce qu'il s'est trop défié de leurs inspirations et de lui-même : c'est le jugement qu'avait porté de ce prince Gustave III, dans une lettre à M. de Bouillé.

CONCLUSION DE L'OUVRAGE.

Il me semble qu'en le résumant, il présente des réflexions bien graves.

Les premières causes de nos révolutions se trouvent dans la conduite du cardinal de Richelieu envers les grands de l'Etat, et surtout envers le Parlement de Paris, cette noble et antique colonne sur laquelle s'appuyaient la monarchie et les libertés publiques; ces causes se trouvent dans la continuation de son système pendant la régence du duc d'Orléans, et les règnes de Louis XV et de Louis XVI.

Dès l'instant que la monarchie fut ébranlée par ce fatal système, on en prévit les suites inévi

tables, à la fin du règne de Louis XV et sous Louis XVI.

Aucun monarque n'a fait de réformes plus utiles et plus nombreuses que Louis XVI; le commerce maritime était immense, l'industrie prospérait, nos rivaux venaient d'être humiliés; il appelle les députés de la France auprès de son trône; ils le proclament le restaurateur de la liberté française. Quatre ans après, le trône est renversé, le monarque périt sur l'échafaud.

L'administration était bonne et humaine; mais le gouvernement était faible; il tournait sans cesse son action contre sa propre autorité; il marchait de concessions en concessions.

De même sous Louis XVIII et Charles X, le commerce prospérait touts les jours de plus en plus; les progrès de l'industrie, disaient les libéraux même, étaient immenses. Paris était le centre de cette industrie; il s'embellissait chaque jour de constructions nouvelles et superbes; c'était là surtout qu'étaient versés les dons du roi et de la famille royale, dont les gazettes étaient remplies. Le trésor répandait par an 500 millions dans Paris. Paris a renversé le trône, et cela devait être ainsi. Quand l'instant fatal arrive, touts les mécontents s'agitent, les autres se taisent et attendent l'évènement. Des milliers d'hommes

l'espéraient, des milliers d'autres le craignaient. D'un côté les espérances, de l'autre les craintes;' tout se portait sur l'influence de la capitale.

Quelles en furent les causes? Les fautes accumulées pendant quinze années. Je les ai exposées, et je n'ai pas tout dit.

Quelle fut la source principale de ces fautes? Le choix des hommes, une position passionnée et impolitique envers le parti royaliste pendant les huit premières années de la seconde restauration; une ignorance absolue du caractère na-, tional, et par conséquent l'impossibilité de le diriger, de l'entraîner.

Rendez un peuple heureux par votre administration, vous ne parviendrez point, par ce succès qui vous éblouit, au maintien de l'autorité. J'ai soutenu cette vérité à la tribune en 1827; mon discours est dans ces Mémoires.

A l'administration, joignez un gouvernement ferme et prévoyant, ne cédez pas la moindre partie de votre autorité, alors seulement vous êtes le bienfaiteur des peuples. Mais à l'administration la plus paternelle, la plus sage, la plus heureuse même, joignez la faiblesse des intentions sentimentales, l'incapacité vertueuse, la pratique journalière de cette petite morale qui ne s'occupe qu'à ne pas faire de fautes person

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