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le rabbinisme et le talmud? Et dans la supposition que cela fût possible, que mettrait-on à la place? Une froide morale humaine, le déisme? Mieux vaut-il qu'ils gardent ce qu'ils ont, et qu'ils restent ce qu'ils sont. D’ailleurs ils sont attachés, comme on l'est à la vie, à ce qui les aveugle: ils se complaisent dans les ténèbres, dans l'ignorance et le vagabondage; c'est leur état naturel ; ils y naissent, ils y vivent, ils y meurent. Oh! que de fois, quand je me trouve au milieu d'eux, les paroles de Moïse se présentent comme malgré moi à mon esprit! «Le Ciel sera d'airain pour vous, et la terre que <vous foulez sera de fer.... Vous serez dispersés parmi tous les peuples, depuis une extrémité de la terre jusqu'à l'autre... Vous marcherez à tâtons en plein midi, « vos mains seront sans force... Vous serez dans la der«nière misère, et comme le jouet et la fable de tous les peuples. Ces malédictions demeureront sur vous et « votre postérité, comme un signe prodigieux, parce «que vous n'aurez point servi le Seigneur avec la re«< connaissance et la joie de cœur que demandait l'a«bondance de toutes choses. »

«

C'est à vous, mon cher Maître, nous nous plaisons à le répéter, c'est à vous que nous devons le sentiment et la conscience de notre état ; car vous avez fait entrer un rayon de lumière dans les ténèbres qui nous enveloppaient ; et c'est à vous que nous déclarons dans l'intimité de la confiance, qu'il nous est impossible de rester dans cet état, et que c'est bien avec connaissance

de cause que nous désirons en sortir. Le Christianisme, vu dans sa généralité, se présente à nous comme une vaste région de lumière, où nous apparaissent cependant des points obscurs. Il nous faut, dites-vous, l'instruction, l'initiation, et la participation à ses mystères. Aurez-vous la charité de nous instruire dans la doctrine que nous désirons connaître? Vous est-il permis d'écarter pour nous le voile qui couvre vos mystères, et nous sera-t-il permis à nous de vous exposer nos doutes et nos répugnances? car nous en avons pour certains articles de foi: La trinité en Dieu, l'incarnation du fils de Dieu, le salut par la croix. Nous avons trouvé ces choses dans un livre élémentaire de la religion chrétienne, et elles nous paraissent tout au moins bien obscures pour l'esprit et peu satisfaisantes pour le cœur. Mais votre parole a fait si souvent jaillir à nos yeux la lumière de l'obscurité! Souffrez donc que nous vous adressions quelques questions préliminaires.

Sur quel principe le Chrétien fonde-t-il ses croyances en général, et en particulier sa foi en la Trinité? Par quelle autorité peut-il les justifier?

Le Chrétien ne reconnaît-il pas en Dieu l'être infiniment simple et pur, et l'idée de Dieu un n'est-elle pas plus pure et plus simple que l'idée de Dieu trois ou d'une Trinité divine?

Cette dernière idée ne tend-elle pas au polythéïsme,

à l'idolâtrie?

Le Christianisme ne pourrait-il se passer d'un dogme

qui révolte le Juif, qui repousse le déiste ou qui en est repoussé et dont nous ne voyons point l'utilité morale? car enfin, quel avantage y a-t-il de nommer par trois noms ce qui est un en soi, de distinguer trois termes dans l'unité?

Pardonnez, cher Maître, si notre parole est sans prudence. Nous ne connaissons du Christianisme que ce que vos leçons philosophiques nous en ont fait pressentir, et pour ainsi dire deviner : il n'est encore pour nous qu'une déduction des faits naturels que vous nous avez exposés. Nous sommes ignorans, mais non obstinés. Que la vérité daigne nous éclairer par votre organe, et nous sommes prêts à l'embrasser, à vivre et à mourir pour elle!

Veuillez ajouter à toutes les marques de bonté que vous nous donnez celle de nous communiquer par écrit vos réponses à ces questions. Nous vous demandons cette grâce, afin de pouvoir méditer votre parole à loisir, et aussi, je vous l'avouerai, dans l'intention de nous soustraire à l'entraînement de votre éloquence.

QUATRIÈME LETTRE.

LE MAITRE A ADÉODAT.

OH! mes amis, quelles douces émotions j'ai éprouvées à la lecture de votre lettre! La vertu divine est avec vous; la colonne lumineuse vous éclaire et vous guide..... C'est elle, cette vertu divine, qui m'a inspiré le conseil que je vous ai donné. C'est elle qui vous a dit par mon organe : «Devenez de bons Is«raélites, et la Vérité fera le reste. » Non, ce n'a point été méfiance de ma part; ce n'était ni prudence, ni prévoyance, ni sagesse propre qui m'ont dicté d'abord cette parole. Elle était l'expression spontanée du désir vif et sincère de vous voir hommes de bien, vivant avec décence dans le monde, pratiquant la justice, aimant Dieu et vos semblables, puisque c'est là le sommaire de votre loi. Plus tard, quand je vous connus mieux, je vous répétai cette parole, en vous engageant à invoquer la vérité, parce que j'avais appris, par une heureuse expérience, qu'en l'appelant avec ardeur elle se rend à notre désir, et

qu'une seule de ses communications ineffables produit plus d'effet dans nos cœurs que tous les discours du monde. Je me reposais sur elle pour l'œuvre qui semblait devoir s'opérer en vous, me bornant à la seconder par mes vœux et mes prières, et grâce à Dieu, elle vous a bien conduits jusqu'ici.

C'est en cherchant à réaliser mon conseil, que vous avez acquis la conviction d'une vérité de fait qu'il m'eût été pénible de vous dire, savoir que le Judaïsme rabbinique n'est que la forme morte et corrompue du Judaïsme mosaïque, un système bizarre élevé sur un fondement antique et sacré. Le fondement subsiste, car il a été posé par le Dieu de vos pères, et nulle puissance humaine ne saurait le détruire; non-seulement il subsiste, mais il porte l'édifice le plus noble, le plus régulier, le plus magnifique; et cet édifice est sous vos yeux: c'est le Christianisme avec sa vaste et sublime doctrine, avec sa morale pure qui élève l'homme au-dessus de lui-même par le dévouement et la charité; c'est l'Église chrétienne fondée par JésusChrist, qui en est la pierre angulaire.

Vos docteurs de la loi, architectes insensés, ont rejeté cette pierre angulaire, et le fondement leur est devenu comme inutile. La Synagogue en a conservé le plan dans la lettre des Écritures; mais cette lettre n'est plus pour elle et ses rabbins qu'un grand hiéroglyphe dont le sens est perdu. Ils la gardent cependant avec un religieux respect: et c'est à ce respect, c'est

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