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qu'on pût adresser de tels reproches au Roi. At-~~taquer le gouvernement., ce n'est donc point attaquer l'autorité royale.

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Autre exemple, Un député du départementdes Ardennes, parlant encore sur le projet de loi relatif aux journaux, faisait les réflexions suivantes: « C'est dans la charte du Roi que nous devons ehercher la grande pensée de Sa Majesté. C'est là qu'il a établi les droits de ses sujets contre son propre gouvernement ;. parce qu'il n'ignorait pas que le gouvernement tend naturellement, et de sa propre essence, à les affaiblir tous. En quoi eût été besoin de les énoncer dans la charte, s'ils ne couraient aucun danger d'être ravis dans l'action du gouvernement?»!

» Ce député disait donc que les droits des sujets conraient risque d'être ravis par le gouvernement; que le gouvernement tendait par son essence à les affaiblir tous; que le Roi avait établi la charte pour les défendre contre son propre gouverne ment. Etait-il possible d'écrire contre le gouver nement du Roi quelque chose de plus énergique; et pense-t-on que ce député se fùt exprimé de la sorte, si, dans son esprit, le mot gouvernement avait signifié l'autorité royale, et s'il avait pu eroire que ce qu'il disait sur le gouvernement s'appliquait nécessairement au Roi? Ce député

aurait-il avancé que les droits des sujets cou raient risque d'être ravis par le Roi? que l'autorité royale tendait naturellement à les affaiblir tous'? que l'objet de la charte était de les défendre contre l'autorité royale ?

» Il est donc vrai que le mot gouvernement peut signifier autre chose que l'autorité du Roi, et qu'on peut écrire contre le gouvernement des choses très-dures et très-offensantes, sans manquer pour cela au respect dû à l'autorité royale.. Ce sont des députés votant avec le ministère, des serviteurs du Roi, des agens du gouvernement qui nous enseignent cela. Ils admettent que le gouvernement du Roi peut servir un parti. Ils disent qu'on peut l'accuser de dissimulation, de mensonge et d'artifice. Ils avancent que les droits des sujets courent risque d'être ravis par lui, qu'il tend essentiellement à les affaiblir tous, et que c'est pour les défendre contre ses usurpations la charte a été faite. Quelles expressions plus fortes auraient-ils pu employer pour dire que le mot gouvernement ne signifie pas nécessairement l'autorité du Roi? Et comment, lorsque des agens du gouvernement s'expriment de la sorte, d'au-i tres agens du gouvernement peuvent-ils dire que le gouvernement et l'autorité royale sont une seule et même chose, que tous les actes du gou

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vernement appartiennent à l'autorité royale, et qu'attaquer les actes du gouvernement, c'est nécessairement attaquer l'autorité du Roi ? Que le ministère s'accorde donc dans son langage et dans ses doctrines; et qu'après nous avoir enseigné qu'on peut s'il y a lieu, accuser le gouvernenient de dissimulation et de fausseté, il ne vienne pas, pour lui avoir fait, à bon droit, des reproches moins offensans, nous traduire devant les tribunaux comme ayant attenté à la majesté. royale.

>> Les reproches que l'on adresse au gouvernement, disait à la dernière audience M. l'avocat, du Roi, les reproches que l'on adresse au gouvernement, né peuvent manquer de réjaillir sur. le Roi. Si la chose est vraie, comment un de ses agens les plus éminens a-t-il admis qu'on put, faire au gouvernement le reproche de servir un, parti? Comment un autre a-t-il dit qu'on pouvait accuser le gouvernement d'artifice et de mensonge?

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Bannissons, ajoutait M. l'avocat du Roi, bannissons ces vains sophismes avec lesquels on place l'autorité royale dans un sanctuaire, à l'aide desquels on l'entoure en quelque sorte d'un mur, pour l'attaquer plus à l'aise dans tous ses actes. Si c'est là un sophisme, c'est celui du ministère;

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car, quand il a mis en question, par la bouche de M. Royer-Colard, si le gouvernement servait la nation ou s'il servait un parti, il est bien évident qu'il séparait le gouvernement de l'autorité royale; qu'il plaçait le Roi dans un sanctuaire, pour examiner plus à l'aise les actes de son gouvernement. Si c'est là un sophisme encore, c'est celui de la charte; car la charte, en déclarant le Roi inviolable et son gouvernement responsable, a entouré le Roi d'un mur et livré son gouvernement à la censure. On dit que les reproches faits au gouvernement percent le mur et atteiguent le Roi. Cela n'est point et ne peut point être; ils n'atteignent, ils ne peuvent atteindre, que son gouvernement qui lui a conseillé les actes qu'on attaque, qui les a signés, et à qui seul est imputable le mal qui peut en résulter. Ensuite que veut-on faire? On dit que les reproches adressés au gouvernement atteignent le monarque, et pour préserver le monarque, on l'arrache de l'asile inviolable où la loi le place, et on le fait apparaître dans tous les actes de son gouvernement. Croiton ainsi le mieux mettre à l'abri des atteintes ? La charte avait placé le Roi derrière le gouvernement, et l'on place le gouvernement derrière le Roi; on met le Roi à l'avant-garde; on veut qu'il serve de bouclier au dernier de ses serviteurs ;

on lui fait envelopper de son manteau l'adminis tration toute entière, et nul trait ne peut plus être dirigé contre l'administration qui n'atteigne d'abord le monarque. Or, je vois bien qu'ainsi l'on sauve l'administration; mais voudrait-on me dire comment on entend préserver le Roi ?

» A cet égard, je ne vois qu'une réponse à faire; c'est de dire que le Roi est suffisamment mis à couvert par la loi du 9 novembre 1815; que cette loi punissant les attaques dirigées contre le Roi, et tout reproche fait au gouvernement devant être considéré comme fait au Roi lui-même, il en résulte que le Roi n'a à craindre d'être attaqué ni dans ses actes, ni dans ceux de son gouvernement, et qu'il est défendu tout à la fois dans sa personne et dans celle de ses serviteurs; qu'ainsi, par exemple, le maire se trouve garanti par le sous-préfet, le sous-préfet par le préfet, le préfet par le conseiller d'état, le conseiller d'état le ministre d'état, le ministre d'état quinistre, le ministre par le Roi, et le Roi par la loi du 9 novembre, qui couvre à la fois de son égide et le Roi et son gouvernement.

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S'il en est ainsi, le système de M. l'avocat du Roi ne met pas le monarque aussi à découvert qu'il le semble d'abord; car toute critique dirigée contre le gouvernement étant censé dirigéo

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