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proches qu'on peut lui faire. Les sentiments se manifestent; cette loyauté est digne d'un peuple libre. On ne présente pas de candidats au roi; mais, comme la nomination doit être approuvée par lui, on a soin de ne pas faire un choix qui lui soit désagréable. Ainsi, toutes les convenances sont observées.

A nos bureaux, dont j'ai montré les inconvénients, le bon sens devrait substituer le comité général des Anglais, et leurs trois lectures, à huit jours de distance. Ils débattent une matière ; ils l'étudient, l'approfondissent par des questions adressées aux ministres dans ces comités. Nous avons pris chez nos voisins tant de choses dangereuses pour nous, qu'il serait temps enfin d'imiter les bonnes; et si des assemblées d'hommes ont toujours de graves inconvénients, il faudrait étudier les moyens par lesquels les peuples qui ont ces assemblées sçavent empêcher ou diminuer ces inconvénients.

A tout ce que je viens de dire, ajoutez une salle construite de façon qu'on ne peut y parler de sa place. On voit dans le règlement des EtatsUnis : « Tout membre, pendant qu'il parle, doit « s'adresser au président, debout et à sa place, « et s'asseoir quand il a fini. »

L'architecte de cette salle avait sans doute

trouvé bien beau d'élever une tribune dans les airs, de la décorer d'une Renommée enflant sa trompette, et envoyant les discours aux quatre coins du monde, et d'orner la salle comme une décoration d'Opéra. C'était bien en soi-même, c'était ridicule pour sa destination. Lorsqu'elle fut construite, la mode exigeait partout la forme ronde; il fallait que les escaliers, les salons, les boudoirs eussent cette forme, et que le jour vînt du toit, où l'on plaçait des vitres. La forme était vicieuse sous touts les rapports : si un orateur, parlant à la tribune, se tournait à droite, il n'était pas entendu à gauche ; s'il se tournait à gauche, la droite ne l'entendait pas. Mais le plus grand inconvénient était le ridicule spectacle que tout cela présentait. Les orateurs montaient et descendaient sans cesse, surtout dans des instants où les débats plus rapides exigeaient ces courses législatives. Il résultait, de cette malheureuse tribune, que les discours improvisés étaient beaucoup plus longs; car l'orateur sentait trèsbien que descendre promptement, après être monté, était une chose ridicule : il alongeait son discours, pour éviter ce ridicule.

Souvent un ministre, ennuyé de courir à la tribune pour dire deux mots, donnait de sa place une explication nécessaire : nouveau ridicule;

car il tournait le dos à toute l'assemblée à laquelle il adressait l'explication. Ici, l'idiotisme est frappant tourner le dos à une assemblée à laquelle on parle!

Dans toutes les assemblées, dans touts les sénats, on a toujours parlé de sa place. La tribune n'a été imaginée que dans les Etats où il fallait parler au peuple : c'était alors une nécessité. Que dis-je ? j'ai vu une tribune dans la salle du sénat de Lucques. Figurez-vous le chef de la magistrature, revêtu de sa longue robe, la traînant de sa place à la tribune, de la tribune à sa place, vingt fois peut-être dans une séance. Les ministres semblaient oublier leur dignité, comme celle de la

couronne.

Rien de plus inconvenant que la manière dont se faisait la clôture de la Chambre des députés. Un ministre la renvoyait, comme une classe d'écoliers dont on est fatigué. En Angleterre, la clôture se fait avec un certain cérémonial, comme l'ouverture. En 1824, le roi fit la clôture en personne; il prononça un discours. Le chancelier annonça, par son ordre, que le parlement était prorogé. Dans cette séance royale, l'orateur de la Chambre des communes présenta trois bills au roi, et lui adressa un discours dans lequel étaient retracés les travaux de la Chambre pen

dant la session. Jamais nos ministres n'ont imaginé que la plus simple politesse demandait qu'après avoir invité solemnellement une Chambre à des travaux, on la remerciât ensuite de ses travaux bien loin de là, ils croyaient affermir la couronne, en traitant cavalièrement les Chambres. La révolution nous a donné de belles choses; mais elle nous en a ôté d'assez bonnes : elle n'a laissé aucune trace de la politesse de nos ancêtres; plus de vestiges de ces égards mutuels que les autres peuples reconnaissaient et imitaient.

CHAPITRE V.

Discussion sur les impôts provisoires. Je réponds à un ministre, et je soutiens que les hommes sont tout dans un gouvernement. Je repousse le système du milieu politique suivi par les ministres. Discours sur l'existence d'une faction, sur son influence en Europe, et sur ses vœux clairement énoncés.

DANS l'examen des sessions dont je vais parler, je prouverai l'existence et les projets de la faction, comme je l'ai prouvé pendant mon ministère. Je ferai voir que le côté droit de la Chambre élective n'a cessé d'avertir les ministres. L'opposition libérale fut violente; mais par cela même elle eût été utile à la monarchie, si les ministres, se mettant franchement à la tête du parti royaliste, avaient marché hardiment à la faction,

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