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» considèrent ce qui est droit, que vos paupières » précèdent vos pas. Dressez-vous vous-même » un chemin, et vos démarches seront fermes'. » Regardez avant que de marcher : soyez attentif à ce que vous faites.

Il ne faut jamais rien précipiter. « Où il n'y

» son trône, et toute l'armée du ciel à droite et » à gauche; et le Seigneur dit : Qui trompera » Achab, roi d'Israël, afin qu'il assiége Ramoth» Galaad, et qu'il y périsse? L'un disoit d'une » façon, et l'autre d'une autre. Un esprit s'a» vança au milieu de l'assemblée, et dit au Sei>> gneur : Je le tromperai. En quoi le tromperas-» a point d'intelligence, il n'y a point de bien : » tu, dit le Seigneur? Et il répondit: Je serai » qui se précipite chopera: la folie des hommes » esprit menteur dans la bouche de tous les pro- >> les fait tomber, et puis ils s'en prennent à Dieu »phètes. Le Seigneur lui dit : Tu le tromperas,» dans leur cœur. » et tu prévaudras; va, et fais comme tu dis. » Maintenant donc, poursuivit Michée, le Sei» gneur a mis l'esprit de mensonge dans la bou» che de tous vos prophètes, et il a résolu votre » perte. »

Qui ne tremblera en voyant de si terribles jugements? Mais qui n'en admirera la justice? Dieu punit par la flatterie les rois qui aiment la flatterie; et livre à l'esprit de mensonge, les rois qui cherchent le mensonge, et de fausses complaisances.

Achab fut tué; et Dieu fit voir que qui cherche à être trompé trouve la tromperie pour sa perte.

Soyez donc attentif et considéré en toutes choses. « Devant que de juger, ayez la justicé » devant les yeux; apprenez avant que de par» ler: prenez la médecine devant la maladie ; >> examinez-vous vous-même, avant que de pro»> noncer un jugement: et Dieu vous sera pro» pice 3. »

L'attention en tout, c'est ce qui nous sauve. « Le conseil et l'attention vous garderont, la » prudence vous sauvera des mauvaises voies : >> vous serez délivré de l'homme qui parle ma» licieusement, qui laisse le droit chemin, et >> marche par des voies ténébreuses *. » Au milieu des déguisements et des artifices.

« Vous êtes juste, o Seigneur! et tous vos ju- qui règnent parmi les hommes, il n'y a que l'at»gements sont droits 1. »

II PROPOSITION.

Deuxième moyen: Ètre attentif et considéré.

On a beau avoir la vérité devant les yeux; qui ne les ouvre pas, ne la voit pas. Ouvrir les yeux, à l'ame, c'est être attentif.

« Les yeux du sage sont en sa tête; le fou » marche dans les ténèbres 2. » On demande à l'imprudent et au téméraire : Insensé, à quoi pensiez-vous? où aviez-vous les yeux ? Vous ne les aviez pas à la tête, ni devant vous; vous ne voyiez pas devant vos pieds: c'est-à-dire, vous ne pensiez à rien; vous n'aviez aucune attention.

C'est comme si on n'avoit point d'yeux, ni d'oreilles. « Ce peuple ne voit pas de ses yeux, » et n'écoute pas des oreilles. » Ou, comme traduit saint Paul*: « Vous écouterez, et n'en» tendrez pas; vous verrez, et ne concevrez » pas. »

C'est pourquoi le Sage nous dit qu'il y a « un » œil qui voit, et une oreille qui écoute : et c'est, » dit-il, le Seigneur qui fait l'un et l'autre 3. »

tention et la vigilance qui nous puissent sauver des surprises.

Qui considère les hommes attentivement, y est rarement trompé. Jacob connut au visage de Laban, que les dispositions de son cœur étoient changées. Il vit que le visage de Laban étoit autre qu'à l'accoutumée 5. Et sur cela il prit la résolution de se retirer.

Car, comme dit l'Ecclésiastique selon les Septante : « On connoît les desseins de vengeance » dans le changement du visage". » Et encore : «Le cœur de l'homme change son visage, soit » pour le bien, soit pour le mal". »

Mais cela n'est pas aisé à découvrir, il y faut une grande application. On trouve difficilement » et avec travail les vestiges d'un cœur bien disposé, et un bon visage 8. »

Que le prince considère donc attentivement toutes choses; mais surtout qu'il considère attentivement les hommes. La nature a imprimé sur le dehors une image du dedans. « L'homme » se connoît à la vue; on remarque un homme » sensé à la rencontre : l'habit, le ris, la dé» marche découvrent l'homme ". »

Il ne faut pourtant pas en croire les premières Ce don de Dieu n'est pas fait pour ceux qui impressions. Il y a des apparences trompeuses : dorment, et qui ne pensent à rien. Il faut s'ex-il y a de profondes dissimulations. Le plus sûr

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est d'observer tout, mais de n'en croire que les œuvres. « Vous les connoîtrez par leurs fruits',» c'est-à-dire, par leurs œuvres, dit la Vérité même. Et ailleurs : « L'arbre se connoît par son >> fruit 2. >>

Encore faut-il prendre garde à ce que dit l'Ecclésiastique. « Il y en a qui manquent, mais ce » n'est pas de dessein. Qui ne pèche point dans » ses paroles ? » Comme s'il disoit : Ne prenez pas garde à quelque parole, et à quelque faute qui échappe. C'est en regardant la suite des paroles et des actions, que vous porterez un jugement droit.

sentinelles qui veillent, et qui laisse dormir en lui-même son attention, sans laquelle il n'y a nulle garde qui soit sûre!

Le prince est lui-même une sentinelle établie pour garder son État. Il doit veiller plus que tous les autres. Peuple malheureux! tes sentinelles (tes princes, tes magistrats, tes pontifes, en un mot tous tes pasteurs, qui doivent veiller à ta conduite); « tes sentinelles, dis-je, sont » tous aveugles; ils sont tous ignorants; chiens » muets, qui ne savent point japper: ils ne » voient que des choses vaines: ils dorment, << ils aiment les songes: ce sont des chiens im>> pudents et insatiables. Les pasteurs mêmes » n'entendent rien : chaeun songe à son intérêt : >> chacun suit son avarice, depuis le premier

>> enivrons-nous, il sera demain comme aujour» d'hui, et cela durera long-temps'. »

Il n'y a rien de moins attentif, ni de moins considéré que les enfants. Le Sage nous veut tirer de cet état, et nous rendre plus sérieux, quand il nous dit « Laissez l'enfance; et vivez, et» jusqu'au dernier. Venez, disent-ils, buvons, : » marchez par les voies de la prudence1. » L'homme qui n'est point attentif tombe dans l'un de ces deux défauts: ou il est égaré, ou il est comme assoupi dans une profonde léthargie. Le premier de ces défauts fait les étourdis, l'autre fait les stupides; états qui, poussés à un certain point, font deux espèces de folie. Voici en deux paroles deux tableaux qui scnt» jours de ton règne, et le nombre en est comfaits de la main du Sage. « La sagesse reluit sur » le visage de l'homme sensé : les yeux du fou regardent aux extrémités de la terre 3. »

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Voilà le langage de ceux qui croient que les affaires se font toutes seules, et que ce qui a duré durera de lui-même sans qu'on y pense. Vient cependant tout-à-coup le moment fatal. « MANÉ, THÉCEL, PHARES, Dieu a compté les

» plet. Tu as été mis dans la balance, et tu as été » trouvé léger. Ton royaume a été divisé, et il a » été donné aux Mèdes et aux Perses. Et la même nuit Baltazar, roi des Chaldéens, fut » tué, et Darius le Mède eut son royaume2. »

Voyez comme l'un est posé l'autre, pendant qu'on lui parle, jette deçà et delà ses regards inconsidérés ; son esprit est loin de vous; il ne vous écoute pas, il ne s'écoute pas lui-même : il n'a rien de suivi, et ses regards égarés font voir Troisième moyen : Prendre conseil, et donner toute licombien ses pensées sont vagues.

Mais voici un autre caractère, qui n'est pas moins mauvais, ni moins vivement représenté. « C'est parler avec un homme endormi, que de » discourir avec l'insensé, qui à la fin du dis» cours demande : de quoi parle-t-on®? »

Que ce sommeil est fréquent parmi les hommes! qu'il y en a peu qui soient attentifs, et aussi qu'il y a peu de sages! C'est pourquoi Jésus-Christ trouvant tout le genre humain assoupi, le réveille par cette parole qu'il répète si souvent « Veillez, soyez attentifs, pensez à » vous-mêmes 7. »

« Voyez, veillez, priez. Veillez, encore une » fois. Et, ce que je vous dis, je le dis à tous, >> veillez. Vous ne savez pas à quelle heure » viendra le voleur 8. »

Qui ne veille pas est toujours surpris. Quelle erreur au prince, qui veut autour de lui des

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IIIe PROPOSITION.

berté à ses conseillers.

«Ne soyez point sage en vous-même 3. » Ne croyez pas que vos yeux vous suffisent pour tout voir.

« La voie de l'insensé est droite à ses yeux. » Il croit toujours avoir raison. « Le sage écoute >> conseil 1. >>

Un prince présomptueux, qui n'écoute pas conseil, et n'en croit que ses propres pensées, devient intraitable, cruel et furieux. « Il vaut >> mieux rencontrer une ourse à qui on enlève » ses petits, qu'un fou qui se confie dans sa » folie". »

Le fou qui se confie dans sa folie, et le présomptueux qui ne trouve bon que ce qu'il pense, est déja défini par ces paroles du Sage: « Le fou n'écoute pas les discours prudents, si vous »> ne lui parlez selon sa pensée ". »

Qu'il est beau d'entendre parler ainsi Salomon

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le plus sage roi qui fût jamais! qu'il se montre vraiment sage, en reconnoissant que sa sagesse ne lui suffit pas !

Aussi voyons-nous qu'en demandant à Dieu la sagesse, il demande un cœur docile. « Don» nez, dit-il, ô mon Dieu ! à votre serviteur un » cœur docile » (un cœur capable de conseil : point superbe, point prévenu, point aheurté): <«< afin qu'il puisse gouverner votre peuple'. » Qui est incapable de conseil, est incapable de gouvernement.

Avoir le cœur docile, c'est n'être point entêté de ses pensées; c'est être capable d'entrer dans celle des autres, selon cette parole de l'Ecclésiastique « Soyez avec les vieillards prudents, » et unissez-vous de tout votre cœur à leur sa» gesse 2. »

Ainsi faisoit David. Nous avons vu combien il étoit prudent : nous le voyons aussi écoutant toujours, et entrant dans la pensée des autres, point aheurté à la sienne. Il écoute avec patience cette femme sage de la ville de Thecué, qui osa bien lui venir parler des plus grandes affaires de» son État, et de sa famille. « Qu'il me soit per» mis, dit-elle 3, de parler au roi mon seigneur. » Et il lui dit : Parlez. Elle poursuivit : Pourquoi » le roi mon seigneur offense-t-il le peuple de >> Dieu ? et pourquoi fait-il cette faute, de ne » vouloir pas rappeler Absalon qu'il a chassé? » David l'écouta paisiblement, et trouva qu'elle avoit raison.

Quand Absalon abusant de la bonté de David eut péri dans sa rebellion, ce bon père s'abandonnoit à la douleur. Joab lui vint représenter de quelle conséquence il lui étoit de ne point témoigner tant d'affliction de la mort de ce rebelle. « Vous avez, dit-il, couvert de confusion les » visages de vos fidèles serviteurs qui ont exposé » leur vie pour votre salut, et de toute votre >> famille vous aimez ceux qui vous haïssent, » et vous haïssez ceux qui vous aiment : vous » nous faites bien paroître que vous ne vous sou>> ciez pas de vos capitaines, ni de vos servi» teurs: et je vois bien qui si Absalon vivoit, et » que nous fussions tous perdus, vous en auriez » de la joie. Levez-vous donc, paroissez, et con» tentez vos serviteurs par des paroles honnêtes: » sinon je vous jure en vérité, qu'il ne demeu>> rera pas un seul homme auprès de vous; et le » mal qui vous arrivera sera le plus grand de >> tous ceux que vous avez jamais éprouvés de» puis votre première jeunesse jusqu'à présent. » David, tout occupé qu'il étoit de sa douleur,

III. Reg. m. 9. -
-Feeli. VI. 35. -II. Reg. xiv.12, elc.
Ibid. XIX. 3. etc.

entre dans la pensée d'un homme qui en apparence le traitoit mal, mais qui en effet le conseilloit bien, et en le croyant il sauva l'État.

C'est donc en prenant conseil, et en donnant toute liberté à ses conseillers, qu'on découvre la vérité, et qu'on acquiert la véritable sagesse. « Moi sagesse, j'ai ma demeure dans le conseil, » et je me trouve au milieu des délibérations » sensées '. » Et encore : « La guerre se fait par » adresse, et le salut est dans la multitude des » conseils 2. »

C'est là que se trouvent avec abondance les expédients. « La science du sage est une inon»dation, et son conseil est une source inépuisable 3. »

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C'est pourquoi « le commencement de tout » ouvrage est la parole, et le conseil doit mar» cher avant toutes les actions *. »

« Où il n'y a point de conseil les pensées se » dissipent; où il y a plusieurs conseillers elles » se confirment 5. >>

« Mon fils, ne faites rien sans conseil, et vous ne vous repentirez point de vos entreprises ".>> Outre que les choses ordinairement réussissent par les bons conseils, on a cette consolation: qu'on ne s'impute rien quand on les a pris.

C'est une chose admirable de voir ce que deviennent les petites choses conduites par les bons conseils. Mathatias n'avoit à opposer que sa famille et un petit nombre de ses amis à la puissance redoutable d'Antiochus, roi de Syrie, qui opprimoit la Judée. Mais parcequ'il règle d'abord les affaires et les conseils, il pose les fondements de la délivrance du peuple 7: « Simon » votre frère est homme de conseil : écoutez-le >> en tout, et il sera votre père. Judas, homme » de guerre, commandera les troupes, et fera » la guerre pour le peuple. Vous attirerez avec » vous ceux qui sont zélés pour la loi de Dieu. » Combattez, et défendez votre peuple. » Un bon dessein, un bon conseil, un bon capitaine pour exécuter, est un moyen assuré d'attirer du monde dans le parti. Voilà un gouvernement réglé, et un petit commencement d'une grande chose.

Ive PROPOSITION.

Quatrième moyen: Choisir son conseil.

« Ne découvrez pas votre cœur à tout le » monde. » Et encore: « Que plusieurs person>> nes soient bien avec vous; mais choisissez pour » conseiller un entre mille ".

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Prov. vii. 12.— 2 Ibid. xxiv. 6. Eccli. XxxI. 16. — Ibid. XXXVII. 20.- Prov, xv, 22. Eccli. xxxu. 24.71. Mach. 11. 63, 66. — Eccli. vm. 22 Ibid. VI. 6.

à

C'est pourquoi les conseils doivent être réduits peu de personnes. Les rois de Perse n'avoient que sept conseillers, ou sept principaux ministres. Nous avons vu qu'ils étoient toujours au» près du roi, et qu'il faisoit tout par leur con» seil'. »>

David en avoit encore moins. « Jonatham, on»cle de David, homme sage et savant, étoit » son conseiller. Lui et Jahiel, fils de Hacha» moni, étoient avec les enfants du roi. Achito» phel étoit aussi conseiller du roi, et Chusaï » étoit son principal ami. Après Achitophel, » Joïadas, fils de Banaïas, et Abiathar furent >> appelés aux conseils. Joab avoit le comman» dement des armées 2: » et c'étoit avec lui que David traitoit des affaires de la guerre.

chose rare parmi les hommes: une sagesse qui
pénètre les secrets desseins, et qui déterre, pour
ainsi dire, ce qu'il y a de plus caché. « Les des-
>> seins qu'un homme forme dans son cœur sont
>> un abîme profond; un homme sage les épui-

» sera 1. »

Cet homme sage ne se trouve pas aisément. Mais je ne sais s'il n'est pas encore plus rare et plus difficile de trouver des hommes fidèles. « Heureux qui a trouvé un véritable ami 2! » Et encore : « Un ami fidèle est une défense in» vincible; qui l'a trouvé a trouvé un trésor : rien ne lui peut être comparé; l'or et l'argent »> ne sont rien au prix de sa fidélité 3. »

La difficulté est de connoître ces vrais et ces sages amis. «Il y a des hommes rusés qui conIl faut donc plusieurs conseillers; car ils s'é- >> seillent les autres, et ne peuvent pas se servir clairent l'un l'autre, et un seul ne peut pas tout >> eux-mêmes. Il y a des raffineurs qui se renvoir mais il se faut réduire à un petit nombre.» dent odieux à tout le monde. Il y en a qui Premièrement, parceque l'ame des conseils est le secret. «Nabuchodonosor assembla les sé»> nateurs et les capitaines, et tint avec eux le » secret de son conseil 3. »

C'est un ange qui dit à Tobie : « Il est bon » de cacher le secret du roi ; mais il est bon de » découvrir les œuvres de Dieu. »

» sont sages pour eux-mêmes, et les fruits de
» leur sagesse sont fidèles dans leur bouche *: »
c'est-à-dire, leurs conseils sont salutaires.

Pour les faux amis, ils sont innombrables.
« Tout ami dit: Je suis bon ami; mais il y a des
>> amis qui ne sont amis que de nom. N'est-ce pas
» de quoi s'affliger jusqu'à la mort, quand on
» voit qu'un ami devient ennemi? O malheu-

Le conseil des rois est un mystère; leur secret, qui regarde le salut de tout l'État, a quel-» reuse pensée! pourquoi viens-tu couvrir toute que chose de religieux et de sacré, aussi bien que leur personne et leur ministère. C'est pourquoi l'interprète latin a traduit secret par le mot de mystère et de sacrement; pour nous montrer combien le secret des conseils du prince doit être religieusement gardé.

» la terre de tromperie? Il y a des amis de plai-
» sir qui nous quittent dans l'affliction. Il y a
>> des amis de table et de bonne chère, ce sont
» des lâches qui abandonneront leur bouclier
» dans le combat 7. » Et encore : « Il y a des
» amis qui cherchent leur temps et leurs inté-

Au reste, quand l'ange dit qu'il est bon de» rêts; ils vous quitteront dans la mauvaise forcacher le secret du roi ; mais qu'il est bon de découvrir les œuvres de Dieu; c'est que les conseils des rois peuvent être détournés étant découverts: mais la puissance de Dieu ne trouve point d'obstacle à ses desseins; et Dieu ne les cache point par crainte ou par précaution, mais parceque les hommes ne sont pas dignes de les savoir, ni capables de les porter.

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» tune. Il y a des amis qui découvriront les pa-
» roles d'emportement, qui vous seront échap-
» pées dans votre colère. Il y a des amis de ta-
»ble, que vous ne trouverez pas dans le besoin.
» Dans la prospérité un tel ami sera comme un
» autre vous-même, et il agira hardiment dans
»> votre maison. Si vous tombez, il se mettra
>> contre vous, et se retirera 8. »

Parmi tant de faux sages et de faux amis, il
faut faire un choix prudent, et ne se fier qu'à
peu de personnes.

Il n'y a point de plus sûr lien d'amitié, que la crainte de Dieu. « Celui qui craint Dieu sera » ami fidèle; et son ami lui sera comme lui» même ". »>

Et de là vient le sage conseil 10 : « Ayez tou-» jours avec vous un homme saint que vous

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Judith, 11.

10 Ibid. XXXVII. 15, 46.

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» connoîtrez craignant Dieu, dont l'ame s'ac» corde avec la vôtre, et qui compatisse à vos » secrets défauts. »

Prenez garde, dans tous ces préceptes, que le Sage vous marque toujours un choix exquis; et qu'il faut se renfermer dans le petit nombre. Mais il faut surtout consulter Dieu. Qui a Dieu pour ami, Dieu lui donnera des amis. «Un ami » fidèle est un remède pour nous assurer la vie » et l'immortalité. Ceux qui craignent Dieu le

» trouveront '.

ve PROPOSITION.

Cinquième moyen: Ecouter et s'informer.

Autres sont les personnes qu'il faut consulter ordinairement dans ses affaires, autres celles qu'il faut écouter.

Le prince doit tenir conseil avec très peu de personnes. Mais il ne doit pas renfermer dans ce petit nombre tous ceux qu'il écoute: autrement, s'il arrivoit qu'il y eût de justes plaintes contre ses conseillers, ou des choses qu'ils ne sussent pas, ou qu'ils résolussent de lui taire, il n'en sauroit jamais rien.

Nous avons vu David écouter sur des affaires importantes jusqu'à une femme, et suivre ses conseils; tant il aimoit la raison et la vérité, de quelque côté qu'elle lui vint.

Il faut que le prince écoute, et s'informe de toutes parts, s'il la veut savoir. Ce sont deux choses: Il faut qu'il écoute, et remarque ce qui vient à lui; et qu'il s'informe avec soin de tout ce qui n'y vient pas assez clairement. « Si vous » prêtez l'oreille, vous serez instruit; si vous >> aimez à écouter, vous serez sage 2. »

Après tant d'instructions tirées des auteurs sacrés, ne refusons pas d'écouter un prince infidèle; mais habile et grand politique. C'est Dioclétien, qui disoit : « Il n'y a rien de plus difficile » que de bien gouverner: quatre ou cinq hom» mes s'unissent, et se concertent pour tromper » l'empereur. Lui, qui est enfermé dans ses ca»binets, ne sait pas la vérité. Il ne peut savoir » que ce que lui disent ces quatre ou cinq hom>> mes qui l'approchent. Il met dans les charges » des hommes incapables. Il en éloigne les » gens de mérite. C'est ainsi, disoit ce prince, » qu'un bon empereur, un empereur vigilant, » et qui prend garde à lui, est vendu : Bonus, » cautus, optimus venditur imperator 3. »

Oui, sans doute, quand il n'écoute que peu de personnes, et ne daigne pas s'informer de ce qui se passe.

Ecoli. VI. 16. -2 lbid. 34. Flavius Vop. Aurel.

VIe PROPOSITION.

Sixième moyen : Prendre garde à qui on croit, et punir les faux rapports.

Dans cette facilité de recevoir des avis de plusieurs endroits, il faut craindre, premièrement, que le prince ne se rabaisse en écoutant des personnes indignes. Cette femme que David écouta si tranquillement ', étoit une femme sage et connue pour telle. L'Ecclésiastique qui recommande tant d'écouter, veut que ceux qu'on écoute, soient des vieillards honorables, et des hommes sensés. «Soyez avec les sages vieillards, » et unissez votre cœur à leurs sages pensées. » Si vous voyez un homme sensé, fréquentez » souvent sa maison, ou l'appelez dans la » vôtre 2. »

Secondement, il faut craindre que le prince qui écoute trop ne se charge de faux avis, et ne se laisse surprendre aux mauvais rapports.

« Qui croit aisément, a le cœur léger, et se » dégrade lui-même 3. »

4

Ne croyez donc pas à toute parole *: « Pesez » tout dans une juste balance. »> « Comptez et » pesez, » dit l'Ecclésiastique *.

Il faut entendre, et non pas croire; c'est-àdire peser les raisons, et non pas croire le premier venu sur sa parole. « Le simple croit tout » ce qu'on lui dit; le sage entend ses voies. »

Salomon, qui parle ainsi, avoit profité de ce sage avis du roi son père 7 : « Prenez garde que » vous entendiez tout ce que vous faites, et de » quel côté vous aurez à vous tourner. » Comme s'il disoit : Tournez-vous de plus d'un côté; car la vérité veut être cherchée en plusieurs endroits : les affaires humaines veulent être aussi tentées par divers moyens; mais de quelque côté que vous vous tourniez, tournez-vous avec connoissance, et ne croyez pas sans raison.

Surtout prenez garde aux faux rapports. « Le prince qui prend plaisir à écouter les men» songes, n'a que des méchants pour ses mi» nistres 8. »

On jugera de vous par les personnes à qui vous croyez. « Le méchant écoute la méchante » langue; le trompeur écoute les lèvres trom»peuses 9.

10

« Plutôt un voleur, dit le Sage 1o, que la con»versation du menteur. » Le mențeur vous dérobe par ses artifices le plus grand de tous les trésors, qui est la connoissance de la vérité;

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