Images de page
PDF
ePub

Pour cela, c'est moins contre le gouvernement qu'il doit agir que sur lui-même ; il doit chercher à s'instruire de ses vrais intérêts; enfin, quand il croit les reconnaître, ce n'est point par des révolutions qu'il doit chercher à les établir, mais par des réformes graduelles et régulières. Voilà le but que nous indiquons, Messieurs,

et les

moyens que nous proposons pour l'atteindre. Qui verrait une autre doctrine dans notre ouvrage, y verrait ce que nous n'avons pas eu le dessein d'y mettre. Cependant, dans le sens de cette doctrine, nous avons été plus loin que je ne viens de le dire.

»En même temps que, dans l'intérêt même des gouvernemens, nous avons pensé qu'il était né cessaire de réduire leurs moyens d'action; en même temps que nous avons conseillé aux citoyens de n'employer pour cela que des moyens légaux, nous nous sommes efforcés, autant qu'il a été en nous, de les faire jouir de ces moyens. Nous avons défendu contre les atteintes du pouvoir ministériel les garanties que les lois leur ont données; nous avons travaillé à faire perfectionner les instrumens de réforme et de préservation que la charte leur a mis à la main. Ces instrumens, vous les connaissez, ce sont la liberté de la presse, la représentation nationale,

la responsabilité des ministres, le jury, le droit de voter l'impôt, etc. Nous nous sommes appliqués, depuis trois années, à bien faire connaître ces diverses garanties, et à indiquer les améliorations dont elles sont susceptibles. Une grande partie des onze volumes que nous avons déjà fait paraître, est consacrée à cet objet.

.

» De toutes ces garanties, de tous ces moyens de réforme, le droit de voter l'impôt est, sanscontredit, celui dont on peut tirer le meilleur parti pour réprimer les abus et affermir le gouvernement; car les abus ayant tous leur source dans les impôts excessifs, il est sensible que la faculté de voter l'impôt, donne le moyen d'at-> taquer les abus dans leur source même, et par conséquent d'affermir le gouvernement.

» C'est lorsqu'un gouvernement lève de grands impôts, qu'on le sollicite de créer cette multitude de places, ces sinecures richement dotées, qui vont tenter au loin la cupidité des ambitieux. Ce sont ces places qui ameutent autour de lui' les partis contraires; c'est pour les conquérir. que les uns l'attaquent; c'est pour les conserver que les autres le poussent à des mesures violentes qui achèvent de le compromettre. En un c'est en levant et en distribuant beaucoup d'argent qu'un gouvernement attire autour de

mòt,

lui la lie d'un peuple, et qu'il s'aliène la partie saine de ce peuple ; c'est en levant et en distribuant beaucoup d'argent qu'il se met à la merci des factions, et qu'il perd l'appui de la masse. Les grands impôts tendent donc d'une manière très-directe à ruiner les forces d'un gouvernement, et c'est véritablement travailler à l'affer-. mir que de faire retrancher de ses dépenses tout ce qui n'a pas un but d'utilité publique incontestable. En votant sagement les impôts, en supprimant sans pitié les dépenses inutiles, on donne. au gouvernement l'appui de la masse contre les factions. Les oisifs, les intrigans, les ambitieux, chassés par la famine des routes du pouvoir, et trop faibles pour oser attaquer un gouvernement que l'opinion soutient, sont forcés de se vouer à. des travaux utiles; et le gouvernement, débarrassé de cette foule d'hommes avides et dangereux, peut adoucir par degrés son action, diminuer de, plus en plus ses dépenses, et, en se rendant chaque jour, plus, populaire, devenir chaque jour plus fort.

כב

[ocr errors]

» Mais, pour qu'on porte dans le vote de l'impôt, cette rigueur salutaire dont les effets doivent être si favorables au gouvernement, une condition semble indispensable; c'est que la faculté de le voter ne soit pas confiée à ceux au profit desquels il

est porcu. Il paraît douteux, en effet, que ceux-ci trouvent jamais qu'il est trop fort; qu'ils regardent jamais comme inutile la dépense dont ils profiteront, quelque préjudiciable qu'elle puisse être d'ailleurs à l'autorité. Il paraîtrait donc essentiel, dans l'intérêt même du gouvernement, que la nation ne confiât pas le droit de voter l'impôt à des agens du gouvernement...

Nous étions fortement pénétrés de cette idée, Messieurs, lorsque nous avons entrepris sur la loi des finances de 1817, le travail qui sert, en: partie, de base à la prévention élevée contre nous. Pour nous assurer si cette idée avait quelqué fondement, nous avons cherché comment avait voté, sur le budget, une assemblée composée presqu'en entier de personnes qui étaient parties prenantes dans le budget.

Il nous paraît important, avons-nous dit, d'examiner comment une assemblée formée de tels élémens, surveille l'emploi qu'on fait de nos finances; comment une représentation composée, en majorité, d'administrateurs, a défendu nos revenus contre les dépenses de l'adminis

tration »

Les procès-verbaux à la main, nous avons trouvé,

» 1°. Qu'elle n'avait pas

demandé compte au

ministère de recettes assez considérables, provenant de l'ancien domaine extraordinaire, de la dotation du sénat, de la vente des passe-ports, de la rétribution payée par les journaux, de l'impôt établi sur les maisons de jeu, et de plu-, sieurs autres branches du revenu public;

2°. Qu'elle n'avait point demandé compte d'une somme de 38 millions 400 mille francs, que les ministres de la guerre et de la marine avaient dépensée au-delà de leur crédit, et d'une autre somme de 50 millions que le ministre, de la guerre avait affectée à un emploi qu'elle ne devait point avoir; beber mo¶.a ft

» 3°. Qu'elle n'avait fait aucune démarche auprès du gouvernement pour l'engager à négocier L'éloignement de l'armée d'occupation, dont la présence nous coûte au-delà de 160 millions.

par an; » 4°. Qu'après avoir été officiellement informée que cette armée et les frais qu'elle nous occasionné seraient diminués d'un cinquième, et que les 25 millions d'augmentation de solde qu'on devait lui payer cette année, ne lui seraient soldés qu'à une époque plus reculée, ce qui réduisait de 60 millions les dépenses extraordinaires de l'année, elle n'avait pas songé à retrancher cette somme du budget des dépenses, et qu'elle avait accordé au ministère tout ce qu'il avait demandé

« PrécédentContinuer »